Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Si je ne puis être parmi vous aujourd'hui, je tiens néanmoins à vous adresser, par ces quelques mots, le témoignage de mon sincère et profond attachement à ce que fut votre combat et à son héritage. Votre engagement doit être le nôtre, et il sera le mien, plus que jamais, pour la défense des valeurs qui fondent notre démocratie et conduisent notre action.
« Certaines époques de la condition de l'homme subissent l'assaut glacé d'un mal qui prend appui sur les points les plus déshonorés de la nature humaine »[1]. Ces mots sont ceux de René CHAR, alias Capitaine Alexandre, résistant, membre de l'Armée secrète fondée par le Général Delestraint. Cette année, René CHAR aurait eu cent ans.
Les mots du poète nous rappellent qu'ici, il y a 66 ans, l'enfer trouva son incarnation en des hommes pétris de haine, d'intolérance et de mépris, nourris d'une idéologie destructrice et mensongère. Contre cette infamie, vous avez pris les armes du courage et de l'honneur, et vous êtes élevés pour dire NON.
Pris dans les fers, harassés sous le poids de pierres, accablés par les coups et les cris du bourreau, affublés d'un simple numéro, vous et vos camarades trop tôt disparus, avez gardé en vous les ressorts d'une foi indéfectible en votre mission, celle de passeurs de liberté.
Et je l'affirme, tous vos noms se retrouvent aujourd'hui dans ce mot, liberté.
Je souhaite aujourd'hui rendre hommage à l'un de ces passeurs, membre du réseau Alliance, Monsieur Jean de ROQUETTE-BUISSON, qui nous a quittés à l'été 2006. Arrêté fin 1943 après la dénonciation de son réseau, il subit les coups et la torture, les humiliations, notamment au sinistre camp de Neue Bremme, en Sarre, au camp de Buchenwald et ici, au KL-Natzweiler et dans l'un de ses kommandos, Erzingen, où il trouve la force d'y croire encore grâce à la solidarité et à l'amitié qui l'unissait à Monsieur Léon BOUTBIEN, dont je salue ici l'épouse, et à Monsieur Robert SALOM0N, son « frère de misère » et successeur à la présidence de la Commission exécutive du Struthof. Elevé à la dignité de Grand Croix de la Légion d'Honneur, Monsieur Jean de ROQUETTE BUISSON a su, par ses engagements et sa démarche spirituelle, atteindre à la sérénité qu'il recherchait.
Mesdames, Messieurs, Chers Amis, votre assemblée en ce dimanche témoigne de ce que ces combats ne furent pas vains. Ils constituent l'ancrage d'un autre combat, pour lequel des hommes et des femmes prennent aujourd'hui les armes du coeur et de la raison et encadrent notre jeunesse au quotidien pour lui délivrer un message essentiel de vigilance et de tolérance. Plus de 150 000 jeunes sont déjà venus ici depuis l'ouverture du Centre européen du résistant déporté, tant appelé par vos voeux. Ils ont pu trouver ici des ressources nécessaires à la construction de leur identité de citoyens responsables, de Français, d'Allemands, d'Européens, conscients de ce qui fut, ici, au Struthof, mais aussi à Auschwitz, à Dachau, à Buchenwald ou Ravensbrück, et dans tous ces lieux dont les noms constituent la litanie sans fin d'une indicible horreur qui fit des millions de victimes : victimes pour être nées, victimes pour avoir pensé, victimes pour avoir été différents, victimes pour avoir cru, victime pour avoir combattu.
Il y a 60 ans, l'Europe s'est reconstruite, entamant le chemin de la paix, réunissant les hommes et les femmes de bonne volonté autour d'un projet. L'avenir de ce projet est entre les mains de chacun d'entre nous. Il nous appartient d'être fidèles à cet espoir et à cet appel.
Puissions nous n'avoir plus jamais à connaître des temps où « les yeux seuls sont encore capables de pousser un cri »[2]. Puissions nous toujours crier, « Liberté, égalité, fraternité ».
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 28 juin 2007
Chers Amis,
Si je ne puis être parmi vous aujourd'hui, je tiens néanmoins à vous adresser, par ces quelques mots, le témoignage de mon sincère et profond attachement à ce que fut votre combat et à son héritage. Votre engagement doit être le nôtre, et il sera le mien, plus que jamais, pour la défense des valeurs qui fondent notre démocratie et conduisent notre action.
« Certaines époques de la condition de l'homme subissent l'assaut glacé d'un mal qui prend appui sur les points les plus déshonorés de la nature humaine »[1]. Ces mots sont ceux de René CHAR, alias Capitaine Alexandre, résistant, membre de l'Armée secrète fondée par le Général Delestraint. Cette année, René CHAR aurait eu cent ans.
Les mots du poète nous rappellent qu'ici, il y a 66 ans, l'enfer trouva son incarnation en des hommes pétris de haine, d'intolérance et de mépris, nourris d'une idéologie destructrice et mensongère. Contre cette infamie, vous avez pris les armes du courage et de l'honneur, et vous êtes élevés pour dire NON.
Pris dans les fers, harassés sous le poids de pierres, accablés par les coups et les cris du bourreau, affublés d'un simple numéro, vous et vos camarades trop tôt disparus, avez gardé en vous les ressorts d'une foi indéfectible en votre mission, celle de passeurs de liberté.
Et je l'affirme, tous vos noms se retrouvent aujourd'hui dans ce mot, liberté.
Je souhaite aujourd'hui rendre hommage à l'un de ces passeurs, membre du réseau Alliance, Monsieur Jean de ROQUETTE-BUISSON, qui nous a quittés à l'été 2006. Arrêté fin 1943 après la dénonciation de son réseau, il subit les coups et la torture, les humiliations, notamment au sinistre camp de Neue Bremme, en Sarre, au camp de Buchenwald et ici, au KL-Natzweiler et dans l'un de ses kommandos, Erzingen, où il trouve la force d'y croire encore grâce à la solidarité et à l'amitié qui l'unissait à Monsieur Léon BOUTBIEN, dont je salue ici l'épouse, et à Monsieur Robert SALOM0N, son « frère de misère » et successeur à la présidence de la Commission exécutive du Struthof. Elevé à la dignité de Grand Croix de la Légion d'Honneur, Monsieur Jean de ROQUETTE BUISSON a su, par ses engagements et sa démarche spirituelle, atteindre à la sérénité qu'il recherchait.
Mesdames, Messieurs, Chers Amis, votre assemblée en ce dimanche témoigne de ce que ces combats ne furent pas vains. Ils constituent l'ancrage d'un autre combat, pour lequel des hommes et des femmes prennent aujourd'hui les armes du coeur et de la raison et encadrent notre jeunesse au quotidien pour lui délivrer un message essentiel de vigilance et de tolérance. Plus de 150 000 jeunes sont déjà venus ici depuis l'ouverture du Centre européen du résistant déporté, tant appelé par vos voeux. Ils ont pu trouver ici des ressources nécessaires à la construction de leur identité de citoyens responsables, de Français, d'Allemands, d'Européens, conscients de ce qui fut, ici, au Struthof, mais aussi à Auschwitz, à Dachau, à Buchenwald ou Ravensbrück, et dans tous ces lieux dont les noms constituent la litanie sans fin d'une indicible horreur qui fit des millions de victimes : victimes pour être nées, victimes pour avoir pensé, victimes pour avoir été différents, victimes pour avoir cru, victime pour avoir combattu.
Il y a 60 ans, l'Europe s'est reconstruite, entamant le chemin de la paix, réunissant les hommes et les femmes de bonne volonté autour d'un projet. L'avenir de ce projet est entre les mains de chacun d'entre nous. Il nous appartient d'être fidèles à cet espoir et à cet appel.
Puissions nous n'avoir plus jamais à connaître des temps où « les yeux seuls sont encore capables de pousser un cri »[2]. Puissions nous toujours crier, « Liberté, égalité, fraternité ».
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 28 juin 2007