Texte intégral
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Permettez-moi d'abord de vous dire combien je suis heureux d'être ici, chez Valeo. C'est une société particulièrement dynamique, qui a su se transformer pour devenir un leader mondial dans le secteur des équipementiers automobiles. Je remercie son président, Thierry MORIN, pour son accueil. Il mène aujourd'hui un travail remarquable à la tête de son équipe et de son entreprise.
Vous le savez, j'ai pris un engagement à l'égard des Français : les tenir informés de notre action et des résultats obtenus. Cet engagement, je le tiens depuis dix-huit mois.
Je le tiens lorsque les choses vont bien et quand nous marquons des points, en particulier sur l'emploi : depuis un an et demi, nous sommes parvenus à débloquer l'emploi dans notre pays. Grâce aux mesures que nous avons prises avec Jean-Louis BORLOO, avec Thierry BRETON et avec tous les ministres concernés, nous sommes passés d'un taux de chômage de 10,2% à un taux de 8,8%. Cette baisse du chômage, c'est bien une réalité. Elle est la clé d'un nouvel élan français.
Je tiens bien sûr cet engagement également lorsque les résultats ne sont pas à la hauteur de nos attentes. Au troisième trimestre, la croissance a marqué une pause et cela s'est répercuté sur l'emploi, qui devrait rester stable au mois d'octobre. Je le dis très clairement : ce n'est pas à la hauteur de nos ambitions, pas à la hauteur des ambitions que nous avons pour la France. Une croissance forte, un emploi dynamique, une distribution plus juste des revenus, voilà l'objectif que nous nous sommes fixés. Voilà ce que les Français sont en droit légitimement d'attendre.
C'est pourquoi je veux immédiatement tirer les leçons de la situation présente et amplifier notre action pour répondre aux préoccupations de nos concitoyens.
1. La priorité des priorités, c'est de donner un emploi à chacun.
L'urgence absolue, c'est le chômage des jeunes.
Près d'un quart des jeunes qui sont entrés sur le marché du travail à la fin des années 90 sont encore dans une situation fragile. Cette proportion, elle passe à 50% pour les non diplômés. Cette réalité n'est pas acceptable. Une société qui n'offre pas de perspectives à sa jeunesse, une société qui ne fait pas de place à ceux qui représentent son dynamisme et son ambition pour l'avenir, c'est une société qui n'avance pas.
La clé pour permettre à tous les jeunes d'accéder plus facilement à l'emploi, je l'ai dit et je le répète,aujourd'hui c'est l'éducation. Chaque année, 190 000 jeunes quittent le système scolaire et universitaire sans diplôme. Pour tous ces jeunes, cela veut dire de très grandes difficultés pour trouver un emploi stable. Avec Gilles de ROBIEN et François GOULARD, cela fait plus d'un an que nous nous battons pour changer cette réalité.
Je pense aux mesures que nous avons prises pour permettre à chaque élève de réussir : la relance de l'éducation prioritaire, l'accompagnement personnalisé des élèves en difficulté, la définition du socle commun des connaissances, la réforme de l'apprentissage de la lecture.
Je pense aussi au chantier de l'orientation que nous avons lancé. Depuis un an, nous sommes parvenus dans ce domaine à faire bouger les lignes. Tout le monde a désormais conscience de la nécessité d'une meilleure information des élèves sur les débouchés qui s'ouvrent à eux, sur les résultats de chaque filière en terme d'accès à l'emploi mais aussi sur les écueils à éviter. Le débat sur l'université et l'emploi qui a été mené partout en France nous a permis de dégager de nouvelles pistes d'action. Un véritable service public de l'orientation est en train de se mettre en place.
Au-delà, nous voulons aussi accompagner davantage les jeunes dans leur recherche d'emploi. Lorsqu'on a peu ou pas d'expérience professionnelle, lorsqu'on découvre le marché du travail, on a besoin d'une aide et d'un soutien particulier. Nous avons donc décidé de redoubler d'efforts pour les jeunes en difficulté et dans les secteurs qui ont des difficultés de recrutement.
D'abord, nous augmenterons le crédit d'impôt pour inciter les jeunes à accepter un emploi dans un secteur qui peine à recruter. Il passera ainsi de 1.000 à 1.500 euros. Actuellement, il y a près de 500.000 emplois non pourvus dans l'agriculture, dans le bâtiment, dans le commerce, l'hôtellerie, la restauration ou l'industrie mécanique. Et de l'autre côté, il y a des dizaines de milliers de jeunes qui ne trouvent pas de travail. Cet écart, il nous appartient de le combler. Désormais, un jeune qui est embauché pendant plus de six mois dans un de ces secteurs paiera 1.500 euros d'impôts en moins s'il est imposable ou recevra un chèque de 1.500 euros s'il ne l'est pas. C'est une vraie incitation à chercher l'emploi là où il se trouve.
Ensuite, nous augmenterons la prime de mobilité pour les demandeurs d'emplois qui acceptent un travail à plus de deux cents kilomètres de leur domicile. Elle passera de 1.500 à 2.000 euros. Là encore, c'est une incitation forte à aller là où est l'emploi. Un chômeur qui s'installe dans une autre ville ou dans une autre région pour reprendre un emploi engage des frais importants : il doit payer le déménagement, avancer un loyer. Désormais, il aura 2.000 euros en plus pour lui permettre de faire face à ces dépenses.
Enfin, l'ANPE proposera aux jeunes peu ou pas qualifiés du tout, suivis par les missions locales, de les recevoir personnellement pour leur donner une orientation et une offre d'emploi. Cette politique d'accompagnement personnalisé que le gouvernement a mise en place a déjà montré son efficacité. Il est indispensable qu'elle soit mise au service de ceux qui en ont le plus besoin : les jeunes, et je sais que je peux compter sur l'engagement et la mobilisation remarquable de tous les agents de l'ANPE.
A côté des jeunes, il y aussi d'autres catégories qui connaissent des difficultés particulières et à qui nous devons apporter des réponses.
Je pense d'abord aux femmes. A responsabilités égales, leur rémunération est inférieure à celle des hommes. Elles ont encore trop de difficultés à concilier vie familiale et vie professionnelle. Un grand nombre d'entre elles subissent des temps partiels et ne travaillent pas le nombre d'heures qu'elles souhaitent. Bien souvent, cela veut dire un salaire très faible et des difficultés à faire face à des dépenses quotidiennes de plus en plus élevées. Lorsqu'en plus, elles sont seules à élever leurs enfants, seules à devoir faire vivre leur famille, la situation devient invivable.
Je pense également aux seniors. Pendant vingt-cinq ans on a considéré que pour faire une place aux jeunes, il fallait écarter les seniors de l'emploi. Cela ne marche pas. Non seulement, la situation des jeunes ne s'est pas améliorée. Mais celle des seniors s'est dégradée : ils continuent à être victimes de discriminations à l'embauche. A compétences égales, une personne de 50 ans a 3 fois moins de chances de décrocher un entretien d'embauche qu'un homme de 33 ans. Avec le plan senior, nous avons fait évoluer les mentalités. Le nouveau contrat pour les seniors, l'adaptation des postes de travail, voilà des mesures concrètes qui doivent désormais se généraliser. C'est un combat de longue haleine que nous poursuivons avec la plus grande détermination.
Face à ces réalités, je veux tirer une réflexion et une orientation de travail.
Une réflexion, d'abord : le problème de notre pays, ce n'est pas la qualité des salariés, c'est que les Français ne peuvent pas travailler autant qu'ils le souhaiteraient. Les salariés français sont parmi les plus compétitifs dans le monde, les mieux formés et les plus efficaces. Ils comprennent d'autant moins les difficultés sur le marché du travail et le peu d'emplois qu'on leur propose. Ils acceptent d'autant moins des revenus qui ne progressent pas suffisamment. Nous devons donc faire en sorte que le talent et l'effort soient mieux récompensés.
Je l'ai dit une réflexion mais aussi une orientation de travail pour le gouvernement, ensuite : vous savez que nous tiendrons avec les partenaires sociaux une conférence sur l'emploi et les revenus le 14 décembre prochain. Ce sera l'occasion d'établir un diagnostic commun sur la situation de l'emploi et des revenus dans notre pays. Je souhaite également que nous puissions en tirer des conclusions concrètes sur le soutien à l'emploi des jeunes, l'amélioration de la qualité des postes qui sont proposés aux femmes, la précarité dans l'emploi, les salaires et le coût de la vie. Une conférence c'est utile bien sûr pour dialoguer et pour débattre. Mais aussi pour dégager ensemble des solutions concrètes. C'est bien dans cet esprit que le gouvernement aborde cette échéance.
2. Notre deuxième objectif, c'est de consolider notre croissance.
Pour y parvenir, nous devons nous appuyer sur tous les secteurs : les services, le bâtiment, bien sûr, qui sont aujourd'hui des secteurs très dynamiques. Mais aussi l'industrie, qui est la première exposée au défi de la mondialisation. Face aux délocalisations, face aux fermetures des sites industriels, nos concitoyens s'interrogent. Ils se demandent si notre pays a véritablement un avenir industriel.
Je veux leur répondre très clairement : le choix qui a été fait par le Président de la République, c'est le choix d'une industrie forte.
Ce n'est pas un choix idéologique, c'est un choix pragmatique. Nous avons des atouts exceptionnels à valoriser : un vrai savoir-faire dans des secteurs de pointe, une maîtrise des hautes technologies, la compétence de nos salariés. L'industrie, c'est le principal moteur de l'innovation, le premier contributeur à notre balance commerciale. Ce sont 5 millions d'emplois qui sont en jeu.
Pour renforcer ce secteur, nous devons tout miser sur la recherche et l'innovation. C'est l'innovation qui fera les emplois de demain. C'est l'innovation qui nous permettra de rivaliser avec les autres grandes puissances commerciales et de conquérir de nouvelles parts de marché.
C'est dans cet esprit que nous avons agi face aux défis du secteur aéronautique.
Lors de mon déplacement à Toulouse, j'ai annoncé le déblocage de 80 millions d'euros d'avances remboursables pour les PME et de 50 millions d'euros pour le financement de la recherche et de l'innovation dans ce secteur.
Au-delà, j'ai souhaité qu'Airbus et ses sous-traitants rentrent dans une véritable logique de partenariat à travers la mise en place d'une charte de confiance.
Aujourd'hui, l'industrie automobile est elle aussi confrontée à des défis majeurs. Défis de l'innovation, d'abord, qu'il s'agisse de la protection de l'environnement ou de la sécurité. Défi de la compétitivité, ensuite, face à une concurrence mondiale de plus en plus rude.
Ces défis, nous devons les relever. Car l'industrie automobile est essentielle pour notre économie toute entière. Elle plonge ses racines dans notre histoire industrielle. Elle emploie plus d'un million de personnes en France. Elle fait vivre l'ensemble de nos territoires.
Nous pouvons nous appuyer sur la compétence et le savoir-faire de nos ouvriers spécialisés, de nos techniciens supérieurs de nos ingénieurs, qui sont parmi les meilleurs au monde. Nous pouvons aussi nous appuyer sur des grands groupes qui font la fierté de tous nos compatriotes : PSA et Renault, bien sûr - une voiture sur 10 dans le monde est produite par l'un de ces deux constructeurs - mais aussi Valeo et Faurecia. Nous pouvons enfin nous appuyer sur le dynamisme de la filière toute entière : constructeurs, équipementiers, sous-traitants, qui ont tous leur rôle à jouer pour contribuer à l'effort collectif.
Je propose donc une nouvelle donne pour la filière automobile. Elle sera fondée sur deux principes.
Le Premier principe c'est la solidarité.
Solidarité entre grandes et petites entreprises, d'abord. Pour que la filière fonctionne, il est indispensable que les conditions de négociation soient saines et équilibrées. Depuis le début de l'année, sous l'impulsion de François LOOS, constructeurs, équipementiers et sous-traitants ont déjà trouvé des accords sur un certain nombre de points. Ils ont ainsi pu signer un code de bonne pratique pour la filière. Aujourd'hui, la question des délais de paiement reste sur la table. J'ai eu l'occasion d'aborder ce sujet difficile avec les constructeurs et avec les sous-traitants.
Dans la plupart des pays européens, la pratique est de 30 à 60 jours. La France se situe nettement au-delà, avec une moyenne supérieure à 100 jours sur l'ensemble de l'industrie. Or pour une petite entreprise nous le savons, c'est un enjeu majeur. Un décalage de trésorerie, c'est une situation financière plus fragile, c'est donc moins d'investissement et à terme moins d'embauche. Il est donc indispensable de trouver ensemble des solutions. C'est tout le sens de la mission qui a été confiée au député Martial SADDIER. Il me remettra ses conclusions dans les prochains jours.
Sur la base de ses premières orientations, je veux fixer un objectif simple : aligner nos pratiques sur celles des autres pays européens. Je veux également fixer une méthode : engager une négociation entre tous les acteurs de la filière pour atteindre rapidement cet objectif. Ils auront jusqu'au 15 janvier pour aboutir. Si à cette date ils n'y sont pas parvenus de manière satisfaisante et équilibrée, je proposerai alors de passer par la voie législative.
La solidarité, c'est aussi la solidarité envers les salariés. Aujourd'hui, dans le secteur automobile comme dans tous les autres secteurs de l'économie, les techniques et les savoir-faire évoluent de plus en plus vite. Nous devons donner à chaque salarié les moyens de se former pour s'adapter à ces mutations. Avec Gérard LARCHER, nous lancerons un plan de 150 millions d'euros sur trois ans pour accompagner 20.000 salariés du secteur automobile.
Le deuxième principe, c'est l'innovation et la recherche. En 2006, le gouvernement a fait un effort sans précédent en faveur de la filière automobile : 120 millions d'euros ont d'ores et déjà été engagés, notamment pour soutenir le projet de l'hybride diesel porté par le groupe Peugeot et financé par l'Agence de l'innovation industrielle. C'est l'équivalent de l'effort cumulé des 5 années précédentes, et je prends deux engagements.
Le premier engagement : le même montant sera débloqué en 2007, pour atteindre 250 millions d'euros au total. Un projet, déposé par le groupe Valeo, est actuellement en cours d'études auprès de l'Agence de l'innovation industrielle. Il s'agit d'un programme qui permettra de développer des technologies propres, comme l'arrêt des moteurs des véhicules aux feux de circulation. Je souhaite que ce projet puisse aboutir rapidement.
Second engagement : un effort majeur sera réalisé sur le crédit d'impôt recherche, dont le plafonnement par société sera doublé pour atteindre 16 millions d'euros. Au total, ce seront donc 120 millions d'euros supplémentaires que le gouvernement injectera directement en faveur de la recherche pour nos grands groupes industriels. Cette mesure profitera en particulier à l'industrie automobile et aéronautique. Elle permettra d'encourager l'innovation, de renforcer la croissance et de créer des emplois.
Au total, pour la seule filière automobile, ce seront environ 400 millions d'euros supplémentaires qui seront engagés sur trois ans pour l'innovation et la recherche.
Au-delà de ces plans de soutien aux filières aéronautique et automobile, nous relèverons le défi industriel si nous savons tenir une ligne de conduite claire à l'échelle nationale, européenne et internationale.
A l'échelle nationale, nous avons besoin d'un environnement économique plus favorable : le plafonnement de la taxe professionnelle, les allègements de charges, le développement de la formation et l'accroissement des compétences, autant de voies que nous avons ouvertes et dans lesquelles nous devons progresser.
A l'échelle européenne, ne refusons pas le débat sur l'appréciation de l'euro et ses conséquences sur nos exportations : c'est une réalité qui pèse aujourd'hui sur notre compétitivité.
A l'échelle internationale, mettons en place des règles du jeu qui soient les mêmes pour tous. C'est vrai notamment en matière environnementale.
Mesdames, Messieurs,
Vous me permettrez de conclure par quelques mots plus personnels. Vous m'entendez souvent dire : « je veux de l'action et des résultats ». Ce n'est pas une incantation. C'est une responsabilité de tous les instants pour le Gouvernement.
C'est une responsabilité à l'égard des Français, dont beaucoup expriment depuis des années leurs doutes, leur inquiétude et parfois même leur colère face à leurs difficultés quotidiennes. A nous de leur apporter la preuve que la politique peut encore changer les choses. A nous de leur montrer que leurs efforts n'ont pas été inutiles et que nous sommes sur la bonne voie.
C'est une responsabilité à l'égard de notre démocratie. La politique est légitime lorsqu'elle rassemble. La politique est légitime lorsqu'elle améliore la situation de tous ceux dont elle a la charge. La politique est légitime lorsqu'elle fixe un cap clair et qu'elle tient ses engagements. La sérénité des débats de 2007 se jouera aussi sur notre capacité à poursuivre notre action jusqu'au dernier moment et à renforcer les résultats que nous avons déjà obtenus. L'avenir de la France j'en suis convaincu se construit dès aujourd'hui.
Je vous remercie.
Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 30 novembre 2006
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Permettez-moi d'abord de vous dire combien je suis heureux d'être ici, chez Valeo. C'est une société particulièrement dynamique, qui a su se transformer pour devenir un leader mondial dans le secteur des équipementiers automobiles. Je remercie son président, Thierry MORIN, pour son accueil. Il mène aujourd'hui un travail remarquable à la tête de son équipe et de son entreprise.
Vous le savez, j'ai pris un engagement à l'égard des Français : les tenir informés de notre action et des résultats obtenus. Cet engagement, je le tiens depuis dix-huit mois.
Je le tiens lorsque les choses vont bien et quand nous marquons des points, en particulier sur l'emploi : depuis un an et demi, nous sommes parvenus à débloquer l'emploi dans notre pays. Grâce aux mesures que nous avons prises avec Jean-Louis BORLOO, avec Thierry BRETON et avec tous les ministres concernés, nous sommes passés d'un taux de chômage de 10,2% à un taux de 8,8%. Cette baisse du chômage, c'est bien une réalité. Elle est la clé d'un nouvel élan français.
Je tiens bien sûr cet engagement également lorsque les résultats ne sont pas à la hauteur de nos attentes. Au troisième trimestre, la croissance a marqué une pause et cela s'est répercuté sur l'emploi, qui devrait rester stable au mois d'octobre. Je le dis très clairement : ce n'est pas à la hauteur de nos ambitions, pas à la hauteur des ambitions que nous avons pour la France. Une croissance forte, un emploi dynamique, une distribution plus juste des revenus, voilà l'objectif que nous nous sommes fixés. Voilà ce que les Français sont en droit légitimement d'attendre.
C'est pourquoi je veux immédiatement tirer les leçons de la situation présente et amplifier notre action pour répondre aux préoccupations de nos concitoyens.
1. La priorité des priorités, c'est de donner un emploi à chacun.
L'urgence absolue, c'est le chômage des jeunes.
Près d'un quart des jeunes qui sont entrés sur le marché du travail à la fin des années 90 sont encore dans une situation fragile. Cette proportion, elle passe à 50% pour les non diplômés. Cette réalité n'est pas acceptable. Une société qui n'offre pas de perspectives à sa jeunesse, une société qui ne fait pas de place à ceux qui représentent son dynamisme et son ambition pour l'avenir, c'est une société qui n'avance pas.
La clé pour permettre à tous les jeunes d'accéder plus facilement à l'emploi, je l'ai dit et je le répète,aujourd'hui c'est l'éducation. Chaque année, 190 000 jeunes quittent le système scolaire et universitaire sans diplôme. Pour tous ces jeunes, cela veut dire de très grandes difficultés pour trouver un emploi stable. Avec Gilles de ROBIEN et François GOULARD, cela fait plus d'un an que nous nous battons pour changer cette réalité.
Je pense aux mesures que nous avons prises pour permettre à chaque élève de réussir : la relance de l'éducation prioritaire, l'accompagnement personnalisé des élèves en difficulté, la définition du socle commun des connaissances, la réforme de l'apprentissage de la lecture.
Je pense aussi au chantier de l'orientation que nous avons lancé. Depuis un an, nous sommes parvenus dans ce domaine à faire bouger les lignes. Tout le monde a désormais conscience de la nécessité d'une meilleure information des élèves sur les débouchés qui s'ouvrent à eux, sur les résultats de chaque filière en terme d'accès à l'emploi mais aussi sur les écueils à éviter. Le débat sur l'université et l'emploi qui a été mené partout en France nous a permis de dégager de nouvelles pistes d'action. Un véritable service public de l'orientation est en train de se mettre en place.
Au-delà, nous voulons aussi accompagner davantage les jeunes dans leur recherche d'emploi. Lorsqu'on a peu ou pas d'expérience professionnelle, lorsqu'on découvre le marché du travail, on a besoin d'une aide et d'un soutien particulier. Nous avons donc décidé de redoubler d'efforts pour les jeunes en difficulté et dans les secteurs qui ont des difficultés de recrutement.
D'abord, nous augmenterons le crédit d'impôt pour inciter les jeunes à accepter un emploi dans un secteur qui peine à recruter. Il passera ainsi de 1.000 à 1.500 euros. Actuellement, il y a près de 500.000 emplois non pourvus dans l'agriculture, dans le bâtiment, dans le commerce, l'hôtellerie, la restauration ou l'industrie mécanique. Et de l'autre côté, il y a des dizaines de milliers de jeunes qui ne trouvent pas de travail. Cet écart, il nous appartient de le combler. Désormais, un jeune qui est embauché pendant plus de six mois dans un de ces secteurs paiera 1.500 euros d'impôts en moins s'il est imposable ou recevra un chèque de 1.500 euros s'il ne l'est pas. C'est une vraie incitation à chercher l'emploi là où il se trouve.
Ensuite, nous augmenterons la prime de mobilité pour les demandeurs d'emplois qui acceptent un travail à plus de deux cents kilomètres de leur domicile. Elle passera de 1.500 à 2.000 euros. Là encore, c'est une incitation forte à aller là où est l'emploi. Un chômeur qui s'installe dans une autre ville ou dans une autre région pour reprendre un emploi engage des frais importants : il doit payer le déménagement, avancer un loyer. Désormais, il aura 2.000 euros en plus pour lui permettre de faire face à ces dépenses.
Enfin, l'ANPE proposera aux jeunes peu ou pas qualifiés du tout, suivis par les missions locales, de les recevoir personnellement pour leur donner une orientation et une offre d'emploi. Cette politique d'accompagnement personnalisé que le gouvernement a mise en place a déjà montré son efficacité. Il est indispensable qu'elle soit mise au service de ceux qui en ont le plus besoin : les jeunes, et je sais que je peux compter sur l'engagement et la mobilisation remarquable de tous les agents de l'ANPE.
A côté des jeunes, il y aussi d'autres catégories qui connaissent des difficultés particulières et à qui nous devons apporter des réponses.
Je pense d'abord aux femmes. A responsabilités égales, leur rémunération est inférieure à celle des hommes. Elles ont encore trop de difficultés à concilier vie familiale et vie professionnelle. Un grand nombre d'entre elles subissent des temps partiels et ne travaillent pas le nombre d'heures qu'elles souhaitent. Bien souvent, cela veut dire un salaire très faible et des difficultés à faire face à des dépenses quotidiennes de plus en plus élevées. Lorsqu'en plus, elles sont seules à élever leurs enfants, seules à devoir faire vivre leur famille, la situation devient invivable.
Je pense également aux seniors. Pendant vingt-cinq ans on a considéré que pour faire une place aux jeunes, il fallait écarter les seniors de l'emploi. Cela ne marche pas. Non seulement, la situation des jeunes ne s'est pas améliorée. Mais celle des seniors s'est dégradée : ils continuent à être victimes de discriminations à l'embauche. A compétences égales, une personne de 50 ans a 3 fois moins de chances de décrocher un entretien d'embauche qu'un homme de 33 ans. Avec le plan senior, nous avons fait évoluer les mentalités. Le nouveau contrat pour les seniors, l'adaptation des postes de travail, voilà des mesures concrètes qui doivent désormais se généraliser. C'est un combat de longue haleine que nous poursuivons avec la plus grande détermination.
Face à ces réalités, je veux tirer une réflexion et une orientation de travail.
Une réflexion, d'abord : le problème de notre pays, ce n'est pas la qualité des salariés, c'est que les Français ne peuvent pas travailler autant qu'ils le souhaiteraient. Les salariés français sont parmi les plus compétitifs dans le monde, les mieux formés et les plus efficaces. Ils comprennent d'autant moins les difficultés sur le marché du travail et le peu d'emplois qu'on leur propose. Ils acceptent d'autant moins des revenus qui ne progressent pas suffisamment. Nous devons donc faire en sorte que le talent et l'effort soient mieux récompensés.
Je l'ai dit une réflexion mais aussi une orientation de travail pour le gouvernement, ensuite : vous savez que nous tiendrons avec les partenaires sociaux une conférence sur l'emploi et les revenus le 14 décembre prochain. Ce sera l'occasion d'établir un diagnostic commun sur la situation de l'emploi et des revenus dans notre pays. Je souhaite également que nous puissions en tirer des conclusions concrètes sur le soutien à l'emploi des jeunes, l'amélioration de la qualité des postes qui sont proposés aux femmes, la précarité dans l'emploi, les salaires et le coût de la vie. Une conférence c'est utile bien sûr pour dialoguer et pour débattre. Mais aussi pour dégager ensemble des solutions concrètes. C'est bien dans cet esprit que le gouvernement aborde cette échéance.
2. Notre deuxième objectif, c'est de consolider notre croissance.
Pour y parvenir, nous devons nous appuyer sur tous les secteurs : les services, le bâtiment, bien sûr, qui sont aujourd'hui des secteurs très dynamiques. Mais aussi l'industrie, qui est la première exposée au défi de la mondialisation. Face aux délocalisations, face aux fermetures des sites industriels, nos concitoyens s'interrogent. Ils se demandent si notre pays a véritablement un avenir industriel.
Je veux leur répondre très clairement : le choix qui a été fait par le Président de la République, c'est le choix d'une industrie forte.
Ce n'est pas un choix idéologique, c'est un choix pragmatique. Nous avons des atouts exceptionnels à valoriser : un vrai savoir-faire dans des secteurs de pointe, une maîtrise des hautes technologies, la compétence de nos salariés. L'industrie, c'est le principal moteur de l'innovation, le premier contributeur à notre balance commerciale. Ce sont 5 millions d'emplois qui sont en jeu.
Pour renforcer ce secteur, nous devons tout miser sur la recherche et l'innovation. C'est l'innovation qui fera les emplois de demain. C'est l'innovation qui nous permettra de rivaliser avec les autres grandes puissances commerciales et de conquérir de nouvelles parts de marché.
C'est dans cet esprit que nous avons agi face aux défis du secteur aéronautique.
Lors de mon déplacement à Toulouse, j'ai annoncé le déblocage de 80 millions d'euros d'avances remboursables pour les PME et de 50 millions d'euros pour le financement de la recherche et de l'innovation dans ce secteur.
Au-delà, j'ai souhaité qu'Airbus et ses sous-traitants rentrent dans une véritable logique de partenariat à travers la mise en place d'une charte de confiance.
Aujourd'hui, l'industrie automobile est elle aussi confrontée à des défis majeurs. Défis de l'innovation, d'abord, qu'il s'agisse de la protection de l'environnement ou de la sécurité. Défi de la compétitivité, ensuite, face à une concurrence mondiale de plus en plus rude.
Ces défis, nous devons les relever. Car l'industrie automobile est essentielle pour notre économie toute entière. Elle plonge ses racines dans notre histoire industrielle. Elle emploie plus d'un million de personnes en France. Elle fait vivre l'ensemble de nos territoires.
Nous pouvons nous appuyer sur la compétence et le savoir-faire de nos ouvriers spécialisés, de nos techniciens supérieurs de nos ingénieurs, qui sont parmi les meilleurs au monde. Nous pouvons aussi nous appuyer sur des grands groupes qui font la fierté de tous nos compatriotes : PSA et Renault, bien sûr - une voiture sur 10 dans le monde est produite par l'un de ces deux constructeurs - mais aussi Valeo et Faurecia. Nous pouvons enfin nous appuyer sur le dynamisme de la filière toute entière : constructeurs, équipementiers, sous-traitants, qui ont tous leur rôle à jouer pour contribuer à l'effort collectif.
Je propose donc une nouvelle donne pour la filière automobile. Elle sera fondée sur deux principes.
Le Premier principe c'est la solidarité.
Solidarité entre grandes et petites entreprises, d'abord. Pour que la filière fonctionne, il est indispensable que les conditions de négociation soient saines et équilibrées. Depuis le début de l'année, sous l'impulsion de François LOOS, constructeurs, équipementiers et sous-traitants ont déjà trouvé des accords sur un certain nombre de points. Ils ont ainsi pu signer un code de bonne pratique pour la filière. Aujourd'hui, la question des délais de paiement reste sur la table. J'ai eu l'occasion d'aborder ce sujet difficile avec les constructeurs et avec les sous-traitants.
Dans la plupart des pays européens, la pratique est de 30 à 60 jours. La France se situe nettement au-delà, avec une moyenne supérieure à 100 jours sur l'ensemble de l'industrie. Or pour une petite entreprise nous le savons, c'est un enjeu majeur. Un décalage de trésorerie, c'est une situation financière plus fragile, c'est donc moins d'investissement et à terme moins d'embauche. Il est donc indispensable de trouver ensemble des solutions. C'est tout le sens de la mission qui a été confiée au député Martial SADDIER. Il me remettra ses conclusions dans les prochains jours.
Sur la base de ses premières orientations, je veux fixer un objectif simple : aligner nos pratiques sur celles des autres pays européens. Je veux également fixer une méthode : engager une négociation entre tous les acteurs de la filière pour atteindre rapidement cet objectif. Ils auront jusqu'au 15 janvier pour aboutir. Si à cette date ils n'y sont pas parvenus de manière satisfaisante et équilibrée, je proposerai alors de passer par la voie législative.
La solidarité, c'est aussi la solidarité envers les salariés. Aujourd'hui, dans le secteur automobile comme dans tous les autres secteurs de l'économie, les techniques et les savoir-faire évoluent de plus en plus vite. Nous devons donner à chaque salarié les moyens de se former pour s'adapter à ces mutations. Avec Gérard LARCHER, nous lancerons un plan de 150 millions d'euros sur trois ans pour accompagner 20.000 salariés du secteur automobile.
Le deuxième principe, c'est l'innovation et la recherche. En 2006, le gouvernement a fait un effort sans précédent en faveur de la filière automobile : 120 millions d'euros ont d'ores et déjà été engagés, notamment pour soutenir le projet de l'hybride diesel porté par le groupe Peugeot et financé par l'Agence de l'innovation industrielle. C'est l'équivalent de l'effort cumulé des 5 années précédentes, et je prends deux engagements.
Le premier engagement : le même montant sera débloqué en 2007, pour atteindre 250 millions d'euros au total. Un projet, déposé par le groupe Valeo, est actuellement en cours d'études auprès de l'Agence de l'innovation industrielle. Il s'agit d'un programme qui permettra de développer des technologies propres, comme l'arrêt des moteurs des véhicules aux feux de circulation. Je souhaite que ce projet puisse aboutir rapidement.
Second engagement : un effort majeur sera réalisé sur le crédit d'impôt recherche, dont le plafonnement par société sera doublé pour atteindre 16 millions d'euros. Au total, ce seront donc 120 millions d'euros supplémentaires que le gouvernement injectera directement en faveur de la recherche pour nos grands groupes industriels. Cette mesure profitera en particulier à l'industrie automobile et aéronautique. Elle permettra d'encourager l'innovation, de renforcer la croissance et de créer des emplois.
Au total, pour la seule filière automobile, ce seront environ 400 millions d'euros supplémentaires qui seront engagés sur trois ans pour l'innovation et la recherche.
Au-delà de ces plans de soutien aux filières aéronautique et automobile, nous relèverons le défi industriel si nous savons tenir une ligne de conduite claire à l'échelle nationale, européenne et internationale.
A l'échelle nationale, nous avons besoin d'un environnement économique plus favorable : le plafonnement de la taxe professionnelle, les allègements de charges, le développement de la formation et l'accroissement des compétences, autant de voies que nous avons ouvertes et dans lesquelles nous devons progresser.
A l'échelle européenne, ne refusons pas le débat sur l'appréciation de l'euro et ses conséquences sur nos exportations : c'est une réalité qui pèse aujourd'hui sur notre compétitivité.
A l'échelle internationale, mettons en place des règles du jeu qui soient les mêmes pour tous. C'est vrai notamment en matière environnementale.
Mesdames, Messieurs,
Vous me permettrez de conclure par quelques mots plus personnels. Vous m'entendez souvent dire : « je veux de l'action et des résultats ». Ce n'est pas une incantation. C'est une responsabilité de tous les instants pour le Gouvernement.
C'est une responsabilité à l'égard des Français, dont beaucoup expriment depuis des années leurs doutes, leur inquiétude et parfois même leur colère face à leurs difficultés quotidiennes. A nous de leur apporter la preuve que la politique peut encore changer les choses. A nous de leur montrer que leurs efforts n'ont pas été inutiles et que nous sommes sur la bonne voie.
C'est une responsabilité à l'égard de notre démocratie. La politique est légitime lorsqu'elle rassemble. La politique est légitime lorsqu'elle améliore la situation de tous ceux dont elle a la charge. La politique est légitime lorsqu'elle fixe un cap clair et qu'elle tient ses engagements. La sérénité des débats de 2007 se jouera aussi sur notre capacité à poursuivre notre action jusqu'au dernier moment et à renforcer les résultats que nous avons déjà obtenus. L'avenir de la France j'en suis convaincu se construit dès aujourd'hui.
Je vous remercie.
Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 30 novembre 2006