Déclaration de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement, sur la politique de modernisation de la gestion de l'immobilier public et sur le lancement de projets tels que la reconstruction du village de la Faisanderie, près de Meaux (Seine-et-Marne), Fontainebleau le 12 janvier 2007.

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Circonstance : Visite du village de la Faisanderie, Fontainebleau le 12 janvier 2007

Texte intégral

1. Tout d'abord, je veux remercier la ville et l'office public d'aménagement et de construction de Fontainebleau de leur invitation amicale, près de Meaux, dans ce département de Seine-et-Marne qui me tient particulièrement à coeur.
Ce matin, j'ai pu me rendre compte sur place du projet de restructuration du Village de la Faisanderie. Je vous félicite, car il est exemplaire à trois égards :
- en matière de logement, il prévoit la réhabilitation et la mobilisation de 226 appartements sociaux sur une surface de 18 000 m². De plus, vous comptez favoriser l'accession à la propriété, sur un espace de 2 645 m² ;
- c'est un projet d'urbanisme majeur pour la qualité de l'entrée de ville de l'agglomération et des circulations entre l'espace urbanisé et la forêt ;
- enfin, afin de développer une vie de quartier et de renforcer le lien avec le reste de la ville, vous prévoyez d'installer des commerces et des espaces publics de proximité, par exemple une crèche ou des locaux associatifs.
2. Cette opération est emblématique, car elle constitue à la traduction concrète de la politique de modernisation de la gestion de l'immobilier public conduite depuis deux ans par le gouvernement. Elle montre que cet effort de mobilisation et de valorisation sans précédent du patrimoine de l'État a porté ses fruits en permettant aux collectivités dynamiques de concrétiser leurs projets :
- la modernisation de l'immobilier public est un chantier pilote : dès que le budget et la réforme de l'État ont été rapprochés au sein du même ministère, à l'été 2005, j'ai décidé de saisir ce nouveau contexte pour accélérer et renforcer la cohérence de cette politique avec un plan d'action opérationnel. Depuis lors, cette démarche a été systématisée partout dans l'État avec 127 audits couvrant plus de 120 milliards d'euros de crédits ;
- cette dynamique repose sur un principe simple, que votre projet du Village de la Faisanderie traduit pleinement. Chacun doit trouver son compte aux actions conduites : les usagers, avec un meilleur service public ; les contribuables, avec un usage optimal des deniers publics et des économies affectées au nécessaire désendettement de l'État ; les agents publics enfin qu'il faut mieux soutenir dans leur action de terrain.
3. Je voudrais profiter de l'occasion pour présenter, aux acteurs de terrain que vous êtes, les actions que je conduis afin de moderniser l'immobilier public :
1. d'abord, je voudrais faire le point d'étape sur la modernisation de l'immobilier public. Sans les progrès de l'État depuis deux ans, la vente du Village de la Faisanderie resterait sans doute encore en discussion !
2. ensuite, je voudrais vous présenter brièvement la stratégie que l'État a engagée pour aller plus loin, et engager dans la durée la modernisation de l'ensemble de son parc immobilier y compris des services déconcentrés.
I. Les 226 logements sociaux et les projets d'aménagement du Village de la Faisanderie ont été permis par le nouveau contexte de l'immobilier public
1. Regardons d'abord quatre ans en arrière. Le gouvernement était parti d'une situation d'immobilisme. Contrairement aux entreprises, aux administrations des pays étrangers, l'État n'avait pas commencé à moderniser son parc immobilier.
Trois constats factuels suffisent à résumer la situation de retard de l'époque :
1. peu de ventes, au plus une centaine de millions d'euros certaines années ;
2. pas de connaissance du parc. Certains immeubles n'étaient pas recensés !
3. personne pour prendre les responsabilités et défendre les intérêts de propriétaire de l'État. Des biens gérés au bon vouloir des administrations.
Dès 2003, le gouvernement a commencé à rattraper le retard. Deux initiatives :
- 1re initiative : à partir de 2003, le gouvernement décide de réduire la dépense immobilière, et se fixe donc des objectifs annuels de cession. Dans cette optique, le régime juridique des bureaux de l'État a été banalisé et la mission interministérielle de valorisation du patrimoine immobilier (MIVPIE) était chargée de professionnaliser la gestion du parc de l'État ;
- 2nde initiative : pour préparer le bilan de l'État, prévu par la LOLF, son patrimoine immobilier a été recensé. Il vaut près de 38 milliards d'euros.
Malgré la montée en puissance, avec 170 millions d'euros de recettes en 2004, le rythme de cessions de l'État fixé par le gouvernement n'était pas été atteint. Et les critiques du Parlement et de l'opinion n'ont pas cessé sur la gestion du parc.
2. À l'été 2005, les conditions étaient réunies pour accélérer le mouvement.
Le rapport de Georges TRON, député de l'Essonne, sur l'immobilier de l'État présenté le 6 juillet 2005 à la mission d'évaluation et de contrôle a pointé une série de dysfonctionnements majeurs et proposé un plan d'action opérationnel.
Le gouvernement ne pouvait pas en rester là ! En tant que ministre chargé du budget et de la réforme de l'État, j'ai décidé de prendre le pilotage du dispositif, et engagé une politique de modernisation accélérée, ciblée sur deux priorités :
1re priorité : passer à la vitesse supérieure sur les cessions, qui est le moteur de la modernisation et la condition de notre crédibilité. La cession du Village de la Faisanderie illustre concrètement cet effort sans précédent de mobilisation :
- les résultats sont là : après une année 2005 où l'État a tenu pour la première fois ses engagements avec 630 millions d'euros de recettes principalement à travers des opérations à Paris, l'objectif de 480 millions d'euros fixé par le Parlement pour 2006 vient d'être largement dépassé avec 800 millions d'euros de ventes réalisées par les services de France Domaine sur l'ensemble du territoire. Le Village de la Faisanderie a contribué pour 14,5 millions d'euros à ce montant total ;
- le mouvement est lancé : l'État peut désormais moderniser son parc immobilier sur la durée avec un rythme régulier de ventes et acquisitions. Le gouvernement a vendu 500 millions d'euros d'immeubles par an en moyenne de 2004 à 2006, répondant à l'objectif fixé au départ par Jean-Pierre RAFFARIN, Premier ministre. J'ai décidé de continuer, en prévoyant 500 millions d'euros de cessions au sein du budget pour 2007.
2nde priorité : donner aux collectivités publiques et à l'État les instruments opérationnels d'une gestion plus performante de leur patrimoine immobilier :
- 1er élément : un cadre juridique rénové avec le code général de la propriété des personnes publiques. Ce texte attendu depuis des années est entré en vigueur le 1er juillet 2006. L'intérêt est double : assister les gestionnaires d'immobilier public, au sein de l'État et des collectivités, en simplifiant et en mettant en cohérence toutes les règles et en les regroupant dans un document opérationnel unique ; lever une série de verrous, en particulier en limitant les contraintes de protection du domaine public aux cas où elles sont strictement nécessaire pour l'intérêt général ;
- 2e élément : France Domaine. En m'appuyant sur l'ancienne administration domaniale, que j'ai modernisée, j'ai mis en place au 1er janvier 2007 ce nouveau service, qui devient l'opérateur de l'immobilier public sur tout le territoire. J'ai décidé de le rattacher à la direction générale de la comptabilité publique, pour bénéficier du partenariat fécond qu'elle développe avec les élus locaux et de son positionnement interministériel. Afin de remplir ses missions de gestion active et de valorisation, il recourt aux méthodes les plus modernes, et s'appuie sur des conseils et des experts externes. C'est un véritable changement de siècle !
- 3e élément du nouveau cadre : un dispositif d'intéressement pour motiver les administrations de l'État qui optimisent les locaux qu'elles occupent, à travers le compte d'affectation spéciale de la gestion immobilière de l'État, créé en loi de finances pour 2006. En recette, il retrace les opérations de cessions. En dépenses, il prévoit que 15 % au moins des produits sont affectés au désendettement. Les ministères peuvent utiliser le reste afin de moderniser leur parc d'immeubles.
3. Cette politique de gestion active et de valorisation contribue directement à la politique de développement de l'offre de logement du gouvernement en offrant aux collectivités publiques et aux opérateurs des opportunités qu'ils attendaient, parfois depuis des années, pour mettre en oeuvre des projets d'intérêt général. Votre programme du Village de la Faisanderie en est une illustration parfaite.
Autre exemple emblématique : le ministère des Finances a cédé l'an dernier l'immeuble situé 69 et 71 boulevard Péreire (Paris, XVIIe), qui était abandonné depuis des années et occupé à titre précaire par Emmaüs malgré les risques d'accident. Cette vente permet désormais de créer 207 places d'hébergement d'urgence conformes aux normes ainsi que 47 logements sociaux familiaux.
Dans cette optique, le gouvernement a pris trois types de mesures concrètes :
- afin de coopérer dans les meilleures conditions avec les collectivités locales, le gouvernement a simplifié et étendu en 2006 le droit de priorité, procédure qui permet aux communes d'acheter pour les besoins d'un projet d'intérêt général les immeubles mis en vente par l'État ou ses opérateurs, à la valeur vénale estimée et avant toute mise en concurrence. C'est dans ce cadre par exemple que la Ville de Paris a acquis en 2005 les immeubles de la Justice, 35 rue Sedaine (XIe), et de la Douane, 8 à 12 rue de la Tour des Dames (IXe), afin d'y construire des logements sociaux ;
- des mesures ciblées ont été prises afin de faciliter la mobilisation du foncier public pour la construction de logements sociaux. Exemple : dans ce cas, l'État peut accorder une décote pouvant aller jusqu'à 35 % de la valeur de marché de l'immeuble cédé dans les zones les plus tendues ;
- les patrimoines immobiliers des opérateurs sont aussi mobilisés. Le gouvernement a mis en place en 2006 la société de valorisation foncière et immobilière pour accélérer les cessions des actifs non ferroviaires de Réseau ferré de France. Dès la première année, elle a réalisé plus de 350 millions d'euros de plus-values contre une centaine en moyenne les années précédentes. Les emprises cédées ont un potentiel de 2 800 logements, dont 2 000 en Île-de-France. Ce dispositif sera appliqué à d'autres biens de l'État et de ses établissements publics, selon les besoins.
II. En 2007, nous franchissons une étape nouvelle. L'État s'engage dans une stratégie de propriétaire sur son parc immobilier, y compris déconcentré
1. C'est le Président de la République qui a donné l'impulsion décisive, en décidant le 6 janvier 2006 à Metz (Moselle), lors de ses voeux aux corps constitués, de donner à France Domaine la fonction d'un vrai propriétaire. Ce service devient l'interlocuteur unique en matière d'immobilier de l'État.
2. J'ai conduit en 2006 un plan d'action concret pour mettre en oeuvre cette décision fondatrice. Le cas du Village de la Faisanderie comme bien d'autres sur tout le territoire montre la nécessité d'engager trois changements majeurs.
1er changement : les ministères paient désormais des loyers réels pour les biens de l'État qu'ils occupent, ce qui permet de les responsabiliser et de les inciter à optimiser leurs locaux. Après une expérimentation positive conduite sur un parc de 17 immeubles en 2006, j'ai étendu ce régime par la loi de finances pour 2007 à l'ensemble des administrations centrales, qui représentent 257 implantations et près de la moitié des bureaux de l'État en valeur (5,6 sur 12,3 milliards d'euros). Ce dispositif évoluera sur deux points essentiels en 2008 :
- 1ère évolution : le mécanisme des loyers sera mis en place dès 2007 sur une première fraction des implantations déconcentrées de l'État, incluant la région Île-de-France puis sera étendu ensuite par étapes ;
- 2nde évolution : les loyers, déjà rapprochés de ceux du privé en 2007, seront désormais déterminés sur une base réelle selon le marché local. Une simulation est en cours pour évaluer l'impact de ce mode de calcul.
2nd changement : l'occupation des immeubles de l'État sera désormais inscrite dans le cadre d'un contrat analogue à un bail privé, d'une durée limitée à neuf ans, précisant les droits et obligations du ministère occupant d'une part et de France Domaine de l'autre. C'est la fin de l'ancien système de l'affectation ministérielle, dans lequel les administrations obtenaient définitivement tous les pouvoirs du propriétaire sans être responsabilisées sur leur gestion patrimoniale. Les conventions seront déployées à partir de cette année, sur une période totale de trois à cinq ans, et en fonction de la mise en oeuvre progressive des loyers.
3e changement : l'État doit prendre ses responsabilités de propriétaire en matière d'entretien. À partir de l'audit de modernisation que j'ai lancé, qui a été publié le 17 octobre 2006, j'ai engagé deux chantiers : des expérimentations viseront dès 2007 à définir les meilleurs dispositifs opérationnels, portant sur la mise en commun des moyens de l'État au niveau régional, ou le recours à des prestataires de service comme c'est déjà le cas pour les prisons ; la préparation d'un dispositif budgétaire de pilotage des dépenses d'entretien de l'État et de chaque ministère qui pourra figurer dans le projet de loi de finances pour 2008.
3. Dans ce contexte rénové, le gouvernement a fixé les lignes directrices d'une stratégie immobilière, en lien avec le conseil de l'immobilier de l'État, que j'ai mis en place pour bénéficier des avis des meilleurs experts et professionnels du public et du privé. Il s'agit d'évoluer sur tout le territoire vers un parc moins coûteux en termes de localisation et d'entretien, des sites accessibles et aménagés permettant d'améliorer le service public, un cadre de travail adapté pour les fonctionnaires. Sa déclinaison opérationnelle comprend trois niveaux :
- 1er niveau : un cadre, élaboré par France Domaine et qui s'impose sur tout le territoire, avec des critères tirés des bonnes pratiques du privé ;
- 2e niveau : les schémas pluriannuels de stratégie ministériels. Sur les administrations centrales, les documents finalisés en 2006 par les ministères servent de support opératoire pour programmer des opérations de modernisation. Ce chantier de programmation stratégique des implantations sera étendu dès l'an prochain à une première fraction des services déconcentrés dont les départements d'Île-de-France font partie ;
- 3e niveau : le préfet a pour mission de piloter et de mettre en oeuvre la stratégie immobilière de l'État au niveau territorial, avec une exigence de dynamisme et de cohérence. Il a autorité sur France Domaine à cet effet.
Sur ces bases, il est essentiel que l'État poursuive la modernisation de son parc immobilier, et le gère de manière performante dans la durée. L'opération que vous avez conduite au Village de la Faisanderie, une des plus importantes cessions opérées par l'État en province, est exemplaire, car elle démontre que :
- la modernisation de l'immobilier de l'État est entrée dans la phase opérationnelle. Ce n'est pas un phénomène de mode parisien éphémère ;
- les cessions de l'État vont dans le sens de l'intérêt général en offrant aux opérateurs et aux collectivités des opportunités pour lancer leurs projets.