Conférence de presse de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, sur la présence de la France dans l'Océan indien, les relations entre la France et les Seychelles, la coopération entre les deux pays, l'aide de la France aux Seychelles, la francophonie, la diffusion de la langue française, la Commission de l'Océan indien et la situation aux Comores, Victoria, Seychelles, le 20 février 2001.

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Circonstance : Voyage de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, aux Seychelles, les 19 et 20 février 2001

Texte intégral

Il y a incontestablement des enjeux politiques, stratégiques. La France souhaite être présente dans l'Océan indien. Elle l'est évidemment avec l'Ile de la Réunion, à qui nous voudrions voir jouer un rôle régional plus affirmé et que la nouvelle loi d'orientation de l'Outre-Mer va incontestablement encourager, en donnant aux élus réunionnais plus de responsabilités, plus de liberté dans leurs relations avec leurs voisins. J'observe aussi que la Commission de l'Océan indien, dont les Seychelles sont évidemment un membre actif, a pris un nouveau départ depuis le deuxième sommet des chefs d'Etat et de gouvernement qui s'est tenu précisément à La Réunion l'an dernier, auquel le président Chirac a participé. J'ajoute enfin, pour en rester au plan politique, que la France et les Seychelles se retrouvent très souvent, presque toujours, sur la même position dans les grandes enceintes internationales. Même, je serais tenté, sans exagérer, de dire qu'il nous arrive d'avoir, vis-à-vis du Fonds monétaire international, des réserves partagées. Et la France fait partie de ces pays qui essaient de rendre plus attentif le Fonds monétaire international, par exemple, aux questions sociales.
Nous avons des raisons économiques et commerciales. Les entreprises françaises sont présentes aux Seychelles. Elles y investissent. La France est le second investisseur étranger aux Seychelles, dans des domaines très divers. On pense évidement au tourisme, on pense à la pêche, mais on pourrait aussi évoquer la présence française constatée déjà, appelée certainement à se développer en tout ce qui tourne autour des services publics. L'eau par exemple étant un des secteurs où les entreprises françaises sont particulièrement performantes. Mais on pourrait parler des communications, des télécommunications, des téléphones. Si j'observe que l'histoire même des Seychelles renvoie pour partie à notre propre histoire, il est clair qu'entre ma région et les Seychelles, c'est une vieille histoire. Bref, et c'est là d'ailleurs que les enjeux linguistiques, que j'évoquais à l'instant, peuvent se vérifier aussi. Les Seychelles sont pour nous un allié dans la bataille engagée en faveur de la diversité linguistique et culturelle. Les Seychelles font partie de l'organisation de la Francophonie, c'est 55 Etats et gouvernements qui ont le français en partage. J'ai d'ailleurs, il y a quelques instants, souhaité que le président René puisse représenter lui-même son pays lors du sommet qui, à Beyrouth à la fin de l'année, réunira la Francophonie institutionnelle sur un thème qui nous parait très actuel, le dialogue des cultures. Nous avons donc de bonnes raisons de vouloir cette relation étroite. Il faut convenir aussi qu'elle s'est nouée très vite.
C'est dès 1976 qu'il y a eu un premier accord de coopération. Il y a eu ensuite des bons moments puis des moments plus difficiles. Des hauts et des bas comme on dit. C'est comme dans toute union, certains disent comme dans tout ménage. Mais j'observe que depuis 1996, en particulier depuis la visite du président René en France, on a assisté à une intensification des actions de coopération, des échanges, encore qu'il faut bien reconnaître que cela faisait presque 4 ans qu'un ministre français n'était pas venu en voyage officiel. Je soupçonne certains de mes collègues d'être venus en voyage privé !... Mais je suis heureux d'avoir, trop brièvement, je le répète, rencontré la réalité politique, économique seychelloise.
Je viens de parler de la réalité économique seychelloise. Je sais les difficultés, dont les responsables seychellois sont encore mieux conscients que moi, que traverse une économie où les investissements importants engagés créent des tensions, notamment monétaires, dont les secteurs économiques peuvent avoir à souffrir. Le président René me dit sa conviction que cette situation difficile est temporaire, que les investissements, qui ont nécessité des prêts importants, vont produire leurs résultats dans les années proches. Il m'a dit aussi sa volonté de préserver un certain nombre d'acquis sociaux, ce qui rendait, il en est convenu, plus compliquée la relation à la communauté financière internationale. La France ne peut que souhaiter voir les Seychelles trouver le chemin entre ce besoin d'une gestion économique et financière resserrée et la préservation des équilibres sociaux. J'ai dit en tout cas au président notre disponibilité à accompagner les discussions que les Seychellois étaient susceptibles d'avoir avec l'Union européenne bien sûr, mais aussi avec les organismes internationaux qui peuvent apporter leur contribution à la situation des Seychelles.
Nous avons beaucoup parlé, au cours de mon séjour, avec les ministres que j'ai rencontrés, avec le président, de la question de l'environnement. Elle est appelée à prendre une importance croissante car il en va de la préservation de ce gisement touristique extraordinaire que sont les Seychelles. Il en va aussi de la préservation d'une ressource essentielle pour son économie, qui est la pêche. Nous avons évoqué, à cet égard, tout particulièrement, le besoin d'organiser un système de surveillance des zones de pêche, dans l'intérêt même des pêcheurs et pour leur propre sécurité mais, il est vrai aussi, pour faire en sorte qu'on évite la surexploitation de certaines espèces. Bien évidemment, il faut, là aussi, que les conventions internationales soient respectées et il faut lutter contre les pratiques illégales. Nous aurons observé que le ministre Jérémie Bonnelame, lui-même hier, s'est exprimé avec force à cet égard.
Voilà, nous allons demain nous retrouver dans le cadre de la Commission de l'Océan indien. Nous y évoquerons la situation générale de la zone. J'aurai l'occasion, avec les élus réunionnais, de dire la volonté de la Réunion de participer pleinement au développement de l'Océan indien. Nous évoquerons la situation des Comores, très probablement. Je n'y insiste pas parce vous souhaiterez peut-être me poser une question sur ce sujet. Mais moi je vais, je le répète, rentrer en France avec la conviction tranquille que la France, dans cette région du monde, a toutes raisons de vouloir être présente, qu'elle bénéficie d'un capital de sympathie, d'intérêts aussi. Il faut que les Français le mesurent et soient prêts à répondre à cette volonté, que j'ai ressentie, fortement exprimée aux Seychelles, d'une relation plus étroite avec notre pays. Je vais, si vous le voulez, en rester là peut-être.
Je vous ai dit - il serait peut-être bien que je le précise - que les Seychelles font partie de la ZSP, Zone de solidarité prioritaire, que la France a dessinée lorsque nous avons entrepris de réformer notre dispositif de coopération. 61, c'est le nombre actuel des pays qui sont membres de la ZSP, dont une bonne quarantaine en Afrique, quelques autres dans la Caraïbe, quelques autres en Asie du Sud-Est et enfin dans le Pacifique et l'Océan indien, et puis le Moyen-Orient. Voilà, maintenant, je suis à votre disposition.
Q - Vous avez parlé tout à l'heure des relations franco-seychelloises, et vous avez dit qu'elles ont connu des hauts et des bas. Pour le moment, peut-on les voir vers le haut ou le bas ?
R - Je pense que nous sommes plutôt dans une période haute. Et le fait que nous ayons réussi dans de bonnes conditions, par exemple à trouver une solution au conflit concernant l'espace maritime, dans des délais très resserrés, montre bien qu'il y a une volonté, partagée je crois, d'améliorer et d'approfondir notre relation. Donc, nous sommes en période de hautes eaux du point de vue de la relation.
Q - Je crois savoir que vous avez retardé à plusieurs reprises votre arrivée aux Seychelles, pour coïncider avec l'inauguration du bâtiment de l'Alliance française. Peut-on en conclure que depuis un certain moment, la France privilégie le développement de la Francophonie au détriment des autres volets de coopération ?
R - D'abord la Francophonie, ne se fait jamais au détriment de la coopération. La Francophonie, c'est toujours de la coopération en plus. Il est vrai que c'est quand même souvent au travers des actions de coopération que la Francophonie se renforce, et la francophilie aussi, j'espère. En ce qui concerne mon voyage, c'est vrai que si mon agenda me l'avait permis, je serais bien venu plus tôt, mais mon rythme de voyage est très soutenu. Je savais, parce que M. l'Ambassadeur m'avait informé, qu'il y aurait cette opportunité de l'inauguration de l'Alliance française, qui est un équipement important, vous avez pu le constater par vous-même. C'est une belle réalisation, et je vais vous faire un aveu : ce n'est pas tous les jours que j'ai la chance d'inaugurer comme ça, loin de ma Bretagne, des équipements de cette qualité.
Q - Monsieur Le Ministre, la sixième session de la commission mixte franco-seychelloise s'est tenue en avril 1994, si j'ai bonne mémoire. Mais la septième, jusqu'à présent n'a pas beaucoup évolué. Est-ce qu'il y a un problème qui fait obstacle à cette manifestation ?
R - Non. Mais les commissions mixtes répondent à un rythme qui est en général de 5 ans, 6 ans, parfois 10 ans. Donc on pourrait imaginer de mettre en chantier une nouvelle commission mixte. Mais j'aimerais bien que cela puisse correspondre au règlement d'un dossier qui empêche que notre coopération se développe aussi complètement que je le voudrais. Je vous parle très franchement. C'est le problème de l'Agence française de développement, qui est désormais le premier opérateur français en matière de coopération, en matière d'infrastructure, en matière de routes, de santé, de constructions scolaires, pour prendre quelques exemples. Et les règles de l'Agence ne lui permettent pas d'intervenir là où il y a un problème d'arriérés. Donc, cela renvoie aux difficultés que j'évoquais tout à l'heure, sur le plan financier et monétaire. Nous sommes convenus, d'ailleurs, et ceci a été confirmé lors de l'entretien avec le président ce matin, qu'une mission de l'Agence française de développement viendrait rencontrer les responsables seychellois, et voir avec eux comment nous pourrions mettre en place une convention prévoyant, par exemple, un rééchelonnement de la dette, un début de remboursement, mais aussi un retour, en quelque sorte, de l'Agence aux Seychelles. J'aimerais bien que ce genre de problème soit réglé avant que l'on tienne une nouvelle commission mixte. Il n'y a pas d'obstacle en dehors de ça, et j'y suis tout à fait favorable.
Q - Ma question concerne un peu les dettes des Seychelles vis-à-vis de la France. Est-ce que je peux vous demander, Monsieur le Ministre, si vous avez abordé cette question avec le président René ? Parce que dans les derniers comptes nationaux, le gouvernement note les arriérés de paiement. Est-ce que vous avez abordé cette question ? Est-ce que ces arriérés ont eu un impact négatif sur nos relations avec l'Agence française de développement et si oui, est-ce qu'il y a un mécanisme qui est maintenant en place pour essayer de résoudre ces difficultés ?
R - Le mécanisme n'est pas en place mais la mission à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure a pour raison d'être de le mettre en place. A la question : est-ce que les arriérés ont empêché, ont handicapé la coopération ? Oui. Incontestablement en ce qui concerne l'AFD puisque, je le répète, dès lors qu'il y a arriérés, l'AFD n'intervient plus. Donc, c'est un acteur en moins en matière de coopération et c'est bien parce que je le regrette, et que je crois que les Seychellois le regrettent aussi, que nous allons essayer de trouver une solution à ce problème d'arriérés pour permettre à l'AFD de revenir aux Seychelles et de pouvoir y exercer ses compétences, ses talents mais aussi y mobiliser ses moyens. Parce qu'il y a un effet de chaîne. L'AFD, cela peut être aussi la filiale PROPARCO, qui est un élément de sécurité pour les investisseurs français. C'est lié aussi à la COFACE. C'est tout un ensemble qui, si on arrive à régler cette question de l'arriéré AFD, peut vraiment donner, non seulement aux investisseurs français mais aux autres, européens en particulier, des raisons supplémentaires de s'investir ici. Et il serait dommage que les Seychellois ne puissent pas en profiter.
Q - Vous nous avez parlé de l'Europe, Monsieur le Ministre. Est-ce que vous, en tant que partenaire historiquement privilégié des Seychelles vous vous positionnez comme un interlocuteur privilégié des Seychelles vis-à-vis de l'Union européenne, pour justement essayer de résoudre les petits différends qui existent au niveau de la communauté ?
R - Sans aucun doute. D'abord, parce que la France est un acteur européen important. J'en donne un exemple. Le Fonds européen de développement, qui est l'outil financier de collaboration entre l'Europe et les pays Afrique-Caraïbes-Pacifique - donc des Seychelles - est financé à presque 25 % par la France. Alors que la part de la France dans les financements européens se situe autour de 17 ou 18 %, pour le FED, nous payons 24,3 %, très près de 25 %, c'est dire que nous avons de bonnes raisons de nous intéresser à l'usage qui est fait de ce fonds. Les Seychelles ayant cette relation privilégiée avec la France, et au travers de la Francophonie tout particulièrement, il est normal que la France soit aussi un allié des Seychelles dans leur relation avec l'Union européenne.
Q - Vous savez peut-être qu'il y a des pressions qui pèsent un peu sur la presse pluraliste aux Seychelles en ce moment. Vous êtes aux Seychelles pour inaugurer un espace de liberté, de démocratie, de tolérance. Est-ce que, dans le cadre des relations entre la France et les Seychelles, il y a des programmes d'appui, ou est-ce qu'il y a une volonté du gouvernement français pour faire avancer et aboutir des questions de démocratie et de pluralisme ?
R - Il y a des programmes d'appui qui se développent en bilatéral et aussi au sein de la Francophonie, programmes d'appui à la presse, afin d'aller vers une meilleure professionnalisation, ce qui me paraît aussi tout à fait important. Et si un tel projet était exprimé, ou la demande d'un tel projet était exprimée, moi je suis tout prêt à l'accompagner, l'aider, notamment dans la relation avec l'Agence de la Francophonie, qui est chargée de mettre en place ces moyens. Sur le fond, j'ai évoqué cette question très brièvement avec le président, ce matin, en faisant référence à la déclaration de Bamako, qui a été l'aboutissement d'une longue réflexion conduite entre francophones sur les questions de démocratie, Droits de l'Homme, liberté au sens large, en lui disant l'importance que nous attachions à faire vivre cette déclaration, l'importance que nous attachions à la liberté de la presse, tout en reconnaissant le besoin, aussi, d'une presse professionnelle, attentive à la vérité. Ca, ce sont des éléments sur lesquels je me plais toujours à insister. La contrepartie de la liberté de la presse, c'est l'exigence des journalistes vis-à-vis d'eux-mêmes, et de la vérité qu'ils veulent défendre.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez parlé de l'élargissement de la Francophonie, et de la diffusion de la langue française, ici aux Seychelles, à travers la convention que vous avez signée hier avec le ministre de l'Education. Et il est vrai que les Seychelles partagent des liens étroits, et que leur langue maternelle, le créole, est beaucoup plus rapproché du français que de l'anglais. Mais il est vrai aussi que le peuple a plutôt tendance à pratiquer l'anglais que le français. Est-ce que vous ne croyez pas que l'Alliance française, pendant ses années d'existence aux Seychelles, n'a pas fait autant qu'elle aurait pu pour promouvoir la Francophonie, de sorte que nous ayons tous cet avantage linguistique et culturel tourné vers la France ?
R - Je crois d'abord que pour que la pratique du français se développe, il faut que les Seychellois en aient envie. Il faut, comme on dit, qu'il y ait de l'appétit. Il faut que l'Alliance française, disposant maintenant d'un nouvel outil, puisse comme cela, plus fortement, offrir cette possibilité aux Seychellois d'apprendre et de parler français. Mais il faut aussi que ca serve un projet professionnel. On a envie de parler français si on montre aux jeunes que le fait de parler français leur permet d'accueillir mieux les touristes français par exemple. Mais les jeunes auront envie de parler français si on leur montre que le fait de parler français, c'est un dialogue plus serré avec leurs voisins, de Madagascar, mais aussi des pays de l'Afrique continentale. C'est surtout un passeport de plus pour dialoguer, pour vivre avec le monde, ca c'est important. Quand nous préconisons le français, ce n'est pas pour nous opposer ou reprocher à ceux qui ont appris l'anglais ou veulent le parler. Je le répète, c'est de la liberté en plus que de parler français. En plus !
Plus il y aura d'entreprises françaises aux Seychelles, plus il y aura de jeunes Seychellois à vouloir parler le français, sachant aussi que par le biais de ces entreprises françaises, c'est une autre ouverture, pourquoi pas, sur l'économie française et la France. C'est tout ça. Et puis il faut, pour que cet appétit du français se développe, qu'il y ait davantage de radio, de télévision française, c'est important aussi. Et parmi les questions que j'aurai eu l'occasion d'évoquer pendant ce voyage, il y a par exemple la relation TV5, il y a la question de Canal Satellite Réunion. Et dans les semaines qui viennent en tout cas, Georges Stoc, qui est le président de TV5, que je vais rencontrer dans les jours qui viennent, va très probablement venir, ou envoyer là encore une équipe capable de régler, j'espère définitivement, les dernières difficultés qui se sont jusqu'à présent opposées à une plus large diffusion de TV5 aux Seychelles. Je n'entre pas dans les considérations techniques: numérique, maintien. Retenons simplement une solution qui ne soit pas invalidée dans deux ans. Il faut qu'une solution d'avenir soit mise en place. Moi, j'y attache beaucoup d'importance. Et comme nous sommes en train de réformer TV5, de la restructurer, de la consolider, j'espère bien que les Seychelles pourront en profiter.
Q - Monsieur le Ministre, si vous le permettez, une question sur la prochaine session de la COI. Vous êtes en route pour cette session ministérielle. Est-ce que vous ne pensez pas que la COI est menacée de marginalisation, compte tenu des nouveaux accords qui ont été signés au Bénin en matière d'ensembles régionaux ? Est-ce que vous pensez que la COI va garder ce format ?
R - Une intégration régionale, ça sert la paix, ça sert le développement, ça créé un marché plus important, ça sécurise les investisseurs, c'est tout cela. Et la France avait fait de l'intégration régionale, en effet, un des axes des nouveaux accords de Lomé, et c'est fait. La COI répond, je crois, à d'autres préoccupations. Tout d'abord, un dialogue politique entre voisins qui paraît très important. Une capacité à faire vivre une solidarité beaucoup plus forte là aussi et, pour les mêmes raisons, jouer un peu des complémentarités, prendre en charge les problèmes communs. Les questions de sécurité maritime par exemple, dont je parlais, voilà bien un sujet qui est commun à tous les pays de la zone. Cela me parait tout à fait important qu'ils puissent en parler, qu'ils mettent justement leurs moyens en commun, pour assurer mieux cette sécurité. Les questions d'environnement, que j'évoquais, sont bien des questions aussi qui se posent à tous les pays de l'Océan indien. Donc c'est un lieu de dialogue, de solidarité et la France est heureuse, du fait de la présence de l'Ile de la Réunion, d'être acteur de cette Conférence de l'Océan indien. Mais cela ne veut pas dire que les pays de l'Océan indien n'ont pas évidemment à regarder aussi du côté de la SADC, pour les uns puisque la question est posée, pour d'autre c'est presque le COMESA, puisqu'il peut être un interlocuteur. Mais ce n'est pas et je le répète là encore, uniquement pour rester entre soi que les pays de l'Océan Indien doivent se retrouver. C'est aussi pour parler des autres. Mais ils ont incontestablement des préoccupations communes. Il y a un ou deux dossiers qui concernent les Seychelles que nous allons essayer de traiter directement avec les représentants de l'Union européenne dès demain. Ceci pour répondre à la question : "est-ce que vous êtres prêts à nous aider dans nos relations avec l'Europe ?" Oui, la preuve.
Q - Une des questions qui sera abordée au cours de cette session, c'est l'élection du nouveau Secrétaire général. La France a-t-elle pour le moins un candidat ?
R - Il y a un candidat, réunionnais, qui est candidat à la candidature. Et j'espère bien que cette candidature recueillera le consensus. J'ai de bonnes raisons d'être optimiste.
Q - Il semblerait que Maurice voudrait monnayer sa position, qui est une position favorable à l'Université française contre le siège de l'Océan Indien.
R - Je sais et je dirai à nos amis mauriciens que quand on monnaye, il faut monnayer des choses comparables et, en l'occurrence, la désignation d'un Secrétaire général pour 2 ans, 4 ans maximum, et le choix du siège d'une institution définitive, ça ne se compare pas. Je crois d'ailleurs que les Mauriciens, puisque ce Secrétariat général répond à une sorte de tour de table, tout naturellement, pourront présenter un candidat à ce poste de Secrétaire général, prochainement. Nous pensons que la Réunion a quelques raisons de souhaiter être le siège de cette université, qu'elle a les moyens. Je crois que les Seychellois sont sensibles au fait que, en mettant le siège à La Réunion, c'est aussi une garantie de relations plus étroites avec l'Europe, ce qui n'est pas rien, mais aussi avec le réseau universitaire des pays industrialisés, ce qui est important aussi. Tout ça me convainc que demain, je devrai réussir à rassembler, là encore je répète, l'ensemble des membres de la COI sur la candidature de la Réunion.
Q - Monsieur le Ministre, si vous le permettez, j'ai une dernière question sur les Comores. Il semblerait que les parties en conflit, si je puis m'exprimer ainsi, ont signé un nouvel accord. Je voulais, au préalable, savoir quelle a été la lecture du Ministre de la Coopération.
R - Je suis l'évolution de la situation aux Comores depuis très longtemps maintenant. J'ai rencontré la plupart des acteurs de ce conflit, y compris le colonel Azali en plusieurs circonstances, notamment à New York, lors de l'Assemblée du Millenium il y a quelques mois. J'ai vu à N'djamena le ministre des Affaires étrangères des Comores. J'espère le voir demain, puisque je crois qu'il est invité, et j'espère bien que c'est lui, cette fois, qui va représenter les Comores. Ce qui montre bien qu'il y a des progrès dans la relation entre l'OUA, en particulier, et les Comores. En tout cas, un accord a été signé le 17 février, qui est en quelque sorte un point d'équilibre entre l'accord de Tananarive et l'accord de Fomboni. C'est d'ailleurs exactement ce que nous avions souhaité. Moi, j'avais eu l'occasion de rencontrer, à New York justement, ma collègue, ministre des Affaires étrangères sud-africaine, la ministre malgache, le ministre mauricien et les Seychellois qui étaient également concernés. Et nous avions fait une bonne réunion en présence d'ailleurs de M. Ahmed Salim, Secrétaire général de l'OUA, et les encouragements que nous avions donnés à un processus justement qui trouve l'équilibre entre le besoin de préserver l'unité et l'intégrité des Comores et de permettre une large autonomie de gestion, notamment économique et sociale, à ses différentes composantes. C'est cet espoir qui me semble être en train de se réaliser, et la France porte un jugement positif sur l'organisation entre l'ensemble comorien et les trois Iles qui vont se voir reconnaître une plus large autonomie.
Je pense que ceci devrait dans les semaines qui viennent nous permettre de développer plus largement notre coopération avec les Comores, une coopération qui n'a jamais été totalement suspendue mais qui avait été un peu réduite à la société civile. Et là, nous pourrions avoir une coopération d'Etat, dès lors que le processus prévoit de nouvelles élections afin que le pouvoir, que les autorités politiques comoriennes procèdent du scrutin universel. C'est la règle à laquelle nous sommes attachés et je crois que c'est bien parti. Enfin j'espère que tous les acteurs comoriens comprendront qu'il faut saisir cette chance pour apaiser une situation qui a, jusqu'à présent, provoqué beaucoup de violences mais qui, surtout, a fait perdre du temps aux Comores sur la voie du développement. Et ce pays a besoin de se développer et l'accord qui vient d'être signé, s'il se met en oeuvre, peut y contribuer.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 février 2001)