Entretien de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, avec France 3 le 14 février 2007 à Cannes, sur l'objectif du sommet Afrique-France et les relations sino-africaines.

Prononcé le

Média : France 3

Texte intégral

Q - (A propos des raisons de la tenue du sommet Afrique-France)
R - D'abord, il faut savoir aujourd'hui que l'Afrique est une priorité pour la France, mais aussi pour beaucoup d'autres pays. Pourquoi ? Parce que les risques, mais aussi les grands enjeux du monde sont en Afrique. C'est la nouvelle frontière du XXIe siècle ; si d'ailleurs vous prenez la croissance économique, on ne dit pas assez qu'en Afrique, aujourd'hui, on enregistre 5 % de croissance par an depuis 10 ans, c'est-à-dire trois fois plus que dans l'Union européenne. C'est pour cela que l'Inde, la Chine, le Brésil, l'Iran, les Etats-Unis, qui viennent de décider de mettre en place un commandement militaire pour l'Afrique, s'intéressent beaucoup à ce continent.
Et puis, il y a bien sûr l'enjeu sanitaire : vous savez que 90 % des maladies infectieuses touchent malheureusement les pays du Sud les plus pauvres ; et enfin, il y a l'enjeu environnemental parce que les grandes forêts primaires sont en Afrique, un des deux grands poumons de la planète est en Afrique, plus précisément en Afrique centrale.
Q - (A propos des relations entre la France et l'Afrique)
R - Le président Jacques Chirac connaît parfaitement l'Afrique, il a la passion de l'Afrique ; j'ai été personnellement choqué d'entendre Mme Royal dire récemment que le président de la République connaît personnellement un certain nombre de chefs d'Etat ; oui, il connaît personnellement nombre de chefs d'Etat africains, et c'est une chance pour notre pays parce qu'aujourd'hui tous les chefs d'Etat des très grands pays du monde se déplacent en Afrique.
C'est un partenariat, pour répondre à votre question, une main tendue. Il ne faut pas aujourd'hui que ce soit le Nord qui donne au Sud, mais que le Nord et le Sud travaillent ensemble. Prenez par exemple UNITAID, cette nouvelle agence que nous sommes en train de monter, sur une idée du président Chirac et du président Lula, et qui vise à acheter des médicaments dans le monde entier à des prix beaucoup plus bas, parce que nous sommes capables, avec un euro par billet d'avion, de payer des médicaments contre le paludisme - un enfant meurt de paludisme toutes les 30 secondes en Afrique - mais aussi contre le sida et la tuberculose.
Q - (A propos des relations entre la Chine et l'Afrique)
R - Il y a une compétition, en effet ; la Chine, qui ne s'intéressait pas beaucoup à l'Afrique, s'y intéresse maintenant. C'est la raison pour laquelle il est très important d'avoir un sommet comme celui-ci, avec autant de chefs d'Etat et de gouvernement qui, en venant en France - comme ils sont d'ailleurs allés en Chine il y a deux mois, vous avez raison de le noter - saluent l'amitié franco-africaine et disent aussi tout le respect qu'ils ont vis-à-vis du président de la République, comme nous avons du respect vis-à-vis d'eux. C'est vrai, vous avez raison, la compétition est rude.
Q - (A propos des interventions de la France en Afrique)
R - Nous sommes en effet présents dans plusieurs pays d'Afrique francophone. Nous avons bien évidemment intérêt à les aider, d'abord en termes de démocratie, car plus la démocratie se développera en Afrique, plus les Droits de l'Homme y seront respectés, et plus la France, évidemment, sera heureuse. La France défend aussi les grands enjeux économiques. Il n'y a aucune raison que la France ne soit pas présente. Vous parliez du Tchad, vous parliez de la République centrafricaine, vous savez que le président Chirac a récemment demandé à l'ONU de déployer des casques bleus à la frontière entre le Soudan et le Tchad et à la frontière entre le Soudan et la République centrafricaine. Cela aussi, c'est la France, c'est faire respecter la paix en Afrique, parce que les conflits entraînent la pauvreté.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 février 2007