Interview de Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur, sur "BFM" le 10 décembre 2006, sur les nouvelles relations économiques entre la France et l'Inde liées grâce au "Forum PME France India 2006".

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Média : BFM

Texte intégral

Michel PICOT - Et nous sommes en compagnie de Christine LAGARDE. Bonjour.
Christine LAGARDE - Bonjour.
Michel PICOT - Vous êtes ministre du Commerce extérieur. Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation dans INDE HEBDO. Vous étiez en Inde en début de semaine pour suivre le forum PME France-India 2006. Alors, on l'a vu, dans l'actualité de ces derniers jours, les grandes entreprises françaises commencent sérieusement à se développer en Inde, et même de plus en plus, RENAULT et MAHINDRA, on en a parlé dans cette émission, ACCOR qui prévoit de construire une centaine d'hôtels. Jeudi dernier, c'est AIRBUS qui annonçait vouloir investir 1 milliard de dollars en Inde et l'avionneur a également annoncé une remontée de ses prévisions de commandes d'appareils dans son pays, donc les grandes entreprises se sont lancées, les PME semblent un petit peu à la traîne et la part de marché de la France en Inde est de 1,5 %. Que se passe-t-il, Christine LAGARDE ? Pourquoi sommes-nous si peu présents en Inde ?
Christine LAGARDE - Alors, c'est 1,7 %
Michel PICOT - Ca a augmenté alors !
Christine LAGARDE - Ca a augmenté un petit peu et on est sur une tendance de croissance, ce qui est excellent. Au titre des investissements importants que vous indiquiez tout à l'heure, moi je rajouterai également LAFARGE qui a été autorisé par les autorités indiennes à ouvrir deux cimenteries supplémentaires et LAFARGE, c'est un petit peu une illustration de l'excellence du travail français quand il s'inscrit dans la durée et je crois que c'est une règle de principe pour toutes les exportations et pour toutes les implantations mais c'est particulièrement vrai en Inde où la relation s'inscrit dans le temps. C'est vrai aussi avec la Chine mais je crois qu'avec l'Inde, on est là pour durer et je crois que la relation est très souvent fondée sur les échanges purement commerciaux mais aussi sur les liens personnels, sur le respect réciproque et sur la connaissance qu'on a les uns les autres. Et à cet égard, je crois que LAFARGE a fait depuis longtemps un très gros travail en Inde et je suis sûr que les autres industriels français que vous mentionniez le feront. Alors, sur les PME, c'est vrai que de toute façon le marché indien n'est pas la porte à côté comme la Belgique ou comme l'Allemagne et qu'il faut un peu plus d'audace pour l'aborder. Il faut aussi évidemment maîtriser l'anglais ou avoir autour de soi des gens qui le maîtrisent puisque c'est la langue de communication des affaires et j'ai été très, très encouragée par la présence de plus de 200 chefs d'entreprise en début de semaine auprès de 1.000 PME indiennes qui, elles aussi, étaient passionnées par la relation entre la France et l'Inde et de cette rencontre entre plus de 200 chefs d'entreprise français et plus de 1.000 PME indiennes, eh bien, sont sortis 2.000 rendez-vous d'affaires en ce qu'il est convenu d'appeler B to B, c'est-à-dire qu'un chef d'entreprise rencontre un chef d'entreprise indien, explore les perspectives de coopération, de collaboration, de joint-venture et je crois que, alors on n'a pas les résultats, c'est trop tôt évidemment pour conclure déjà que tant de contrats auront été signés, que tant d'implantations sont décidées.
Michel PICOT - En tout cas, nous verrons, Madame la ministre, on a eu des patrons qui participent à ce forum et ils sont déjà très motivés, ils ont déjà plus ou moins motivés. Pour eux, ça fonctionne très, très bien. Vous pensez que ce forum qui a eu lieu cette semaine amorce une nouvelle étape dans les relations entre la France et l'Inde.
Christine LAGARDE - Oui, je crois que les relations au niveau des petites et moyennes entreprises sont vraiment dans une phase de décollage et ça me paraît très important pour tisser vraiment un tissu économique d'échanges entre nos deux pays à tous les niveaux : les grandes entreprises sont présentes des deux côtés, les indiennes en France, les françaises en Inde et c'est très bien ; il faut aussi que ce mouvement s'amorce et se développe entre les petites et les moyennes entreprises de nos deux pays. Ca forme une espèce de richesse et d'humus absolument indispensable aux bonnes relations économiques.
Michel PICOT - Vous vous êtes fixé un objectif ?
Christine LAGARDE - Oui, nous nous sommes fixé un objectif avec mon homologue Kamal NATH et nous nous sommes promis que dans les cinq ans, nous doublerions le volume des échanges donc sur le plan du commerce et que nous doublerions le nombre d'implantations françaises en Inde.
Michel PICOT - Et dans quels secteurs les Français peuvent-ils prendre des parts de marché plus facilement en Inde ?
Christine LAGARDE - Alors, bien sûr ans les domaines qui sont nos domaines d'excellence, je crois que c'est vraiment la démarche à aborder, c'est déterminer où nous sommes vraiment très bons, où nous avons un avantage compétitif et où ça peut séduire les acheteurs, les clients indiens. Dans de domaine là, clairement le monde de la distribution, je pense évidemment à CARREFOUR mais à CASINO mais à tous les autres, ont leur carte à jouer maintenant. Je crois que le marché indien est en train de s'ouvrir avec des structures juridiques qui ne seront pas très simples dans un premier temps parce qu'il va falloir passer par des régimes de franchise, par des régimes de vente en gros, enfin c'est pas tout à fait simple mais je pense que la porte est en train de s'ouvrir. Il faut donc être présent. Nous avons là de grands champions internationaux, ils doivent être présents. Dans le domaine des infrastructures, il est évident pour toute personne qui a mis les pieds en Inde que d'énormes travaux sont à faire, qu'il s'agisse des routes, des autoroutes ...
Michel PICOT - De l'énergie.
Christine LAGARDE - Des aéroports, de l'énergie bien entendu ; alors, les infrastructures en termes de transports, en termes d'énergie bien entendu. Ce sont les trois grands secteurs auxquels je pense naturellement et puis il y a séparément, et ils ont commencé ce chemin là tous les domaines du luxe, de la beauté, de la cosmétique, du design où là, de même, la porte est en train de s'ouvrir et des grandes maisons comme CHANEL, comme LOUIS VUITTON, comme HERMES ont commencé déjà à pousser un petit peu cette porte. Donc ça se passe plutôt bien.
Michel PICOT - Merci beaucoup pour toutes ces précisions, Christine LAGARDE, ministre du Commerce extérieur. Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation dans INDE HEBDO sur BFM
source http://www.exporter.gouv.fr, le 28 décembre 2006