Texte intégral
Cher(e)s Camarades,
Nous avons le sentiment, en ce 26 novembre, de vivre une journée particulière. Une fête ? N'allons pas trop vite ; la seule fête qui vaudra sera au mois de mai 2007. Mais, nous avons le sentiment de vivre un moment particulier, étrange, joyeux et en même temps grave.
Nous sommes réunis, socialistes, radicaux (et d'autres, peut-être, qui se sont glissés dans cette réunion sans nous prévenir), mais nous sommes là pour investir Ségolène ROYAL, pour faire que demain Ségolène soit la présidente de tous les Français.
Nous avons, les uns et les autres, l'impression d'avoir pris notre part dans cette décision. En effet, nous sommes à un an jour pour jour après notre congrès du Mans, celui de la synthèse, et nous sommes à cinq mois de l'élection présidentielle. Et les socialistes, j'en suis fier, sont aujourd'hui en ordre de marche. Le projet adopté, les candidat(e)s aux élections législatives désignés à la parité et avec la diversité -autant qu'il a été possible- de la représentation de notre société. Il manquait une étape ; elle n'était pas la plus simple : c'était le choix de notre candidat(e). C'est fait aujourd'hui : c'est Ségolène qui sera notre candidate pour l'élection présidentielle. Elle a senti ce matin, comme nous tous, une immense volonté de victoire et une conviction venant, des uns et des autres, du fond du coeur : cette victoire est possible.
C'est un grand jour pour notre parti. C'était un moment délicat que ce processus que nous avions lancé pour la désignation militante de celui ou de celle qui devait être notre candidat(e). Ce fut en fait un moment heureux car nous l'avons franchi, et de quelle manière ! Nous en découvrons un autre, beaucoup plus suave encore : celui du rassemblement de tous les socialistes. C'est également un moment partagé avec beaucoup de Français qui attendent de nous une nouvelle donne démocratique, écologique, sociale, éducative, et qui se sont saisis de manière incroyable de nos débats, de ce que nous pensions être une chose interne, pour faire en sorte que cette candidature, celle de Ségolène, soit l'instrument de la rénovation de l'action politique. C'est donc un beau jour pour les socialistes d'avoir donné envie avant l'heure de participer à une consultation qui, au départ, n'était qu'entre nous et qui devenait ensuite, déjà, l'affaire des Français.
C'est un moment particulier de ce savoir observé, regardé, jalousé par les pays du monde. Merci à Georges Papandréou de venir ici, au nom de l'Internationale socialiste, nous dire que le combat que nous menons est aussi le vôtre. Merci Elio Di Rupo d'être là ; merci à tous ceux qui ont envoyé des messages ; merci à toutes celles qui, déjà Présidentes, veulent que d'autres rejoignent le « club »... C'est dire si, maintenant, partout dans le monde, la pression va être forte. Tant mieux. Car, ce regard porté sur nous, c'est le regard qu'ont toujours eu beaucoup d'amis de la France amie des droits de l'Homme, de la femme. Ils regardent maintenant vers nous pour savoir si nous aurons l'audace, l'envie, la capacité de faire qu'une femme socialiste soit élue présidente de la République en mai prochain. Nous devons leur donner ce message : OUI, nous le voulons ; OUI, cette victoire est possible ; OUI nous allons faire qu'elle soit la victoire de Ségolène, des femmes, mais aussi de tous les citoyens et citoyennes de la République française et, au-delà de la République, de l'Europe et du monde, fiers de nous regarder.
Nous avons contribué à cette novation démocratique à travers la démarche que nous avons engagée pour la désignation de notre candidat : la démocratie, le débat, la délibération, la décision, un vote clair, une participation exceptionnelle. Je l'avais dit avant le vote, je le dis après le vote : SOYEZ FIERS, socialistes, d'avoir pris votre part dans cette délibération et dans ce choix démocratique. Je salue Dominique, Laurent, les militants (anciens comme nouveaux), les cadres du parti qui ont toujours veillé, malgré les différences et les ambitions légitimes, à préserver l'unité de notre parti. Merci aux Radicaux de gauche, merci à Jean-Michel Baylet, d'avoir fait ce choix qui n'allait pas d'évidence. Mais, ce n'était pas simplement pour effacer 2002 -encore déjà, cet argument valait la peine ; c'était parce qu'ils sentaient bien, comme nous tous, que cette victoire devait être collective et ne pas être la propriété d'un seul parti... fût-il le nôtre.
Je ne veux pas, en ce moment de joie, qui donne une légitimité forte à notre candidate, tomber dans je ne sais quelle autocélébration de nous-mêmes, participer à un exercice de jubilation collective qui nous ferait oublier que la seule échéance qui compte n'est pas la sélection de notre candidate aujourd'hui, mais le choix de la prochaine présidente de la République en mai prochain.
En même temps, convenons-en, cette procédure -la nôtre, ce résultat -celui de Ségolène, notre calendrier -celui que nous avons fixé ensemble au congrès du Mans, cette alchimie étrange a tout bousculé. Et, aujourd'hui, c'est comme si après notre vote tout se précipitait, s'accélérait, s'anticipait.
Voilà Nicolas Sarkozy qui, l'autre soir au journal de 20 heures et encore hier goguenard à notre endroit, satisfait de lui-même -mais c'est son tempérament ; c'est sa nature profonde- annonçait fébrilement qu'il allait être candidat. Il ne pouvait pas le dire dès jeudi, nous en doutions tellement ! Il annonçait qu'il le serait et rapidement. Notre procédure n'est sans doute pas étrangère à cette précipitation. Mais, il allait plus loin : il convoquait ses concurrents, même contre leur gré, à participer à une primaire ; il préparait lui aussi des forums régionaux entre Noël et Jour de l'An, pour un vote le 14 janvier qui ne règlera rien puisque ses concurrents réels n'excluent pas de se présenter au nom d'une conception gaulliste en dehors de l'UMP.
Puisque nous sommes socialistes, nous sommes généreux : alors souhaitons leur bon courage, bonne chance dans cette procédure. Mais, surtout, ne les attendons pas, menons campagne, soutenons Ségolène dès aujourd'hui, inscrivons-nous déjà dans la perspective de victoire. Mais, au moins, nous aurons eu la satisfaction d'obliger Nicolas Sarkozy, pour une fois, à la clarté. Il sera donc officiellement candidat, puisqu'il l'est officieusement depuis 5 ans. Mais, cela ne suffit pas que d'avoir rempli cette obligation ; il faut, maintenant, qu'il en remplisse une autre, car l'exigence morale voudrait qu'il ne reste pas plus longtemps Ministre de l'Intérieur. Il ne s'agit pas là de je ne sais quelle polémique ; il s'agit d'un principe essentiel : éviter que l'organisateur du scrutin qu'est le Ministre de l'Intérieur en soit un protagoniste, de prévenir toute confusion des genres et des budgets car il serait paradoxal que ce soit le contribuable français qui paye la campagne de Nicolas Sarkozy ! Mais, j'ajoute un dernier argument au nom même de l'intérêt du pays : il faut permettre à la France de disposer d'un Ministre de l'Intérieur à plein temps. Car, en ces temps d'insécurité et de violence, ce ne serait pas superflu.
Revenons à l'enjeu même de l'élection présidentielle :
Il ne s'agit pas de nous-mêmes, de nos destins, de nos personnes, de nos familles politiques, mais de la France elle-même. 5 ans après avoir gouverné le pays, à partir d'une élection dont on sait le caractère exceptionnel, ayant tous les pouvoirs à sa disposition, la droite a affaibli la France. La France est aujourd'hui appauvrie : 7 millions de pauvres vivent avec moins de 800 euros par mois et il y a un Français sur quatre touché pas les phénomènes de pauvreté quand, dans le même temps, la répartition des richesses est devenue plus inégale encore : 10 % de la population la plus fortunée détient la moitié des patrimoines dans notre pays. Voilà la France dont nous allons hériter. Une France aussi amoindrie, une croissance désespérément faible, un investissement ralenti, une vie chère qui empêche beaucoup d'accéder aux biens de consommation courante, un commerce extérieur profondément déséquilibré, une Recherche sacrifiée...
La France est abîmée par un endettement trop lourd, une fiscalité injuste et une opacité des comptes publics qui fait que la Cour des comptes, aujourd'hui, hésite à certifier les comptes du gouvernement.
La France est apeurée par une mondialisation sans contrôle, une Europe en panne ; la France est apeurée par les violences, les insécurités de toute nature. Et il y a de quoi d'ailleurs quand on sent une société qui se délite, quand dans les banlieues, on s'interroge toujours pour savoir s'il ne va pas y avoir une nouvelle explosion, quand tant de faits-divers frappent l'inconscient collectif.
C'est le sens du projet socialiste et des propositions que portera Ségolène. Il s'agit d'abord de répondre à l'urgence : le chômage, le pouvoir d'achat, la précarité, le logement, la jeunesse qui a droit enfin à pouvoir espérer dans l'avenir et à son autonomie.
Répondre à l'urgence et préparer l'avenir : l'Education, l'environnement, la Recherche, faire le choix de la démocratie comme nous l'avons fait dans nos villes, démocratie sous toutes ses formes : nouvelle République, décentralisation, démocratie sociale, nouvelle donne aussi fondatrice que celle de 1981, et peut-être encore plus ambitieuse. Il faudra aussi relancer l'Europe en lui redonnant son sens, son projet, ses frontières. Son sens car ce n'est pas seulement pour faire une monnaie, pour organiser un marché que les socialistes européens ont fait ce qu'est aujourd'hui ce continent organisé. Nous voulons promouvoir un modèle de développement non pas pour nous-mêmes, mais pour le monde entier. Il ne s'agit pas aujourd'hui d'exister comme puissance et de vouloir un environnement maîtrisé, mais de peser sur le destin du monde, et notamment sur la paix. C'est effectivement en Palestine, en Irak, en Iran et au Liban qu'il faut porter attention. Et il faudra que les socialistes, là aussi, avec leur candidate puissent montrer qu'il y a des solutions pour régler les différends, les conflits, les tragédies de la planète.
Nous mesurons l'ampleur des défis qui nous attendent. Ils sont considérables ; il faudra les maîtriser. Promettre ce que nous serons capables de tenir, donner un calendrier de réformes, fixer le rythme et la méthode de l'action future.
Nous mesurons aussi les attentes qui sont portées sur nous et sur Ségolène. Il y a aujourd'hui beaucoup d'espoir, beaucoup d'exigence. Il y a un mouvement qui s'est levé. Et Ségolène a su lui donner un visage. Mais, pour autant, rien n'est joué.
Nous avons un devoir de victoire ; mais la victoire pose ses conditions :
. Première condition : savoir quels adversaires nous allons affronter.
- Le premier, nous le connaissons bien, c'est la droite . Elle fera comme d'habitude : fuira devant ses responsabilités, fera même comme si elle n'avait jamais gouverné et même depuis 2002, comme si elle n'était comptable de rien, comme si elle n'était pas libérale ; elle empruntera notre vocabulaire, n'hésitera pas à se caricaturer elle-même, dénoncera les patrons voyous, voudra des protections aux frontières, fustigera les délocalisations... Voilà ce que fera la droite, comme toujours ! La confusion des esprits, l'indifférenciation des programmes. Nous sommes devant cette droite qui ne s'assume pas en tant que telle au moment des campagnes électorales, mais fait une politique bien à droite une fois qu'elle a eu ce qu'elle voulait, c'est-à-dire le pouvoir, toujours le pouvoir, encore le pouvoir. La droite voudra aussi faire de l'élection présidentielle une affaire de personnes, une joute entre l'un, l'autre, elle essaiera d'effacer les clivages et elle voudra se parer, une nouvelle fois, du manteau de protectrice ou de sauveuse. Elle n'hésitera pas à utiliser les peurs qui seront pour son candidat une justification de son engagement. Il faut dénoncer le bilan, celui de la droite, dévoiler les intentions : le libéralisme jusqu'au bout et démystifier la méthode : le mensonge une nouvelle fois. Il faudra nous aussi utiliser la peur à son détriment, car c'est aujourd'hui la droite et son candidat qui inquiètent et c'est la gauche et sa candidate qui rassurent. Là est le paradoxe de la situation !
- Le deuxième adversaire, l'extrême droite , est un adversaire qui s'est se faire oublier à chaque scrutin, pour mieux surprendre, surgir ; un adversaire qui a pris, avec l'âge et le temps, une apparence plus débonnaire, presque banale pour cacher une identité qui ne change pas, qui reste toujours la stigmatisation de l'étranger et la diabolisation de l'immigration. Et, comme la droite lui sert d'agent d'ambiance, cette extrême droite n'a pas besoin de faire campagne pour trouver, hélas, ses électeurs. Là est le danger et il faudra de nouveau démasquer l'imposture, évoquer le risque toujours possible d'un 21 avril et conjurer la menace qui pourrait être celle de la tentation de beaucoup de ceux qui n'ont rien -et auxquels Ségolène s'adresse- qui, se désespérant de tout, choisissent cette extrême-là pour envoyer un message. Je dis à ces électeurs troublés, à ces pauvres, ces exclus, que le seul message qu'ils doivent envoyer est le message de l'espoir et non pas du refus, du repli, de la résignation. Aujourd'hui, ils doivent envoyer le message qu'il faut battre la droite et donner à la gauche les moyens d'agir.
- Il y a un dernier adversaire, plus anonyme, moins belliqueux, plus découragé : le retrait civique, l'abstention, l'indifférence, le scepticisme, la résignation. Il faudra donc, face à cet adversaire-là, pour en faire un allié, lancer une grande campagne pour la participation civique et pour l'inscription sur les listes électorales. Il faudra donner les éléments qui justifient cet engagement.
. Deuxième condition : imposer nous-mêmes les thèmes de la confrontation.
- La droite voudrait nous entraîner sur ce qu'elle suppose être son terrain, celui de l'insécurité . Nous ne nous déroberons pas devant ce défi-là et nous dénoncerons les échecs de la droite et l'augmentation des violences aux personnes, les méthodes et l'inflation législative avec le 6ème texte en 5 ans de la législature non pas pour prévenir la délinquance, mais pour renforcer encore des mesures pénales inutiles puisque les précédentes n'ont même pas été appliquées. Il faudra dénoncer ses fautes, la première ayant été de supprimer la police de proximité que Lionel Jospin avait mise en oeuvre. Il faudra donc être sur ce terrain parce que, si la politique de Nicolas Sarkozy marchait, cela se saurait dans les élections professionnelles de la police ! Nicolas Sarkozy vient de perdre une première bataille électorale, elle est d'importance car si ceux qui ont en charge d'approuver ou d'appliquer la politique de Nicolas Sarkozy l'avaient manifesté, cela ce serait vu dans les urnes, or ils s'en sont détournés... de Nicolas Sarkozy et ils ont eu raison. Cette compétition démocratique doit se faire également sur ces questions de sécurité et de violence.
- Il faudra revenir à ce qu'est l'essentiel de notre message dans cette bataille électorale qui s'annonce : le social, l'Education, le service public, la laïcité et là, je ne crains rien, Ségolène ne craint rien de ce qui peut se produire. Le clivage est là, visible.
. Troisième condition : mobiliser le Parti socialiste. Le Parti socialiste est un atout formidable. Pierre Mauroy a bien voulu rappeler que j'en étais le Premier secrétaire depuis près de 10 ans. Je le connais bien le Parti socialiste. J'en connais toute la richesse (pas seulement) ; ce gisement formidable de dévouement, d'engagement, de solidarité, de générosité que portent les militants, mais aussi les élus, les dirigeants qui ont subi des échecs et se sont toujours relevés. Je salue les adhérents anciens du Parti socialiste qui sont restés : quel courage ! Quelle confiance ! Quel espoir ! Je sais de quelle fidélité ce parti est capable pour les uns, pour les autres et de quel esprit d'unité il est aussi capable quand il faut se rassembler pour la victoire, et il le fera. Il le fera parce que Ségolène fera confiance à son parti dont elle procède, parce que ce parti est une force collective sans laquelle rien n'est possible, et parce que ce parti aujourd'hui fera tout ce qu'il est possible de faire pour la victoire de Ségolène ROYAL, c'est-à-dire la victoire de tous.
Ce parti a pris une nouvelle dimension avec les nouveaux adhérents -220 000 votants, 270 000 inscrits ; il faut aller plus loin. Il n'y a pas de risque, il n'y a pas de crainte. Il n'y a pas d'un côté le vieux parti et le nouveau, c'est le même. Ce parti n'a pas changé de culture, il a changé de mesure, il a changé de dimension, il a changé de force. Nous ne sommes pas trop nombreux au Parti socialiste, et s'il ne s'agissait que d'argent, je serai prêt à mettre la cotisation à 10 ; il ne s'agit donc pas de cela, il s'agit d'être plus forts ensemble, tous ensemble. C'est pourquoi, j'ai demandé à Jack Lang qui a déjà fait la démonstration de son talent pour la première campagne d'adhésion de nous permettre de dépasser les 300 000 adhérents. Pourquoi ? Pas simplement pour gagner la bataille présidentielle, mais parce qu'après la victoire de Ségolène, il en faudra du courage, il en faudra de l'abnégation, il en faudra du soutien de la part de ce parti -de la critique aussi sans division ou surenchère- car, il est dur de gagner une élection présidentielle, c'est dur de gagner des élections législatives, mais c'est au moins aussi dur de réussir au gouvernement et même à la présidence de la République. Et notre engagement n'est pas simplement une victoire en 2007, mais d'en avoir une autre en 2012 et pourquoi aussi pour les années qui viennent.
Il faut aussi se tourner vers les autres. Il n'y a pas que les socialistes en France. C'est bien là le problème. C'est comme en Europe, il n'y a pas que des Français ! Puisqu'il n'y a pas que des socialistes, il faut aller vers les autres : ceux qui ne le sont pas encore, ceux qui le sont déjà sans le savoir et tous ceux qui ont besoin de s'exprimer par un vote clair au premier tour comme au second de l'élection. Ségolène a raison : tournons-nous vers les Français, dialoguons avec eux, faisons les participer à notre projet en l'améliorant et non en le dénaturant (n'ayons d'ailleurs aucune crainte, ils ont souvent plus d'imagination que nous). Nous avons une contrainte qu'ils n'ont pas : nous devons gouverner le pays et dire ce qu'il est possible ou non de faire.
CONCLUSION
Le rassemblement de la gauche est la dernière condition de la victoire. Et pourtant, cette vérité simple à posteriori n'est jamais une évidence a priori. Il faut quelques fois que la victoire consacre le rassemblement pour qu'il existe. Je suggère que nous ayons une méthode plus originale : faisons le rassemblement avant pour faire l'union après.
Mais, il en est toujours au sein de la gauche qui, par pureté, par calcul souvent dans l'impureté, ou par réflexe identitaire, pensent que l'essentiel est dans la différence, la surenchère voire même le combat. Par exemple : je suis toujours surpris qu'à chaque élection présidentielle il y ait trois candidats trotskistes ; j'ai beaucoup de respect pour Trotski, je sais le rôle majeur qu'il a joué pour le socialisme dans le monde et même en France. Mais, pourquoi trois ? Etait-il inscrit dans les textes qu'il en fallait forcément trois à chaque élection présidentielle ?
C'est contre cette tentation-là qu'il faut lutter. Nous sommes les plus forts à gauche. Nous devons donc être les plus humbles pour revendiquer l'union et le rassemblement tout simplement parce que nous ne gagnerons pas seuls l'élection présidentielle et que nous ne gouvernerons pas seuls le pays. Nous avons besoin de toute la gauche, de celle qui veut avec nous agir, réformer, transformer.
Jusqu'au bout, nous ne ménagerons pas notre peine pour convaincre de ce rassemblement comme nous l'avons fait avec le Parti Radical de Gauche qui s'est associé à nous et je ne désespère pas d'en convaincre d'autres, même s'ils ont déjà annoncé leur candidature.
Nous, dès lors que nous aurons fait l'effort de rassembler, nous ferons tout pour que la candidate, la nôtre, puisse être au plus haut le soir du premier tour de l'élection présidentielle. Pas seulement pour être qualifiée pour le second ; il faut créer une dynamique de victoire et elle se crée dès le premier tour. Nous le faisons dans l'intérêt de la gauche car il s'agit de faire la différence avec la droite et l'extrême droite dès le premier tour. Il faut aussi donner une légitimité à la future Présidente de la République car il faut avoir le meilleur résultat au premier tour pour avoir la force ensuite de diriger le pays.
Quant au second tour, chacun à gauche sera devant ses responsabilités. Et notamment ceux qui veulent être plus anti-libéraux que nous. Nous sommes des anti-libéraux, mais il y en a qui veulent être plus anti-libéraux encore. Ils en ont le droit, mais ils seront devant ce choix simple : est-ce qu'ils prennent le risque de laisser les vrais libéraux cinq ans de plus au pouvoir ou nous donneront-ils à nous qui voulons maîtriser le capitalisme, dominer le capitalisme, les moyens d'agir. Il faudra leur rappeler cette leçon simple : si l'on veut battre la droite, c'est avec la gauche que l'on peut le faire.
En ce 26 novembre, nous lançons un formidable pari à notre peuple. Nous nous lançons nous-mêmes dans une grande aventure humaine et politique. Nous sommes les héritiers d'une grande histoire. Nous portons un idéal intact dans un monde qui change et que nous devons changer. Nous proposons d'ouvrir un nouveau temps de progrès et de conquêtes.
Nous sommes conscients de nos devoirs. Le premier est de réussir. Ségolène, tu incarnes aujourd'hui cette formidable espérance ; tu as su nous convaincre. Il s'agit aujourd'hui de convaincre les Français.
Ton parti est là rassemblé. Il sera là derrière toi pendant les cinq mois qui nous séparent de l'élection présidentielle. Il sera là pendant les cinq ans de ton mandat pour traduire en acte notre politique, si les Français nous accordent leur confiance.
Nous partageons tous avec toi cette aventure démocratique. Nous sentons bien confusément que l'élection qui vient n'est pas un rendez-vous comme les autres et qu'elle sera fondatrice, comme celle de 1981 avec François Mitterrand. Nous mesurons aussi nos responsabilités avec toi et me revient une formule de Léon Blum à la fin de sa vie : « Le socialisme est le maître de l'heure. Je n'ai pas d'autre voeu à faire et vous, vous n'avez pas d'autre devoir à remplir : le Parti socialiste doit digne du socialisme ».
Alors, Cher(e)s Camarades, Chère Ségolène, soyons dignes de ce combat-là, de ce combat pour la justice, pour la liberté, pour l'égalité. C'est servant nos idées, c'est en poursuivant ce combat que nous servirons la France.
Source http://www.parti-socialiste.fr, le 28 novembre 2006
Nous avons le sentiment, en ce 26 novembre, de vivre une journée particulière. Une fête ? N'allons pas trop vite ; la seule fête qui vaudra sera au mois de mai 2007. Mais, nous avons le sentiment de vivre un moment particulier, étrange, joyeux et en même temps grave.
Nous sommes réunis, socialistes, radicaux (et d'autres, peut-être, qui se sont glissés dans cette réunion sans nous prévenir), mais nous sommes là pour investir Ségolène ROYAL, pour faire que demain Ségolène soit la présidente de tous les Français.
Nous avons, les uns et les autres, l'impression d'avoir pris notre part dans cette décision. En effet, nous sommes à un an jour pour jour après notre congrès du Mans, celui de la synthèse, et nous sommes à cinq mois de l'élection présidentielle. Et les socialistes, j'en suis fier, sont aujourd'hui en ordre de marche. Le projet adopté, les candidat(e)s aux élections législatives désignés à la parité et avec la diversité -autant qu'il a été possible- de la représentation de notre société. Il manquait une étape ; elle n'était pas la plus simple : c'était le choix de notre candidat(e). C'est fait aujourd'hui : c'est Ségolène qui sera notre candidate pour l'élection présidentielle. Elle a senti ce matin, comme nous tous, une immense volonté de victoire et une conviction venant, des uns et des autres, du fond du coeur : cette victoire est possible.
C'est un grand jour pour notre parti. C'était un moment délicat que ce processus que nous avions lancé pour la désignation militante de celui ou de celle qui devait être notre candidat(e). Ce fut en fait un moment heureux car nous l'avons franchi, et de quelle manière ! Nous en découvrons un autre, beaucoup plus suave encore : celui du rassemblement de tous les socialistes. C'est également un moment partagé avec beaucoup de Français qui attendent de nous une nouvelle donne démocratique, écologique, sociale, éducative, et qui se sont saisis de manière incroyable de nos débats, de ce que nous pensions être une chose interne, pour faire en sorte que cette candidature, celle de Ségolène, soit l'instrument de la rénovation de l'action politique. C'est donc un beau jour pour les socialistes d'avoir donné envie avant l'heure de participer à une consultation qui, au départ, n'était qu'entre nous et qui devenait ensuite, déjà, l'affaire des Français.
C'est un moment particulier de ce savoir observé, regardé, jalousé par les pays du monde. Merci à Georges Papandréou de venir ici, au nom de l'Internationale socialiste, nous dire que le combat que nous menons est aussi le vôtre. Merci Elio Di Rupo d'être là ; merci à tous ceux qui ont envoyé des messages ; merci à toutes celles qui, déjà Présidentes, veulent que d'autres rejoignent le « club »... C'est dire si, maintenant, partout dans le monde, la pression va être forte. Tant mieux. Car, ce regard porté sur nous, c'est le regard qu'ont toujours eu beaucoup d'amis de la France amie des droits de l'Homme, de la femme. Ils regardent maintenant vers nous pour savoir si nous aurons l'audace, l'envie, la capacité de faire qu'une femme socialiste soit élue présidente de la République en mai prochain. Nous devons leur donner ce message : OUI, nous le voulons ; OUI, cette victoire est possible ; OUI nous allons faire qu'elle soit la victoire de Ségolène, des femmes, mais aussi de tous les citoyens et citoyennes de la République française et, au-delà de la République, de l'Europe et du monde, fiers de nous regarder.
Nous avons contribué à cette novation démocratique à travers la démarche que nous avons engagée pour la désignation de notre candidat : la démocratie, le débat, la délibération, la décision, un vote clair, une participation exceptionnelle. Je l'avais dit avant le vote, je le dis après le vote : SOYEZ FIERS, socialistes, d'avoir pris votre part dans cette délibération et dans ce choix démocratique. Je salue Dominique, Laurent, les militants (anciens comme nouveaux), les cadres du parti qui ont toujours veillé, malgré les différences et les ambitions légitimes, à préserver l'unité de notre parti. Merci aux Radicaux de gauche, merci à Jean-Michel Baylet, d'avoir fait ce choix qui n'allait pas d'évidence. Mais, ce n'était pas simplement pour effacer 2002 -encore déjà, cet argument valait la peine ; c'était parce qu'ils sentaient bien, comme nous tous, que cette victoire devait être collective et ne pas être la propriété d'un seul parti... fût-il le nôtre.
Je ne veux pas, en ce moment de joie, qui donne une légitimité forte à notre candidate, tomber dans je ne sais quelle autocélébration de nous-mêmes, participer à un exercice de jubilation collective qui nous ferait oublier que la seule échéance qui compte n'est pas la sélection de notre candidate aujourd'hui, mais le choix de la prochaine présidente de la République en mai prochain.
En même temps, convenons-en, cette procédure -la nôtre, ce résultat -celui de Ségolène, notre calendrier -celui que nous avons fixé ensemble au congrès du Mans, cette alchimie étrange a tout bousculé. Et, aujourd'hui, c'est comme si après notre vote tout se précipitait, s'accélérait, s'anticipait.
Voilà Nicolas Sarkozy qui, l'autre soir au journal de 20 heures et encore hier goguenard à notre endroit, satisfait de lui-même -mais c'est son tempérament ; c'est sa nature profonde- annonçait fébrilement qu'il allait être candidat. Il ne pouvait pas le dire dès jeudi, nous en doutions tellement ! Il annonçait qu'il le serait et rapidement. Notre procédure n'est sans doute pas étrangère à cette précipitation. Mais, il allait plus loin : il convoquait ses concurrents, même contre leur gré, à participer à une primaire ; il préparait lui aussi des forums régionaux entre Noël et Jour de l'An, pour un vote le 14 janvier qui ne règlera rien puisque ses concurrents réels n'excluent pas de se présenter au nom d'une conception gaulliste en dehors de l'UMP.
Puisque nous sommes socialistes, nous sommes généreux : alors souhaitons leur bon courage, bonne chance dans cette procédure. Mais, surtout, ne les attendons pas, menons campagne, soutenons Ségolène dès aujourd'hui, inscrivons-nous déjà dans la perspective de victoire. Mais, au moins, nous aurons eu la satisfaction d'obliger Nicolas Sarkozy, pour une fois, à la clarté. Il sera donc officiellement candidat, puisqu'il l'est officieusement depuis 5 ans. Mais, cela ne suffit pas que d'avoir rempli cette obligation ; il faut, maintenant, qu'il en remplisse une autre, car l'exigence morale voudrait qu'il ne reste pas plus longtemps Ministre de l'Intérieur. Il ne s'agit pas là de je ne sais quelle polémique ; il s'agit d'un principe essentiel : éviter que l'organisateur du scrutin qu'est le Ministre de l'Intérieur en soit un protagoniste, de prévenir toute confusion des genres et des budgets car il serait paradoxal que ce soit le contribuable français qui paye la campagne de Nicolas Sarkozy ! Mais, j'ajoute un dernier argument au nom même de l'intérêt du pays : il faut permettre à la France de disposer d'un Ministre de l'Intérieur à plein temps. Car, en ces temps d'insécurité et de violence, ce ne serait pas superflu.
Revenons à l'enjeu même de l'élection présidentielle :
Il ne s'agit pas de nous-mêmes, de nos destins, de nos personnes, de nos familles politiques, mais de la France elle-même. 5 ans après avoir gouverné le pays, à partir d'une élection dont on sait le caractère exceptionnel, ayant tous les pouvoirs à sa disposition, la droite a affaibli la France. La France est aujourd'hui appauvrie : 7 millions de pauvres vivent avec moins de 800 euros par mois et il y a un Français sur quatre touché pas les phénomènes de pauvreté quand, dans le même temps, la répartition des richesses est devenue plus inégale encore : 10 % de la population la plus fortunée détient la moitié des patrimoines dans notre pays. Voilà la France dont nous allons hériter. Une France aussi amoindrie, une croissance désespérément faible, un investissement ralenti, une vie chère qui empêche beaucoup d'accéder aux biens de consommation courante, un commerce extérieur profondément déséquilibré, une Recherche sacrifiée...
La France est abîmée par un endettement trop lourd, une fiscalité injuste et une opacité des comptes publics qui fait que la Cour des comptes, aujourd'hui, hésite à certifier les comptes du gouvernement.
La France est apeurée par une mondialisation sans contrôle, une Europe en panne ; la France est apeurée par les violences, les insécurités de toute nature. Et il y a de quoi d'ailleurs quand on sent une société qui se délite, quand dans les banlieues, on s'interroge toujours pour savoir s'il ne va pas y avoir une nouvelle explosion, quand tant de faits-divers frappent l'inconscient collectif.
C'est le sens du projet socialiste et des propositions que portera Ségolène. Il s'agit d'abord de répondre à l'urgence : le chômage, le pouvoir d'achat, la précarité, le logement, la jeunesse qui a droit enfin à pouvoir espérer dans l'avenir et à son autonomie.
Répondre à l'urgence et préparer l'avenir : l'Education, l'environnement, la Recherche, faire le choix de la démocratie comme nous l'avons fait dans nos villes, démocratie sous toutes ses formes : nouvelle République, décentralisation, démocratie sociale, nouvelle donne aussi fondatrice que celle de 1981, et peut-être encore plus ambitieuse. Il faudra aussi relancer l'Europe en lui redonnant son sens, son projet, ses frontières. Son sens car ce n'est pas seulement pour faire une monnaie, pour organiser un marché que les socialistes européens ont fait ce qu'est aujourd'hui ce continent organisé. Nous voulons promouvoir un modèle de développement non pas pour nous-mêmes, mais pour le monde entier. Il ne s'agit pas aujourd'hui d'exister comme puissance et de vouloir un environnement maîtrisé, mais de peser sur le destin du monde, et notamment sur la paix. C'est effectivement en Palestine, en Irak, en Iran et au Liban qu'il faut porter attention. Et il faudra que les socialistes, là aussi, avec leur candidate puissent montrer qu'il y a des solutions pour régler les différends, les conflits, les tragédies de la planète.
Nous mesurons l'ampleur des défis qui nous attendent. Ils sont considérables ; il faudra les maîtriser. Promettre ce que nous serons capables de tenir, donner un calendrier de réformes, fixer le rythme et la méthode de l'action future.
Nous mesurons aussi les attentes qui sont portées sur nous et sur Ségolène. Il y a aujourd'hui beaucoup d'espoir, beaucoup d'exigence. Il y a un mouvement qui s'est levé. Et Ségolène a su lui donner un visage. Mais, pour autant, rien n'est joué.
Nous avons un devoir de victoire ; mais la victoire pose ses conditions :
. Première condition : savoir quels adversaires nous allons affronter.
- Le premier, nous le connaissons bien, c'est la droite . Elle fera comme d'habitude : fuira devant ses responsabilités, fera même comme si elle n'avait jamais gouverné et même depuis 2002, comme si elle n'était comptable de rien, comme si elle n'était pas libérale ; elle empruntera notre vocabulaire, n'hésitera pas à se caricaturer elle-même, dénoncera les patrons voyous, voudra des protections aux frontières, fustigera les délocalisations... Voilà ce que fera la droite, comme toujours ! La confusion des esprits, l'indifférenciation des programmes. Nous sommes devant cette droite qui ne s'assume pas en tant que telle au moment des campagnes électorales, mais fait une politique bien à droite une fois qu'elle a eu ce qu'elle voulait, c'est-à-dire le pouvoir, toujours le pouvoir, encore le pouvoir. La droite voudra aussi faire de l'élection présidentielle une affaire de personnes, une joute entre l'un, l'autre, elle essaiera d'effacer les clivages et elle voudra se parer, une nouvelle fois, du manteau de protectrice ou de sauveuse. Elle n'hésitera pas à utiliser les peurs qui seront pour son candidat une justification de son engagement. Il faut dénoncer le bilan, celui de la droite, dévoiler les intentions : le libéralisme jusqu'au bout et démystifier la méthode : le mensonge une nouvelle fois. Il faudra nous aussi utiliser la peur à son détriment, car c'est aujourd'hui la droite et son candidat qui inquiètent et c'est la gauche et sa candidate qui rassurent. Là est le paradoxe de la situation !
- Le deuxième adversaire, l'extrême droite , est un adversaire qui s'est se faire oublier à chaque scrutin, pour mieux surprendre, surgir ; un adversaire qui a pris, avec l'âge et le temps, une apparence plus débonnaire, presque banale pour cacher une identité qui ne change pas, qui reste toujours la stigmatisation de l'étranger et la diabolisation de l'immigration. Et, comme la droite lui sert d'agent d'ambiance, cette extrême droite n'a pas besoin de faire campagne pour trouver, hélas, ses électeurs. Là est le danger et il faudra de nouveau démasquer l'imposture, évoquer le risque toujours possible d'un 21 avril et conjurer la menace qui pourrait être celle de la tentation de beaucoup de ceux qui n'ont rien -et auxquels Ségolène s'adresse- qui, se désespérant de tout, choisissent cette extrême-là pour envoyer un message. Je dis à ces électeurs troublés, à ces pauvres, ces exclus, que le seul message qu'ils doivent envoyer est le message de l'espoir et non pas du refus, du repli, de la résignation. Aujourd'hui, ils doivent envoyer le message qu'il faut battre la droite et donner à la gauche les moyens d'agir.
- Il y a un dernier adversaire, plus anonyme, moins belliqueux, plus découragé : le retrait civique, l'abstention, l'indifférence, le scepticisme, la résignation. Il faudra donc, face à cet adversaire-là, pour en faire un allié, lancer une grande campagne pour la participation civique et pour l'inscription sur les listes électorales. Il faudra donner les éléments qui justifient cet engagement.
. Deuxième condition : imposer nous-mêmes les thèmes de la confrontation.
- La droite voudrait nous entraîner sur ce qu'elle suppose être son terrain, celui de l'insécurité . Nous ne nous déroberons pas devant ce défi-là et nous dénoncerons les échecs de la droite et l'augmentation des violences aux personnes, les méthodes et l'inflation législative avec le 6ème texte en 5 ans de la législature non pas pour prévenir la délinquance, mais pour renforcer encore des mesures pénales inutiles puisque les précédentes n'ont même pas été appliquées. Il faudra dénoncer ses fautes, la première ayant été de supprimer la police de proximité que Lionel Jospin avait mise en oeuvre. Il faudra donc être sur ce terrain parce que, si la politique de Nicolas Sarkozy marchait, cela se saurait dans les élections professionnelles de la police ! Nicolas Sarkozy vient de perdre une première bataille électorale, elle est d'importance car si ceux qui ont en charge d'approuver ou d'appliquer la politique de Nicolas Sarkozy l'avaient manifesté, cela ce serait vu dans les urnes, or ils s'en sont détournés... de Nicolas Sarkozy et ils ont eu raison. Cette compétition démocratique doit se faire également sur ces questions de sécurité et de violence.
- Il faudra revenir à ce qu'est l'essentiel de notre message dans cette bataille électorale qui s'annonce : le social, l'Education, le service public, la laïcité et là, je ne crains rien, Ségolène ne craint rien de ce qui peut se produire. Le clivage est là, visible.
. Troisième condition : mobiliser le Parti socialiste. Le Parti socialiste est un atout formidable. Pierre Mauroy a bien voulu rappeler que j'en étais le Premier secrétaire depuis près de 10 ans. Je le connais bien le Parti socialiste. J'en connais toute la richesse (pas seulement) ; ce gisement formidable de dévouement, d'engagement, de solidarité, de générosité que portent les militants, mais aussi les élus, les dirigeants qui ont subi des échecs et se sont toujours relevés. Je salue les adhérents anciens du Parti socialiste qui sont restés : quel courage ! Quelle confiance ! Quel espoir ! Je sais de quelle fidélité ce parti est capable pour les uns, pour les autres et de quel esprit d'unité il est aussi capable quand il faut se rassembler pour la victoire, et il le fera. Il le fera parce que Ségolène fera confiance à son parti dont elle procède, parce que ce parti est une force collective sans laquelle rien n'est possible, et parce que ce parti aujourd'hui fera tout ce qu'il est possible de faire pour la victoire de Ségolène ROYAL, c'est-à-dire la victoire de tous.
Ce parti a pris une nouvelle dimension avec les nouveaux adhérents -220 000 votants, 270 000 inscrits ; il faut aller plus loin. Il n'y a pas de risque, il n'y a pas de crainte. Il n'y a pas d'un côté le vieux parti et le nouveau, c'est le même. Ce parti n'a pas changé de culture, il a changé de mesure, il a changé de dimension, il a changé de force. Nous ne sommes pas trop nombreux au Parti socialiste, et s'il ne s'agissait que d'argent, je serai prêt à mettre la cotisation à 10 ; il ne s'agit donc pas de cela, il s'agit d'être plus forts ensemble, tous ensemble. C'est pourquoi, j'ai demandé à Jack Lang qui a déjà fait la démonstration de son talent pour la première campagne d'adhésion de nous permettre de dépasser les 300 000 adhérents. Pourquoi ? Pas simplement pour gagner la bataille présidentielle, mais parce qu'après la victoire de Ségolène, il en faudra du courage, il en faudra de l'abnégation, il en faudra du soutien de la part de ce parti -de la critique aussi sans division ou surenchère- car, il est dur de gagner une élection présidentielle, c'est dur de gagner des élections législatives, mais c'est au moins aussi dur de réussir au gouvernement et même à la présidence de la République. Et notre engagement n'est pas simplement une victoire en 2007, mais d'en avoir une autre en 2012 et pourquoi aussi pour les années qui viennent.
Il faut aussi se tourner vers les autres. Il n'y a pas que les socialistes en France. C'est bien là le problème. C'est comme en Europe, il n'y a pas que des Français ! Puisqu'il n'y a pas que des socialistes, il faut aller vers les autres : ceux qui ne le sont pas encore, ceux qui le sont déjà sans le savoir et tous ceux qui ont besoin de s'exprimer par un vote clair au premier tour comme au second de l'élection. Ségolène a raison : tournons-nous vers les Français, dialoguons avec eux, faisons les participer à notre projet en l'améliorant et non en le dénaturant (n'ayons d'ailleurs aucune crainte, ils ont souvent plus d'imagination que nous). Nous avons une contrainte qu'ils n'ont pas : nous devons gouverner le pays et dire ce qu'il est possible ou non de faire.
CONCLUSION
Le rassemblement de la gauche est la dernière condition de la victoire. Et pourtant, cette vérité simple à posteriori n'est jamais une évidence a priori. Il faut quelques fois que la victoire consacre le rassemblement pour qu'il existe. Je suggère que nous ayons une méthode plus originale : faisons le rassemblement avant pour faire l'union après.
Mais, il en est toujours au sein de la gauche qui, par pureté, par calcul souvent dans l'impureté, ou par réflexe identitaire, pensent que l'essentiel est dans la différence, la surenchère voire même le combat. Par exemple : je suis toujours surpris qu'à chaque élection présidentielle il y ait trois candidats trotskistes ; j'ai beaucoup de respect pour Trotski, je sais le rôle majeur qu'il a joué pour le socialisme dans le monde et même en France. Mais, pourquoi trois ? Etait-il inscrit dans les textes qu'il en fallait forcément trois à chaque élection présidentielle ?
C'est contre cette tentation-là qu'il faut lutter. Nous sommes les plus forts à gauche. Nous devons donc être les plus humbles pour revendiquer l'union et le rassemblement tout simplement parce que nous ne gagnerons pas seuls l'élection présidentielle et que nous ne gouvernerons pas seuls le pays. Nous avons besoin de toute la gauche, de celle qui veut avec nous agir, réformer, transformer.
Jusqu'au bout, nous ne ménagerons pas notre peine pour convaincre de ce rassemblement comme nous l'avons fait avec le Parti Radical de Gauche qui s'est associé à nous et je ne désespère pas d'en convaincre d'autres, même s'ils ont déjà annoncé leur candidature.
Nous, dès lors que nous aurons fait l'effort de rassembler, nous ferons tout pour que la candidate, la nôtre, puisse être au plus haut le soir du premier tour de l'élection présidentielle. Pas seulement pour être qualifiée pour le second ; il faut créer une dynamique de victoire et elle se crée dès le premier tour. Nous le faisons dans l'intérêt de la gauche car il s'agit de faire la différence avec la droite et l'extrême droite dès le premier tour. Il faut aussi donner une légitimité à la future Présidente de la République car il faut avoir le meilleur résultat au premier tour pour avoir la force ensuite de diriger le pays.
Quant au second tour, chacun à gauche sera devant ses responsabilités. Et notamment ceux qui veulent être plus anti-libéraux que nous. Nous sommes des anti-libéraux, mais il y en a qui veulent être plus anti-libéraux encore. Ils en ont le droit, mais ils seront devant ce choix simple : est-ce qu'ils prennent le risque de laisser les vrais libéraux cinq ans de plus au pouvoir ou nous donneront-ils à nous qui voulons maîtriser le capitalisme, dominer le capitalisme, les moyens d'agir. Il faudra leur rappeler cette leçon simple : si l'on veut battre la droite, c'est avec la gauche que l'on peut le faire.
En ce 26 novembre, nous lançons un formidable pari à notre peuple. Nous nous lançons nous-mêmes dans une grande aventure humaine et politique. Nous sommes les héritiers d'une grande histoire. Nous portons un idéal intact dans un monde qui change et que nous devons changer. Nous proposons d'ouvrir un nouveau temps de progrès et de conquêtes.
Nous sommes conscients de nos devoirs. Le premier est de réussir. Ségolène, tu incarnes aujourd'hui cette formidable espérance ; tu as su nous convaincre. Il s'agit aujourd'hui de convaincre les Français.
Ton parti est là rassemblé. Il sera là derrière toi pendant les cinq mois qui nous séparent de l'élection présidentielle. Il sera là pendant les cinq ans de ton mandat pour traduire en acte notre politique, si les Français nous accordent leur confiance.
Nous partageons tous avec toi cette aventure démocratique. Nous sentons bien confusément que l'élection qui vient n'est pas un rendez-vous comme les autres et qu'elle sera fondatrice, comme celle de 1981 avec François Mitterrand. Nous mesurons aussi nos responsabilités avec toi et me revient une formule de Léon Blum à la fin de sa vie : « Le socialisme est le maître de l'heure. Je n'ai pas d'autre voeu à faire et vous, vous n'avez pas d'autre devoir à remplir : le Parti socialiste doit digne du socialisme ».
Alors, Cher(e)s Camarades, Chère Ségolène, soyons dignes de ce combat-là, de ce combat pour la justice, pour la liberté, pour l'égalité. C'est servant nos idées, c'est en poursuivant ce combat que nous servirons la France.
Source http://www.parti-socialiste.fr, le 28 novembre 2006