Texte intégral
Monsieur le Président,
C'est pour moi un grand honneur de vous recevoir ce soir, au nom du gouvernement français, dans ces lieux chargés d'histoire que sont les salons du Quai d'Orsay, à l'occasion de votre visite officielle en France. Votre venue constitue l'occasion exceptionnelle de mieux faire connaître votre pays en France et de nous permettre de donner à la relation franco-colombienne un dynamisme accru.
Pour les Français, la Colombie a longtemps été le pays d'une réalité magique, romancée par Garcia Marquez, rendant possible tous les rêves et toutes les utopies, comme dans les récits d'Alvaro Mutis. Mais vous avez aussi des jeunes et talentueux écrivains, comme Santiago Gamboa, qui nous fait visiter Bogota dans un roman policier, ou l'iconoclaste et polémique Fernando Vallejo, qui nous fait visiter dans un délire romanesque la ville de Medellin. Cette ville qui a tant souffert, mais qui relève tous les défis de la modernité et qui s'est récemment dotée d'un grand musée, consacré à l'uvre d'un fils du pays, Fernando Botero. J'ai eu l'honneur de recevoir pour l'occasion la distinction les Clés de la Ville de Medellin. Je souhaite également évoquer la rétrospective, il y a quinze ans, de l'oeuvre d'Alejandro Obregon, sous les auspices du Ministre Ramirez Ocampo, que je tiens à saluer chaleureusement.
Monsieur le Président, à cette image très riche culturellement, il ne serait pas sincère de ne pas rappeler que s'ajoute, pour beaucoup de Français, celle, tragique, d'un pays synonyme d'une terrible violence.
Monsieur le Président, au cours des deux siècles passés, je ne connais pas de crise dans l'histoire des relations entre nos deux pays, tout au plus quelques rares contentieux, vite effacés. En revanche, ils se sont souvent retrouvés sur des valeurs essentielles et cela les a conduits à rechercher ensemble, il y a quelques années, les voies et les moyens de rendre à l'Amérique centrale pour vous si proche, alors déchirée par des luttes fratricides, je pense en particulier au Salvador, la paix nécessaire pour assurer son développement. La Colombie était membre du groupe de Contadora aux côtés du Mexique, du Venezuela et du Panama qui allaient avec les pays membres de l'Union européenne lancer un processus qui dure encore, celui des conférences dites de San José.
Il est donc normal que la France se trouve aujourd'hui à vos côtés pour vous aider à rechercher les moyens de rétablir la concorde nationale dans votre propre pays. Permettez-moi de redire ce soir, Monsieur le Président, le grand respect que nous éprouvons tous face à votre engagement déterminé en faveur de la paix, devant votre volonté inébranlable de négocier, de discuter, d'amener les ennemis d'hier à se rencontrer et à se comprendre. C'est là sans doute la plus écrasante responsabilité d'un homme politique. C'est aussi certainement son plus beau titre de gloire. Votre lutte difficile, opiniâtre et courageuse, suscite l'attention soutenue et l'admiration de la communauté internationale toute entière.
Vous savez, Monsieur le Président, la force des liens fraternels et sincères qui unissent nos deux pays. Permettez-moi de vous redire la grande confiance qu'a le gouvernement français dans le succès de votre action en faveur de la paix et de la réconciliation nationale. La France s'est impliquée, à votre demande, dans un des processus de paix en cours. Nous sommes ainsi présents, sur le terrain, pour faciliter telle ou telle négociation, dans le cadre du groupe des pays amis et facilitateurs du processus de paix entre le gouvernement colombien et l'ELN (armée de libération nationale ). Nous nous en réjouissons pleinement. Il est par ailleurs significatif que, pour la quatrième année consécutive, une organisation non gouvernementale colombienne, en l'an 2000 ce fut le "programme de développement et de paix dans la région du Magdalena medio", ait reçu des mains du Premier ministre le Prix des Droits de l'Homme de la République française.
Nous avons uvré pendant notre présidence de l'Union européenne et nous continuerons à uvrer pour que l'Union prenne pleinement conscience de l'importance de ces processus et pour qu'elle y apporte une contribution qui réponde à l'ampleur des besoins de votre pays. Les Quinze ont en effet pris un engagement envers le processus de paix. Ils ont annoncé lors de la conférence du 24 octobre dernier à Bogota, sous présidence française, leur intention de mettre sur pied un véritable programme européen d'appui au processus de paix. Enfin, l'Union européenne ne manque aucune occasion d'appeler chacun à retourner à la table de négociation et à renoncer à toutes les violations du droit international humanitaire qui endeuillent votre pays. Dans l'ensemble des cénacles internationaux, nous insistons par ailleurs autant sur la nécessité de combattre ce fléau qu'est la drogue que sur le principe de co-responsabilité entre pays producteurs et consommateurs, qui nous semble être non seulement une manifestation de solidarité, mais encore une condition évidente d'efficacité.
La venue en septembre 2000 d'une importante délégation de sénateurs français, de toutes les tendances de notre échiquier politique, a concrétisé le renforcement des liens entre nos deux pays. Nos entreprises par ailleurs, comprennent tout l'intérêt que représente pour elles votre pays, qui conjugue, comme peu d'autres, richesses naturelles et haut niveau de formation des hommes. La France s'honore ainsi d'appartenir au groupe de pays ayant fait le pari de la solidité de votre économie et des potentialités colombiennes. Elle s'enorgueillit ainsi d'avoir été, en 1999, le premier investisseur étranger dans votre pays et souhaite continuer à aller encore de l'avant, grâce en particulier à la mission de haut niveau que le MEDEF international va effectuer en Colombie le mois prochain.
Je souhaiterais également rappeler ces évidences du "temps long" cher à Fernand Braudel, qui parfois peuvent sembler disparaître derrière l'écume des vagues, les remous de l'agitation politique ou économique. La culture colombienne a, depuis longtemps, conquis la France. Après notre imaginaire, définitivement séduit par une littérature parfois désespérée mais toujours luxuriante, nos musées, enthousiasmés par les collections du musée de l'or de Bogota (que j'ai eu le plaisir de visiter personnellement en 1985, lors du voyage officiel en Colombie du président François Mitterrand à l'invitation du président Belisario Betancur) ; les Champs-Elysées eux-mêmes ont été animés et inspirés par les magnifiques sculptures du Maître Botero. Nous avons aussi soutenu et encouragé le grand cinéaste Sergio Cabrera. Et, en ce moment même, à Paris, Omar Porras, encore un Colombien de talent, triomphe avec sa mise en scène audacieuse de la fameuse pièce d'Euripide Les Bacchantes.
En sens inverse je me réjouis, comme membre du gouvernement et en tant que ministre de l'Education plus spécifiquement, que tant de jeunes colombiens choisissent d'aller étudier et vivre en France, qui est leur deuxième pays d'accueil dans le monde. Plus largement, l'excellence de notre coopération scientifique et universitaire reflète le goût de vos compatriotes, Monsieur le Président, pour la culture européenne et pour les savoir-faire français d'aujourd'hui et les techniques de demain.
Afin d'approfondir notre coopération universitaire, scientifique et technique, j'ai décidé d'augmenter le nombre d'assistants de langue, qui vont venir de Colombie l'an prochain. Après avoir séjourné en France, ils deviendront naturellement les promoteurs du français dans votre pays. J'espère que l'enseignement du français trouvera ainsi à s'enrichir et que votre gouvernement les y encouragera.
Je voudrais que les Colombiens, Monsieur le Président, ne se sentent jamais seuls dans leur combat pour un avenir meilleur. Cet avenir se construit avec l'éducation et avec la recherche. C'est pourquoi, j'ai demandé au directeur de l'Institut des hautes études de l'Amérique latine, Jean-Michel Blanquer, de mettre en place une "Chaire d'études prospectives colombiennes". Elle donnera présence et visibilité aux travaux des universitaires colombiens qui viendront confronter avec les Français leur vision d'avenir et leur réflexion sur la Colombie de demain.
Nous avons aussi décidé, avec l'ambassadeur Juan Camilo Restrepo et avec notre ambassadeur Daniel Parfait, qu'une mission conjointe du ministère de l'Education et du ministère des Affaires étrangères se rendra en Colombie pour étudier une coopération approfondie en matière d'études universitaires de technologie.
Telle est aussi notre façon de participer à votre plan pour ramener la paix dans votre pays. Et c'est cette amitié franco-colombienne, faite d'échanges et d'enrichissements mutuels que nous célébrons ce soir, Monsieur le Président.
Votre présence dans ce palais, celle d'un homme de paix et de dialogue, ainsi que celle de la première dame de la nation, nous ravissent et nous honorent.
Puisse l'avenir vous réserver le succès que vous escomptez pour le bonheur de votre peuple et auquel vous uvrez sans relâche et, comme les usages français le permettent durant le mois de janvier, accordez-moi le privilège de vous présenter, au nom du gouvernement français et en mon nom personnel, tous nos vux de bonne et heureuse année.
C'est dans cet esprit que je vous invite à lever vos verres pour que :
Vive la Colombie, vive la France et vive l'amitié franco-colombienne
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 janvier 2001)
C'est pour moi un grand honneur de vous recevoir ce soir, au nom du gouvernement français, dans ces lieux chargés d'histoire que sont les salons du Quai d'Orsay, à l'occasion de votre visite officielle en France. Votre venue constitue l'occasion exceptionnelle de mieux faire connaître votre pays en France et de nous permettre de donner à la relation franco-colombienne un dynamisme accru.
Pour les Français, la Colombie a longtemps été le pays d'une réalité magique, romancée par Garcia Marquez, rendant possible tous les rêves et toutes les utopies, comme dans les récits d'Alvaro Mutis. Mais vous avez aussi des jeunes et talentueux écrivains, comme Santiago Gamboa, qui nous fait visiter Bogota dans un roman policier, ou l'iconoclaste et polémique Fernando Vallejo, qui nous fait visiter dans un délire romanesque la ville de Medellin. Cette ville qui a tant souffert, mais qui relève tous les défis de la modernité et qui s'est récemment dotée d'un grand musée, consacré à l'uvre d'un fils du pays, Fernando Botero. J'ai eu l'honneur de recevoir pour l'occasion la distinction les Clés de la Ville de Medellin. Je souhaite également évoquer la rétrospective, il y a quinze ans, de l'oeuvre d'Alejandro Obregon, sous les auspices du Ministre Ramirez Ocampo, que je tiens à saluer chaleureusement.
Monsieur le Président, à cette image très riche culturellement, il ne serait pas sincère de ne pas rappeler que s'ajoute, pour beaucoup de Français, celle, tragique, d'un pays synonyme d'une terrible violence.
Monsieur le Président, au cours des deux siècles passés, je ne connais pas de crise dans l'histoire des relations entre nos deux pays, tout au plus quelques rares contentieux, vite effacés. En revanche, ils se sont souvent retrouvés sur des valeurs essentielles et cela les a conduits à rechercher ensemble, il y a quelques années, les voies et les moyens de rendre à l'Amérique centrale pour vous si proche, alors déchirée par des luttes fratricides, je pense en particulier au Salvador, la paix nécessaire pour assurer son développement. La Colombie était membre du groupe de Contadora aux côtés du Mexique, du Venezuela et du Panama qui allaient avec les pays membres de l'Union européenne lancer un processus qui dure encore, celui des conférences dites de San José.
Il est donc normal que la France se trouve aujourd'hui à vos côtés pour vous aider à rechercher les moyens de rétablir la concorde nationale dans votre propre pays. Permettez-moi de redire ce soir, Monsieur le Président, le grand respect que nous éprouvons tous face à votre engagement déterminé en faveur de la paix, devant votre volonté inébranlable de négocier, de discuter, d'amener les ennemis d'hier à se rencontrer et à se comprendre. C'est là sans doute la plus écrasante responsabilité d'un homme politique. C'est aussi certainement son plus beau titre de gloire. Votre lutte difficile, opiniâtre et courageuse, suscite l'attention soutenue et l'admiration de la communauté internationale toute entière.
Vous savez, Monsieur le Président, la force des liens fraternels et sincères qui unissent nos deux pays. Permettez-moi de vous redire la grande confiance qu'a le gouvernement français dans le succès de votre action en faveur de la paix et de la réconciliation nationale. La France s'est impliquée, à votre demande, dans un des processus de paix en cours. Nous sommes ainsi présents, sur le terrain, pour faciliter telle ou telle négociation, dans le cadre du groupe des pays amis et facilitateurs du processus de paix entre le gouvernement colombien et l'ELN (armée de libération nationale ). Nous nous en réjouissons pleinement. Il est par ailleurs significatif que, pour la quatrième année consécutive, une organisation non gouvernementale colombienne, en l'an 2000 ce fut le "programme de développement et de paix dans la région du Magdalena medio", ait reçu des mains du Premier ministre le Prix des Droits de l'Homme de la République française.
Nous avons uvré pendant notre présidence de l'Union européenne et nous continuerons à uvrer pour que l'Union prenne pleinement conscience de l'importance de ces processus et pour qu'elle y apporte une contribution qui réponde à l'ampleur des besoins de votre pays. Les Quinze ont en effet pris un engagement envers le processus de paix. Ils ont annoncé lors de la conférence du 24 octobre dernier à Bogota, sous présidence française, leur intention de mettre sur pied un véritable programme européen d'appui au processus de paix. Enfin, l'Union européenne ne manque aucune occasion d'appeler chacun à retourner à la table de négociation et à renoncer à toutes les violations du droit international humanitaire qui endeuillent votre pays. Dans l'ensemble des cénacles internationaux, nous insistons par ailleurs autant sur la nécessité de combattre ce fléau qu'est la drogue que sur le principe de co-responsabilité entre pays producteurs et consommateurs, qui nous semble être non seulement une manifestation de solidarité, mais encore une condition évidente d'efficacité.
La venue en septembre 2000 d'une importante délégation de sénateurs français, de toutes les tendances de notre échiquier politique, a concrétisé le renforcement des liens entre nos deux pays. Nos entreprises par ailleurs, comprennent tout l'intérêt que représente pour elles votre pays, qui conjugue, comme peu d'autres, richesses naturelles et haut niveau de formation des hommes. La France s'honore ainsi d'appartenir au groupe de pays ayant fait le pari de la solidité de votre économie et des potentialités colombiennes. Elle s'enorgueillit ainsi d'avoir été, en 1999, le premier investisseur étranger dans votre pays et souhaite continuer à aller encore de l'avant, grâce en particulier à la mission de haut niveau que le MEDEF international va effectuer en Colombie le mois prochain.
Je souhaiterais également rappeler ces évidences du "temps long" cher à Fernand Braudel, qui parfois peuvent sembler disparaître derrière l'écume des vagues, les remous de l'agitation politique ou économique. La culture colombienne a, depuis longtemps, conquis la France. Après notre imaginaire, définitivement séduit par une littérature parfois désespérée mais toujours luxuriante, nos musées, enthousiasmés par les collections du musée de l'or de Bogota (que j'ai eu le plaisir de visiter personnellement en 1985, lors du voyage officiel en Colombie du président François Mitterrand à l'invitation du président Belisario Betancur) ; les Champs-Elysées eux-mêmes ont été animés et inspirés par les magnifiques sculptures du Maître Botero. Nous avons aussi soutenu et encouragé le grand cinéaste Sergio Cabrera. Et, en ce moment même, à Paris, Omar Porras, encore un Colombien de talent, triomphe avec sa mise en scène audacieuse de la fameuse pièce d'Euripide Les Bacchantes.
En sens inverse je me réjouis, comme membre du gouvernement et en tant que ministre de l'Education plus spécifiquement, que tant de jeunes colombiens choisissent d'aller étudier et vivre en France, qui est leur deuxième pays d'accueil dans le monde. Plus largement, l'excellence de notre coopération scientifique et universitaire reflète le goût de vos compatriotes, Monsieur le Président, pour la culture européenne et pour les savoir-faire français d'aujourd'hui et les techniques de demain.
Afin d'approfondir notre coopération universitaire, scientifique et technique, j'ai décidé d'augmenter le nombre d'assistants de langue, qui vont venir de Colombie l'an prochain. Après avoir séjourné en France, ils deviendront naturellement les promoteurs du français dans votre pays. J'espère que l'enseignement du français trouvera ainsi à s'enrichir et que votre gouvernement les y encouragera.
Je voudrais que les Colombiens, Monsieur le Président, ne se sentent jamais seuls dans leur combat pour un avenir meilleur. Cet avenir se construit avec l'éducation et avec la recherche. C'est pourquoi, j'ai demandé au directeur de l'Institut des hautes études de l'Amérique latine, Jean-Michel Blanquer, de mettre en place une "Chaire d'études prospectives colombiennes". Elle donnera présence et visibilité aux travaux des universitaires colombiens qui viendront confronter avec les Français leur vision d'avenir et leur réflexion sur la Colombie de demain.
Nous avons aussi décidé, avec l'ambassadeur Juan Camilo Restrepo et avec notre ambassadeur Daniel Parfait, qu'une mission conjointe du ministère de l'Education et du ministère des Affaires étrangères se rendra en Colombie pour étudier une coopération approfondie en matière d'études universitaires de technologie.
Telle est aussi notre façon de participer à votre plan pour ramener la paix dans votre pays. Et c'est cette amitié franco-colombienne, faite d'échanges et d'enrichissements mutuels que nous célébrons ce soir, Monsieur le Président.
Votre présence dans ce palais, celle d'un homme de paix et de dialogue, ainsi que celle de la première dame de la nation, nous ravissent et nous honorent.
Puisse l'avenir vous réserver le succès que vous escomptez pour le bonheur de votre peuple et auquel vous uvrez sans relâche et, comme les usages français le permettent durant le mois de janvier, accordez-moi le privilège de vous présenter, au nom du gouvernement français et en mon nom personnel, tous nos vux de bonne et heureuse année.
C'est dans cet esprit que je vous invite à lever vos verres pour que :
Vive la Colombie, vive la France et vive l'amitié franco-colombienne
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 janvier 2001)