Déclaration de M. Lionel Jospin, Premier ministre, en réponse à une question sur le bilan des élections municipales et sur la politique économique du gouvernement, à l'Assemblée nationale le 28 mars 2001.

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Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le député,
Il vient d'y avoir des élections municipales et dans les conseils généraux. Aux élections municipales, le solde pour les villes de plus de 30 000 habitants est négatif pour 21 villes. Nous avons fait des conquêtes, nous avons subi plus de défaites au détriment de la majorité. Pour ce qui concerne les élections au conseil général, nous avons un gain de cinq départements, tel est le solde. J'ai dit, de toute façon, que ces élections étaient des élections locales destinées à élire dans 36 000 communes des maires et des équipes municipales ; que pour autant, nous ayons à tirer des leçons de ces élections, nous l'avons toujours fait, que nous le fassions par le débat au sein de la formation politique à laquelle j'appartiens et au sein de la majorité qui me soutient et qui soutient le Gouvernement depuis quatre ans, me paraissent de bons fonctionnements démocratiques. Nous n'avons pas à construire des édifices politiques qui jamais d'ailleurs ne sont véritablement construits, nous avons à vivre notre vie démocratique entre les partis de la majorité.
Et si parce que notre conviction est forte, qu'il est normal que nous défendions notre bilan, que nous croyons en la force de ce que nous faisons, il a pu arriver parfois que certains nous trouvent trop satisfaits de cette action et de ce bilan, eh bien, une des leçons de ces élections est qu'il ne faut point le faire. Mais ne commencez pas à y succomber trop vite vous-mêmes.
Les 35 heures : il y a eu un débat quand nous avons parlé des 35 heures au sein de cette majorité qui était encore en constitution - nous étions dans l'opposition - et au sein du Parti socialiste auquel j'appartiens, pour savoir si ces 35 heures, mesure fondamentale pour nous, devaient être faites avec ou sans diminution de salaire. Nous avons fait le choix qui a été difficile à trancher, de dire : nous ne proposerons pas d'accompagner ces 35 heures par une diminution des salaires. Nous répondons par là même à votre interrogation.
Ces 35 heures qui ont créé ou sauvegardé 350 000 emplois dans le pays et qui accordent du temps libre supplémentaire et aux hommes et aux femmes du travail en France, sont une mesure essentielle. Et je constate que contrairement à ce qu'on nous disait dans l'année 1997, quand nous avons pris cette décision essentielle, ça n'a en rien pénalisé l'économie française : on consomme, on investit, on produit plutôt plus qu'ailleurs et la France, dans l'Europe, est effectivement considérée comme une locomotive.
Si des accords de modération salariale ont été signés librement par des organisations syndicales dans telle ou telle entreprise, c'est de la responsabilité des partenaires sociaux, et ce n'est en rien une politique que recommanderait le Gouvernement. Nous souhaitons une revalorisation raisonnable des salaires, nous avons d'ailleurs à nous poser cette question dans la fonction publique. Ce que je peux dire en tout cas, parce que l'histoire nous a appris cela : c'est que quand le chômage diminue d'un million de personnes dans un pays, quand donc la peur du chômage diminue, cela veut dire que le rapport de force entre les salariés et les chefs d'entreprise se modifie favorablement, au service du monde du travail, et cela veut dire donc que ça devrait peser à terme en faveur de la revalorisation des salaires.
Sur les dépenses publiques : je veux bien que vous nous appeliez à les réduire, mais je constate que quand nous discutons de ces questions, budget après budget, c'est toujours des augmentations de dépenses que vous préconisez. Quant à "l'Etat peu efficace", le ministre de l'Economie et des Finances, le ministre de la Fonction publique ont engagé des réformes importantes. L'Assemblée nationale et notamment monsieur Migaud, le président de l'Assemblée nationale lui-même, vous ont proposé d'engager avec nous une réforme essentielle : celle de la procédure budgétaire dans ce pays, par la révision de l'ordonnance organique de 1959. Nous verrons si vous êtes d'accord avec nous pour moderniser l'Etat.
Alors, quand nous pouvons travailler ensemble, travaillons ensemble. Quand nous avons des différences, confrontons-les. C'est ce que je fais devant vous et ce que je vous appelle à faire, en étant capable de proposer autant que vous critiquez !"
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 29 mars 2001)