Texte intégral
Q - Dans quel état d'esprit abordez-vous cette dernière ligne droite ?
R - En fait, la campagne commence. Plusieurs dizaines de millions de Français sont décidés à rebattre les cartes et ce sont eux qui vont imposer le changement. La question est très simple : Sarkozy-Royal, cela veut dire que l'on continue comme par le passé avec les deux états majors immobiles, un camp qui dit toujours oui, un camp qui dit toujours non et aucun renouvellement. Le PS restera ce qu'il est, fermé, bloqué, l'UMP restera ce qu'elle est, dominatrice avec l'idée qu'il faut qu'elle ait tous les pouvoirs.
Q - Vous vous présentez comme le vrai candidat de la rupture, mais vos adversaires font de vous le candidat du statu quo qui ne pourra rien changer faute de majorité...
R - Ceux qui n'ont pas de majorité, c'est eux. Nicolas Sarkozy plafonne à 26 %, Ségolène Royal est à 23 %. On ne fait pas une majorité avec ça. Le seul qui puisse faire une majorité parce qu'il tendra la main sur sa droite et sur sa gauche, c'est moi. Le seul qui ait une approche de rassemblement, capable de faire leur place à des gens venant d'autres inspirations, c'est moi. C'est pourquoi mon élection éventuelle porte une dynamique de changement et d'action bien différente. Il suffit de regarder ce qui se passe en Allemagne. Les deux partis opposés avaient annoncé que jamais ils ne pourraient travailler ensemble. Le peuple les a obligés à le faire et les résultats sont formidables. Il n'y aura de majorité stable en France qu'avec une majorité centrale, capable de sortir les uns et les autres de leur isolement.
Q - Vous parlez « d'électrochoc » et en même temps, vous vous présentez comme le candidat « apaiseur ». N'est-ce pas contradictoire...
R - Les Français ont besoin des deux. Un électrochoc dans la vie politique pour sortir de ces mises en scène perpétuelles de gens qui s'insultent et prétendent n'avoir rien en commun alors qu'ils passent leur temps à se copier. On a aussi besoin de sortir des caricatures. Nicolas Sarkozy propose une France d'affrontement, avec des idées, notamment sur le fait que tout serait joué à la naissance, que personne n'a acceptées en France depuis longtemps.
Quand à Ségolène Royal, elle avance une idée et puis la récuse. Mais surtout, elle demande à l'État de tout faire, depuis la petite enfance jusqu'à l'entrée dans l'entreprise. Il y a belle lurette que les Français ont compris que l'État ne pouvait pas s'occuper de tout. La rénovation de l'UMP et du PS que les Français attendent ne pourra se faire que par mon élection. Mais les Français ont aussi besoin d'un président qui rassemble et qui apaise, pour qu'on ne soit pas perpétuellement dans cette ambiance de guerre civile larvée.
Q - Vous allez aujourd'hui sur les sites de Metaleurop et Samsonite. Qu'est ce qu'une présidence Bayrou changerait pour les salariés d'usines menacées de fermeture ?
R - Une politique de défense des usines doit être européenne. L'Europe doit s'engager à défendre l'industrie chez nous. On peut y arriver. Les Allemands sont en train de le faire. Je veux aller le dire à ceux qui en sont les premières victimes.
Q - Ceux-là attendent plutôt de l'État qu'il prenne des sanctions...
R - S'il y a motif à sanction, il faut sanctionner.
Q - Vous dénoncez les statistiques du chômage ?
R - Absolument. Elles n'ont aucune fiabilité. La preuve ? c'est qu'on ne compte même pas les chômeurs de l'outre-mer et les RMistes. L'institut européen des statistiques a d'ailleurs envoyé un avertissement sévère à la France.
Q - Vous changerez donc l'indice mensuel ?
R - Il faut prendre en compte tous les chômeurs pour y voir clair. Un pays ne peut être courageux que s'il a une idée précise de ce qui se passe. On ne peut bien balayer une pièce que si on allume la lumière.
Q - Reviendrez-vous sur les suppressions de postes d'enseignants décidées par Gilles de Robien ?
R - Je garantirai les moyens de l'Éducation nationale sur un plan pluriannuel. La chasse aux postes perpétuelle n'est pas la solution. L'Éducation nationale doit avoir la certitude qu'elle aura le soutien de la nation, et en échange, elle doit augmenter ses performances tant dans le primaire que dans le secondaire. Il n'y a qu'un moyen d'être performant dans la mondialisation, c'est d'avoir les jeunes les mieux formés de la planète.
Q - Le débat à quatre sur l'Internet que vous avez proposé n'aura pas lieu. Pourquoi ne pas débattre avec Ségolène Royal et Jean-Marie le Pen qui l'ont accepté ?
R - Accepter l'idée que l'un des principaux candidats puisse refuser le débat n'est pas respectueux des citoyens. Les Français demandent ces débats et ceux qui les refusent traduisent une inquiétude et une faiblesse. On aurait beaucoup gagné à avoir une confrontation directe.
Q - Azouz Begag vous a rejoint. Si vous gagnez, fera-t-il partie du gouvernement ?
R - Deux ministres ont choisi de me soutenir, François Goulard, unanimement respecté et Azouz Begag. C'est quelqu'un de bien, intelligent, courageux, impressionnant par sa volonté de dire la vérité. Ces deux soutiens sont précieux pour aujourd'hui et demain.
Q - Vous leur réservez une place de ministre ?
R - Je ne raisonne pas en terme de place mais de confiance !
source http://www.bayrou.fr, le 10 avril 2007