Texte intégral
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Au moment où le Parlement débat de la parité homme-femme, il ma semblé préférable de vous accueillir par ces appellations usitées plutôt que de me lancer dans une énumération fastidieuse et périlleuse de tous les titres et fonctions des personnalités éminentes qui nous ont fait lhonneur et le plaisir de répondre à notre invitation.
Nous sommes particulièrement heureux, mes collègues membres du Bureau et moi-même, ainsi que tous les sénateurs, de vous recevoir, ici, dans les salons de la Présidence du Sénat.
Nous sommes réunis, ce soir, pour célébrer, selon une tradition bien sympathique, et dans une ambiance conviviale, cette nouvelle année qui constitue, en loccurrence, la dernière année du siècle.
Les premiers jours de cette année charnière se sont placés sous deux signes différents : un signe positif, riche despoir et un signe négatif, lourd dinquiétudes.
Le motif despoir, cest bien évidemment, lavénement, tant attendu, de la monnaie européenne qui a plongé notre pays dans une douce europhorie, à peine tempérée par la crise brésilienne.
Avant même sa naissance, leuro avait dailleurs administré la preuve de sa viabilité, de sa fonction damortisseur et de sa vertu danti-dépresseur en faisant de la future zone euro un îlot de stabilité dans un océan de tempêtes économiques et monétaires.
Aujourdhui, leuro est enfin devenu une réalité monétaire. Comme toute monnaie, il présente deux faces.
Côté face, leuro est un point darrivée. Cest le point daboutissement dune grande aventure, devenue indispensable après léchec de la communauté européenne de défense, celle de la construction de lEurope économique.
Lavènement de leuro parachève létablissement du marché unique.
Côté pile, leuro est le point de départ dune nouvelle aventure européenne. Leuro est, en effet, le révélateur de la nécessité daller plus loin pour bâtir une Europe politique. Laprès euro appelle, en effet, de nouveaux pas dans la voie de lintégration européenne, cest-à-dire de nouvelles avancées vers lEurope politique.
Déjà, le besoin dun gouvernement économique de leuro se fait sentir, pour faire contrepoids à la Banque Centrale européenne et éviter de livrer leuro à la seule force des marchés.
Ce besoin nouveau se surajoute, en les exacerbant, à des nécessités anciennes, celles dune défense européenne et dune politique étrangère commune.
Cest ce débat sur lavenir de la construction européenne, bref sur lEurope de laprès euro, qui devrait être au coeur de la campagne en vue des prochaines élections européennes.
LEurope qui se dessine devant nos yeux est, tout à la fois notre avenir, notre nouvelle frontière et notre terre promise : sa configuration devrait susciter, dans tous les partis politiques, des réflexions et des programmes.
Certains souhaitent que lEurope soit, dès demain, fédérale ; peut-être le sera-t-elle, à terme. Sûrement même. Mais il me semble dangereux de brusquer les étapes de cette construction sui generis, au risque de détourner les peuples de cette formidable et patiente aventure qui conditionne la survie de notre identité et de notre civilisation, dans un monde caractérisé par le monopole dun seul gendarme, lhégémonie de son billet vert et limpérialisme de son mode de vie qui se prend pour une culture.
Aussi me semble-t-il indispensable de passer par une étape confédérale qui permettra de bâtir lunion européenne en partant du bas et en ne déléguant à léchelon européen que le strict nécessaire par application du principe de subsidiarité, tout en veillant à résorber le déficit démocratique qui affecte parfois les institutions européennes.
La forme confédérale permettra de concilier la nécessaire montée en puissance de lUnion européenne avec lindispensable préservation de lidentité et de la spécificité de la nation française.
Par ailleurs, le rôle bénéfique de leuro ne se limite pas à sa fonction daccélérateur de la construction européenne.
Leuro est également le révélateur de nos blocages, de nos faiblesses et de nos handicaps qui découlent du coût trop élevé du fonctionnement de la Maison France.
La monnaie européenne, instrument de mesure commun des coûts de production, risque dexacerber la concurrence entre les territoires qui composent la zone euro.
Il est donc indispensable et urgent que les Etats membres de lunion européenne sengagent, résolument, dans un processus dharmonisation fiscale et sociale.
Cest à ce prix que nous éviterons que leuro ne devienne un facteur de « déménagement de territoire « au risque de transformer le formidable espoir quil suscite en une cruelle désillusion.
Pour la France, recueillir les fruits de leuro passe par une réduction de nos dépenses publiques, un desserrement de létau des prélèvements obligatoires et un allégement du coût du travail peu qualifié.
Le motif dinquiétude, qui vient ternir ma joie, est constitué par la montée de linsécurité, avec la progression de la délinquance, le rajeunissement des délinquants et la multiplication des zones de non droit ou de non application de la légalité républicaine.
Ce phénomène de linsécurité a pris une telle ampleur quil devient explosif pour notre société démocratique. Nous savons tous que linsécurité, réelle ou ressentie, fait le lit des extrêmes dont elle nourrit les fantasmes, grossit les caricatures et radicalise les propositions simplistes. Cest à nous républicains quil appartient, dans un grand sursaut national, de nous emparer du redoutable problème de la sécurité, en faisant taire nos divisions politiques pour rechercher de vrais remèdes à ce cancer social.
Toutes les solutions devront être examinées sans tabous.
Il peut sagir de la destruction des ghettos propices à la délinquance en substituant à un habitat concentré dans des tours un habitat plus pavillonnaire et dispersé.
Cette politique est certes onéreuse ; mais elle savère efficace et propice à une intégration réussie.
Il pourrait sagir également de sanctionner, avec vigueur, la première infraction, tout en préférant à des peines privatives de liberté effectuées dans lunivers carcéral, des travaux dintérêt général assortis dune sensibilisation civique.
Il peut sagir, en outre, de créer des internats éducatifs dinsertion dont lobjet serait, au-delà de léloignement des délinquants récidivistes du lieu de leurs méfaits, de leur dispenser, dans un lieu fermé ou semi-ouvert, une éducation civique et une formation professionnelle.
*
* *
Pour conclure mon propos, je voudrais vous dire, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, que le Sénat saura apporter sa contribution éclairée à la définition des mesures indispensables pour relever ces deux défis : le positif, cest-à-dire leuro et le négatif, cest-à-dire linsécurité.
Loin de constituer une « anomalie « dans notre vie politique, le Sénat représente une chance pour notre démocratie. Les vertus du bicamérisme ne sont plus à démontrer ; mais encore faut-il que ses bienfaits soient mieux reconnus par nos concitoyens.
Il nous appartient, à nous sénateurs, de combler ce fossé qui existe entre, dune part, la qualité du Sénat et, dautre part, son image parfois brouillée.
Je sais, chers amis, que nous pouvons compter sur vous pour nous aider dans cette tâche, difficile mais exaltante.
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, cest avec un vif plaisir que je vous adresse mes voeux chaleureux de bonne et heureuse année pour vous même et ceux qui vous sont chers.
Puisse cette année charnière, qui nous ouvre les portes du troisième millénaire, nous permettre de jeter les bases dun monde pacifique, prospère et solidaire.
(Source http://www.senat.fr)
Au moment où le Parlement débat de la parité homme-femme, il ma semblé préférable de vous accueillir par ces appellations usitées plutôt que de me lancer dans une énumération fastidieuse et périlleuse de tous les titres et fonctions des personnalités éminentes qui nous ont fait lhonneur et le plaisir de répondre à notre invitation.
Nous sommes particulièrement heureux, mes collègues membres du Bureau et moi-même, ainsi que tous les sénateurs, de vous recevoir, ici, dans les salons de la Présidence du Sénat.
Nous sommes réunis, ce soir, pour célébrer, selon une tradition bien sympathique, et dans une ambiance conviviale, cette nouvelle année qui constitue, en loccurrence, la dernière année du siècle.
Les premiers jours de cette année charnière se sont placés sous deux signes différents : un signe positif, riche despoir et un signe négatif, lourd dinquiétudes.
Le motif despoir, cest bien évidemment, lavénement, tant attendu, de la monnaie européenne qui a plongé notre pays dans une douce europhorie, à peine tempérée par la crise brésilienne.
Avant même sa naissance, leuro avait dailleurs administré la preuve de sa viabilité, de sa fonction damortisseur et de sa vertu danti-dépresseur en faisant de la future zone euro un îlot de stabilité dans un océan de tempêtes économiques et monétaires.
Aujourdhui, leuro est enfin devenu une réalité monétaire. Comme toute monnaie, il présente deux faces.
Côté face, leuro est un point darrivée. Cest le point daboutissement dune grande aventure, devenue indispensable après léchec de la communauté européenne de défense, celle de la construction de lEurope économique.
Lavènement de leuro parachève létablissement du marché unique.
Côté pile, leuro est le point de départ dune nouvelle aventure européenne. Leuro est, en effet, le révélateur de la nécessité daller plus loin pour bâtir une Europe politique. Laprès euro appelle, en effet, de nouveaux pas dans la voie de lintégration européenne, cest-à-dire de nouvelles avancées vers lEurope politique.
Déjà, le besoin dun gouvernement économique de leuro se fait sentir, pour faire contrepoids à la Banque Centrale européenne et éviter de livrer leuro à la seule force des marchés.
Ce besoin nouveau se surajoute, en les exacerbant, à des nécessités anciennes, celles dune défense européenne et dune politique étrangère commune.
Cest ce débat sur lavenir de la construction européenne, bref sur lEurope de laprès euro, qui devrait être au coeur de la campagne en vue des prochaines élections européennes.
LEurope qui se dessine devant nos yeux est, tout à la fois notre avenir, notre nouvelle frontière et notre terre promise : sa configuration devrait susciter, dans tous les partis politiques, des réflexions et des programmes.
Certains souhaitent que lEurope soit, dès demain, fédérale ; peut-être le sera-t-elle, à terme. Sûrement même. Mais il me semble dangereux de brusquer les étapes de cette construction sui generis, au risque de détourner les peuples de cette formidable et patiente aventure qui conditionne la survie de notre identité et de notre civilisation, dans un monde caractérisé par le monopole dun seul gendarme, lhégémonie de son billet vert et limpérialisme de son mode de vie qui se prend pour une culture.
Aussi me semble-t-il indispensable de passer par une étape confédérale qui permettra de bâtir lunion européenne en partant du bas et en ne déléguant à léchelon européen que le strict nécessaire par application du principe de subsidiarité, tout en veillant à résorber le déficit démocratique qui affecte parfois les institutions européennes.
La forme confédérale permettra de concilier la nécessaire montée en puissance de lUnion européenne avec lindispensable préservation de lidentité et de la spécificité de la nation française.
Par ailleurs, le rôle bénéfique de leuro ne se limite pas à sa fonction daccélérateur de la construction européenne.
Leuro est également le révélateur de nos blocages, de nos faiblesses et de nos handicaps qui découlent du coût trop élevé du fonctionnement de la Maison France.
La monnaie européenne, instrument de mesure commun des coûts de production, risque dexacerber la concurrence entre les territoires qui composent la zone euro.
Il est donc indispensable et urgent que les Etats membres de lunion européenne sengagent, résolument, dans un processus dharmonisation fiscale et sociale.
Cest à ce prix que nous éviterons que leuro ne devienne un facteur de « déménagement de territoire « au risque de transformer le formidable espoir quil suscite en une cruelle désillusion.
Pour la France, recueillir les fruits de leuro passe par une réduction de nos dépenses publiques, un desserrement de létau des prélèvements obligatoires et un allégement du coût du travail peu qualifié.
Le motif dinquiétude, qui vient ternir ma joie, est constitué par la montée de linsécurité, avec la progression de la délinquance, le rajeunissement des délinquants et la multiplication des zones de non droit ou de non application de la légalité républicaine.
Ce phénomène de linsécurité a pris une telle ampleur quil devient explosif pour notre société démocratique. Nous savons tous que linsécurité, réelle ou ressentie, fait le lit des extrêmes dont elle nourrit les fantasmes, grossit les caricatures et radicalise les propositions simplistes. Cest à nous républicains quil appartient, dans un grand sursaut national, de nous emparer du redoutable problème de la sécurité, en faisant taire nos divisions politiques pour rechercher de vrais remèdes à ce cancer social.
Toutes les solutions devront être examinées sans tabous.
Il peut sagir de la destruction des ghettos propices à la délinquance en substituant à un habitat concentré dans des tours un habitat plus pavillonnaire et dispersé.
Cette politique est certes onéreuse ; mais elle savère efficace et propice à une intégration réussie.
Il pourrait sagir également de sanctionner, avec vigueur, la première infraction, tout en préférant à des peines privatives de liberté effectuées dans lunivers carcéral, des travaux dintérêt général assortis dune sensibilisation civique.
Il peut sagir, en outre, de créer des internats éducatifs dinsertion dont lobjet serait, au-delà de léloignement des délinquants récidivistes du lieu de leurs méfaits, de leur dispenser, dans un lieu fermé ou semi-ouvert, une éducation civique et une formation professionnelle.
*
* *
Pour conclure mon propos, je voudrais vous dire, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, que le Sénat saura apporter sa contribution éclairée à la définition des mesures indispensables pour relever ces deux défis : le positif, cest-à-dire leuro et le négatif, cest-à-dire linsécurité.
Loin de constituer une « anomalie « dans notre vie politique, le Sénat représente une chance pour notre démocratie. Les vertus du bicamérisme ne sont plus à démontrer ; mais encore faut-il que ses bienfaits soient mieux reconnus par nos concitoyens.
Il nous appartient, à nous sénateurs, de combler ce fossé qui existe entre, dune part, la qualité du Sénat et, dautre part, son image parfois brouillée.
Je sais, chers amis, que nous pouvons compter sur vous pour nous aider dans cette tâche, difficile mais exaltante.
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, cest avec un vif plaisir que je vous adresse mes voeux chaleureux de bonne et heureuse année pour vous même et ceux qui vous sont chers.
Puisse cette année charnière, qui nous ouvre les portes du troisième millénaire, nous permettre de jeter les bases dun monde pacifique, prospère et solidaire.
(Source http://www.senat.fr)