Interview de M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, à LCI le 30 janvier 2007, sur le chômage, notamment celui des jeunes et les chômeurs de longue durée.

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Média : La Chaîne Info

Texte intégral


Q- Nouveaux chiffres du chômage ce soir, y aura-t-il une nouvelle baisse enregistrée sur décembre 2006 ?
R- Laissons les chiffres être sortis par la DARES ce soir. Ce qui importe c'est que, depuis février 2005, le chômage baisse et il baisse de manière régulière et il baisse dans toutes les catégories de demandeurs d'emplois, ce qui compte, c'est la tendance.
Q- Donnez-nous une tendance pour le mois de décembre, vous êtes plutôt optimiste pour le chiffre qui va arriver ce soir ?
R- Attendons ce soir. La tendance depuis février 2005 est une tendance à la baisse et c'est ce qui compte aussi bien chez les jeunes que chez les chômeurs de longue durée et j'y vois un indice particulièrement sensible chez les chômeurs de longue durée, ceux qui ont le plus de difficultés à revenir vers l'emploi.
Q- Il y a eu des à-coups quand même, on eu des mois comme ça qui mystérieusement faisaient un palier ou une petite hausse ?
R- Pas mystérieusement, regardez l'à-coup de janvier notamment 2005 et l'à-coup de janvier 2006. Souvenez-vous, nous avons demandé en novembre et décembre 2005 à beaucoup de jeunes, après les difficultés qu'avaient rencontré les quartiers, de s'inscrire dans les ANPE au travers des Missions locales ; nous avons demandé aux Missions locales et à l'ANPE d'être attentifs à ces jeunes. Eh bien il y a eu de ombreuses inscriptions, et c'est heureux, de jeunes qui aujourd'hui sont dans des parcours de retour vers l'emploi ou qui ont retrouvé un emploi ou qui sont suivis par les Missions locales.
Q- Donc si le chiffre de décembre n'est pas formidablement bon, cela peut être aussi le signe qu'on ramène aussi les gens vers la recherche d'emploi ?
R- Sur le chiffre de décembre, il s'inscrit dans cette tendance générale, je n'en doute pas parce que moi j'ai de bons indices d'inscription en formation d'alternance, en contrat de professionnalisation. On aura fait sur l'année 2006, 140.000 contrats de professionnalisation ; 36 % de plus qu'en 2005. C'est le signe d'un investissement dans la formation donc dans l'emploi parce qu'il y a des vrais emplois qui se créent dans les entreprises.
Q- Est-ce que vous gardez l'espoir de passer en dessous des 2 millions de chômeurs pour la présidentielle, fin avril, début mai ?
R- En tous les cas, notre objectif, celui fixé par le président de la République le 14 juillet 2006, c'est tendance 8 % pour juillet de cette année, pour juillet 2007.
Q- On tient le cap ?
R- Vous savez, il y a des rendez-vous électoraux, mais le chômage c'est un vrai combat, c'est la bataille pour l'emploi, c'est le plan de cohésion sociale. Souvenons-nous simplement qu'il y a deux ans, nous mettions en place, avec J.-L. Borloo, le plan de cohésion sociale, deux ans après, on avait 10,2 % de chômage. Nous verrons ce soir où nous en sommes mais nous étions à 8,7 % pour le mois de novembre. Un apprentissage qui a grandi et puis des jeunes qui s'insèrent vers l'emploi.
Q- On vous sent optimiste pour ce soir ?
R- Je suis par nature optimiste parce que j'ai envie de me battre pour l'emploi.
Q- C'est parfois une bataille de chiffres aussi le chômage. L'INSEE publie normalement chaque mois de mars une statistique, un bilan que le Bureau International du Travail d'ailleurs prend en compte. Or le bilan 2006, qu'on devait connaître en mars 2007, est repoussé au mois de novembre. Il y a une manipulation derrière tout ça ?
R- Vous savez, quand les chiffres étaient à 10,2 %, j'évoquais les chiffres de début 2005 - personne ne contestait le thermomètre. Le thermomètre est le même, il a été fixé en 1995 sur des bases BIT 1982. L'INSEE, chacun connaît son indépendance, a fait savoir qu'elle n'avait pas les moyens aujourd'hui de recaler ses chiffres, qu'elle les déplaçait.
Q- D'autres chercheurs disent qu'on est à 9,2 % au lieu de 8,7 % ?
R- Ecoutez, l'INSEE est un organisme indépendant, ce que je peux vous dire c'est qu'avec le thermomètre 2005, le thermomètre 2006, vous aurez des chiffres du chômage. D'ailleurs dans toutes les catégories - vous savez, alors c'est un peu complexe, mais pour les téléspectateurs, il y a huit catégories - eh bien, il y a baisse dans toutes les catégories de novembre 2005 à novembre 2006.
Q- Pour en avoir le coeur net, acceptez-vous la proposition d'H. Emmanuelli : une audition à l'Assemblée nationale, voire une commission d'enquête parlementaire sur ces chiffres ?
R- M. Emmanuelli n'a pas changé ses chiffres quand le Gouvernement Jospin était aux affaires. Audition ? Je suis naturellement prêt, en ce qui me concerne, à rencontrer les parlementaires. D'ailleurs c'est la mission naturelle de contrôle des parlementaires. J'ai d'ailleurs déjà été interpellé par les parlementaires sur ce sujet.
Q- Et l'INSEE pourrait être aussi auditionnée ?
R- Le pouvoir du Parlement c'est un pouvoir de contrôle. Que le Parlement exerce ses pouvoirs !
Q- Le pouvoir des candidats à la présidentielle c'est de faire des propositions, N. Sarkozy ne veut pas généraliser le CNE à toutes les entreprises quelle que soit leur taille. Est-ce que c'est une reculade ? "Le CNE a créé 240 000 emplois", dit l'UMP.
R- Le CNE c'est aujourd'hui un contrat pour les entreprises de 20 salariés et moins et c'est un contrat qui marche. Plus de 800.000 contrats ont été signés, des emplois qui n'auraient pas été créés, ont été créés. Il convient aujourd'hui de faire le point sur le CNE et d'ailleurs la DARES, le mois prochain, au mois de février, dans deux semaines, donnera son deuxième point d'étape de l'observatoire sur le CNE. Et puis je rappelle que l'ordonnance a prévu un point, un bilan avec les partenaires sociaux sur le contrat "nouvelles embauches" qui est prévu, au plus tard, à la fin de l'année 2008, je dis bien "au plus tard". Donc cela peut être un sujet de dialogue avec les partenaires sociaux.
Q- Et cela pourrait marcher pour les entreprises de 100, de 1.000, de
2.000 salariés ?
R- Le contrat "nouvelles embauches" aujourd'hui est construit pour les entreprises de 20 salariés et moins.
Q- Le Medef prône la séparabilité, le divorce à l'amiable entre employeurs et employés, J.-L. Borloo nous disait sur LCI jeudi dernière : "Pourquoi pas, c'est une voie qu'il faut explorer".
R- C'est une voie qu'il faut explorer en utilisant le nouveau texte qui va être publié, j'allais dire promulgué, cette semaine sur la modernisation du dialogue social. C'est un sujet de partenaires sociaux. D'ores et déjà, les délibérations sociales initiés par le Medef se sont engagées, c'est un sujet de partenaires sociaux. Est-ce qu'on réfléchit à de nouvelles formes de contrat ? Quelle sécurisation apporte-t-on à ces contrats, car un contrat qui peut cesser par accord commun, en quelque sorte, en contrepartie, il faut aussi un certain nombre de sécurisations.
Q- Vous rencontrez demain les syndicats pour réformer la représentativité, sera-t-elle fondée sur les résultats aux élections, sur les listes périodiquement révisées ? Comment on va faire ?
R- D'abord, aucun gouvernement dans ce Gouvernement [sic] n'avait relevé cette question qui date de 1966 : quelle représentativité pour des syndicats, pour des organismes professionnels ? En décembre 2005, le Premier ministre a engagé les bases de ce débat au travers de deux rapports. Le Conseil économique et Social a donné son avis : élections sans doute, parce qu'en démocratie, même en démocratie sociale, c'est quelque chose d'essentiel. Mais aussi : organisation sous forme confédérée, c'est-à-dire qui regroupe l'ensemble des secteurs professionnels publics et privés. En même temps, peut-on imaginer un syndicalisme sans adhérents ? Voilà les débats qui sont sur la table, ces débats qui m'amènent à rencontrer les partenaires sociaux dans les deux semaines qui viennent et ensuite, sans aucun doute, à proposer au Premier ministre d'aller plus loin au travers de ce qu'on appelle une note d'orientation qui sera proposée aux partenaires sociaux.
Q- Le droit de grève dans les entreprises publiques, les administrations avec un vote au bout de huit jours de grève, cela peut être un des sujets de discussion sur les partenaires sociaux ?
R- C'est un sujet de discussion et c'est un sujet aussi sur la conception qu'on a du service public et de la continuité du service public. Là aussi c'est un sujet sur lequel il faut engager le dialogue. Regardez ! Un certain nombre d'entreprises ont, aujourd'hui, par décision et par accord entre les partenaires sociaux, cadré le droit de grève.
Q- Vous recevez tout à l'heure D. de Villepin dans votre ville de Rambouillet pour sa conférence de presse mensuelle. A quoi sert le Premier ministre aujourd'hui en pleine campagne ?
D'abord à assumer jour après jour le gouvernement de la France. Nous avons encore des sujets très importants au Parlement et pour le pôle de cohésion sociale, nous serons naturellement aux côtés de J.-L. Borloo sur la question du logement et notamment du droit opposable au logement. Et puis Parlement jusqu'au 22 février, en même temps, bataille pour l'emploi. Vous savez, cette bataille se livre tous les jours et ne connaît pas tout à fait les dates des rendez-vous électoraux, les rendez-vous électoraux qui sont essentiels en démocratie et auxquels je participerai pleinement.Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 31 janvier 2007