Texte intégral
Bonjour F. Bayrou.
Bonjour.
Q- P. Noiret, on l'a su hier soir, est mort, et l'émotion est importante parfois. Quand un personnage meurt, c'est toute une collectivité qui témoigne quelque chose.
R- C'est une grande nostalgie. Je crois qu'on a tous été marqué par l'un ou l'autre des visages qu'il interprétait. On a tous aussi discerné que sous l'acteur, il y avait un homme qui était original, qui était profond et qui était libre. Et cette profondeur et cette liberté faisaient que chacun de ses rôles était un moment de grande émotion humaine, pas seulement de spectateur qui regarde un acteur, mais de grande émotion humaine.
Q- Et vous, quel visage de P. Noiret vous a marqué, F. Bayrou.
R- Comme tout le monde, j'ai beaucoup aimé "Alexandre le Bienheureux", j'ai beaucoup aimé "les Ripoux", mais j'ai une particulière affection, peut-être parce qu'il y était un professeur d'université de Lettres Classiques, bougon et sympathique pour "Tendre Poulet", avec Annie Girardot.
Q- Dans moins de cinq mois maintenant, les Français vont voter pour choisir un président de la République. Les principaux acteurs sont en train de se mettre en place : S. Royal a été investie, N. Sarkozy dira la semaine prochaine s'il est candidat ou pas, vous-même, le 2 décembre, vous ferez de la même façon connaître votre décision. Le suspens est relativement faible. Quelles sont, selon vous, les caractéristiques de cette élection ?
R- C'est une élection qui va ouvrir un nouveau cycle. Il y a des élections qui sont des élections ordinaires, si j'ose dire, à l'intérieur de la même période politique. Et puis, on renouvelle ou non le bail. Ce n'est absolument pas le cas de celle-ci. Celle-ci c'est une élection qui va dessiner pour longtemps le paysage de la politique française, peut-être pour une période de dix ou de quinze ans. Le dernier cycle s'est ouvert en 1981 : Chirac - Mitterrand. Au fond, le PS et le RPR, le PS et l'UMP. Et ça a duré vingt-cinq ans. Un nouveau cycle va s'ouvrir. Et à l'orée de ce nouveau cycle, il va falloir répondre à une question très importante : est-ce qu'on peut tirer la France de la situation angoissante dans laquelle elle se trouve : banlieues, dettes, universités, chômage, exclusions, climat ? Est-ce qu'on peut tirer la France de la situation où elle se trouve, simplement avec les deux acteurs classiques qu'on connaît depuis si longtemps : l'UMP et le PS en guerre ouverte l'un contre l'autre et se succédant à un rythme de une fois tous les trois ans, régulièrement, en se repassant le flambeau et au fond, en étant corresponsable de la situation où l'on se trouve aujourd'hui ? Ma réponse à moi, c'est qu'il va falloir trouver une approche politique nouvelle que le PS, de son côté, même avec S. Royal, l'UMP de son côté même avec Nicolas Sarkozy, sont incapables tout seuls de sortir la France de la situation terrible où elle se trouve aujourd'hui.
Q- En 2002, vous étiez candidat. Vous aviez réuni 1,95 million de suffrages.
R- 1 million, c'est pas mal !
Q- 1,95 million. 6,80 % de tout ce qui s'était exprimé. Vous pensez, cette fois-ci, pouvoir sérieusement être un compétiteur susceptible de remporter l'élection présidentielle ou d'être au deuxième tour de l'élection présidentielle ?
R- Oui, parce que tout le monde, désormais, a vu l'échec, n'est-ce-pas. Nous venons d'avoir une démonstration formidable : c'est que depuis cinq ans, le même parti a tous les pouvoirs, sans aucune exception en France. L'Elysée, Matignon, tous les ministères, la majorité de l'Assemblée, la présidence de l'Assemblée, la majorité absolue du Sénat, la présidence du Sénat. Le même parti a tous les pouvoirs. Qu'ont-ils fait ? Qui peut raisonnablement prétendre qu'aujourd'hui en France, la sécurité ça va mieux, l'emploi, ça va mieux, la croissance ça va mieux ? Croissance zéro, ce trimestre. Que le déficit ça va mieux, que la dette ça va mieux ; que le moral de la France ça va mieux ?. Eh bien, tout le monde vérifiera que quand vous prenez un seul parti, que vous lui donnez tous les pouvoirs, mais qu'en réalité, dans la société, ce parti est minoritaire, rien ne se passe ; et que donc, il faut changer l'approche comme ça a été fait dans presque tous les pays qui nous entourent.
Q- N. Sarkozy a dit, hier soir, sur TF1 : "On ne peut pas se permettre de voir la gauche gouverner pendant cinq ans". C'est une préoccupation que vous partagez, F. Bayrou ?
R- Oui, je pense que la gauche est dans l'erreur dans son orientation. Mais c'est une orientation d'appareil de parti. Quand vous discutez avec les responsables principaux de la gauche, en effet, ils haussent les épaules. Je prends un seul exemple : la gauche prétend qu'elle va faire 70 milliards d'euros de dépenses supplémentaires.
Q- Le chiffre à 50 milliards. Son programme, vous voulez dire ?
R- Oui. Certains disent cinquante. D'autres soixante-dix. Strauss-Kahn, c'est ce qu'il avait dit à peu près. Donc 70 milliards d'euros de dépenses supplémentaires. L'impôt sur le Revenu des Français total, l'ensemble des impôts que paient les Français, c'est 53 milliards. Et donc, si on veut réaliser ce programme, ça veut dire ou bien qu'on double l'impôt sur le revenu, ou bien qu'on invente un prélèvement supplémentaire qui sera supérieur à l'impôt sur le revenu. Qu'est-ce que c'est ? Qui peut croire que ce soit le chemin pour un pays comme le nôtre ? Et qui peut croire que ceci va rendre à la France, la vitalité dont elle manque ? Et donc, en effet, je ne pense pas du tout que le programme du Parti socialiste soit dans la bonne voie. Mais je vous dis une chose : il est impossible de répondre aux problèmes du pays si l'on n'est pas capable de rassembler et de fédérer des gens qui jusqu'à maintenant, étaient à gauche et qui jusqu'à maintenant étaient à droite, pour qu'une politique équilibrée et juste se fasse en France.
Q- Tous les candidats se mettent en place, et il y a toujours une interrogation autour de J.-M. Le Pen. Aura-t-il ou pas ses signatures ? C'est important pour vous qu'il soit candidat ou bien c'est son problème, d'après vous, F. Bayrou ?
R- J.-M. Le Pen a représenté beaucoup de voix. La dernière fois, vous disiez que j'en avais fait 2 millions. Il en a fait, je crois, 4 - 5 millions au premier tour...
Q- 4,8 millions au premier tour...
R- Donc, c'est très important. Je pense qu'il aura ses signatures. Cela fait cinq fois qu'il se présente à l'élection présidentielle ; et ça fait cinq fois qu'il dit qu'il n'aura pas ses signatures, c'est aussi une manière d'attirer l'attention sur lui en situation de victime.
Q- Les comparaisons vous concernant sont toujours délicates à manier. Donc, je vais être prudent. Mais enfin, vous allez vous déclarer, samedi prochain : c'est le 2 décembre. Et le 2 décembre, ça rappelle, bien sûr, Napoléon III ... c'est aussi Austerlitz...
R- C'est Austerlitz. Car si Napoléon III a fait ce qu'il a fait, le 2 décembre, c'est parce que c'était l'anniversaire d'Austerlitz. Je préfère me souvenir de la première qui est une victoire, que la deuxième qui est franchement pas quelque chose de positif pour la France.
F. Bayrou qui dira le 2 décembre donc, s'il est candidat ou pas, était l'invité de RTL ce matin.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 novembre 2006
Bonjour.
Q- P. Noiret, on l'a su hier soir, est mort, et l'émotion est importante parfois. Quand un personnage meurt, c'est toute une collectivité qui témoigne quelque chose.
R- C'est une grande nostalgie. Je crois qu'on a tous été marqué par l'un ou l'autre des visages qu'il interprétait. On a tous aussi discerné que sous l'acteur, il y avait un homme qui était original, qui était profond et qui était libre. Et cette profondeur et cette liberté faisaient que chacun de ses rôles était un moment de grande émotion humaine, pas seulement de spectateur qui regarde un acteur, mais de grande émotion humaine.
Q- Et vous, quel visage de P. Noiret vous a marqué, F. Bayrou.
R- Comme tout le monde, j'ai beaucoup aimé "Alexandre le Bienheureux", j'ai beaucoup aimé "les Ripoux", mais j'ai une particulière affection, peut-être parce qu'il y était un professeur d'université de Lettres Classiques, bougon et sympathique pour "Tendre Poulet", avec Annie Girardot.
Q- Dans moins de cinq mois maintenant, les Français vont voter pour choisir un président de la République. Les principaux acteurs sont en train de se mettre en place : S. Royal a été investie, N. Sarkozy dira la semaine prochaine s'il est candidat ou pas, vous-même, le 2 décembre, vous ferez de la même façon connaître votre décision. Le suspens est relativement faible. Quelles sont, selon vous, les caractéristiques de cette élection ?
R- C'est une élection qui va ouvrir un nouveau cycle. Il y a des élections qui sont des élections ordinaires, si j'ose dire, à l'intérieur de la même période politique. Et puis, on renouvelle ou non le bail. Ce n'est absolument pas le cas de celle-ci. Celle-ci c'est une élection qui va dessiner pour longtemps le paysage de la politique française, peut-être pour une période de dix ou de quinze ans. Le dernier cycle s'est ouvert en 1981 : Chirac - Mitterrand. Au fond, le PS et le RPR, le PS et l'UMP. Et ça a duré vingt-cinq ans. Un nouveau cycle va s'ouvrir. Et à l'orée de ce nouveau cycle, il va falloir répondre à une question très importante : est-ce qu'on peut tirer la France de la situation angoissante dans laquelle elle se trouve : banlieues, dettes, universités, chômage, exclusions, climat ? Est-ce qu'on peut tirer la France de la situation où elle se trouve, simplement avec les deux acteurs classiques qu'on connaît depuis si longtemps : l'UMP et le PS en guerre ouverte l'un contre l'autre et se succédant à un rythme de une fois tous les trois ans, régulièrement, en se repassant le flambeau et au fond, en étant corresponsable de la situation où l'on se trouve aujourd'hui ? Ma réponse à moi, c'est qu'il va falloir trouver une approche politique nouvelle que le PS, de son côté, même avec S. Royal, l'UMP de son côté même avec Nicolas Sarkozy, sont incapables tout seuls de sortir la France de la situation terrible où elle se trouve aujourd'hui.
Q- En 2002, vous étiez candidat. Vous aviez réuni 1,95 million de suffrages.
R- 1 million, c'est pas mal !
Q- 1,95 million. 6,80 % de tout ce qui s'était exprimé. Vous pensez, cette fois-ci, pouvoir sérieusement être un compétiteur susceptible de remporter l'élection présidentielle ou d'être au deuxième tour de l'élection présidentielle ?
R- Oui, parce que tout le monde, désormais, a vu l'échec, n'est-ce-pas. Nous venons d'avoir une démonstration formidable : c'est que depuis cinq ans, le même parti a tous les pouvoirs, sans aucune exception en France. L'Elysée, Matignon, tous les ministères, la majorité de l'Assemblée, la présidence de l'Assemblée, la majorité absolue du Sénat, la présidence du Sénat. Le même parti a tous les pouvoirs. Qu'ont-ils fait ? Qui peut raisonnablement prétendre qu'aujourd'hui en France, la sécurité ça va mieux, l'emploi, ça va mieux, la croissance ça va mieux ? Croissance zéro, ce trimestre. Que le déficit ça va mieux, que la dette ça va mieux ; que le moral de la France ça va mieux ?. Eh bien, tout le monde vérifiera que quand vous prenez un seul parti, que vous lui donnez tous les pouvoirs, mais qu'en réalité, dans la société, ce parti est minoritaire, rien ne se passe ; et que donc, il faut changer l'approche comme ça a été fait dans presque tous les pays qui nous entourent.
Q- N. Sarkozy a dit, hier soir, sur TF1 : "On ne peut pas se permettre de voir la gauche gouverner pendant cinq ans". C'est une préoccupation que vous partagez, F. Bayrou ?
R- Oui, je pense que la gauche est dans l'erreur dans son orientation. Mais c'est une orientation d'appareil de parti. Quand vous discutez avec les responsables principaux de la gauche, en effet, ils haussent les épaules. Je prends un seul exemple : la gauche prétend qu'elle va faire 70 milliards d'euros de dépenses supplémentaires.
Q- Le chiffre à 50 milliards. Son programme, vous voulez dire ?
R- Oui. Certains disent cinquante. D'autres soixante-dix. Strauss-Kahn, c'est ce qu'il avait dit à peu près. Donc 70 milliards d'euros de dépenses supplémentaires. L'impôt sur le Revenu des Français total, l'ensemble des impôts que paient les Français, c'est 53 milliards. Et donc, si on veut réaliser ce programme, ça veut dire ou bien qu'on double l'impôt sur le revenu, ou bien qu'on invente un prélèvement supplémentaire qui sera supérieur à l'impôt sur le revenu. Qu'est-ce que c'est ? Qui peut croire que ce soit le chemin pour un pays comme le nôtre ? Et qui peut croire que ceci va rendre à la France, la vitalité dont elle manque ? Et donc, en effet, je ne pense pas du tout que le programme du Parti socialiste soit dans la bonne voie. Mais je vous dis une chose : il est impossible de répondre aux problèmes du pays si l'on n'est pas capable de rassembler et de fédérer des gens qui jusqu'à maintenant, étaient à gauche et qui jusqu'à maintenant étaient à droite, pour qu'une politique équilibrée et juste se fasse en France.
Q- Tous les candidats se mettent en place, et il y a toujours une interrogation autour de J.-M. Le Pen. Aura-t-il ou pas ses signatures ? C'est important pour vous qu'il soit candidat ou bien c'est son problème, d'après vous, F. Bayrou ?
R- J.-M. Le Pen a représenté beaucoup de voix. La dernière fois, vous disiez que j'en avais fait 2 millions. Il en a fait, je crois, 4 - 5 millions au premier tour...
Q- 4,8 millions au premier tour...
R- Donc, c'est très important. Je pense qu'il aura ses signatures. Cela fait cinq fois qu'il se présente à l'élection présidentielle ; et ça fait cinq fois qu'il dit qu'il n'aura pas ses signatures, c'est aussi une manière d'attirer l'attention sur lui en situation de victime.
Q- Les comparaisons vous concernant sont toujours délicates à manier. Donc, je vais être prudent. Mais enfin, vous allez vous déclarer, samedi prochain : c'est le 2 décembre. Et le 2 décembre, ça rappelle, bien sûr, Napoléon III ... c'est aussi Austerlitz...
R- C'est Austerlitz. Car si Napoléon III a fait ce qu'il a fait, le 2 décembre, c'est parce que c'était l'anniversaire d'Austerlitz. Je préfère me souvenir de la première qui est une victoire, que la deuxième qui est franchement pas quelque chose de positif pour la France.
F. Bayrou qui dira le 2 décembre donc, s'il est candidat ou pas, était l'invité de RTL ce matin.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 novembre 2006