Interview de M. Nicolas Sarkozy, président de l'UMP et candidat à l'élection présidentielle, à France 2 le 26 avril 2007, sur une ouverture vers F. Bayrou après le 1er tour, son programme électoral et en réponse à des questions de téléspectateurs.

Prononcé le

Circonstance : Emission "A vous de juger" à France 2 le 26 avril 2007, dans le cadre de la préparation du second tour de l'élection présidentielle

Texte intégral

ARLETTE CHABOT - Bonsoir à tous. Merci de nous rejoindre pour cette deuxième émission exceptionnelle qui nous permettra de retrouver l'autre candidat, Nicolas SARKOZY, que vous avez choisi pour affronter Ségolène ROYAL le 6 mai prochain. L'occasion donc encore une fois - et nous vous le devons bien - pour ces candidats de s'expliquer, de présenter leur programme, mais aussi leur vision de la France et répondre à quelques interrogations et à quelques sujets peut-être qui n'ont pas été précisés et qui doivent l'être ce soir. Donc, hier, c'était Ségolène ROYAL ; ce soir, nous recevons Nicolas SARKOZY. Bonsoir, monsieur SARKOZY.
NICOLAS SARKOZY - Bonsoir, madame CHABOT.
ARLETTE CHABOT - Merci d'être là.
NICOLAS SARKOZY - Merci de m'avoir invité.
ARLETTE CHABOT - Ceux qui vous connaissent et qui étaient avec vous dimanche soir disent que lorsque vous avez vu les résultats à 20h00, vous étiez particulièrement ému, ils ne vous avaient jamais vu, disent-ils, aussi ému qu'à ce moment-là. Est-ce que c'est vrai ?
NICOLAS SARKOZY - Vous savez, quand 11,5 millions de Français vous font confiance dès le premier tour, jamais dans l'histoire de la 5ème République, y compris à l'époque de Georges POMPIDOU et même, je crois, du général de GAULLE, un tel nombre d'électeurs se sont porté sur un candidat au premier tour, c'est une preuve de confiance qui m'a beaucoup touché. En même temps, c'est une responsabilité immense. Je veux dire d'ailleurs ce soir à ces électeurs que je ne les décevrai pas, je ne les tromperai pas, je ne les trahirai pas, je resterai fidèle aux convictions que j'ai défendues.
ARLETTE CHABOT - Alors, il y a peut-être une mauvaise nouvelle pour vous ce soir-là, le dimanche, c'était le score de François BAYROU. Franchement, vous imaginiez que François BAYROU atteindrait un tel résultat après sa campagne ?
NICOLAS SARKOZY - Franchement, je ne sais pas pourquoi vous dites que c'était une mauvaise nouvelle, j'imaginais parfaitement que je ne ferais pas 100 % des suffrages, dès le premier tour, que j'avais des concurrents, des concurrents de valeur. J'ai d'ailleurs téléphoné à François BAYROU pour le féliciter et lui dire...
ARLETTE CHABOT- Message sur le répondeur, vous ne l'avez pas eu directement au téléphone, c'est ça...
NICOLAS SARKOZY - Il n'a sans doute pas eu le temps de me répondre, ce n'est pas grave. Je pensais qu'il était légitimement déçu parce que dans la compétition présidentielle, il y a un premier tour et il n'y a que les deux premiers qui sont au deuxième tour. J'ai voulu être fair-play et le lui dire, c'est quelqu'un que je connais bien depuis des années. Et voilà ! Il a rassemblé 6 millions d'électeurs, c'est effectivement un bon score. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de dire à madame ROYAL aussi que je respectais la campagne qu'elle avait faite et le résultat, le nombre d'électeurs qui s'était porté sur elle...
ARLETTE CHABOT - Vous pensiez qu'il dirait ce soir-là ou deux jours après : Je choisis Nicolas SARKOZY, comme, au fond, il y a une alliance traditionnelle autrefois avec le centre ou pas du tout ?
NICOLAS SARKOZY - Non. Je n'ai pas cette conception-là parce qu'il faut revenir à l'esprit de la 5ème République. Qu'a voulu faire le général de GAULLE ? C'est quand même de cela dont il s'agit, il a voulu que les Français aient la liberté de choisir. Quand on se présente à l'élection présidentielle, on se présente au suffrage de 44 millions d'électeurs français, il n'y en a pas un qui vaut plus que les autres, il n'y en a pas un qui pèse plus que les autres ou davantage que les autres. C'est les Français qui choisissent et ces Français qui choisissent, ils n'appartiennent à personne. Ce serait trop simple ! Moi, je n'ai pas fait...
ARLETTE CHABOT - Mais monsieur BALLADUR ou monsieur BARRE, au soir du premier tour, avaient dit, voilà, ils avaient pris position ! Là, évidemment, ce n'est pas du tout le cas !
NICOLAS SARKOZY - Monsieur BALLADUR et monsieur BARRE ont pris position avec beaucoup de loyauté. François BAYROU a choisi de ne pas prendre position, c'est son droit, je le respecte. C'est à ses électeurs de dire est-ce que c'est loyal ou est-ce que cela ne l'est pas.
ARLETTE CHABOT - François BAYROU doit rencontrer Ségolène ROYAL, un débat, il y a beaucoup de confusions, de problèmes autour de l'organisation de cette rencontre, disons. Vous pensez que cette rencontre peut être inutile pour vous, rencontrer François BAYROU, en tout cas pas publiquement et pas à la télévision, pas dans un débat ?
NICOLAS SARKOZY - Non. Tout ce qu'est le dialogue est utile. J'ai d'ailleurs dit à François BAYROU que s'il souhaitait qu'on se voit, dans la forme qu'il désirera d'ailleurs, moi, je suis prêt à ce dialogue, à cette écoute...
ARLETTE CHABOT - Mais pas un face-à-face comme ça, télévision, devant le public, devant des journalistes...
NICOLAS SARKOZY - C'est vous-même qui avez dit...
ARLETTE CHABOT - Je vous pose la question.
NICOLAS SARKOZY - Vous-même avez dit qu'il y a beaucoup de confusions, essayons de mettre de la clarté. Dans la 5ème République, chacun qui a des signatures peut être candidat. Il y a eu douze candidats au premier tour. Il y a un deuxième tour où seuls les deux premiers sont qualifiés. Le débat doit avoir lieu, contradictoire, entre madame ROYAL et moi. Pourquoi ? Parce que le dimanche 6 mai, je suis désolé pour monsieur BAYROU, mais il n'y aura pas un bulletin au nom de François BAYROU ; je suis désolé pour monsieur LE PEN, mais il n'y aura pas un bulletin au nom de Jean-Marie LE PEN ; il n'y aura que deux bulletins. Donc, pour la clarté du choix des Français, le débat contradictoire doit avoir lieu entre ceux pour qui on peut voter, pas pour ceux qui n'ont pas été qualifiés. C'est un peu comme la finale de la Coupe du monde ! La finale, elle se joue entre le premier et le second ! On n'a jamais vu le troisième dire : Excusez-moi, la finale doit avoir lieu avec moi. J'ajoute...
ARLETTE CHABOT - Il y a parfois le match entre le troisième et le quatrième, mais...
NICOLAS SARKOZY - Oui, mais ça s'appelle la petite finale ! Si monsieur LE PEN et monsieur BAYROU veulent débattre, c'est leur droit...
ARLETTE CHABOT - Pour la clarté - pardonnez-moi - je reprends votre mot, clarté...
NICOLAS SARKOZY - Mais juste un mot...
ARLETTE CHABOT - ... Est-ce que ce n'est pas forcément - pardonnez-moi - utile pour des électeurs de l'UDF, qui vont se déterminer au second tour, de se dire, après tout, quelles sont les différences réelles entre madame Ségolène ROYAL, monsieur SARKOZY et notre candidat ?
NICOLAS SARKOZY - Mais madame CHABOT, il y a eu un premier tour pour cela ! 84...
ARLETTE CHABOT - Donc, c'est fini ?
NICOLAS SARKOZY - Non. 84 % de participation, 21 millions de Français ont choisi, soit madame ROYAL, soit moi-même, on ne peut pas dire que le deuxième tour qu'ils ont choisi est illégitime. Le débat de clarification entre les douze candidats, c'est le premier tour. Le débat de clarification du deuxième tour, c'est entre les deux candidats qui restent. Parce qu'au deuxième tour, les Français ont le choix : soit madame ROYAL, soit moi. Il n'y a pas de troisième choix. Donc, par conséquent, la clarté, c'est cela. J'ajoute un autre mot, madame CHABOT, si vous me le permettez. La 5ème République a voulu l'élection du président de la République au suffrage universel. Pourquoi ? Pour qu'il n'y ait pas de magouille ! Pour qu'il n'y ait pas de combine ! Pour qu'il n'y ait pas d'accord partisan. Pour que les partis politiques n'essayent pas de récupérer sur le tapis vert ce qu'ils ont perdu devant les électeurs. Il faut essayer de comprendre. Madame ROYAL avait dit avant le premier tour, il y a quatre jours, je cite : « BAYROU, c'est pire que SARKOZY. » C'était sur le site. Le soir du premier tour, on a vu défiler monsieur BESANCENOT, madame LAGUILLER, madame BUFFET : Il faut faire barrage à la droite et à SARKOZY ! Très bien. Madame ROYAL les a remerciés en disant : Je vais faire une grande coalition de la gauche pour battre Nicolas SARKOZY. C'est son droit. Et voilà que parce que les sondages ne lui sont pas favorables et qu'il y a des problèmes, alors, maintenant, c'est barre toute au centre ! Mais alors, quelle serait la majorité de madame ROYAL si elle gagnait ? Est-ce qu'elle gouverne avec monsieur BAYROU ? Est-ce qu'elle gouverne avec l'extrême gauche ? Est-ce qu'elle gouverne avec les écologistes ? Les Français sont en droit de savoir quel projet est celui de madame ROYAL et quelle majorité. Avec moi, c'est clair. Je m'adresse à tous les Français, sans exception, mais cette majorité, je le dis, elle sera sans surprise par rapport aux idées que j'ai défendues.
ARLETTE CHABOT - Oui, mais on se dit, elle rassemble, madame ROYAL, elle est capable effectivement de dépasser le clivage gauche/droite. Vous aussi, vous dites, je rassemble. Donc, il y a aussi une ouverture de Nicolas SARKOZY qui correspond à une ouverture de Ségolène ROYAL ?
NICOLAS SARKOZY - Mais je rappelle, madame CHABOT, qui a choisi la finale ROYAL et moi ? Ce sont les...
ARLETTE CHABOT - Oui, mais vous ouvrez aussi, vous voulez être le président...
NICOLAS SARKOZY - Ce sont les Français...
ARLETTE CHABOT - ... Elargi, qui rassemble...
NICOLAS SARKOZY - Ca, c'est autre chose. Si les Français devaient me choisir comme président de la République, ils choisiraient un projet. Les Français, on ne leur demande pas de voter à l'aveugle ! Ils votent pour des personnes, certes, mais également pour un projet politique. L'honnêteté et la clarté, c'est de dire aux Français : Voilà ce qu'on va faire ! Par exemple, le programme économique de monsieur BAYROU est parfaitement incompatible avec le programme économique de Ségolène ROYAL...
ARLETTE CHABOT - Donc, compatible avec le vôtre...
NICOLAS SARKOZY - C'est ce que disent tous les économistes...
ARLETTE CHABOT - Vous aussi, vous avez une idée quand même...
NICOLAS SARKOZY - Mais bien sûr, moi aussi, et c'est tout à fait normal. Par exemple, nous souhaitons que les 35 heures ne soient plus imposées. Madame ROYAL défend la pérennisation des 35 heures. Qu'est-ce qu'ils font là-dessus ? Donc, ce qui est parfaitement clair, c'est que si je devais emporter la confiance des Français, j'ouvrirais mon équipe le plus largement possible parce que je veux constituer la meilleure équipe de France possible. Mais sur une stratégie, sur une ligne politique, qui est celle de la rupture avec la façon dont on fait aujourd'hui la politique. Je veux tourner le dos à un certain nombre d'habitudes, je veux maîtriser l'immigration, je souhaite que nous puissions engager une politique de sécurité qui résolve le problème des violences, avec notamment l'affaire des multirécidivistes, je souhaite donner priorité au pouvoir d'achat et au travail. Mais les Français doivent pouvoir choisir dans la clarté ; et la clarté, ce n'est pas les combinaisons d'appareils.
ARLETTE CHABOT - Vous avez dit vous-même qu'il y aurait des ministres UDF dans le gouvernement que vous installeriez après votre élection si vous êtes élu, vous disiez même, j'irais au-delà. Cela va où au-delà ?
NICOLAS SARKOZY - Alors... Ecoutez...
ARLETTE CHABOT - ... Vous avez aussi une majorité arc-en-ciel...
NICOLAS SARKOZY - A la minute où je vous parle, la majorité des parlementaires UDF m'a rejoint. Mais moi, je ne demande pas de renoncer à leur appartenance politique. Je ne dis pas à ceux qui vont me soutenir pour le deuxième tour : Renoncez à ce que vous êtes ! Je leur dis : Venez en femmes et hommes libres. Sur un contrat de gouvernement, sur les idées que j'ai défendues au premier tour et que je défendrai au deuxième tour, c'est clair. A partir de ce moment-là, il est normal que ceux qui m'auront soutenu participent à la majorité présidentielle...
ARLETTE CHABOT - Mais le au-delà, ça vise qui ?
NICOLAS SARKOZY - Le gouvernement, c'est l'expression de cette majorité présidentielle. Il y a des hommes de gauche, il y a des femmes de gauche qui m'ont rejoint.
ARLETTE CHABOT - Au-delà de monsieur BESSON, est-ce qu'il y en a d'autres de gauche qui peuvent vous rejoindre ?
NICOLAS SARKOZY - Bien sûr ! Il y a beaucoup de gens de la gauche qui me rejoignent. Sur quelles idées ? C'est que moi, je porte l'idée que la France a besoin de changement, qu'elle a besoin de mouvement. Or, il y a des femmes et des hommes de gauche qui ne peuvent pas se satisfaire de la stratégie du Parti socialiste aujourd'hui qui consiste : On ne bouge rien, on ne change rien, on défend tout le statu quo. Ce n'est pas la politique que je propose pour la France. Partant, je ferai la meilleure équipe de France possible à la tête du gouvernement de la France.
ARLETTE CHABOT - Alors, je reprends, hier, ce qu'a dit François BAYROU. Il a dit qu'effectivement, il y avait un grand fossé entre son programme économique, il n'aime pas celui de Ségolène ROYAL parce qu'il est trop étatique. Vous, il dit, je le cite : « Nicolas SARKOZY, par sa proximité avec les milieux d'affaires et les puissances médiatiques, par son goût de l'intimidation et de la menace, va concentrer tous les pouvoirs comme jamais ils ne l'ont été. » Mais vous vous détestez vraiment avec François BAYROU ?
NICOLAS SARKOZY - Non, je...
ARLETTE CHABOT - Comment vous avez réagi à ces propos qui sont, pas sévères, mais violents ?
NICOLAS SARKOZY - Vous savez, je réagis avec beaucoup de calme parce que je sais faire la part de l'amertume et de la déception personnelle.
ARLETTE CHABOT - Vous avez un truc entre vous ? Vous vous êtes fâchés un jour ? Il y a une rivalité ? Il y a quelque chose... ? On a l'impression qu'il y a quelque chose de personnel entre vous...
NICOLAS SARKOZY - Je vais vous faire une confidence. François BAYROU et moi, nous nous connaissons très bien, nous sommes amis depuis bien longtemps et j'ai observé avec une certaine tristesse ses déclarations qui ne lui ressemblent pas. Je suis persuadé qu'elles ont été dictées par la déception, un brin d'amertume et qu'elles ne sont pas, pour tout dire, au niveau de la dignité que je souhaite pour le débat présidentiel. Ce n'est pas grave...
ARLETTE CHABOT - Il a dit que vous avez des « rapports virils », c'est ce qu'il a dit sur FRANCE 2 hier soir, dans le journal de David PUJADAS...
NICOLAS SARKOZY - Des rapports virils...
ARLETTE CHABOT - Virils.
NICOLAS SARKOZY - Comme cela fait vingt ans qu'on se connaît, il est temps qu'il s'en aperçoive. J'espère qu'il n'en a pas trop de stigmates.
ARLETTE CHABOT - Est-ce que vous ne pensez pas quand même que tout ça converge dans le même sens, c'est-à-dire de faire de ce deuxième tour un référendum pour ou contre Nicolas SARKOZY et que c'est votre personnalité qu'on met en cause ? C'est ce que fait François BAYROU, c'est ce que fait aussi Ségolène ROYAL.
NICOLAS SARKOZY - Oui, je ne sais pas...
ARLETTE CHABOT - Il y a le projet et il y a vous.
NICOLAS SARKOZY - Vous savez, moi, vous avez certainement observé que depuis le début de la campagne, je n'ai attaqué personne. J'ai même dit que je respectais madame ROYAL et que j'avais de l'amitié pour monsieur BAYROU. J'ai été attaqué violemment par monsieur BAYROU, madame ROYAL s'est même laissé aller à des mots, je pense au mot « ignoble », à mon endroit. Quant à monsieur LE PEN, il m'a contesté même le droit d'être candidat, puisque l'un de mes grands-parents n'est pas Français. Ecoutez, franchement, ce n'est pas ce qu'attendent les Français. Qu'est-ce qu'ils attendent, les Français ? Que j'apporte des réponses précises aux problèmes qui sont les leurs. Pour le reste, madame ROYAL comme moi, si nous avons la responsabilité d'être président de la République, nous devons être à la hauteur de la dignité de la fonction. Ne m'en veuillez pas, je ne répondrai à aucune de ces injures.
ARLETTE CHABOT - Mais, je ne vous demande pas de répondre, mais quand même est-ce que vous n'êtes pas en train de payer...
NICOLAS SARKOZY - Ah, mais si vous me posez des questions et que vous ne me demandez pas de répondre, madame CHABOT, c'est peut-être à vous de répondre !
ARLETTE CHABOT - ... Répondre, si, mais pas aux injures, répondre à mes questions et pas aux injures. Est-ce que vous n'êtes pas quand même en train de payer finalement une espèce de liberté de ton, de langage, le goût du débat, parfois limite provocation, aujourd'hui, c'est ça qu'on vous renvoie et qu'on n'a peut-être pas tout à fait compris ?
NICOLAS SARKOZY - Madame CHABOT, vous avez commencé votre émission en disant : C'est extraordinaire, vous avez rassemblé sur votre nom 11,5 millions de Français. Vous me dites après : Vous payez. Mais je paye quoi ? Le fait que la vie politique française suscitait un ennui profond ? S'il y a eu 84 % de participation, madame CHABOT, j'y suis peut-être pour quelque chose. Les débats que vous, les journalistes, vous n'aimez pas, peut-être que les Français les apprécient...
ARLETTE CHABOT - Pourquoi on ne les aimerait pas, nous ? On les organise...
NICOLAS SARKOZY - Non, je veux dire les débats francs. Quand j'ai parlé de l'identité nationale, la totalité de la presse et des élites me l'ont reproché...
ARLETTE CHABOT - Même dans votre camp, Simone VEIL n'était pas très, très emballée par vos propos...
NICOLAS SARKOZY - J'ai persisté. Est-ce que les Français m'ont sanctionné ? N'est-il pas normal qu'un candidat à la présidence de la République française parle de la France et exige - je dis exige - de ceux qui veulent devenir Français qu'ils aiment la France, qu'ils la respectent ? Madame CHABOT, j'ai l'impression qu'un certain nombre d'entre vous, vous vivez dans un milieu qui est totalement déconnecté des réalités du pays. Quand j'ai dit : Je vais aller dans les usines parce que je veux parler du pouvoir d'achat qui est trop faible et je veux mettre en valeur le travail parce que pour gagner plus, il faut travailler plus. On s'est moqué de moi aussi. Quand j'ai posé un certain nombre de débats sur l'euro fort, beaucoup trop fort, qui détruit des emplois ; sur la Turquie qui ne devait pas entrer en Europe ; sur l'Europe qui devait protéger ; là aussi, j'ai vu le concert de la pensée unique. Mais moi, ça m'est égal ! Parce que je ne suis pas candidat pour plaire à un petit milieu parisien, je suis candidat pour essayer de convaincre les Français, je veux leur dire que la politique renonce depuis trop longtemps. Parce qu'ils s'inclinent, tous ces gens-là, devant la fatalité. Pas moi. Lorsque je reçois la mère d'une jeune fille lapidée par deux voyous barbares, torturée, je fais mien son combat et je dis que ce n'est pas admissible de tolérer de tels actes dans la République française. Alors, évidemment, entre le boulevard Saint-Germain et l'Assemblée nationale, on peut s'émouvoir. Mais les Français, eux, ils comprennent. Quand il y a les émeutes à la gare du Nord et que monsieur BAYROU, comme madame ROYAL, trouvent des excuses aux fraudeurs, moi, je félicite la police d'avoir interpellé ce fraudeur, sans-papiers, multirécidiviste, et je dis que je ne suis pas du côté des casseurs. Alors, peut-être que ça ne fait pas plaisir à tel ou tel journaliste, mais moi, je ne me présente pas devant les journalistes. Je me présente devant le peuple français.
ARLETTE CHABOT - Alors, je sais que vous n'avez pas...
NICOLAS SARKOZY - Je vous le dis gentiment, mais je vous le dis quand même.
ARLETTE CHABOT - Ségolène ROYAL dit : « Il sait tout, il a réponse à tout. »
NICOLAS SARKOZY - C'est une critique ?
ARLETTE CHABOT - Je pense que dans sa bouche, ce n'est pas forcément un compliment, c'est votre défaut.
NICOLAS SARKOZY - Ah bon ! Ecoutez, franchement, dans ce cas-là, choisissons une candidate qui ne sait pas tout et qui n'a pas de réponse.
ARLETTE CHABOT - Est-ce que vous ne pensez pas que ce qui se passe aujourd'hui quand même annonce, quoi qu'il arrive et quel que soit le résultat, une évolution de la gauche ? C'est-à-dire vous incarnez une droite moderne, est-ce que Ségolène ROYAL n'est pas en train de faire évoluer très vite un Parti socialiste qui sera beaucoup plus moderne, très différent, quoi qu'il arrive ?
NICOLAS SARKOZY - Ecoutez, moi, je... Je n'ai pas à gérer le Parti socialiste. Ce que je peux dire, c'est que depuis des années, j'ai demandé à la droite républicaine et au centre de faire un travail idéologique très profond sur eux-mêmes. Qu'est-ce que ça veut dire ? Pendant des années, la droite française a désespéré ses électeurs en appliquant, en faisant, une fois élue, le contraire de ce qu'elle avait dit qu'elle ferait. C'est l'explication du Front national. Ces électeurs qui sont partis au Front national ne sont pas partis au Front national parce que LE PEN représentait une espérance ! Mais parce que nous, nous les avions désespérés. Mais en même temps, j'ai décomplexé la droite républicaine française et le centre, je leur ai dit : Ne soyons pas si rigides, ouvrons-nous à d'autres idées. Nous nous sommes trompés sur le PACS, toute la question de l'homophobie, de la reconnaissance qu'il y avait une discrimination scandaleuse à l'endroit des homosexuels. Je leur ai dit : Nous nous sommes trompés à l'endroit de la fonction publique, les fonctionnaires doivent être respectés, considérés, leur situation doit être améliorée. Nous nous sommes trompés sur l'éducation nationale, les enseignants, la qualité de vie des enseignants, le respect que l'on doit à un enseignant, est-ce qu'on en a fait assez pour eux ? J'ai voulu élargir la droite républicaine française. A l'arrivée, qu'est-ce qui se passe ? Si j'en juge les résultats du premier tour, nous avons récupéré l'écoute des milieux populaires. C'est exactement ce que je veux faire, passionner les Français pour la politique, leur expliquer que la politique, ça peut changer les choses et que si je suis élu président de la République, je ferai scrupuleusement, après l'élection, ce que j'ai dit avant. En même temps, j'ai voulu que la droite récupère des thèmes, le pouvoir d'achat, les salaires, les salaires sont trop bas dans notre pays !
ARLETTE CHABOT - On va en parler dans un instant...
NICOLAS SARKOZY - Je veux protéger les Français contre les délocalisations, c'est un sujet massif, considérable. Je veux qu'on arrête la République des droits virtuels pour faire la République des droits réels. Voilà ce que j'ai voulu faire. Après, que ça plaise ou pas dans tel ou tel petit milieu, peu m'importe ! Ce que je souhaite, c'est que les Français me comprennent. Et si demain, je suis élu, ce n'est pas la presse, ce n'est pas les sondages, ce n'est pas les élites qui m'auront choisi, c'est le peuple, c'est la logique des institutions de la 5ème République.
ARLETTE CHABOT - A ceux qui disent : Si Nicolas SARKOZY est élu, c'est le désordre qui commence, les syndicats vont protester, dans les banlieues, il va y avoir des violences, des manifestations, bref le désordre arrive !
NICOLAS SARKOZY - Ah bon ! Parce que ça veut dire qu'avant moi...
ARLETTE CHABOT - Qu'est-ce que vous répondez à ça ? C'est ce qu'on entend...
NICOLAS SARKOZY - Oui, alors...
ARLETTE CHABOT - Je vous pose la question. C'est un argument de campagne.
NICOLAS SARKOZY - C'est extraordinaire ! Prenons un exemple. On dit ça parce que je promets aux Français, notamment aux Français qui habitent en banlieue, un service minimum dans les transports. Alors, l'histoire mérite d'être contée ! Cela fait vingt ans qu'on promet le service minimum dans les transports, vingt ans. Vingt ans qu'après l'avoir promis, on ne le fait pas. Je dis aux Français : Si je suis élu président de la République, il y aura un service minimum dans les transports avant la fin de l'année 2007. Qu'est-ce que ça veut dire ? Cela veut dire que vous aurez trois heures de transports en commun, y compris les jours de grève, le matin, pour aller à votre travail, et trois heures de transport en commun, l'après-midi, pour revenir de votre travail. On me dit : Oui, mais alors, c'est dramatique parce que ça ne plaît pas à monsieur THIBAULT ! Je respecte monsieur THIBAULT. Je considère les syndicats et notamment la CGT. Mais si monsieur THIBAULT a un projet présidentiel, il faut qu'il se présente à l'élection présidentielle. Ma pratique du gouvernement, j'ai une longue expérience des affaires gouvernementales, c'est le dialogue, c'est l'écoute, c'est la concertation. Nous avons besoin de syndicats forts. Mais alors, si on ne peut pas mettre en oeuvre le projet, après les élections, qu'on a défendu avant, si les Français vous font confiance, alors, à quoi ça sert de faire des élections, madame CHABOT ?
ARLETTE CHABOT - Petite parenthèse, vous avez un peu évolué sur le service minimum - on parlera de votre projet tout à l'heure économique et social - vous aviez dit une loi, maintenant, vous dites quand même qu'il y aura une concertation avec les syndicats...
NICOLAS SARKOZY - Non, je ne l'ai pas...
ARLETTE CHABOT - Ce ne sera pas une loi automatique...
NICOLAS SARKOZY - Je dirai aux syndicats et au ministre des Transports : Voilà, négociez cet été et essayez de trouver une solution. Si, au début du mois de septembre, ils ont trouvé une solution, il n'y aura pas besoin de loi. Si, au début du mois de septembre, ils n'ont pas trouvé de solution, il y aura une loi qui sera votée avant le mois de décembre 2007.
ARLETTE CHABOT - Ségolène ROYAL, à votre place, hier, disait : « Je suis libre. » A une question que je lui posais. C'était le titre d'un livre que vous avez publié il y a quelques années, « Libre ». Vous vous sentez aussi totalement libre dans cette campagne ?
NICOLAS SARKOZY - Pour vous dire, j'ai essayé et j'essaye d'être un homme libre. Parce que le président de la République, ce n'est pas l'homme d'un parti, ce n'est pas l'homme d'un clan, ce n'est pas l'homme d'une secte, ce doit être l'homme de la nation. Pour cela, il doit être libre à l'endroit de toute attache, partisane, économique, sociale. Il ne doit penser qu'à une seule chose : servir l'intérêt général, servir son pays. Vous savez, la France m'a tout donné. Pour moi, j'estime qu'il est venu le temps de tout lui rendre.
ARLETTE CHABOT - Il y a un petit sondage qui dit que si vous êtes élu président, les Français voient comme Premier ministre, il y a une majorité qui dit Jean-Louis BORLOO... Oui ? Non ? Vous ne donnez pas le nom du Premier ministre ce soir, je le sais bien. Ce n'est pas une mauvaise idée, a priori... C'est une idée parmi d'autres, vous allez dire, c'est ça...
NICOLAS SARKOZY - C'est une idée.
ARLETTE CHABOT - Merci. On va aller...
NICOLAS SARKOZY - Au moins comme ça, je vois la chose, je repartirai de cette émission avec une idée.
ARLETTE CHABOT - Avec une idée, oui. Mais vous êtes là surtout pour présenter vos idées aux Français ce soir. On va s'asseoir justement et on va reparler de votre programme, tout de suite, avec Gilles LECLERC.
GILLES LECLERC - Bonsoir, Nicolas SARKOZY.
NICOLAS SARKOZY - Bonsoir, Gilles LECLERC.
GILLES LECLERC - Dans nos institutions, le président de la République est quelqu'un qui détient beaucoup de pouvoirs. Est-ce que dans une démocratie moderne, telle que vous l'imaginez, j'imagine, est-ce qu'il faut des contre-pouvoirs ? D'autant que ceux qui ne vous aiment pas, vos adversaires, vos concurrents disent souvent : Avec Nicolas SARKOZY, il a l'âme d'un chef, il va non seulement présider, mais s'occuper de tout, diriger, il va concentrer beaucoup de pouvoirs.
ARLETTE CHABOT - Où sont les contre-pouvoirs ?
GILLES LECLERC - Où sont les contre-pouvoirs ?
NICOLAS SARKOZY - D'abord, bien sûr, la Constitution prévoit des contre-pouvoirs naturellement, il ne s'agit pas d'avoir des contre-pouvoirs pour empêcher celui qui a des responsabilités de les exercer. Si les Français m'élisent président de la République, je m'engage sur une logique de résultat. J'ai fait des promesses, j'ai pris des engagements, je les tiendrai. Je ne m'abriterai derrière personne en cas d'échec, je rendrai des comptes aux Français. Je dirai très régulièrement aux Français : Voilà où nous en sommes, j'avais promis ceci, j'avais pris tel engagement, voilà où j'en suis. Premier élément : Je veux rendre des comptes aux Français très régulièrement. Je gouvernerai avec une obsession, monsieur LECLERC, l'obsession de l'obtention des résultats. Cela fait trop longtemps qu'on fait des discours en France, des discours dans lesquels de moins en moins de gens croient. Je veux des résultats. Deuxième élément, je vais, de moi-même, demandé à ce qu'un certain nombre de pouvoirs du président de la République soient encadrés, en quelque sorte limités. Je pense...
GILLES LECLERC - Vous pensez aux nominations, par exemple...
NICOLAS SARKOZY - Exactement. Je pense à la question centrale des nominations. Je souhaite une République irréprochable. Qu'est-ce que ça veut dire ? Je pense que les nominations, que ce soit la gauche ou la droite - la gauche n'a aucune leçon à donner en la matière - sont trop souvent le fait du prince. On récompense, on nomme des amis, c'est la connivence. Je souhaite des nominations qui soient la compétence. Alors, comment on peut faire ? Toutes les grandes nominations, je les soumettrai au contreseing des commissions compétentes du Parlement. Par exemple, lorsqu'on choisit le président d'une grande entreprise, EDF, je demanderai à ce que le gouvernement propose un nom et que ce nom soit soumis pour approbation à la Commission des Affaires économiques du Sénat et de l'Assemblée nationale et ratifié à la majorité qualifiée pour que l'opposition, madame CHABOT, ratifie, elle aussi, la proposition du gouvernement. C'est clair. Cela veut dire que...
GILLES LECLERC - Donc, vous souhaitez un rôle pour l'opposition, un statut...
NICOLAS SARKOZY - Attendez, c'est autre chose, c'est la deuxième chose. Donc, les nominations ne seront plus le fait du prince. C'est un élément décisif de la République irréprochable que je... Troisième élément...
ARLETTE CHABOT - Petite précision, vous avez repris l'idée de Ségolène ROYAL de confier la présidence de la Commission des Finances à l'Assemblée à quelqu'un de l'opposition...
NICOLAS SARKOZY - Mais voilà bien...
ARLETTE CHABOT - Mais vous confirmez, c'est votre proposition en tout cas...
NICOLAS SARKOZY - Enfin... C'est ma proposition ou c'est celle de madame ROYAL, madame CHABOT, est-ce que vous avez demandé hier...
ARLETTE CHABOT - En tout cas, c'est votre proposition, j'oublie le texte comparatif...
NICOLAS SARKOZY - Est-ce que vous avez demandé... ?
ARLETTE CHABOT - ... Elle l'a dit, elle l'a confirmé, donc voilà...
NICOLAS SARKOZY - Alors, très bien. Très bien. Alors, troisième proposition, je propose...
ARLETTE CHABOT - Mais vous dites oui à ça quand même...
NICOLAS SARKOZY - J'y viens. Je propose un statut de l'opposition. Je trouve que l'opposition doit avoir davantage de pouvoir pour exprimer ses opinions et contrôler le gouvernement. Si je suis président de la République, je recevrai les leaders de l'opposition régulièrement et je propose que la présidence de la commission la plus importante, la présidence de la Commission des Finances soit confiée à un représentant de l'opposition...
GILLES LECLERC - Ce n'est pas au symbole, ça va au-delà, ça va au-delà...
NICOLAS SARKOZY - Comment ça... C'est considérable ! C'est un élément très nouveau, c'est absolument considérable. Je souhaite une pratique irréprochable pour notre République.
GILLES LECLERC - Que devient le Premier ministre dans cette conception-là ?
NICOLAS SARKOZY - Le Premier ministre coordonne l'action des ministres. Dans un pays de 64 millions d'habitants, le Premier ministre a un rôle essentiel. Mais je précise une chose, je ne vois pas la répartition des pouvoirs entre le président et le Premier ministre avec un président qui ne s'occupe que de l'international et un Premier ministre qui ne s'occupe que du national. Le président de la République, si on l'élit pour cinq ans, c'est pour qu'il fasse du travail à la maison en quelque sorte. Alors, non pas que l'action internationale n'ait pas des répercussions nationales. Mais le président de la République ne peut pas se désintéresser de la réforme de l'Etat, de la réforme de la Sécurité sociale, des résultats en matière d'emploi. Je veux m'engager, par exemple, sur le plein emploi, 5 % de chômeurs à la fin de mon quinquennat. Mais le Premier ministre n'est pas interdit de quitter le territoire national pour aller représenter la France, avec la force que représente cette fonction, dans d'autres pays.
GILLES LECLERC - Petite parenthèse, juste sur le rôle du Premier ministre, qui mènera, par exemple, la bataille des législatives ? Ce sera lui, le chef de la majorité ? C'est comme ça que c'est dans la tradition de la 5ème République. Ce sera vous ? Ce sera le président de l'UMP ?
NICOLAS SARKOZY - Enfin, moi, je n'ai jamais...
GILLES LECLERC - Les législatives du mois de juin, par exemple...
NICOLAS SARKOZY - Pardon, moi, vous savez, j'essaye...
GILLES LECLERC - C'est une parenthèse...
NICOLAS SARKOZY - J'essaye d'être quelqu'un de simple, de cohérent et, si possible, de bon sens. Pour moi, le chef, c'est plutôt celui qui est élu plutôt que celui qui est nommé. Le Premier ministre conduira la bataille des législatives. Mais il va de soi que le président de la République, qui viendrait d'être élu ou qui viendra d'être élu, ne peut pas se désintéresser et demandera aux Français de lui donner une majorité au Parlement pour voter...
GILLES LECLERC - En conservant la présidence du parti...
NICOLAS SARKOZY - ... Et pour adopter le projet présidentiel.
GILLES LECLERC - Tout en restant président de l'UMP...
NICOLAS SARKOZY - Non. Non. Si je suis président de la République, j'abandonnerai immédiatement toute fonction élective et partisane.
GILLES LECLERC - Dans une République apaisée, moderne, est-ce que, au fond, la proportionnelle n'est pas une bonne idée ? Puisque vous parliez, il y a un instant, du statut de l'opposition. Vous le proposez, par exemple, pour le Sénat, pourquoi pas une dose de proportionnelle pour l'Assemblée ?
NICOLAS SARKOZY - Franchement, si on avait la proportionnelle à l'Assemblée aujourd'hui...
GILLES LECLERC - Non, une dose, une dose de proportionnelle...
NICOLAS SARKOZY - Monsieur LECLERC, si on avait la proportionnelle aujourd'hui à l'Assemblée, avec les agitations auxquelles on assiste, quand vous voyez que pour organiser un débat entre deux personnes, cela fait déjà huit fois qu'ils changent, vous imaginez la pagaille qu'il y aurait dans le pays s'il n'y avait pas de majorité et si chacun pouvait faire danser l'autre à coups de petits arrangements !
ARLETTE CHABOT - Une petite dose, une dose qui permet à des partis importants d'être représentés...
NICOLAS SARKOZY - Alors, attendez... Premier élément. Deuxième élément, j'ai proposé que nous réfléchissions à l'augmentation de la part de la proportionnelle au Sénat pour que les grands courants d'idées politiques puissent être représentés et que le Sénat ne soit pas simplement la Chambre des communes de France, mais également des grands courants d'opinion. Certains de mes amis sont pour aller plus loin, notamment un peu de proportionnelle à l'Assemblée nationale, on peut en discuter, je n'y suis guère favorable. Mais en tout état de cause, cela ne pourrait se faire éventuellement que si on prenait la décision de supprimer un certain nombre de postes de députés. Car, il y en a déjà beaucoup. Dans mon esprit...
GILLES LECLERC - Ce serait quoi, le bon chiffre, ce serait quoi ?
NICOLAS SARKOZY - Dans mon esprit, il ne saurait être question de créer un seul poste de député de plus.
ARLETTE CHABOT - Est-ce que vous êtes un adepte du référendum ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, le référendum, c'est quelque chose qui peut être très utile. Mais enfin, réfléchissons ensemble, Arlette CHABOT. Les Français vont voter deux tours à la présidentielle, le mois de mai, le mois d'avril ; deux tours pour la législative au mois de juin. Puis, nous aurons les municipales, les régionales, les cantonales, les sénatoriales. Franchement, si je suis président de la République, est-ce que vous croyez que je pourrais dire au pays : Voilà, je vais vous demander votre avis, j'ai encore besoin d'avoir votre opinion, on va faire un référendum en plus...
ARLETTE CHABOT - Oui, mais il y a des sujets qui le méritent peut-être...
NICOLAS SARKOZY - ... Je crois que si je suis élu président de la République, après les législatives, il sera largement temps qu'on se mette au travail.
ARLETTE CHABOT - Si vous dites qu'un président est responsable, est-ce que vous pensez, par exemple, qu'un président qui organise un référendum et qui perd ce référendum, qui s'est engagé, doit aussi quitter le pouvoir ?
NICOLAS SARKOZY - Ma pratique des institutions, c'est qu'en France, le référendum voulu par le général de GAULLE, ce n'est pas le référendum cantonal suisse. Partant, si le président de la République engage un référendum, il doit lui-même engager son destin politique. C'est ce que le général de GAULLE avait fait en 1969. Il y a eu d'autres pratiques et d'autres exemples. Mais pour moi, un référendum qui n'a pas de signification politique, c'est un référendum dont on peut s'interroger sur son utilité.
ARLETTE CHABOT - Ce que vous dites, au fond, culture du résultat, mais le président, lui, il revient cinq ans plus tard, c'est là qu'il peut être sanctionné par les Français...
NICOLAS SARKOZY - Ah, mais j'irai plus loin ! Dans la République irréprochable que je souhaite, je demanderai à chacun des ministres qu'ils recevront une lettre de mission : Voilà ce qu'ils doivent faire, voilà les résultats qu'ils doivent...
ARLETTE CHABOT - Comme une entreprise...
NICOLAS SARKOZY - Je ne sais pas si c'est comme une entreprise, mais enfin, si les gens...
GILLES LECLERC - Recherche d'efficacité...
NICOLAS SARKOZY - Si les gens nous élisent, c'est pour qu'on fasse un travail ! Ce travail, on ne nous demande pas, nous, une obligation de moyen, madame CHABOT. On nous demande une obligation de résultat. C'est quand même extraordinaire, la démocratie, il faut qu'elle vive ! Si on s'engage sur 5 % de chômeurs et que, à l'arrivée, il y en a 10, c'est qu'il y a un problème ! Moi, je me suis engagé, lorsque je suis devenu ministre de l'Intérieur, à publier, tous les mois, les chiffres de la délinquance. La délinquance a reculé, elle a reculé fortement dans notre pays. Si elle avait augmenté, j'aurais eu à rendre des comptes. C'est tout à fait normal.
GILLES LECLERC - Encore une question de méthode qui concerne le service minimum dont vous avez parlé tout à l'heure, je parle bien encore de la méthode. François CHEREQUE, demain, dans le quotidien LES ECHOS, dit : Au fond, avec Nicolas SARKOZY, il fixe à l'avance le résultat et le calendrier. Alors, qu'est-ce qu'il reste à négocier ?
NICOLAS SARKOZY - Pardon, pardon, pardon ! Ce n'est pas moi qui fixe. Si les Français votent pour moi, c'est qu'ils adoptent un projet politique. Je suis désolé. Je respecte beaucoup François CHEREQUE, qui est un homme de très grande qualité, avec qui j'ai souvent négocié et discuté. Mais expliquer ce que serait un candidat à la présidentielle qui dirait devant le suffrage des Français : Excusez-moi, je n'ai pas de projet, parce qu'il faut que je le discute avec les syndicats !
GILLES LECLERC - De quoi on discute alors à ce moment-là ?
NICOLAS SARKOZY - Par exemple, on discute...
GILLES LECLERC - Si vous connaissez le calendrier et vous avez...
NICOLAS SARKOZY - Mais on discute de tas de choses !
GILLES LECLERC - ... Défini l'objectif...
NICOLAS SARKOZY - Les Français choisissent le service minimum. Ensuite, pour établir les modalités de ce service minimum, est-ce que c'est deux heures ? Est-ce que c'est trois heures ? Est-ce que c'est un train sur trois, est-ce que c'est 1 train sur deux, les modalités...
GILLES LECLERC - Donc, on discute des modalités...
NICOLAS SARKOZY - La rémunération. Eh bien, il y a tout le champ de la négociation avec les partenaires sociaux, y compris pour une expérimentation. Mais, enfin, ça fait trop longtemps qu'en France, on dit aux électeurs « Donnez-moi un blanc-seing pour faire ceci » et à l'arrivée on ne le fait pas. Il ne faut pas s'étonner qu'il y eut pendant tant d'années une abstention généralisée.
ARLETTE CHABOT - Mais, par exemple, Nicolas SARKOZY, vous dites « Objectif 5 % » pour le chômage, si au bout de votre mandat, si vous êtes élu, au bout de 5 ans vous n'arrivez pas à ce chiffre, vous dites « Je ne vais pas me représenter » ?
NICOLAS SARKOZY - Mais, je dis aux Français c'est un échec, j'ai échoué. C'est aux Français d'en tirer les conséquences. Regardons l'Europe, il y a 5 pays en Europe qui ont obtenu le plein emploi : le Danemark et la Suède, l'Irlande et le Royaume-Uni et, d'une certaine façon, l'Espagne qui est passée de 20 à 8 %. Pourquoi voudriez-vous que nous soyons le seul pays qui renonce à cet objectif du plein emploi ? Aucun des pays qui ont obtenu le plein emploi n'ont fait le partage du temps de travail et encore moins les 35 heures, cette idée curieuse que personne ne nous a prise par ailleurs. Moi, je veux m'engager, je dis aux Français par exemple sur la sécurité « A l'été 2007, j'aurai fait voter une loi pour punir beaucoup plus sévèrement les multirécidivistes et pour résoudre le problème des mineurs délinquants. Parce que si je me présente, c'est parce que je veux changer les choses. Je dis aux Français que c'est possible, mais si ils m'élisent, s'ils me font confiance, c'est pour que je fasse le travail sur lequel ne me suis engagé, sinon à quoi ça sert la démocratie ?
ARLETTE CHABOT - Mais, en vous écoutant, Ségolène ROYAL, hier, disait, pardonnez-moi de la citer, mais il se trouve qu'elle est en face de vous le 6 mai prochain, dit, en gros : la réforme avec la brutalité, c'est Nicolas SARKOZY, avec moi ça sera le vrai changement en douceur. Vous pensez qu'il y a une vraie différence de méthode entre vous ou pas ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, enfin, franchement si rénover la vie politique, c'est insulter son concurrent, je ne suis pas sûr que ça change beaucoup la vie politique.
ARLETTE CHABOT - Vous êtes un adepte de la concertation ou pas ? C'est ça qui est derrière.
NICOLAS SARKOZY - Non, Madame CHABOT, il y a une différence - pardon, je ne veux surtout pas être désagréable à l'endroit de madame ROYAL - mais il y a une différence entre elle et moi, c'est que, moi, j'ai exercé des responsabilités importantes au gouvernement de la France, comme ministre des Finances...
ARLETTE CHABOT - Elle a été ministre aussi.
NICOLAS SARKOZY - Oui, elle a été ministre délégué à la Famille, c'est tout à fait important...
ARLETTE CHABOT - Et à l'Environnement.
NICOLAS SARKOZY - ...m'enfin, les réformes qu'elle a mise en oeuvre, elle vous les expliquera certainement, mais c'est difficile de s'en souvenir. Lorsque j'étais ministre des Finances, j'ai réformé le statut d'EDF. Il y a-t-il eu un problème ? J'ai été 4 ans ministre de l'Intérieur, dans l'un des ministères les plus syndiqués de France, il y a-t-il eu un problème ? Enfin, écoutez, lorsque je suis devenu ministre de l'Intérieur, chacun se souvenait que... mes prédécesseurs socialistes avaient réussi à mettre les gens dans la rue et les policiers dans la rue. En 4 ans...
GILLES LECLERC - Vous êtes quand même pour dire qu'on gouverne plutôt dans l'apaisement que dans le conflit ou le rapport de forces ?
NICOLAS SARKOZY - Mais bien... attendez, attendez ! En 4 ans, il n'y a pas eu une grève et une manifestation dans le ministère que j'ai dirigé ni aux Finances ni à l'Intérieur. Alors, vous dites « On dirige dans l'apaisement », mais bien sûr. Mais en même temps, Monsieur LECLERC, il y a un travail à faire. Est-ce que vous croyez que c'est facile de diriger un pays de 64 millions d'habitants, la 5e puissance du monde ? Si par avance, vous dites « Dès que je gênerai un corporatisme, dès que je bougerai un immobilisme, je reculerai », alors dans ce cas-là, il vaut mieux dire aux Français tout de suite « Ecoutez, je suis là pour pas déranger, mon programme c'est de vous écouter et de rien faire. » Il se trouve que c'est pas le mien. Je pense, au contraire, au contraire, que c'est en provoquant des changements, en portant une politique de réforme, en créant la dynamique du plein emploi et de la croissance qu'on pourra donner plus à chacun.
GILLES LECLERC - Avec une légitimité d'une élection, est-ce qu'on peut tout faire ?
NICOLAS SARKOZY - Enfin « tout faire », de républicain !
GILLES LECLERC - On peut avancer quitte à ce que, peut-être, il y ait des milliers de manifestants dans les rues.
NICOLAS SARKOZY - Mais, c'est extraordinaire...
ARLETTE CHABOT - On voit bien le CPE, les réformes, etc., tous les gouvernements reculent sur les réformes.
NICOLAS SARKOZY - Non, mais, comme vous le savez, le CPE, j'étais contre parce que je suis contre un contrat spécifique pour les jeunes. Je considère que les jeunes doivent être protégés de la même façon que les autres. Mais, alors, c'est extraordinaire. Alors, parce que je ne suis pas de gauche, ça deviendrait illégitime. Parce que je ne suis pas de gauche, je provoquerais des mouvements sociaux. Mais, qui est-ce qui a vu ça ?
ARLETTE CHABOT - Non, mais il y a des gouvernements de gauche qui ont reculé, des réformes dans l'éducation, Claude ALLEGRE, ça s'est mal terminé.
GILLES LECLERC - Il y a la réalité tout simplement du terrain et de la société.
NICOLAS SARKOZY - Alors, maintenant, on ne peut pas me reprocher mes idées, mais on dit « Attention, si c'est vous, il y aura des grèves. » Mais, est-ce que vous posez les mêmes questions à madame ROYAL ? Est-ce que vous la posez cette question ?
GILLES LECLERC - On la pose à tous ceux qui veulent devenir président de la République.
NICOLAS SARKOZY - Est-ce que vous la posez avec la même insistance ?
ARLETTE CHABOT - Parce que les organisations syndicales disent clairement, pardonnez-moi, Nicolas SARKOZY, en fait qu'ils penchent d'un côté et pas de l'autre. C'est pour ça qu'on vous pose cette question.
NICOLAS SARKOZY - C'est très bien Arlette CHABOT. Quand monsieur ALLEGRE était ministre de l'Education nationale, il était de gauche, il a mis tous les enseignants dans la rue...
ARLETTE CHABOT - C'est ce que je vous dis.
NICOLAS SARKOZY - Ils s'en souviennent, bon. Au nom de quoi, ça c'est extraordinaire, il y aurait donc une candidate de l'apaisement et un candidat de l'affrontement. Mais, vous savez ce que ça s'appelle [sic] ça ? Ça s'appelle un procès d'intention.
GILLES LECLERC - Nicolas SARKOZY...
NICOLAS SARKOZY - Attendez, attendez...
GILLES LECLERC - Pardon !
NICOLAS SARKOZY - On me demande, je veux bien me justifier sur le projet qu'est le mien, je veux bien me justifier ou m'expliquer sur mon passé, mais c'est extraordinaire qu'on me demande de m'expliquer sur les manifestations futures si j'étais élu président de la République.
ARLETTE CHABOT - Il y a des mises en garde...
NICOLAS SARKOZY - Ça devient compliqué...
GILLES LECLERC - Je cite Bernard THIBAULT ce soir Nicolas SARKOZY.
NICOLAS SARKOZY - Attendez ! Ça devient compliqué de se présenter aux élections. Quant à Bernard THIBAULT et la CGT...
GILLES LECLERC - Il dit...
NICOLAS SARKOZY - Il est membre du bureau politique du Parti communiste, c'est son droit le plus absolu.
GILLES LECLERC - Je vais juste le citer...
NICOLAS SARKOZY - Attendez, c'est son droit le plus absolu, qu'il ne vote pas pour moi, c'est également son droit. J'ai vu dans un récent sondage, qu'il y avait 11 % des adhérents de la CGT qui avaient voter pour moi, ce qui prouve qu'y compris à la CGT, ils savent que je peux comprendre ce que je dis.
GILLES LECLERC - Vous savez ce qu'il dit, ce soir, toujours à propos du service minimum ? Il dit « Nicolas SARKOZY veut nous mettre un revolver sur la tempe. » Donc, ça ne préfigure pas un apaisement d'une France rassemblée.
NICOLAS SARKOZY - Heureusement, que c'est moi qui suis brutal, en disant ça. Je prends un autre exemple : la fédération CGT des cheminots a déclaré que l'ennemi c'était moi. Pourquoi ? Parce que j'ai dit que si j'étais élu président de la République, je proposerai aux Français de faire la réforme des régimes spéciaux de retraite. Pourquoi ? Parce que je n'accepte pas que les salariés du privé cotisent 40 ans, que les salariés du public cotisent 40 ans et que dans les régimes spéciaux on cotise 37,5 ans. Je ne fais pas ça parce que j'aime pas les cheminots, qui sont des gens que je respecte, qui font un travail très difficile, mais qui doivent comprendre que, dans un pays où on met « Egalité » au frontispice des établissements publics, l'égalité c'est chacun cotise 40 ans. Voyez-vous, dire ça, la CGT Cheminots dit « On s'y opposera. » Bon, alors, écoutez, dans ce cas-là, il n'y a qu'à voter que pour la CGT Cheminots.
ARLETTE CHABOT - Ça veut dire que... Je posais la question, tout à l'heure, en disant, effectivement Claude ALLEGRE a reculé, il y a d'autres réformes qui ont été, effectivement, reprises par des gouvernements parce qu'il y avait des manifestations. Vous, vous pensez qu'il faut tenir ?
NICOLAS SARKOZY - Moi, je pense qu'il faut écouter, qu'il faut dialoguer et qu'il faut avancer.
ARLETTE CHABOT - Parce que vous n'avez pas préparé les réformes ?
NICOLAS SARKOZY - ...et qu'il faut avancer. En fait, vous décrivez une France très immobile et très conservatrice, je ne vous en veux pas.
ARLETTE CHABOT - C'est la réalité non ? C'est bien des réformes qui ont été stoppées à cause de ça ?
NICOLAS SARKOZY - Mais, je m'inscris totalement en faux avec ça. La France ne redoute pas le changement, elle l'espère. Les Français veulent une bonne école pour leurs enfants, veulent une meilleure sécurité, veulent le plein emploi, veulent une formation. Ils savent parfaitement bien que d'autres pays ont fait des changements et qu'il est venu le temps de les faire. D'ailleurs, si la France représentait et ressemblait à ce que vous en dites, on se demande bien pourquoi je suis arrivé en tête au 1er tour avec un score que vous n'avez jamais imaginé, dépassant toutes les prévisions de tous les instituts. J'ai été totalement et clairement, pour la plupart, à l'exception d'un ou deux, sous-estimé au 1er tour. C'est donc bien que vous vous trompez sur ce qu'est la France ? Mais, c'est quand même extraordinaire, vous devriez vous réjouir : 84 % de participation. Des gens qui se sont passionnés pour la campagne, des millions de téléspectateurs à toutes les émissions.
ARLETTE CHABOT - J'ai même regardé les émissions de télévision, voyez !
NICOLAS SARKOZY - Exactement. Eh bien, j'ai un projet, ce projet est clair, si les Français me donnent la majorité, ce projet sera appliqué. Mais, qu'est-ce que vous attendez Monsieur LECLERC de moi ? Que je dise le contraire ? Alors, que les choses soient claires là aussi : je ne mentirai pas parce que ça fait trop longtemps que, dans la vie politique française, on raconte n'importe quoi avant les élections. Je dis les choses telles que je les crois justes, j'écouterai, je dialoguerai, j'animerai des équipes, mais, c'est vrai, s'il y a un travail à faire, je le ferai comme je l'ai fait aux Finances pour sauver...
GILLES LECLERC - Sans jamais reculer ?
NICOLAS SARKOZY - C'est pas ça... Non... Comme je l'ai fait aux Finances pour sauver ALSTOM, comme je l'ai fait à l'Intérieur. L'affaire du « reculer », mais non, la question ne se pose pas du tout comme ça Monsieur LECLERC. Il ne faut jamais se mettre en situation de brutaliser. Il faut se mettre en situation de rassembler. Si j'ai rassemblé tant de millions de gens sur ma candidature, c'est justement parce que je veux créer une dynamique. Je veux faire de la France de nouveau le pays où on peut créer, innover, inventer, le pays de la nouveauté, le pays où il y a la joie de vivre, la volonté de vivre et pas simplement le pays où on est terrorisé assis sur sa chaise. Je dis d'ailleurs aux Français que je vais les protéger, mais pour les protéger, il faut redonner du dynamisme et de la croissance à notre pays.
ARLETTE CHABOT - Alors un certain nombre de personnalités vont vous poser des questions, ce soir, vous allez voir, au long de l'émission, il y a de visages connus qui ont marqué l'actualité et généralement un peu émus ou bouleversés les Français. Alors d'abord une image, c'est celle de quelqu'un que tous les Français admirent aujourd'hui, c'est Laure MANAUDOU, elle gagne des médailles, elle est championne du monde, elle bat des records et elle a un maillot ARENA. Or dans le même temps, ARENA est une entreprise qui ferme qui délocalise les usines, qui est à Libourne et une de ses ouvrières rencontrées par Nicolas LE MARINIER, vous pose une question ce soir.
FRANCISCA BOUQUEY, 54 ANS, MECANICIENNE EN CONFECTION ARENA - Vous êtes candidat à la présidence de la République, moi, je suis candidate en tant que nouvelle demandeuse d'emploi. J'ai travaillé 35 ans, dans la société ARENA qui malgré le succès de Laure MANAUDOU, une situation financière saine, a choisi la délocalisation. Je souhaite vous demander quelle mesure comptez-vous prendre pour m'accompagner jusqu'à l'âge de la retraite ? Voilà.
ARLETTE CHABOT - Et aussi la situation, si on peut bloquer ou non, les délocalisations ?
NICOLAS SARKOZY - Alors deux réponses là-dessus. D'abord la société ARENA, la société ARENA appartient à un fonds de pension italien localisé en Suisse, il est capital de renouer avec le capitalisme familiale en France. On a découragé la présence en France, de tous ceux qui voulaient investir. Quand on a des investisseurs français que l'on connaît, qui sont attachés leur entreprise, ils ne délocalisent pas du jour au lendemain, comme le font les fonds de pension, les fonds d'investissement avec des dirigeants qui changent tout le temps et qui se moquent du tiers, comme du quart, de l'avenir des salariés. Ce n'est pas admissible, donc on fait une grande erreur en éloignant de notre territoire ceux qui peuvent créer des richesses et ceux qui peuvent investir. Je le dis à tous ceux qui souhaitent la taxation du patrimoine. J'en ai assez, pardon de cette expression qu'on fasse la richesse de l'Angleterre, de la Suisse et de tous les autres pays où on envoie ceux qui feraient bien mieux d'investir en France.
ARLETTE CHABOT - Ca c'est les impôts, on en parlera. Mais pour l'instant est-ce qu'on peut bloquer ce genre de délocalisation ?
NICOLAS SARKOZY - Non, mais c'est quand même très important, parce que ARENA, qu'est-ce qui s'est passé ? Le fonds de pension, lui, il ne fait pas de détails, il ne fait pas de cadeau, il dit : ça coûte moins cher de produire en Chine, on s'en va. Si c'est une entreprise familiale, où on a l'entreprise dans la famille depuis des années, où on met son propre argent, où le chef d'entreprise habite sur le lieu et connaît les salariés, l'attitude n'est pas la même. Il faut favoriser le capitalisme familial. Deuxième élément, je dis aux salariés d'ARENA, qu'en ce qui me concerne j'ai choisi la Sécurité sociale professionnelle avec Jean-Louis BORLOO. Cela veut dire, que tous les salariés de l'entreprise, à la minute où il y a une délocalisation auront un contrat avec le service public de l'emploi, contrat qui leur garantira 90 % de la rémunération, pendant au moins un an et ça marche. Et on profitera de cette année où ils garderont 90 % de leur salaire, pour les former pour apprendre un nouveau métier et pouvoir se recaser. Je fais une promesse aux Français, pas un seul licenciement économique sans que celui qui est licencié ou délocalisé, ne puisse avoir immédiatement un contrat avec le service public de l'emploi, 90 % de sa rémunération et une formation à la clé. En échange, naturellement le salarié s'engage à suivre cette formation pour apprendre un nouveau métier. Troisième élément, il faut aider massivement les entreprises dans la recherche et dans l'innovation, c'est ce que j'ai fait avec les pôles de compétitivité, c'est ce que je propose avec le crédit d'impôt recherche à 100 %, j'ajoute un dernier point, il faut qu'on arrête la naïveté maintenant, je suis pour la concurrence, mais la concurrence loyale. Je trouve scandaleux qu'on accepte en France des produits agricoles ou viticoles qui ne répondent pas aux mêmes critères de sécurité alimentaire ou sanitaire que l'on impose à nos agriculteurs et à nos viticulteurs. Deuxièmement, on ne peut plus accepter d'importer en France des produits venants de pays qui ne respectent pas le protocole de Kyoto, je demande la taxe sur les importations, la taxe carbone.
ARLETTE CHABOT - Ca c'est au niveau européen que ça se décide... la France ne peut pas faire ça tout seul ?
NICOLAS SARKOZY - La France ça compte en Europe.
ARLETTE CHABOT - Biens sûr, on est d'accord, mais...
GILLES LECLERC - Les autres pays peuvent avoir des mesures de rétorsion, si on fait ça non ?
NICOLAS SARKOZY - Non, mais moi, ça...
GILLES LECLERC - Parce que la mondialisation ça peut servir aussi à la France ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, enfin moi, je crois à la mondialisation, je crois à la concurrence, mais la concurrence loyale, pas la concurrence déloyale. La France respecte le protocole de Kyoto, c'est-à-dire qu'elle réduit les émissions de gaz à effet de serre. La Chine ne les respecte pas, cela veut donc dire que les entreprises chinoises ont moins d'obligation pour respecter l'environnement que les entreprises françaises. Eh bien on va rétablir l'équilibre en taxant les importations chinoises, parce qu'elles ne respectent pas le protocole de Kyoto.
GILLES LECLERC - Ça fait aussi des prix moins chers ? Quand il y a des produits chinois par exemple en France ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, mais ça détruit des emplois et enfin troisième élément, je veux qu'on expérimente...
GILLES LECLERC - Et vous êtes pour le pouvoir d'achat en même temps ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, j'y viens, je veux qu'on expérimente la TVA sociale car on ne peut plus continuer à taxer le travail et je souhaite que les importations contribuent au financement de notre protection sociale, voilà ma réponse aux salariés d'ARENA.
ARLETTE CHABOT - Mais c'est l'impôt le plus injuste la TVA, non ? Si vous dites même d'abord expérimenté, on dit quand un impôt est crée, il est adopté. Donc est-ce qu'on peut vraiment expérimenter un impôt ?
NICOLAS SARKOZY - Non, non, non...
ARLETTE CHABOT - Je pose la question.
NICOLAS SARKOZY - Non, madame CHABOT, vous ne pouvez pas dire ça. L'Allemagne vient de le décider, le Danemark vient de le décider, il n'y a pas eu d'inflation, il n'y a pas eu d'augmentation des prix, ils ont relancé la croissance et ils sauvent des emplois, pourquoi ? Aujourd'hui toute la taxation fiscale se fait sur le travail, si on continue à taxer le travail, on va perdre encore des emplois. Je souhaite qu'on taxe la pollution, qu'on taxe les importations et qu'on réfléchisse sur le transfert d'une partie des charges sur les salaires, sur la consommation, ce qui ne provoquera aucune augmentation des prix, mais ce qui allégera le coût du travail, parce que je vous le dis, je n'accepterai pas que toutes les usines s'en aillent.
GILLES LECLERC - L'expérimentation ça serait sur combien de temps ?
NICOLAS SARKOZY - Alors l'expérimentation, il y a deux solutions, soit on prend un secteur bien délimité et on voit ce que ça donne, soit on fait l'expérimentation pour deux ans, sur l'ensemble de l'économie française et on regarde chaque année, l'évolution des prix, pour que les salariés n'en soient pas les victimes.
ARLETTE CHABOT - Alors il y a ceux qui regardent votre programme, disent : alors il y a un truc qui n'est pas possible, c'est à la fois de baisser les impôts, de supprimer les droits de succession et en même temps de réduire la dette. Et comme le dit un candidat qui n'est pas au second tour, mais qui l'a beaucoup répété dans sa campagne, même REAGAN et TATCHER en rêvaient mais n'ont pas réussi à le faire. Donc comment réussirez-vous à le faire ?
NICOLAS SARKOZY - Je voudrais savoir quelle est la question que vous me posez parce que...
ARLETTE CHABOT - Est-ce qu'on peut à la fois...
NICOLAS SARKOZY - Est-ce que mon programme est crédible ? Economiquement ?
ARLETTE CHABOT - Voilà, on peut le résumer comme ça. C'est-à-dire baisser les impôts, s'engager à réduire la dette comme vous le faites et puis supprimer par exemple les droits de succession et en même temps financer votre programme, parce qu'il y a des dépenses évidemment ?
GILLES LECLERC - Est-ce qu'on peut faire tout ça en même temps ? Ou est-ce qu'il y a une priorité ? Est-ce que votre priorité c'est de faire baisser la dette, baisser les impôts ou...
NICOLAS SARKOZY - Madame CHABOT m'a posé cinq questions, vous venez de...
ARLETTE CHABOT - C'est les mêmes, on décline.
NICOLAS SARKOZY - Non, ce n'est pas...
ARLETTE CHABOT - Est-ce qu'il est crédible voilà ? Comme vous dites en une phrase, il est crédible ?
NICOLAS SARKOZY - Non, le principal institut de prévisions économiques français, l'institut REXECODE a noté les programmes de tous les candidats et a déclaré que le seul programme économique qui créait 1,3 points de croissance en plus c'était le mien. Le nobélisable français, monsieur BLANCHARD, professeur d'économie au MIT...
ARLETTE CHABOT - Aux Etats-Unis oui.
NICOLAS SARKOZY - Qui a toujours voté à gauche a pris position dans un journal de gauche, CHALLENGE, pour dire qu'il voterait pour moi. Le consensus des économistes, c'est que le seul programme économique crédible qui créait de la croissance, c'est le mien. Pourquoi ? Parce que je dis aux Français, si on travaille plus, on gagnera davantage. Alors comment on réduit la dette de la France, c'est un programme considérable, mais d'abord...
GILLES LECLERC - Mais est-ce que c'est votre priorité, pardon de me répéter, de réduire la dette ?
NICOLAS SARKOZY - Enfin, voilà une huitième question, qui arrive. Mais vous voulez...
GILLES LECLERC - Si, si, est-ce que c'est un grand chantier ? Est-ce que pour vous c'est le point central, cette fameuse dette ?
NICOLAS SARKOZY - Naturellement qu'il faut réduire la dette, c'est une priorité, 1200 milliards d'euros, vis-à-vis de nos enfants, on ne peut pas continuer. Alors comment peut-on faire pour réduire la dette ? Je ne reviens pas sur la croissance, nous avons 1 % de croissance de moins que les autres, en libérant les possibilités de travailler, en exonérant les heures supplémentaires d'impôts et de charges, en payant ces heures supplémentaires 25 % de plus, on va distribuer du pouvoir d'achat aux salariés, on va mettre du carburant dans l'économie française et on va créer ce point de croissance. Premier point. Deuxième point, il faut faire des économies. Alors où peut-on faire des économies ? 45 % du budget de la nation, c'est les salaires et les pensions de retraite des fonctionnaires, pourquoi ? Parce que lorsque l'Etat engage un fonctionnaire, il ne l'engage pas pour 40 ans, il l'engage pour 70 ans, puisque comme vous le savez certainement, c'est l'Etat qui paie les propres retraites puisqu'il ne cotise pas à la Sécurité sociale. J'ai proposé qu'on ne remplace pas un fonctionnaire sur deux, qui part à la retraite et qu'on affecte la moitié de ce gain de productivité, ces économies, à la réduction de la dette et l'autre moitié à l'augmentation du pouvoir d'achat des fonctionnaires. Moins de fonctionnaires, mieux payés, mieux considérés, mieux formés, mieux traités. Je suis le seul candidat à avoir proposé cette piste d'économies.
ARLETTE CHABOT - Oui, mais on dit « oh ! lalalala, où est-ce qu'il va les supprimer » pas les remplacer les fonctionnaires, monsieur SARKOZY, parce que ce n'est pas les policiers, ce n'est pas les infirmières, vous savez bien, c'est toujours l'argument qui est utilisé ?
NICOLAS SARKOZY - Alors essayons d'être précis, il y a 450 000 fonctionnaires qui vont partir à la retraite, entre 2007 et 2012 dont 300 000 pour l'Etat. Si nous ne remplaçons pas un fonctionnaire sur deux, nous revenons au niveau de la fonction publique de 1992, lorsque François MITTERRAND était président de la République, je ne sache pas qu'à cette époque, la France était sous-administrée. Savez-vous que la France a crée depuis 1981 un million d'emploi public, il y a des marges de manoeuvres, je peux prendre des exemples, la douane 20 000 fonctionnaires, le même nombre de fonctionnaires qu'il y a 20 ans, mais entre-temps, il n'y a plus de frontières. Deuxième élément, la direction générale des impôts, 80 000 fonctionnaires, la comptabilité publique 60 000 fonctionnaires, chacun sait bien qu'il faut les rassembler entre-temps on a investi massivement dans l'informatique, il y a des marges de productivité considérable. Je veux la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC pour avoir un interlocuteur unique pour le chômeur, comme ça se passe dans tous les pays au monde. Il y a des marges de manoeuvres, croyez-moi. De toute façon nous n'avons pas le choix, je dis d'ailleurs aux fonctionnaires, que je n'aime pas la façon dont on parle d'eux, la performance ça existe dans la fonction publique, les fonctionnaires ont des petits salaires, on va améliorer leurs conditions, ils seront mieux formés, il y aura plus de souplesse dans leur gestion de l'emploi, mais on ne peut pas faire l'économie d'un plan d'économie en la matière.
ARLETTE CHABOT- Petite précision, vous aviez parlé, il y a quelque temps, d'une allocation familiale, des allocations familiales qui seraient versées au premier enfant. Est-ce que vous maintenez cette proposition ? Est-ce qu'il y aurait de conditions de ressources ou pas ?
NICOLAS SARKOZY - Non, non, je maintiens cette proposition, parce que si vous voulez, c'est formidable, on prévoit des allocations familiales pour un niveau d'enfants qu'on n'atteint jamais. Avant d'avoir trois enfants, il en faut deux et avant deux, il en faut un. Donc je maintiens, parce que je crois à la famille, je crois à la nécessité d'aider les familles, je dis d'ailleurs dans le même temps, que les allocations familiales, je souhaite qu'elles soient mises sous tutelle, voire supprimées lorsque des familles sont défaillantes et qu'elles n'exercent pas leurs responsabilités dans la République je souhaite, madame CHABOT, il y a des droits, mais il y a aussi des devoirs. Serais-je le seul candidat à parler des devoirs ? Je le ferais, quitte à me faire reprocher madame ROYAL a dit quoi ? « Père fouettard. »
ARLETTE CHABOT - Oui. C'est ça.
GILLES LECLERC - Autre précision sur les heures supplémentaires, vous voulez exonérer d'impôts donc sur le revenu et les charges. Est-ce que vous ne craignez pas tout de même que les employeurs et les salariés fassent finalement des heures supplémentaires fictives afin d'échapper tout simplement à l'impôt sur le revenu d'un côté et de charges de l'autre ? Est-ce que ça ne comporte pas ce risque ?
NICOLAS SARKOZY - C'est une vision curieuse du monde des salariés et de l'entreprise. On travaille 35 heures...
GILLES LECLERC - Au lieu de faire tout simplement des hausses de salaire normales ?
NICOLAS SARKOZY - Aujourd'hui tout est fait pour empêcher les entreprises de donner des heures supplémentaires ? Et j'ai vu des tas d'ouvriers qui après 36 ans d'ancienneté gagnaient 1200 euros, qu'est-ce qu'on fait avec 1200 euros par mois ? C'est des petits salaires. Voyez-vous je n'accepte pas une société où il y a des pauvres, parce qu'il n'y a pas de travail, mais pire, où il y a des pauvres alors qu'ils travaillent. Quand on travaille tout le mois et qu'il ne reste rien à la fin du mois, on se dit à quoi ça sert les RTT, si je n'ai pas de quoi payer des vacances à mes enfants. La solution c'est permettre de favoriser l'obtention des heures supplémentaires, je dis donc aux entreprises si vous donnez des heures supplémentaires, vous ne payerez pas de charges dessus. Et je dis aux salariés, si vous exercez ces heures supplémentaires vous ne payerez pas d'impôts sur ce revenu supplémentaire. Savez-vous qu'un salarié au SMIG qui travaillerait 50 minutes de plus par jour, aurait droit à 15 % d'augmentation de salaire. Quand on passe de 1300 euros par mois à 1500 euros ça va dans l'économie. Ça créait de la croissance, ça créait de l'emploi et c'est comme ça qu'on récupérera cette croissance qui nous manque.
ARLETTE CHABOT - Et pourquoi vous n'augmentez pas le SMIC alors à 1500 euros tout de suite ?
NICOLAS SARKOZY - Mais pour une raison très simple, madame CHABOT, c'est que le SMIC ça concerne 17 % des salariés français. Et que moi, ce qui m'intéresse c'est d'augmenter le pouvoir d'achat de 100 % des salariés français et pas de 17 % de salariés français. Ca c'est vraiment une vision excusez-moi totalement socialiste, qui consiste à dire une fois qu'on a augmenté le SMIG, on a résolu le problème des Français. Or toute la question, c'est la désespérance et la peur du déclassement des classes moyennes. Le SMIG c'est 17 %. Moi, ce qui m'intéresse c'est 100 %.
ARLETTE CHABOT - Alors vous parlez des travailleurs pauvres, il y a tous ceux qui sont travailleurs et qui regardent les chefs d'entreprises qui partent avec des indemnités considérables pour dire les choses, sans les nommer, il y a EADS d'un côté, il y a un plan pour redynamiser l'entreprise avec des gens qui vont être sans doute perdre leur emploi à terme. Et puis il y a un ancien patron qui est parti avec beaucoup d'argent. Est-ce qu'il faut à votre avis moralisé et comment ?
NICOLAS SARKOZY - Oui. Oui. Nous avons...
ARLETTE CHABOT - Vous êtes choqué par ça aussi vous ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, oui, et oui.
ARLETTE CHABOT - Parce qu'on dit collusion avec les chefs d'entreprise, donc voilà...
GILLES LECLERC - Comment peut-on encadrer les conditions de départ ?
ARLETTE CHABOT - Ces accusations on le disait tout à l'heure, proximité avec des chefs d'entreprise, donc on se dit est-ce que Nicolas SARKOZY, c'était l'accusation de François BAYROU, est-ce que vous êtes choqué ou pas ?
NICOLAS SARKOZY - Vous êtes drôlement aimable ce soir.
ARLETTE CHABOT - Non, mais je vous pose des questions, monsieur SARKOZY. Est-ce que vous êtes choqué ou pas ?
NICOLAS SARKOZY - Non, mais attendez, franchement, vous posez des questions, enfin...
ARLETTE CHABOT - Pour que vous y répondiez, parce qu'il faut nous dire ?
NICOLAS SARKOZY - Enfin écoutez, dans ce cas-là, vous citez des exemples précis. Moi, je vais vous répondre précisément. Je connais bien la situation d'EADS. C'est particulièrement scandaleux, ce qui est en train de se passer. On explique à l'entreprise qu'il faut supprimer 10 000 emplois pour dégager des marges de manoeuvres pour financer le programme de développement de l'A350 et de l'A380 bon ! Pourquoi pas, on peut en discuter. Là-dessus l'entreprise, où il n'y a pas d'argent, on trouve les moyens de donner 8 millions d'euros au président qui s'en va. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il ne s'en va pas après un bilan totalement positif. Premier point. Et je viens d'apprendre que le plan d'intéressement pour les salariés, je crois que c'est 2,20 euros. On se moque du monde.
GILLES LECLERC - Donc où est la faille en fait dans ce système ?
NICOLAS SARKOZY - Alors la faille, c'est que je proposerais dès l'été 2007, l'interdiction de ce qu'on appelle les « golden parachute. »
GILLES LECLERC - Par la loi ?
NICOLAS SARKOZY - Par la loi, pour une raison simple, si vous ne faites pas de loi, monsieur LECLERC, vous restez sur le contrat, le contrat c'est la loi des parties. Donc il faut une loi, pourquoi je veux qu'on interdise les « golden parachute ? » parce que je comprends très bien que les chefs d'entreprise ou des dirigeants gagnent davantage que les autres, mais ils gagnent davantage que les autres, parce qu'ils prennent plus de risques.
GILLES LECLERC - Souvent ça se négocie à l'arrivée de ce chef d'entreprise ?
NICOLAS SARKOZY - Non, non, ils prennent plus de risques. Si il y a un risque, c'est normal qu'il y ait une grosse rémunération. S'il n'y a pas de risques, la grosse rémunération est illégitime. J'ajoute que pour l'affaire dont vous parlez l'indemnité avait été prévue en 1998, à l'époque où monsieur JOSPIN était Premier ministre et où madame ROYAL était au gouvernement.
ARLETTE CHABOT - Alors je voudrais, deuxième question, elle vous est posée par la fille de quelqu'un que tout le monde admire et aime, qui est Annie GIRARDOT. Annie GIRARDOT qui est on le sait, aujourd'hui, malade et sa fille Giulia pose une question qui au fond concerne beaucoup de Français, avec des parents qui sont plus ou moins âgés mais malades. Donc d'abord un petit hommage à Annie GIRARDOT et puis la question de sa fille Giulia.
ANNIE GIRARDOT - Votre témoignage, votre amour, me font penser que peut-être, je dis bien peut-être, je ne suis pas encore tout à fait morte.
GIULIA SALVATORI, FILLE D'ANNIE GIRARDOT - Nous qui avons des malades à domicile, atteint d'Alzheimer comme plein de famille, que comptez-vous faire pour nous aider financièrement, psychologiquement, qu'est-ce qu'on peut faire ? Qu'est-ce que vous pouvez nous proposer ?
ARLETTE CHABOT - Alors réponse à Giulia et à beaucoup d'autres familles encore une fois ?
NICOLAS SARKOZY - C'est un drame absolu, il faut savoir qu'il y a 860 000 Français qui sont touchés par la maladie d'Alzheimer et qu'on pense qu'ils sont 1 200 000 d'ici dix à quinze ans. Ca va concerner toutes les familles, et il faut réagir à cela, comment ? D'abord on ne connaît pas les causes de cette maladie. La recherche doit faire des progrès considérables, pour découvrir pourquoi à un moment donné, dans le cerveau, il y a ce qu'on appelle le dépôt des plaques séniles. Je regardais les chiffres : 2004-2007, c'est 200 millions d'euros pour la recherche dans la maladie sur l'Alzheimer. Grâce à Jacques CHIRAC, pour le cancer, c'est un milliard et demi d'euro. Il faut faire pour Alzheimer ce qu'on a fait pour le cancer. C'est une mobilisation nationale, la question d'Alzheimer est centrale, dans le problème de la santé publique des Français. Si je suis élu président de la République, je ferais adopter par le parlement et je demanderais au gouvernement de travailler sur un plan Alzheimer comme il y a eu un plan cancer.
GILLES LECLERC - Concernant la...
NICOLAS SARKOZY - Depuis qu'il y a le plan cancer, l'espérance de vie des malades a considérablement augmentée. On ne peut pas laisser cette épidémie d'Alzheimer dans la situation où nous, nous trouvons avec près d'un million de Français, touchés par cette maladie.
ARLETTE CHABOT - Et les personnes âgées en général, c'est-à-dire que c'est un problème que connaissent toutes les familles aujourd'hui qui ont des parents très âgés et ils n'ont pas d'argent, pas de ressource pour payer est-ce qu'on peut imaginer quand même un plan vieillesse, on n'en a pas beaucoup parlé pendant cette campagne, des personnes âgées...
NICOLAS SARKOZY - Oui, vous avez raison.
ARLETTE CHABOT - Mais la grande vieillesse, la grande dépendance ça existe ?
NICOLAS SARKOZY - Mais vous avez raison...
GILLES LECLERC - On créait un quatrième volet, pour...
NICOLAS SARKOZY - Cinquième.
GILLES LECLERC - Cinquième volet.
NICOLAS SARKOZY - Vous avez raison la question des personnes âgées, c'est une question absolument bouleversante parce qu'une société qui ne fait pas de place aux personnes âgées, c'est une société qui se renie elle-même. Parce que les personnes âgées c'est la mémoire de cette société. C'est la façon dont elle respecte l'homme. Alors qu'est-ce qu'on peut faire ? On va vivre plus longtemps, il faut développer... il faut d'abord créer un cinquième risque de sécurité sociale, le risque dépendance qui serait géré par la Sécurité sociale et par les départements, pour créer des maisons pour personnes âgées dépendantes, pour permettre de facilité l'emploi de personnes à domicile, pour que ces personnes âgées puissent rester chez elles et je vais même plus loin, je souhaite que soit créer un congé rémunéré pour un membre de la famille qui aurait à s'occuper d'une personne âgée dépendante et d'une personne âgée en fin de vie.
ARLETTE CHABOT - Comme congé maternité, congé paternité, mais appliqué aux personnes âgées en fait ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, mais si vous voulez, enfin je réfléchissais à ça, madame CHABOT et je pense que ça peut toucher tout le monde, tout le monde a été bouleversé par la mort de son père ou de sa mère, enfin bon, ce sont des affaires très personnelles. Il ne viendrait à l'idée de personne de contester le congé maternité, pour le moment de joie que représente l'arrivée d'un enfant. Personne ne le conteste, je veux faire la même chose, moi, quand on a la douleur de perdre sa mère ou son père, il est parfaitement normal qu'un membre de la famille puisse se mettre en congé de son travail, rémunéré pour accompagner cette personne jusqu'à la mort. Vous savez ce que ça s'appelle ça ? Ca s'appelle de l'humanité. Parce que c'est bien d'être tous ensemble quand il y a un moment de joie, mais quand il y a un grand chagrin, une grande douleur, c'est bien aussi et je pense même que c'est plus nécessaire encore.
GILLES LECLERC - Toujours concernant la santé, vous souhaitez une franchise sur les dépenses de soins, ça revient donc à responsabiliser un peu plus en effet, les malades, mais ils vont être un peu moins remboursés, ça va sans doute les conduire donc à cotiser davantage auprès des mutuelles. Est-ce que c'est juste ?
NICOLAS SARKOZY - Non, je veux m'expliquer là-dessus. D'abord je veux dire aux Français que moi, je veux leur dire la vérité, je ne veux pas leur mentir et qu'on ne peut pas dans une campagne électorale annoncer uniquement des dépenses supplémentaires et jamais de recettes. C'est ce que j'ai fait avec l'affaire de la fonction publique, un départ sur deux. On va dépenser plus pour notre santé, qu'est-ce que j'ai dit tout à l'heure, le plan Alzheimer. Parce que ça peut toucher toutes les familles, nous, nous serons concernés, le plan cancer, parce que le cancer brise tant de famille, les maisons pour personnes âgées dépendantes. Alors qu'est-ce qu'on fait ? On ne peut pas taxer le travail, parce que sinon tout va partir, il faut bien trouver des ressources, qu'est-ce que je propose ? Qu'une toute petite somme, soit une franchise non remboursable chaque année, je ne suis pas d'accord sur le 1 euro par boîte de médicaments. Vous savez pourquoi ? Parce que 1 euro prélevé, par boîte de médicaments ça pénalise celui qui est malade, parce que naturellement, il achète plus de boîtes de médicaments. Je souhaite une franchise annuelle d'un très petit niveau, 5 ou 10 euros, pour responsabiliser les patients. Si à la fin de l'année, l'Assurance maladie est équilibrée, on réduit la franchise. Si l'Assurance maladie est déséquilibrée, on augmente la franchise.
GILLES LECLERC - Cette franchise, c'est quels que soient les revenus ?
NICOLAS SARKOZY - On peut en discuter, il faut en exonérer sans doute les chômeurs, il faut en exonérer telle ou telle catégorie de la population, on en discutera avec les partenaires sociaux. Mais c'est la seule façon de responsabiliser, les patients, nous devons tous être intéressés à l'équilibre de la Sécurité sociale. J'ajoute...
ARLETTE CHABOT - Et le montant de la franchise, vous savez, c'est fonction du déficit...
NICOLAS SARKOZY - Nous en discuterons, j'ajoute, il faut bien trouver des moyens pour que l'hôpital fonctionne mieux, les conditions de travail à l'hôpital, le travail que font les agents hospitaliers, médecins ou assistants, ou personnels hospitaliers, est considérable, ils travaillent dans des situations très difficiles, les 35 heures ont mis une pagaille à l'hôpital public comme rarement on en a vu. Il va falloir donner des moyens à l'hôpital, il va falloir restructurer l'hôpital. Il va falloir modifier la gouvernance de l'hôpital, je pense à tous ces agents et je me dis qu'avec la franchise, on aura une réponse à leur donner.
ARLETTE CHABOT - On va avant de parler des sujets autour de la nation, on regarde aussi un petit peu la pendule et vous savez qu'on est soumis à l'égalité, on va parler de ces sujets, mais d'abord une autre question, puisqu'on est un peu dans le domaine un peu personnel et individuel, et autre visage qui a bouleversé tout le monde c'est celui de Vincent HUMBERT. On sait l'accident qui a mis ce garçon, Vincent, dans une situation épouvantable, c'est-à-dire qu'il avait demandé lui-même, le droit à mourir, dans une lettre écrite au président de la République. Marie HUMBERT, sa mère qui l'a aidé à mourir, considère qu'aujourd'hui, le combat n'est pas réglé parce que le droit dans certaines circonstances d'accorder la possibilité à quelqu'un qui réclame la mort n'est pas donné. Donc Marie HUMBERT vous pose cette question aujourd'hui.
MARIE HUMBERT - Monsieur SARKOZY, il y a deux mois, vous avez dit qu'il fallait absolument essayer de faire quelque chose parce que la souffrance était intolérable. 80 % des Français sont d'accord sur ce sujet. Je vous le demande actuellement, parce qu'il y a énormément de gens qui souffrent en France qui sont courageux et qui luttent et qui attendent un changement de loi sur les exceptions d'euthanasie. Monsieur SARKOZY si vous êtes élu, est-ce que vous allez changer la loi ?
NICOLAS SARKOZY - Bon c'est un sujet extrêmement difficile, sur lequel j'ai beaucoup réfléchi mais il faut que je prenne mes responsabilités. D'abord, la France souffre d'un manque de structure de soins palliatifs, pour ceux qui ne le savent pas ce sont des soins, pour les grands malades, qui permettent d'éviter la douleur, un rapport du Conseil Economique et Social indiquait qu'il faudrait cinq lits pour 100 000 habitants de soins palliatifs, on en a 1-1,2. Non, mais c'est très important, parce que quand on est très malade et qu'on va vers la mort, en 2007, j'estime qu'on a le droit d'y aller sans souffrir horriblement, je ne veux pas répondre à la question de Marie HUMBERT, sans parler de la question des soins palliatifs, qui sont de mon point de vue essentiel, on va investir massivement dans ce sens-là. Deuxième élément...
ARLETTE CHABOT - Sur l'euthanasie oui.
NICOLAS SARKOZY - D'abord le mot « euthanasie » non, je ne suis pas d'accord. Que les choses soient très claires, je ne suis pas d'accord sur ce mot-là, pour des raisons philosophiques, personnelles, je crois qu'il ne nous appartient pas, nous n'avons pas le droit, d'interrompre volontairement la vie. Donc les choses clairement...
GILLES LECLERC - Même si c'est une décision collective, la famille...
NICOLAS SARKOZY - Attendez, non, non...
ARLETTE CHABOT - Là c'est un principe.
NICOLAS SARKOZY - Pardon Gilles LECLERC, excusez-moi, c'est une affaire extrêmement sensible, complexe, j'essaie de me faire comprendre tout en prenant mes responsabilités. Je ne veux pas fuir surtout devant le courage de madame HUMBERT. Donc pour moi, la vie c'est sacrée, et faire mourir, je ne l'accepte pas. Mais il y a une différence et je ne suis pas, ce n'est pas jésuitique, ce n'est pas hypocrite. Entre faire mourir et laisser mourir. C'est d'ailleurs le travail remarquable qu'avait fait Jean-Louis LEONETTI, avec la nouvelle loi, madame HUMBERT sait d'ailleurs très bien que cette loi de 2005, a fait beaucoup de progrès.
ARLETTE CHABOT - Mais ne règle pas le problème...
NICOLAS SARKOZY - Moi, je dis une chose, il faut respecter la vie, mais il y a un moment, c'est vrai, je l'ai dit, donc je l'assume, parce que c'est mes convictions les plus profondes. Il y a un moment où la vie est tellement douloureuse que ce n'est plus de la vie, ce n'est plus possible de vivre. Parce que la souffrance bouffe la vie, et que c'est un peu facile d'avoir des principes en disant, je m'en moque qu'il souffre, ce n'est pas vous qui souffrez, et partant, le laisser mourir, c'est-à-dire l'interruption volontaire d'un traitement, comme l'a fait le président MITTERRAND, sur son lit de mort, en tout cas d'après ce que j'en ai lu, cela je suis pour. Vous voyez, il y a une différence, dans mon esprit entre injecter le liquide mortel, ce que j'appelle faire mourir et interrompre un traitement dont on sait qu'il accélérera la mort, ce que j'appelle le laisser mourir. Alors il me semble d'ailleurs et je le dis très prudemment, mais qu'on ne peut pas tout réglementer, qu'on ne peut pas légiférer sur tout alors j'ai vu qu'aux Pays-Bas, ils avaient, c'est incroyable ! Enfin c'est vraiment une société que je ne souhaite pas, 83 cas d'euthanasie, alors le médecin regarde si on est dans le bon cas, vous imaginez. Je souhaite qu'il y ait place aussi pour le dialogue singulier entre le médecin...
GILLES LECLERC - Ce n'est pas par la loi, c'est ça que vous dites ?
NICOLAS SARKOZY - Pas forcément, en tout cas, on peut faire évoluer la loi Léonetti qui est excellente. Mais le dialogue singulier au chevet du malade entre le malade, le médecin et la famille, pour mettre un peu d'humanité là-dedans. Donc je dis à madame HUMBERT que je ne suis pas opposé à une évolution dans le sens qu'elle propose, même si je suis opposé à toute forme d'euthanasie.
ARLETTE CHABOT - Alors on va essayer d'être assez rapide sur des sujets, pardonnez-moi, mais...
NICOLAS SARKOZY - Enfin vous comprenez que c'est un sujet très difficile...
ARLETTE CHABOT - Mais ce n'est pas un reproche.
NICOLAS SARKOZY - Non, non, mais bien sûr...
ARLETTE CHABOT - C'est pour vous annoncez...
NICOLAS SARKOZY - Ce sont des sujets passionnants, c'est que moi-même j'ai beaucoup hésité, ce n'est pas évident d'avoir la réponse à tout. Sur ces questions-là qui mettent en jeu des principes philosophiques, personnels, et puis la souffrance. Et moi, la vie m'a appris que devant la souffrance, il fallait beaucoup d'humilité. Et qu'on ne pouvait pas simplement...
GILLES LECLERC - Vous pouvez avoir des doutes aussi ? Si vous êtes demain président de la République ?
NICOLAS SARKOZY - Vous me voyez comme un monstre monsieur LECLERC ? Vous croyez que je n'ai pas de doute ?
GILLES LECLERC - Non, c'est une question que je vous pose ?
NICOLAS SARKOZY - Vous croyez que je n'ai pas de doute devant des questions aussi difficiles ?
GILLES LECLERC - Un homme politique peut avoir un doute, c'est ça que vous dites ce soir ?
NICOLAS SARKOZY - Il doit avoir un doute, mais devant une question comme ça, je me dit moi, je ne raisonne pas en terme de législateur ou de possible président de la République. Je me dis si j'ai l'un de mes proches, moi-même, mes parents concernés et si je le vois se tordre de douleur sur son lit, de bientôt mort, je me dis c'est bien beau les principes, mais c'est quoi la vie en se tordant de douleurs du matin au soir, est-ce qu'on a le droit d'imposer ça ? Mais en même temps je vois bien que si je réponds, on n'a pas le droit d'imposer ça. A quel moment on dit : qu'on a le droit de mettre fin à la vie ? C'est pourquoi, j'avance, voyez-vous je l'espère de façon pragmatique et cohérente. Pour respecter le respect de la vie et en même temps de ne pas imposer des souffrances inhumaines.
ARLETTE CHABOT - Alors comme on dit, toujours dans les émissions de télévision, pour garder du temps et parler de politique étrangère avec notre confrère du TIME, Charles BREMER (phone) qui va venir nous rejoindre. Petite précision sur ce que vous voulez pour la France. Certains disent vivre ensemble, en tout cas, la nation, est-ce que vous avez abandonné l'idée de la discrimination positive ?
NICOLAS SARKOZY - Non.
GILLES LECLERC - Vous en avez moins parlé dans la campagne électorale que quand vous étiez ministre de l'Intérieur ?
NICOLAS SARKOZY - Parce que maintenant tout le monde a bien compris, cette affaire ne fait plus polémique. Qu'est-ce que c'est que la discrimination positive à la française ? C'est, donner plus à celui qui a moins. La Creuse, c'est un territoire...
GILLES LECLERC - C'est quelque chose qui est admis ça ?
NICOLAS SARKOZY - La Creuse, c'est un territoire, la Creuse a davantage besoin d'être aidée que mon département des Hauts-de-Seine par l'Etat ! Le fils de trois générations de chômeurs, dans le Pas-de-Calais a davantage besoin d'être aidé que mon propre fils. La discrimination positive c'est, donner plus à celui qui a moins, et naturellement pas sur des critères ethniques. D'ailleurs qu'est-ce que c'est que la parité ? Si ce n'est de la discrimination positive, fondée sur des critères sexuels !
ARLETTE CHABOT - Alors deuxième question, communautarisme, on dit : ah ! Il a été tenté Nicolas SARKOZY, par un modèle anglo-saxon. Est-ce que vous êtes ou non pour le communautarisme qui règle des problèmes ?
NICOLAS SARKOZY - Je suis résolument opposé à toute forme de communautarisme, mais qu'est-ce que c'est que le communautarisme ? C'est réduire quelqu'un à sa seule identité extérieure. C'est une absurdité, alors pourquoi ai-je défendu l'idée nationale, le rôle de la nation ? C'est parce que qui le voit et qui le comprend que quand on dénigre la nation, quand on dénonce la nation, quand on hait la nation, chacun se retranche sur sa communauté. La nation, le respect de la nation, la fierté d'être français, l'identité nationale française, c'est la meilleure réponse à la montée des communautarismes. C'est quand la nation s'affaisse, que les communautaristes augmentent. C'est parce qu'on a dénigré la nation qu'on a laissé monter le communautarisme. Or il se trouve que je porte l'idée nationale française.
GILLES LECLERC - Vous avez fait voter deux lois, concernant l'immigration entre 2003 et en 2006, vous nous avez annoncé une troisième loi, dès le mois de juillet prochain, est-ce que vraiment c'est nécessaire ?
NICOLAS SARKOZY - D'abord les résultats sont spectaculaires, on a divisé par trois, le nombre de clandestins dans notre pays. Mais je veux aller encore un peu plus loin, je souhaite sur le regroupement familial, que nul ne puisse faire venir sa famille, s'il ne possède un logement pour la loger ou alors on accepte les squats. Que nul ne puisse faire venir sa famille s'il ne dispose pas des revenus de son travail et non pas des allocations sociales pour la faire vivre. Et je souhaite à l'image de ce qu'on fait un certain nombre de pays européens, qu'avant de faire venir sa famille, on demande à ceux qui vont nous rejoindre d'apprendre le Français, parce que la France, parce que le Français c'est la langue de la République.
GILLES LECLERC - Comment est-ce qu'on fait si on est dans un pays pauvre d'Afrique apprendre le Français, ce n'est pas évident, ce n'est pas facile ?
NICOLAS SARKOZY - Ca fera beaucoup de bien au réseau d'alliance française et comme cela on assurera la promotion de la francophonie ce qui sera pour moi, une priorité absolue.
ARLETTE CHABOT - Est-ce que ce n'est pas une manière de dire que vous remettez en cause le regroupement familial ?
NICOLAS SARKOZY - Ecoutez, absolument pas. Chacun a le droit de faire venir sa famille, écoutez, c'est extraordinaire maintenant, on parle d'immigration on est traité de raciste. Je dis, il faut...
ARLETTE CHABOT - C'est une manière de limiter le regroupement familial ?
NICOLAS SARKOZY - Ah ! Ca si vous me dites, c'est une manière d'éviter le regroupement familial, certes. Si c'est une manière de l'interdire non.
ARLETTE CHABOT - Donc je dis, limité alors ?
NICOLAS SARKOZY - Mais alors écoutez, madame CHABOT, le regroupement familial, très bien, je n'ai pas de logement, je fais venir ma famille, c'est normal ? Et je les fais vivre où ? Et alors après on va se plaindre parce qu'un ministre de l'Intérieur fait évacuer les squats et après on va verser de larmes de crocodile parce que dans un squat sordide, des femmes et des hommes et des enfants qui avaient le droit de vivre, vont mourir. C'est l'hypocrisie que je ne veux pas. C'est la bonne conscience de gauche ça, c'est ceux qui parlent des grands principes, et qui ne connaissent pas la réalité du terrain. Comment peut-on dénoncer les squats insalubres et ne pas exiger quelqu'un qui fait venir sa famille ait un logement ! Mais s'il n'a pas de logement, comment il fait venir sa famille ? Où est-ce qu'elle va vivre ? S'il n'a pas de revenu de son travail, comment il va la faire vivre ? Et si nous ne maîtrisons pas l'immigration, on fait exploser le pacte social français. Nous sommes le pays d'Europe qui avons le système social le plus généreux, si nous ne maîtrisons pas le nombre de ceux qui rentrent, qui va payer ? Comment on va maintenir les équilibres ? Tout à l'heure monsieur...
GILLES LECLERC - C'est une générosité d'accueillir les enfants scolarisés dont les parents n'ont pas de papier ?
NICOLAS SARKOZY - Alors mettre son enfant dans une école, c'est un droit, c'est même un droit garanti par des conventions européennes. Mais quand madame ROYAL propose de donner des papiers aux parents et si j'ai bien compris aux grands-parents...
ARLETTE CHABOT - Elle a dit au cas par cas.
NICOLAS SARKOZY - Attendez,...
GILLES LECLERC - Au cas par cas, elle a dit ça.
ARLETTE CHABOT - Au cas par cas, hier soir.
NICOLAS SARKOZY - Elle a encore changé, parce qu'il y a quinze jours c'était à tout le monde.
ARLETTE CHABOT - Elle dit au cas par cas, c'est ce qu'elle nous a dit hier.
NICOLAS SARKOZY - Alors dans ce cas-là, cette fois-ci, elle dit la même chose que moi ? C'est ce que j'ai fait. Mais elle avait proposé qu'on donne des papiers à deux générations au-dessus. Comme c'est un droit d'inscrire son enfant à l'école, ça voudrait dire que dans le monde entier, il suffira d'avoir une inscription dans une école française, pour avoir le droit de devenir français ? Mais c'est irresponsable ! Savez-vous combien il y a d'enfants en Afrique ? Il y a 450 millions de jeunes africains qui ont moins de 17 ans. Si tous ceux qui viennent s'inscrire dans nos écoles et encore une fois c'est un droit, deviennent Français, mais comment on maintient le pacte social français ? Comment les finances publiques peuvent y résister ? Comment éviter la montée du racisme ? Comment éviter les antagonismes ? Comment éviter l'explosion d'un certain nombre de nos quartiers ? Il faut être responsable. Si je suis président de la République, je le dis aux Français, il n'y aura pas de régularisation globale.
GILLES LECLERC - A l'égard des banlieues justement, est-ce qu'il y a un problème entre vous-même, Nicolas SARKOZY et les banlieues ? Est-ce que vous seriez prêt si vous êtes président de la République, à avoir un geste fort, généreux à l'égard de ces banlieues ? Ou est-ce qu'au fond tout ça, c'est un malentendu ou...
NICOLAS SARKOZY - Si j'en juge, non, mais c'est une construction exclusivement médiatique, car si j'en juge par la carte électorale, le score que j'ai réalisé au premier tour de l'élection présidentielle, n'avait jamais été réalisé par un candidat de droite, jusqu'à présent. Donc je ne sais pas si j'ai un problème avec les banlieues...
GILLES LECLERC - Donc il n'y a pas de malaise...
ARLETTE CHABOT - Il y a des quartiers où, qui sont quand même, qui ont voté à gauche ?
NICOLAS SARKOZY - Pas du tout, y compris ces quartiers-là, où ceux qui y vivent, ont parfaitement compris que quand je me battais pour la sécurité c'était pour leur sécurité. Et donc par conséquent c'est une construction totalement médiatique. Alors il y a environ 230 000 jeunes dans ces quartiers, à qui je trouverai un emploi, une formation, une rémunération, car je veux leur éviter le piège de l'oisiveté. Je leur demanderai simplement une chose : c'est que dans les chances de cette chance de la formation et de l'emploi, de s'engager à la suivre, de se lever tôt le matin et de travailler. Car nulle ne peut prétendre être aidé par l'Etat, si par lui-même, il ne fait pas un effort minimum pour s'en sortir.
GILLES LECLERC - C'est important ce que vous venez de dire, c'est une sorte d'engagement, trouver un emploi à ces 230 000 jeunes, c'est un engagement que vous prenez ce soir ?
NICOLAS SARKOZY - Mais ce n'est pas une sorte d'engagement...
GILLES LECLERC - C'est un engagement ?
NICOLAS SARKOZY - C'est une promesse et je dis...
GILLES LECLERC - En combien de temps ? En combien de temps ? Parce que ce n'est pas facile ?
NICOLAS SARKOZY - Je mettrais ça en place pour le début 2008 et je dis d'ailleurs à ces jeunes que tous auront le droit de s'en sortir. Jusqu'à présent la politique de la ville, ça a été formidable, mais ça a consisté à refaire les immeubles. Mais si vous refaites les immeubles et les quartiers, et vous ne vous préoccupez pas de la formation et de l'emploi de ceux qui y vivent, dans cinq ans vous pourrez refaire les villes.
GILLES LECLERC - C'est un peu quand même ce qu'a essayé de faire le gouvernement ? Notamment Jean-Louis BORLOO ?
NICOLAS SARKOZY - Mais Jean-Louis BORLOO a fait un travail remarquable de rénovation urbaine, je veux maintenant engager un plan Marshall 2, au service de la formation de ces jeunes. Qu'est-ce que je veux éviter ? Je veux éviter que tant de jeunes soient tentés par le trafic de drogue. Quand vous pensez qu'un guetteur au bas des immeubles peut gagner davantage que son père qui se lève tôt le matin, comment voulez-vous qu'on respecte le travail dans ces conditions-là. Donc je dis à tous ces jeunes que la République sera généreuse à leur endroit, que la République leur trouvera une formation et un emploi. Mais en revanche, je leur dis que je serais ferme, à l'endroit de ceux qui empoisonnent la vie des autres. Dans la République que je souhaite, vous comprenez si on a envie de brûler une voiture, il vaut mieux brûler la sienne, plutôt que celle du voisin. Parce que ça ce n'est pas admissible.
ARLETTE CHABOT - Petite précision, vous aviez dit qu'à titre personnel, bien avant la campagne vous souhaitiez accorder le droit de vote aux étrangers, pour les élections locales qui séjournaient depuis un certain nombre d'années en France. Peut-être cinq ans, si je me souviens bien, est-ce que vous avez changé d'avis sur ce sujet ?
NICOLAS SARKOZY - Sur la base de la réciprocité avec les pays d'accueil, je n'ai pas retenu cette proposition, dans mon projet présidentiel. Parce que j'ai considéré que cette proposition ferait reculer le débat plutôt que de le faire avancer.
GILLES LECLERC - C'est quand même une idée qui vous tient un peu à coeur ? A terme ?
NICOLAS SARKOZY - Si elle m'avait tenu à coeur, je l'aurais mis dans mon projet présidentiel. Je ne l'ai pas fait.
ARLETTE CHABOT - Alors pour garder toujours un peu de temps pour parler de l'étranger. Je voudrais d'abord un dernier interpellateur, si j'ose dire, en tout cas, question posée par Yann ARTHUS-BERTRAND. Il est en ce moment au Brésil, il prépare un film sur l'état de la planète, déforestation au Brésil dans le mato grosso et c'est par téléphone, parce qu'il est vraiment au fin fond de la forêt, qu'il vous pose cette question, je pense qu'on va l'entendre.
YANN ARTHUS-BERTRAND - J'aimerais vous rappeler que si tout le monde vivait comme un Français, les ressources de la terre ne suffiraient pas. J'ai lu votre programme sur l'environnement et vous allez me dire qu'il est formidable, mais j'aimerais que vous me précisiez ce que vous proposez en plus que Ségolène ROYAL, pour réduire notre impact que nous, Français sur la terre, car l'enjeu il est là ?
ARLETTE CHABOT - Voilà, alors qu'est-ce que vous faites vraiment ?
NICOLAS SARKOZY - Je veux dire que j'apprécie beaucoup Yann ARTHUS-BERTRAND, il est venu il y a quelques mois avec moi en Guyane. Qu'est-ce que je propose de plus ? Une chose assez simple, je me battrais auprès des instances européennes, pour que tous les produits écologiquement propres bénéficient d'un taux de TVA réduit à 5 %. C'est simple, c'est la différence de logique entre Ségolène ROYAL et moi. Ségolène ROYAL veut interdire, je veux encourager. C'est quand même parfaitement anormal qu'une voiture propre coûte davantage d'argent, qu'une voiture qui pollue. Si vous acceptez de mettre la TVA sur les voitures propres à 5 %, la voiture propre coûtera moins chère que la voiture qui pollue. Pareil pour le bâtiment, je souhaite que toutes les constructions HQE, Haute Qualité Environnementale, bénéficient d'un taux de TVA réduit à 5 % pour que chacun d'entre nous, soit encouragé à faire des économies d'énergie, à consommer propre, à construire propre, et je dis pareil d'ailleurs pour les produits de l'agriculture biologique.
ARLETTE CHABOT - Alors notre confrère, Charles BREMNER du TIMES va venir nous rejoindre pour évoquer avec vous, évidemment des sujets, qui concernent notamment l'Europe, la France et l'Europe. Voilà alors Charles BREMNER, le TIMES, il a pris je le disais l'EUROSTAR, pour venir en France et vous poser des questions ce soir et d'abord sur l'Europe. Charles BREMNER.
CHARLES BREMNER, CORRESPONDANT DE THE TIMES (GB) - Bonsoir monsieur SARKOZY.
NICOLAS SARKOZY - Bonsoir monsieur BREMNER.
CHARLES BREMNER - Vous avez été assez critique à l'égard de l'Europe, pendant la campagne, si vous êtes élu, vous allez aller à Bruxelles, un mois après votre installation, qu'est-ce que vous allez dire ? Quel message est-ce que vous allez passer à vos 26 confrères ?
NICOLAS SARKOZY - Moi, je voudrais qu'on change notre façon de concevoir l'Europe. Premier message, je leur demanderai d'être assez sage pour qu'on renonce à tout élargissement tant qu'on n'a pas trouvé des institutions pour l'Europe. On s'est élargi vite, trop vite, et je crois à l'Europe politique, et je dis qu'il faut une Europe avec des frontières. Deuxième message, je m'opposerai à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. La Turquie c'est l'Asie mineure, ce n'est pas l'Europe. Troisième message, je veux que la préférence communautaire devienne une réalité, si on a fait l'Europe, c'est pour la préférence communautaire.
CHARLES BREMNER - La question comme la Turquie c'est assez long terme, moyen terme, mais il y a des questions plus immédiates et vous avez parlé là de la préférence communautaire, vous avez parlé de l'harmonisation fiscale et vous savez bien que ce sont des politiques qui n'ont pas beaucoup de soutien parmi vos partenaires ?
NICOLAS SARKOZY - Alors si vous me permettez, sur la fiscalité, il y a quelque chose que je ne comprends pas. La Slovénie vient de supprimer l'impôt sur les bénéfices des sociétés, a-t-elle demandé l'avis de la France ? L'a-t-elle demandé ?
CHARLES BREMNER - Je suppose que non.
NICOLAS SARKOZY - Parfait ! Alors je ne vois pas pourquoi la Slovénie peut supprimer l'impôt sur les bénéfices sans demander l'avis de ses partenaires. Et que si nous, nous voulons baisser la TVA sur la restauration, pour les petits commerces, nous devons demander et attendre l'unanimité des autres. Monsieur BREMNER, l'Europe c'est la même règle pour tout le monde. Si les uns ont la liberté, les autres doivent l'avoir. Deuxième élément, je veux défendre l'agriculture française et européenne. Alors je sais que ça ne plait pas trop aux Anglais, mais j'aimerai vous faire réfléchir à cela. Si on abandonne l'agriculture européenne, il ne restera plus qu'une seule agriculture dans le monde, l'agriculture américaine. Et à ce moment-là, vous verrez les prix augmenter et l'indépendance alimentaire de l'Europe disparue et la sécurité alimentaire de l'Europe disparue. Si on a fait l'Europe, c'est parce qu'on préfère la communauté européenne. Sinon, ce n'était pas la peine de le faire.
CHARLES BREMNER - Mais quand même, il va falloir l'unanimité pour changer les politiques ?
NICOLAS SARKOZY - Bien sûr, mais monsieur BREMNER ce n'est pas parce qu'il faut l'unanimité, que je dois m'abstenir d'avoir des convictions. Si on s'assied à la table des chefs d'Etat et de gouvernement européens, en disant : j'ai aucune idée, aucune conviction. Enfin dernier point, je veux qu'on change l'état d'esprit des négociations OMC. C'est invraisemblable, quand même...
ARLETTE CHABOT - Organisation Mondiale du Commerce.
NICOLAS SARKOZY - Pardon, on envoie un commissaire européen, très bien, qui négocie en dépit du bon sens.
ARLETTE CHABOT - Vous dites ça parce qu'il est britannique ?
NICOLAS SARKOZY - Non, je ne dis pas ça parce qu'il est britannique. Je dis ça parce que...
ARLETTE CHABOT - Sauf qu'il est britannique quand même ?
NICOLAS SARKOZY - Il se trouve que monsieur MANDELSEN est un homme intelligent, mais qui négocie en dépit du bon sens. Prenons un exemple, les Américains ont une dérogation à l'OMC pour aider leurs petites moyennes entreprises. Mais pourquoi ce qui est permis pour les Américains, ça ne serait pas permis pour nous ? Deuxièmement, pourquoi on va ouvrir nos marchés alors que les autres ne le font pas ? Pourquoi on s'impose des règles alors que les autres ne le font pas ? Je veux la réciprocité, je veux défendre les emplois en Europe, je veux lutter contre les délocalisations, parce que toutes ne sont pas absolument nécessaires. Et je veux que l'Europe nous aide à nous protéger de la mondialisation et non pas sur le Cheval de Troie de la mondialisation. Je suis Européen, monsieur BREMNER. Enfin dernier point, je poserai la question de la politique des changes et de l'euro. C'est invraisemblable...
CHARLES BREMNER - Justement l'euro, là, aucun de vos partenaires est de votre avis, que l'euro est trop fort ?
NICOLAS SARKOZY - Ce n'est pas exact, les Allemands ne sont pas de cet avis, mais le Premier ministre luxembourgeois qui préside l'EUROGROUP, monsieur JUNCKER et vous le savez très bien, vous connaissez très bien ces questions a menacé de démissionner si monsieur TRICHET continuait. Enfin qu'est-ce qui se passe ? Les Américains poussent le dollar à la baisse pour favoriser la croissance et l'emploi, vous êtes d'accord ? Vous, les Anglais, j'aime beaucoup l'Angleterre, vous êtes les champions du monde, dès que votre croissance diminue, qu'est-ce que vous faites ? Gordon BROWN, le chancelier et le gouverneur de la Banque d'Angleterre se réunissent et décident de baisser les taux, pour faire baisser la livre. Les Japonais font la même chose, et les Chinois font la même chose. Alors monsieur BREMNER pourquoi vous nous créez la deuxième monnaie du monde si c'est pour ne pas s'en servir ? Alors vous, les Anglais, vous nous dites, écoutez, ce n'est pas bien de faire comme ça, mais enfin vous, vous êtes absolu de venir dans l'euro !
CHARLES BREMNER - Là vous avez parlé de Gordon BROWN, il va peut-être, probablement être le Premier ministre britannique, il va être votre partenaire, qui seront vos autres partenaires ? Vous allez créer un nouveau groupe au centre de l'Union européenne ?
NICOLAS SARKOZY - Moi, je crois qu'il faut que les grands pays prennent leurs responsabilités, je pense à l'Angleterre dont nous avons besoin en Europe monsieur BREMNER. Je pense à l'Allemagne, bien sûr, je pense à l'Italie, je pense à l'Espagne, bien sûr tous les pays se valent. Mais enfin pour l'économie de l'Europe, 82 millions d'Allemands ça pèse plus que 500 000 Luxembourgeois.
ARLETTE CHABOT - Petite question, pas petite d'ailleurs, question importante, si vous êtes élu, vous voulez au fond, refaire démarrer l'Europe en faisant adopter par le parlement un traité simplifié qui permettrait aux institutions européennes de se remettre en route. Alors d'autres candidats veulent un référendum, est-ce que ça veut dire au fond que vous, vous souciez peu de l'avis des Français qui ont dit « non » il y a deux ans à une constitution ?
NICOLAS SARKOZY - Mais c'est extravagant, c'est extravagant. Les Français ont dit « non » n'y revenons pas. La constitution malgré le travail absolument remarquable de Valéry GISCARD d'ESTAING, elle ne sera pas appliquée. En revanche, on ne peut pas rester comme ça ! Avec une Europe immobile, depuis deux ans, en Europe, il ne se passe rien. Donc il faut doter l'Europe d'institutions minimums, qui par ailleurs font parfaitement consensus. Je propose que la France prenne l'initiative et qu'on débloque la situation. Alors ceux qui proposent un nouveau référendum, mais un référendum sur quoi ? Sur la même constitution ?
ARLETTE CHABOT - Renégocier avec nos partenaires un autre texte ?
NICOLAS SARKOZY - Non, mais renégocier, écoutez le temps qu'on le renégocie, c'est le fameux plan B de monsieur FABIUS. On a toujours monsieur FABIUS, mais on n'a pas vu le plan B. Il n'y en a pas, alors qu'est-ce qu'on va faire ? On va faire une négociation pour une nouvelle constitution ? Dans cinq ans on y est encore. Ou alors on va proposer la même constitution aux Français, si ils disent « non », on aura détruit définitivement l'Europe. Donc je propose d'être raisonnable, de mettre la constitution de côté et de faire adopter par l'Europe, de faire ratifier par le parlement, quelques modifications institutionnelles, par exemple un président de l'Union européenne qui irait négocier en lieu et place du commissaire européen, ça mettrait de la clarté, tout le monde est d'accord dessus et ça permet de débloquer l'Europe.
ARLETTE CHABOT - Alors très, court, forcément, je laisse le soin de poser la question sur les rapports avec les Etats-Unis.
CHARLES BREMNER - On vous appelle, monsieur SARKOZY « l'Américain » on vous a beaucoup critiqué, mais depuis 40 ans maintenant, les relations avec les Etats-Unis, ne sont pas très tranquilles. Comment vous allez les changer, les améliorer ?
NICOLAS SARKOZY - Les Américains sont des amis, ce sont des alliés, c'est la première économie du monde, nous devons avoir des rapports apaisés avec eux. Mais je dis aux Américains nous serons des amis exigeants et surtout libres. Je peux prendre des exemples, on n'était pas d'accord pour l'intervention en Irak, deuxième exemple, je ne comprends pas pourquoi cette grande nation américaine, ne donne pas l'exemple pour la préservation des équilibres de la planète ? Le fait que les Etats-Unis n'aient pas ratifié le protocole de Kyoto c'est inadmissible. Ils sont bordés de deux océans, l'Atlantique et le Pacifique, la montée des eaux due au réchauffement de la planète, ça doit concerner autant les Américains que les autres populations du monde. Voilà, je pense qu'on peut être des amis, on peut être des alliés et se dire les choses quand on n'est pas d'accord.
CHARLES BREMNER - Est-ce que vous allez poursuivre la vision du président CHIRAC, d'un monde multipolaire, avec l'Europe ? En quelque sorte comme concurrent des Etats-Unis ?
NICOLAS SARKOZY - Non, pas concurrent, le monde multipolaire c'est la seule solution. Quel pays dans le monde peut-il prétendre diriger le monde entier. Le monde est multipolaire, c'est une réalité et même s'il y a l'Europe, ça n'empêchera pas le monde de vouloir exister, tous les pays veulent prendre part aux décisions l'ONU est composé de tous les pays de la planète ou quasiment tous, la multipolarité c'est un choix incontournable.
CHARLES BREMNER - Un autre p??le, c'est la Russie, et vous allez, si vous êtes élu à la réunion du G8, les 8 pays démocratiques, vous allez serrer la main du président POUTINE ? Est-ce que vous allez lui parler de la nouvelle moralité que vous voulez installer dans l'Europe ?
NICOLAS SARKOZY - Mais d'abord c'est mon devoir, si je suis élu président de serrer la main du président d'une grande nation. Ca serait discourtois et invraisemblable. Par ailleurs ce qu'a fait monsieur POUTINE en Russie, ce n'est pas rien. La Russie c'est un grand pays, une grande nation et le sentiment national russe a été mis à rude épreuve ces derniers temps. Mais ça n'empêche pas de dire à monsieur POUTINE, écoutez, on est préoccupé de ce qui se passe en Tchétchénie. Il y a la moitié des, il y a 250 000 Tchétchènes qui ont assassiné et 250 000 qui sont exilés, un peuple de 900 000. Par ailleurs, on peut quand même être préoccupé du fait qu'un journaliste russe, se trouve empoisonné. Je ne me permets pas de dire que c'est tel ou tel, mais enfin ce sont des pratiques qui demandent quelques éclaircissements. J'ai beaucoup d'admiration pour la Chine qui est un empire extraordinaire, mais enfin on peut s'asseoir à la table avec nos amis chinois et leur dire quand même, le sort des prisonniers politiques, dans votre pays ça pose question. De la même façon quand monsieur POUTINE n'est pas content de nous, il nous le dit. Ce n'est pas parce que c'est de la diplomatie qu'il ne faut rien se dire.
CHARLES BREMNER - Est-ce que la situation interne de la Russie, en ce moment, vous préoccupe ?
NICOLAS SARKOZY - Sur certains aspects, un petit peu.
ARLETTE CHABOT - C'est-à-dire ? C'est-à-dire ? C'est économique, le développement quoi ? De délinquance....
NICOLAS SARKOZY - Ecoutez, on voit la montée d'une certaine corruption, la montée de la violence, la montée d'organisations parallèles, qui sont incontestablement préoccupantes. Maintenant, moi, je n'ai de leçon à donner à personne, on me pose une question, j'essaie d'y répondre avec honnêteté. Mais la France, c'est le pays du monde qui a le plus fait pour les droits de l'homme, la France ne peut pas se taire. Quand les infirmières bulgares sont maintenues, rendez-vous compte ces pauvres femmes, depuis huit ans, mais c'est inadmissible. Quand madame Ingrid BETANCOURT, j'en ferais une priorité, qui depuis cinq ans, dans des conditions abominables, dans la jungle. Vraiment la mission de la France, c'est de défendre les droits de l'homme et en l'occurrence les droits de la femme, avec une grande force.
ARLETTE CHABOT - Alors il y a une question qui nous ramène à l'Europe. On a vu ce soir dans le journal, Bronislaw GEREMEK, dire qu'il ne se soumet pas à une loi, en Pologne c'est simple, c'est en même temps, effectivement, ça s'appelle « la déclaration de lustration. » C'est-à-dire qu'on demande à tous ceux qui occupent...
NICOLAS SARKOZY - Ils veulent revisiter l'histoire.
ARLETTE CHABOT - Voilà, on demande à tous ceux qui occupent une fonction officielle de dire si oui ou non, ils ont collaboré avec les polices etc. dans un régime passé ou avec le régime passé. Monsieur GEREMEK a refusé, on sait qui il est et aujourd'hui, il est menacé de perdre, d'être déchu de son mandat de député européen. Comment vous réagissez à ce qui se passe aujourd'hui en Pologne ?
NICOLAS SARKOZY - Ecoutez d'abord je veux dire que je connais monsieur GEREMEK pour qui j'ai beaucoup d'admiration et soupçonner monsieur GEREMEK, ça ne manque pas de sel, lorsqu'on sait le rôle qu'il a joué à Gdansk avec Lech WALESA, auquel j'avais rendu visite l'année dernière et donc c'est particulièrement inadmissible de soumettre monsieur GEREMEK à cette nouvelle législation et je veux dire pour le coup que je suis très préoccupé du gouvernement polonais actuel.
ARLETTE CHABOT - C'est-à-dire que vous, mais quand vous dites que vous êtes préoccupés...
NICOLAS SARKOZY - C'est-à-dire que je soutiens...
ARLETTE CHABOT - C'est un gouvernement qui est élu.
NICOLAS SARKOZY - Bien sûr, mais le fait d'être élu, ne vous fait pas toujours rentrer dans des critères démocratiques absolument parfaits. L'élection, je pourrais prendre d'autres exemples, à la fois dans l'histoire et aujourd'hui, l'élection ne lave pas de toutes autres considérations. C'est très préoccupant ce qui se passe en Pologne aujourd'hui et je veux vous dire que j'apporte mon soutien à monsieur GEREMEK.
ARLETTE CHABOT - Oui, si on fait des questions courtes, sur l'Afghanistan, on a des nouvelles assez rassurantes sur les deux Français qui sont en otages en Afghanistan, est-ce que vous pensez que les troupes françaises ont toujours leur place en Afghanistan, ou est-ce qu'il faut à terme, envisager un départ ?
NICOLAS SARKOZY - Il était certainement utile qu'on les envoie, dans la mesure où il y avait un combat contre le terrorisme. Mais la présence à long terme des troupes françaises à cet endroit du monde ne me semble pas décisive.
ARLETTE CHABOT - Mais même s'il faut poursuivre je dirais une présence, pour empêcher les Talibans de revenir au pouvoir ?
NICOLAS SARKOZY - Je vous ai dit quelle était ma réponse, il y a eu à un moment donné, pour aider le gouvernement de monsieur Hamid KARZAI, où il fallait faire un certain nombre de choix et d'ailleurs le président de la République a pris la décision de rapatrier nos forces spéciales et un certain nombre d'éléments. C'est une politique que je poursuivrais.
ARLETTE CHABOT - Vous avez dit que vous croyez à l'efficacité de sanctions, contre l'Iran afin d'empêcher le gouvernement iranien d'aller plus loin et vers l'arme nucléaire. Vous croyez toujours à l'efficacité ou vous pensez qu'un jour, il faudra dire, ça ne marche pas et il faut effectivement envisager d'autres dispositions ?
NICOLAS SARKOZY - Non, il n'y a pas d'autres solutions que les sanctions progressives, de plus en plus fermes et l'unité de la communauté internationale. On ne peut pas laisser le président iranien avec dans ses mains l'arme nucléaire militaire, c'est absolument insensé. C'est l'Iran c'est un très grand pays, une très grande civilisation, j'ai confiance dans les débats internes en Iran, il faut les sanctions obligent la société civile iranienne, à prendre position et à faire céder le gouvernement iranien actuel.
ARLETTE CHABOT - Vous avez dit que c'était le premier dossier que vous trouveriez, si effectivement, si vous êtes élu à l'Elysée, qu'il trouvera quel que soit l'élu. Vous pensez qu'il faudrait s'opposer à une intervention militaire ? Comment vous réagiriez si vous on vous demain, l'Iran, les Etats-Unis envisage une intervention militaire.
NICOLAS SARKOZY - Je ne peux pas imaginer que les Etats-Unis envisageraient une erreur de cette nature, on a vu ce qu'a donné l'intervention militaire dans un pays de 25 millions d'habitants, imaginons ce que donnerait l'intervention militaire dans un pays de 75 millions d'habitants au relief aussi accidenté que l'Iran. Je n'ose imaginer que ça sera, que la question se posera même.
CHARLES BREMNER - Sur l'Irak, deux questions, qu'est-ce que vous auriez fait autrement que le président CHIRAC a fait ? Parce que vous avez été un peu critique à l'époque. Et deuxièmement, maintenant, est-ce que vous envisageriez une coopération française ?
ARLETTE CHABOT - Est-ce que vous auriez fait différemment ?
NICOLAS SARKOZY - Non, j'aurais fait la même chose, on peut discuter, sur la forme et notamment la question du droit de veto. Est-ce que c'était utile ou pas ? Mais sur le fond j'aurais fait exactement la même chose. Aujourd'hui on ne peut que dire à nos amis américains que la seule solution pour l'Irak, c'est de prévoir un plan de retrait. Et de toute manière, si vous regardez l'histoire du monde, aucune armée étrangère, n'a réussi dans un pays qui n'était pas le sien. Aucune. Même la Chine sur le Vietnam, les Japonais, aucune, quelle que soit l'époque, quel que soit le lieu. Donc de toute façon, les Américains devront se retirer, dans leur intérêt. Alors selon quel calendrier ? Nous n'avons pas de troupe là-bas, ce n'est donc pas à nous de nous en mêler.
ARLETTE CHABOT - Alors tout le monde s'accorde à dire qu'il faut vraiment peut-être un jour arrêter ce qui se passe au Darfour. Quel est à votre avis, qu'est-ce qu'on peut faire en dehors de tout le monde, entendre, les plaintes, les regrets de tous les chefs d'Etat et de gouvernement ?
NICOLAS SARKOZY - Non, ce qu'il faut faire c'est assez simple quand même. Il y a une demande de corridor humanitaire, il faut faire ces corridors humanitaires. Pourquoi des corridors humanitaires ? Pour aller sauver ces pauvres gens. On ne peut pas les laisser tomber, on ne peut pas assister à un véritable génocide. Alors qu'est-ce qu'il faut pour ça ? Il faut un corridor pour que les ONG, des nourritures, des médecins, des écoles, enfin des personnes pour soigner, éduquer puissent arriver sur ces populations, et leur porter secours. Premier point. Deuxième point, les dirigeants soudanais qui se sont opposés à ces corridors, doivent être traduits un jour ou l'autre et le plus tôt sera le mieux, devant le Tribunal International. Parce qu'il est parfaitement clair aujourd'hui que nulle chef d'Etat n'est à l'abri de rendre des comptes sur la façon dont il a traité humainement ou non, des populations qui étaient sous sa responsabilité.
ARLETTE CHABOT - Alors merci, Charles. Pour terminer, on va regarder sur FRANCE 2, dans après cette émission, un documentaire qui est consacré à l'histoire des débats, justement du second tour de l'élection présidentielle. Vous avez re-visionné vous-mêmes les débats avant de vous préparer à celui qui vous mettra en face de Ségolène ROYAL mercredi prochain ?
NICOLAS SARKOZY - Non, je n'ai pas visionné, j'ai vu tout à fait par hasard, sur une chaîne du câble, le débat CHIRAC/MITTERRAND, j'ai trouvé que c'était très intéressant. J'en ai regardé un quart d'heure.
ARLETTE CHABOT - C'est tout ? Parce que vous aviez tout compris ou vous, vous souveniez parfaitement du débat ?
NICOLAS SARKOZY - Non, non, non, je ne me souvenais pas parfaitement du débat. Mais je pense qu'aucun débat ne ressemble à un autre, que madame ROYAL a des qualités certainement différentes de celles de monsieur MITTERRAND et que moi-même je n'ai pas toutes les qualités ni de Jacques CHIRAC, ni de Valéry GISCARD d'ESTAING.
ARLETTE CHABOT - Comment on se prépare à ce genre de débat ? Tout le monde se demande comment se prépare un candidat ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, vous savez je crois qu'il faut être beaucoup plus authentique que cela. J'irais à ce débat très sereinement, en essayant d'expliquer mon projet aux Français. En essayant d'avoir la préoccupation de la dignité du débat. En respectant la personne qui sera en face de moi. En ne la considérant pas comme une femme, mais en en la considérant comme un responsable politique qui a développé beaucoup de qualités pour arriver à ce niveau-là et en expliquant au mieux possible, quelles sont nos différences, et puis mon Dieu, les Français jugeront. Vous savez je crois qu'il faut sortir de cette idée que la politique c'est la guerre, c'est la brutalité, c'est l'intolérance, moi, je crois au respect, je crois à la tolérance et je crois dans le fond, à une certaine forme d'ouverture et puis c'est aux Français de choisir, il faut leur faire confiance.
ARLETTE CHABOT - En tout cas, vous dites comme le disait hier Ségolène ROYAL, vous êtes tout à fait prêt à assumer la fonction ? Vous avez dit qu'il vous faudrait quelques jours...
NICOLAS SARKOZY - Je ne me permets pas de dire ça, je ne me permettrais pas...
ARLETTE CHABOT - Vous êtes prêt à assumer la fonction ?
NICOLAS SARKOZY - Oui, mais bien sûr, mais c'est les Français qui doivent le dire.
ARLETTE CHABOT - Vous avez dit qu'il fallait quelques jours, si vous êtes élu, quelques jours après l'élection pour vous isoler, réfléchir, avant de décider.
NICOLAS SARKOZY - Oui, si les Français m'élisent, je prendrais quelques jours, pour oublier le fracas de la campagne électorale, pour habiter la fonction, parce que c'est une responsabilité grave, que celle de conduire la 5ème nation du monde, la 5ème puissance du monde, et je ne vais pas vers cette responsabilité de façon insouciante, je suis très conscient de la difficulté de la tâche. Je mesure l'ampleur des projets que j'ai à mettre en oeuvre et donc oui, oui, certainement trois ou quatre jours. J'aurais besoin de cette période de silence et de préparation. Il faut être habité.
ARLETTE CHABOT - Oui, aux Etats-Unis, il a une période un peu longue de plusieurs semaines qui permet à la nouvelle équipe de prendre le relais. Vous pensez que c'est un système qui serait utile et le mettre en place en France ?
NICOLAS SARKOZY - C'est un système qui est très sage, qui est sans doute plus sage que le nôtre. Même si l'élection chez nous, aura lieu le 6 mai, et le président de la République, Jacques CHIRAC son mandat se termine le 17 mai à 00 heures. On peut donc penser que la passation aura lieu vers le 16 mai.
ARLETTE CHABOT - Merci, Nicolas SARKOZY. Temps de parole, il s'affiche, voilà pour respecter l'égalité avec Ségolène ROYAL, merci à vous, d'avoir participé à cette émission...
NICOLAS SARKOZY - Merci de m'avoir invité.
ARLETTE CHABOT - Le rendez-vous bien sûr, c'est le 2 mai, pour ce face à face, avec Ségolène ROYAL, que vous pourrez bien sûr suivre évidemment sur FRANCE 2. D'ici là bien sûr, un autre débat lundi soir, c'est « Mots croisés » Yves CALVI, trois face-à-face entre trois soutiens de monsieur SARKOZY et trois supporters si je puis dire de Ségolène ROYAL. « Mots croisés » lundi soir vous n'oubliez pas. Merci à tous ceux qui ont préparé cette émission, notamment à Jean-Jacques AMSELLEM et puis à tous ceux qui ont réalisé encore une fois ce décor très vite, pour permettre de suivre ces deux émissions. Merci à tous, bonsoir et donc suivez...
NICOLAS SARKOZY - Et puis au 2 mai.
ARLETTE CHABOT - Et au 2 mai.
NICOLAS SARKOZY - Vous y serez Arlette CHABOT.
ARLETTE CHABOT - Voilà nous y serons au 2 mai, pour suivre ce grand face-à-face de 2007.
NICOLAS SARKOZY - Vous, vous y préparez aussi ?
ARLETTE CHABOT - Aussi. Bonsoir à tous. source http://www.u-m-p.org, le 2 mai 2007