Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, sur les actions en faveur de l'égalité des chances entre les femmes et les hommes, à Sanaa le 8 mars 2007.

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Circonstance : Déplacement au Yemen du 6 au 8 août-journée internationale de la femme organisée par la Ligue des femmes yéménites, à Sanaa le 8 mars 2007

Texte intégral

Monsieur le Premier Ministre,
Madame la Ministre,
Madame la Présidente de l'Union des Femmes yéménites,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je suis heureuse d'être au Yémen aujourd'hui, pour y célébrer avec vous la Journée internationale de la femme. Je souhaitais vous rencontrer pour vous apporter mon soutien et mes encouragements, mais aussi pour mieux connaître la situation des femmes dans votre pays, et notamment prendre la mesure des progrès réalisés dans le domaine de l'égalité entre les hommes et les femmes.
Depuis 1975, à l'initiative de l'Organisation des Nations unies, la Journée internationale de la femme est l'occasion de rappeler que ce qui est un progrès pour les femmes est un progrès pour tous. Je veux donc ici, devant vous, le redire avec force et conviction : le progrès économique et social, le développement harmonieux de nos sociétés ne peuvent se faire sans que les femmes obtiennent l'égalité des chances, le droit de participer activement à la vie politique, ou encore la liberté de s'instruire et d'entreprendre. Il s'agit-là de droits fondamentaux, sur lesquels il ne saurait être question de transiger.
A cet égard, je tiens à saluer le récent rapport du Programme des Nations unies pour le développement sur la place des femmes dans le monde arabe, qui fournit un diagnostic précis, mais aussi des recommandations d'autant plus pertinentes qu'elles émanent d'experts originaires de votre région.
Ce rapport du PNUD établit clairement que la discrimination envers les femmes constitue un frein majeur au développement économique et social. Face à un tel constat, il est donc indispensable de donner aux femmes la possibilité de s'épanouir individuellement et professionnellement, de vivre dignes et libres, et de disposer des mêmes droits que les hommes.
Pour parvenir à cet objectif, des efforts restent naturellement à accomplir - et d'ailleurs pas seulement dans les pays arabes. Mais s'agissant plus spécialement du monde arabe auquel il est consacré, le rapport du PNUD souligne combien la promotion des femmes y demeure partielle : l'accès à l'éducation et aux soins, la participation active aux différents domaines d'activité humaine, ou encore la reconnaissance de leurs droits, ne leur sont pas garantis au même titre que les hommes, ce qui limite le rôle qu'elles peuvent jouer dans la société et représente un obstacle certain à l'essor des pays arabes.
En m'adressant à vous à l'occasion de cette Journée internationale de la femme, je voudrais donc, d'abord, me réjouir des avancées déjà obtenues notamment dans votre pays, mais aussi vous assurer de l'engagement de la France dans ce combat qui nous est commun en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes.
D'abord, chaque avancée mérite d'être relevée, saluée, et encouragée, parce qu'elle est toujours une victoire sur ce qui est le plus difficile de faire évoluer dans les sociétés, la tradition. Où que ce soit dans le monde, l'égalité entre les hommes et les femmes ne s'est jamais faite toute seule. Partout, elle est le fruit d'une volonté politique, d'un engagement de la société civile, mais aussi et surtout de la volonté des femmes elles-mêmes.
A cet égard, je tiens à saluer le rôle précurseur qu'a pu avoir votre pays en ce domaine, au sein du monde arabe : vous avez ainsi été les premières femmes arabes à bénéficier du droit de vote, dès 1967 ; en 1990, la première femme yéménite faisait son entrée au Parlement ; et en 2001, le ministère des Droits de l'Homme était pour la première fois confié à une femme, Mme Amat Al Alim Al Soussoua, qui représente aujourd'hui votre pays aux Pays-Bas et qui a été remplacée dans ses fonctions par Mme Khadija Al Haissami. Enfin, en 2006, c'est une troisième femme qui a accédé aux fonctions ministérielles, Mme Amat Al Razzaq Ali Hamad, à la tête des affaires sociales. Je souhaite saluer l'engagement très fort de ces trois personnalités, au service de l'égalité des droits entre les hommes et les femmes.
Bien sûr, c'est grâce à la volonté des différents partis politiques, qu'ils soient au pouvoir ou dans l'opposition, que de tels progrès ont pu être réalisés ; partis politiques yéménites qui comptent un nombre important de femmes parmi leurs membres et leurs instances dirigeantes.
Mais cette volonté politique n'aurait sans doute pu aboutir si elle n'avait été constamment stimulée pour continuer à aller de l'avant. Et c'est précisément le rôle de la société civile - votre rôle - que d'agir en ce sens : je sais que vous êtes 52 ONG, au Yémen, qui travaillez quotidiennement, sur le terrain, pour améliorer les conditions de vie des femmes. C'est donc aussi à cette forme d'engagement militant que je veux rendre hommage aujourd'hui.
Mais au-delà de cet hommage, c'est surtout le soutien de la France que je suis venue vous apporter, dans ce combat pour l'égalité entre les hommes et les femmes qui nous est commun.
Ce combat, la France le mène en effet avec conviction et détermination, et d'abord sur son propre sol, car nous avons, nous aussi, des progrès à accomplir, et il ne saurait être question de nous ériger en donneurs de leçons. Dans mon pays, les dernières statistiques établies par le ministère de l'Intérieur montrent qu'en 2006, tous les trois jours, une femme est morte après avoir été victime de violences conjugales. Cela est inacceptable, et justifie pleinement l'action du gouvernement auquel j'appartiens.
Mais mon pays est aussi engagé au sein des Nations unies, organisation qui porte notre idéal de droits universels et de progrès pour l'humanité. Ainsi, le 19 décembre dernier, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté à l'unanimité, et avec le co-parrainage de plus de 100 Etats, une résolution proposée par la France et les Pays-Bas, dans laquelle la communauté internationale s'engage à intensifier son action, sur le plan local, national et international, en vue de l'éradication des violences faites aux femmes.
De même, la 51ème session de la Commission de la condition de la femme, qui se tient actuellement à New York et dont le thème principal porte sur l'élimination de la discrimination et des violences à l'encontre des petites filles, offre une occasion unique de rencontres et d'échanges sur les expériences et les meilleures pratiques.
Vous l'aurez compris, la France est active sur ce sujet par fidélité envers sa tradition républicaine des droits de l'Homme, mais aussi par sa vision de la défense des droits fondamentaux dans le contexte nouveau de la mondialisation. A cet égard, le respect de la diversité culturelle, principe auquel la France est attachée, n'ôte rien à l'exigence que représente l'égalité entre les hommes et les femmes. Aucune tradition, aucune coutume, aucune croyance ne saurait prendre le pas sur le respect des droits fondamentaux, universellement reconnus.
Au total, il était donc logique que nos deux pays se retrouvent dans ce combat en faveur de l'égalité des droits entre les hommes et les femmes, dans le cadre de la coopération franco-yéménite que je suis venue réaffirmée à l'occasion de mon déplacement. Nous disposons ainsi d'un programme intitulé "Genre et société civile", qui est conduit avec le Fonds social de développement, dans quatre secteurs principaux : l'éducation des filles, la santé maternelle et infantile, le rôle de la femme dans l'agriculture, et la promotion des droits de la femme. Je vais par ailleurs signer tout à l'heure avec votre ministre du Plan et de la Coopération internationale, un accord mettant en place un fonds de solidarité prioritaire destiné à soutenir la jeunesse et les sports au Yémen, en lien notamment avec la Fédération yéménite du sport féminin.
Monsieur le Premier Ministre,
Madame la Ministre,
Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs,
Pour conclure, je voudrais vous réaffirmer chaleureusement toute l'estime et l'amitié de la France, de son gouvernement et de son peuple.
Et sur un registre plus personnel, vous redire aussi mon soutien de femme, pour cet engagement qui est le vôtre, et pour ce combat qui me tient à coeur. Soyons toutes et tous convaincus de la justesse de ce combat, pas seulement pour les femmes, mais pour le mieux-être de l'humanité toute entière.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 mars 2007