Déclaration de M. Jean-François Roubaud, président de la CGPME, sur la campagne pour l'élection présidentielle de 2007, Paris le 24 janvier 2007.

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Texte intégral


Monsieur le Ministre d'Etat,
Monsieur le Président, Monsieur le Candidat,
C'est pour moi un grand honneur d'accueillir le Ministre d'Etat et le Président de l'UMP, que nous connaissons bien, et le candidat à la Présidence de la République dont nous suivons attentivement, comme tous les Français, les déclarations.
Nous n'oublions pas non plus votre fidélité. Vous avez été présent à plusieurs reprises à Planète PME où vous nous avez d'ailleurs annoncé la réforme des 35 heures.
Vous connaissez bien le monde de l'entreprise et pas simplement celui de la grande entreprise. J'en veux pour preuve vos propos, je cite : « ce n'est pas la même chose de licencier lorsqu'on est pris à la gorge et de délocaliser pour faire monter le CAC 40 » ou plus récemment « l'entreprise et l'entrepreneur n'ont pas aujourd'hui la place qu'ils méritent dans le pays. Entreprendre c'est toujours prendre un risque ».
Nous ne pouvons qu'approuver, nous qui n'avons de cesse de répéter que le patronat réel est celui qui risque ses biens propres et assume tous les risques. Quant aux « patrons voyous » que vous dénoncez, soyons clairs, ils ne sont pas à la CGPME !
Notre Confédération réunit, elle, des entreprises patrimoniales où les relations humaines fondées sur la proximité entre le chef d'entreprise et les salariés font converger les intérêts réciproques autour d'un même projet, et ce aux antipodes de la seule logique financière.
Nous professons des valeurs d'effort, d'initiative et de partage.
Nous avons la conviction que les libertés sont facteurs de progrès à condition qu'elles s'accompagnent d'un cadre garantissant au chef d'entreprise, comme à ses salariés, que la responsabilité individuelle, le mérite et le travail peuvent être facteurs de succès au travers d'une saine concurrence.
C'est ce que nous avons coutume d'appeler le « libéralisme tempéré »
Cela nécessite de rétablir un équilibre entre les acteurs économiques en protégeant certains, je pense par exemple au commerce de proximité, contre les excès d'autres. Peut-on se satisfaire de la dépendance économique extrême de certains sous-traitants industriels ou laisser des prestataires de services sans défense face à des entreprises dites solidaires à qui on n'applique pas les mêmes
règles ?
Tempérer le libéralisme ne veut pas dire saper les fondements mêmes de la liberté. Remettre en cause le droit de propriété est pour nous inacceptable. Je vous avoue donc, pardonnez moi ma franchise, une certaine perplexité face au nouveau concept de droit opposable au logement.
Alors bien sûr, et nous en sommes conscients, l'entreprise fait partie de cette mosaïque qui constitue le corps social. Mais, nous en sommes convaincus, elle est un maillon essentiel de la chaîne.
Sa vision de la place de l'entreprise et du rôle de l'Etat dans l'économie française est donc une des grandes questions que l'on peut raisonnablement poser à un candidat à la magistrature suprême.
De même, le travail et la réussite semblent aujourd'hui suspects. Il est partout question de la répartition et de la redistribution des richesses mais personne, jamais, n'évoque la nécessité de produire ces mêmes richesses pour en disposer. La société française est pourtant à un tournant. Fera-t-elle le choix, et je n'hésite pas à prononcer le mot, du collectivisme en continuant à privilégier le principe de précaution plutôt que l'innovation, l'assistanat plutôt que l'initiative individuelle, les avantages acquis de quelques uns plutôt que la croissance et l'emploi pour tous ?
Sur ces questions aussi, les PME attendent des réponses.
Si la société française change, nous avons parfois le sentiment que cette évolution ne prend pas réellement en cause les bouleversements mondiaux, aussi bien sur les plans techniques et technologiques, que des moyens de communication et d'échanges. Le travail de demain, c'est une certitude, sera organisé différemment de celui d'aujourd'hui.
Dès lors, il est impératif, alors même que la mondialisation s'accélère, de poser clairement la question du temps et du coût du travail et celle du financement de la protection sociale. Continuer à confisquer ainsi la création de richesses, c'est tout à la fois freiner le pouvoir d'achat de nos concitoyens et handicaper lourdement la compétitivité de la France.
Enfin, le Président de la République devra fixer le cap en matière de finances publiques. Il est pour nous, chefs d'entreprises, choquant de voir chaque année le budget initial de la France présenté en déficit (même si le budget 2006 a permis d'infléchir cette tendance) contribuant d'année en année, à creuser une dette publique qui dépasse aujourd'hui les 1100 milliards d'euros. L'avenir de nos enfants est en jeu. Alors je vous pose clairement la question : quelles sont vos intentions en la matière ?
Pour conclure mon propos, je voudrais vous remercier d'avoir été aussi rapide à répondre à notre invitation.
La CGPME a fait le choix de se faire l'écho des interrogations des PME pour que chacun puisse se prononcer, selon ses convictions, mais en toute connaissance de cause.
Mais pour cela encore faut-il que les candidats acceptent le dialogue. Ce n'est pas le cas pour l'instant.
Je ne veux pas croire que le débat participatif soit pour tous les Français...sauf pour les patrons de TPE et PME.
Dans l'hypothèse où cette situation perdurerait, j'inviterais alors le Premier Secrétaire du Parti Socialiste à nous présenter son projet.
En effet, du pouvoir d'achat au dialogue social, de la formation des jeunes à l'emploi, de la fiscalité à la protection sociale, du travail manuel à l'innovation, de l'environnement à l'Europe, quels que soient les sujets, les petites entreprises sont au coeur de la vie de nos concitoyens.
Personne, de droite ou de gauche, ne peut, ni ne doit, l'oublier !
Et dire cela, ce n'est pas faire de la politique mais simplement vouloir ne pas passer à côté d'enjeux majeurs pour la croissance et l'emploi... dans l'intérêt de la Nation toute entière.
Nicolas SARKOZY, merci encore de votre présence.
Je vous cède cette tribune.Source http://www.cgpme.org, le 30 janvier 2007