Réponse de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, et de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, dans Le Monde du 11 avril 2007, à la tribune intitulée "Bosnie : où sont les valeurs de l'Union européenne ?" parue dans Le Monde du 6 avril 2007.

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Média : Emission la politique de la France dans le monde - Le Monde

Texte intégral

Dans une lettre ouverte parue dans Le Monde du 6 avril, un groupe d'intellectuels nous a appelés à maintenir une position ferme sur la nécessaire coopération de la Serbie avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) de La Haye dans la recherche des criminels de guerre encore en fuite. Nous partageons pleinement l'appel au maintien de la conditionnalité liée au TPIY.
Les auteurs s'adressent au chef de l'Etat français "présent et futur". Mais tous savent bien que c'est le président de la République, dès son entrée en fonctions en 1995, qui a eu une action décisive pour changer le cours des choses en Bosnie en déployant la Force de réaction rapide. Il a sauvé l'honneur de notre pays. La reprise du pont de Vrbanja restera le symbole de la dignité affirmée et retrouvée. De même, en 1999, Jacques Chirac a engagé l'OTAN à intervenir pour faire cesser les massacres au Kosovo.
Depuis 1995, la position du gouvernement français concernant la recherche et le jugement des criminels de guerre par le TPIY a été constante et vise à ce que ces criminels rendent compte devant la justice de leurs crimes.
En novembre 2000, c'est encore la France, qui assumait alors la Présidence de l'Union européenne, qui a organisé le Sommet de Zagreb et proposé à ses partenaires d'ouvrir la perspective européenne aux pays des Balkans tout en la subordonnant clairement à une pleine et entière coopération avec le TPIY. Cette conditionnalité a commencé à porter ses fruits en permettant le transfert à La Haye et le jugement d'un certain nombre de criminels de guerre, mais six d'entre eux sont encore recherchés aujourd'hui par le procureur du TPIY, Carla Del Ponte. Il faut souligner ici l'action exemplaire et opiniâtre de cette personnalité d'exception.
Depuis la suspension des négociations de l'Accord de stabilisation et d'association avec la Serbie en mai 2006, la position de la France et de l'Europe est de conditionner la reprise de ces négociations à un engagement clair du gouvernement serbe à coopérer pleinement avec le TPIY ainsi qu'à des mesures concrètes et efficaces en ce sens. Mladic devrait notamment être transféré à La Haye dans les meilleurs délais. Nous avons rappelé à de nombreuses reprises cette position constante de la France et encore lors de la récente réunion des ministres des Affaires étrangères à Brême, les 30 et 31 mars.
Le président de la République a lui-même eu l'occasion de réaffirmer dernièrement, lors du Conseil européen du 15 décembre 2006, qu'il s'agissait, là, d'une condition absolument indispensable pour progresser sur la voie du rapprochement européen de la Serbie.
Notre devoir est que personne n'oublie ce qui s'est passé à deux heures de Paris, en Europe, il y a quelques années à peine. L'Union européenne se doit d'être particulièrement vigilante à l'égard de pays ayant vocation à la rejoindre un jour : le respect des valeurs fondamentales qui constituent son identité s'impose.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 avril 2007