Déclaration de M. Xavier Bertand, ministre de la santé et des solidarités, sur l'interdiction de fumer dans les hôpitaux à compter du 1er février 2007 et la création de 500 consultations en tabacologie dans les hôpitaux, Paris le 19 janvier 2007.

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Circonstance : 12èmes Rencontres du réseau "Hôpital sans tabac" à Paris le 19 janvier 2007

Texte intégral

Madame le Président, chère Anne (Borgne),
Mesdames, Messieurs,
Dans 12 jours, l'interdiction de fumer dans les lieux publics sera effective pour les entreprises, les hôpitaux, les établissements scolaires et les administrations. Dans 12 jours, votre réseau qui a été à l'avant-garde sera rejoint par l'ensemble des établissements de santé. Dans 12 jours, vous aurez plus que jamais à accompagner les fumeurs qui désirent arrêter. C'est dire si je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour évoquer cette interdiction, l'accompagnement que nous voulons offrir aux fumeurs, et, au-delà, le rôle majeur de l'hôpital comme lieu de promotion de la santé.
I/ Le tabagisme passif est une réalité dont vous dénoncez les conséquences depuis longtemps. Il était normal que nous prenions la seule décision possible aujourd'hui en termes de santé publique : l'interdiction de fumer dans les lieux publics.
Vous le savez tous, les preuves scientifiques des méfaits du tabagisme passif, qu'on estime en France à 5000 à 6000 décès par an, sont bien là. Nous avons d'ailleurs anticipé les recommandations de l'OMS, qui demande cette année aux responsables politiques d'en tenir compte et donc de mettre en oeuvre le plus rapidement possible l'interdiction de fumer dans les lieux publics. La France a su relever le défi que représente la lutte contre le tabagisme ; nous avons ainsi rejoint les pays européens toujours plus nombreux qui ont choisi de mettre en avant les impératifs de santé publique.
Aujourd'hui, l'interdiction est prête ; les dernières circulaires sont parues : aujourd'hui, celle que vous attendez plus particulièrement sur les hôpitaux a été publiée au Journal Officiel. La formation nationale des différents corps de contrôle est elle aussi achevée, en insistant bien évidemment sur la pédagogie. Et les esprits ont été sensibilisés par les différentes campagnes de communication que nous avons lancées - la campagne accompagnant l'interdiction commencera d'ailleurs le 23.
Surtout, ce qui est prêt, c'est l'accompagnement, car nous avons souhaité une mesure de prévention et d'aide à l'arrêt au-delà du mouvement naturel que provoque l'interdiction. A partir du 1er février sera mise en place un accompagnement financier de 50 euros par patient et par an pour le traitement de substitution nicotinique, sur le même modèle que l'opération « ce mois-ci j'arrête » organisée par le réseau Hôpital sans tabac. Cette opération, qui a connu un grand succès, finançait le premier mois de l'arrêt, laissant à la charge du patient les mois suivants. Notre objectif avec cet accompagnement, c'est de doubler le nombre d'arrêts chez les fumeurs en un an.
II/ Pour cela, nous ne misons pas que sur la prise en charge d'une partie du traitement de substitution nicotinique, nous avons voulu également mobiliser l'ensemble des professionnels de santé.
Ces douzièmes rencontres du Réseau Hôpital sans tabac représentent une occasion unique de mobiliser les professionnels de santé autour de l'accompagnement de l'interdiction. Je veux d'ailleurs saluer le succès de cette journée qui, avec près de 1000 inscrits, témoigne de la mobilisation de l'ensemble des professionnels autant que de la nécessité de communiquer sur l'interdiction.
Les professionnels de santé ont bien sûr un devoir d'exemplarité ; c'est ce que vous, les 810 établissements français qui adhèrent au réseau hôpital sans tabac, avez bien compris.
Cependant, même si votre réseau regroupe déjà près d'un tiers des établissements de santé, nous pouvons encore l'améliorer. La France, à l'origine de ce mouvement qui concerne désormais 12 000 établissements en Europe dans 21 pays, se doit de montrer l'exemple en la matière.
Tous vos établissements se sont engagés sur les 10 points de la charte Hôpital sans tabac, qui prévoit de tout mettre en oeuvre pour réduire le tabagisme chez les patients comme chez les soignants. Cette charte a été longtemps exemplaire, en avance ; elle doit le rester. C'est pourquoi aujourd'hui, je vous propose, si vous le voulez bien, de l'améliorer encore sur un point, le 5e, celui qui concerne l'aménagement des espaces fumeurs : il ne me paraît plus d'actualité. Je propose de le remplacer par « Faire accepter et respecter partout la réglementation, dans un esprit de prévention »... c'est d'ailleurs tout à fait l'esprit de votre point 10 « convaincre d'abord, contraindre si besoin, et être persévérant ». C'est là l'esprit de cette interdiction qui se veut avant tout une mesure de prévention, d'évolution des comportements plus que de coercition.
Je souhaite ainsi que les professionnels de santé jouent pleinement leur rôle d'éducateur pour la santé. Il y a une véritable attente de la part de nos concitoyens, qui voient ceux qui les soignent comme des « référents » pour toutes ces questions, tels que celle du tabagisme. En milieu hospitalier, votre action éducative peut aussi bien concerner vos collègues que les patients. En effet, pour ces derniers, le temps de l'hospitalisation est un temps privilégié pour la prévention : l'hôpital a véritablement un rôle dans la promotion de la santé au quotidien. Les patients ont également l'occasion tout au long de leur séjour hospitalier de débuter gratuitement un sevrage ; les hôpitaux mettent en effet gracieusement à leur disposition des traitements de substitution nicotinique lorsque cela est nécessaire.
Enfin, vous le savez bien, le nombre de consultations de tabacologie à l'hôpital va être doublé pour accompagner la demande de sevrage liée à l'interdiction. En 2006, ces consultations étaient au nombre de 500 ; je souhaite en créer 500 nouvelles en 2007, 250 individuelles et 250 collectives. Je veux d'ailleurs saluer le travail du réseau sur l'état des lieux des consultations de tabacologie, qui nous a permis de mieux connaître l'existant et va permettre de mieux cibler les besoins. Par la circulaire publiée aujourd'hui au Journal Officiel, nous demandons aux établissements d'instruire les projets, avec leurs besoins en personnels et de les envoyer aux ARH. Je sais qu'un certain nombre d'établissements, notamment de votre réseau, ont déjà anticipé cette demande. Cela permettra de débloquer rapidement les crédits délégués aux ARH pour la création de ces nouvelles consultations, dont le coût de fonctionnement sera de 25 millions d'euros en année pleine.
Les moyens que nous consacrons à ces consultations nous permettront également d'élargir leurs plages horaires ainsi que de réduire les délais d'attente. Ceux-ci sont actuellement de 20 jours ; notre objectif est de parvenir à un délai d'une semaine cette année. Je crois que cet objectif est réalisable puisque plus d'un tiers des consultations ont déjà un délai d'attente compris entre une et deux semaines. Pour cela, nous pourrons rémunérer les médecins libéraux qui acceptent de passer plus de temps à l'hôpital, réaffecter des praticiens hospitaliers, et embaucher de nouveaux personnels. Les formations spécifiques en addictologie, la création de la spécialité prévues dans le Plan de prévention et de prise en charge des addictions 2007-2001 permettront de bénéficier de professionnels en nombre suffisant.
Ces consultations seront rattachées aux unités d'addictologie mises en place dans le cadre du Plan de prise en charge et de prévention des addictions 2007-2011. Vous disposerez ainsi d'un outil cohérent et efficace pour prévenir et soigner les comportements addictifs, qui associent souvent différentes dépendances.
La prévention doit entrer à l'hôpital ; je suis sûr que vous êtes, comme moi, convaincus qu'elle y a toute sa place. Sur le tabac, le rôle de l'hôpital comme promoteur de santé est évident, vous en apportez la preuve depuis plus de dix ans. Dans 12 jours, l'interdiction de fumer sera effective ; à nous de mettre tout en oeuvre pour répondre aux demandes de ceux qui souhaiteront s'arrêter. Je suis heureux de vous avoir rejoins dans ce combat.Source http://www.sante.gouv.fr, le 23 janvier 2007