Interview de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat chargé des transports, à La Chaîne Info le 2 juillet 2007, sur la menace terroriste, le service minimum dans les transports, la nécessité de développer le fret ferroviaire et les relations entre N. Sarkozy et F. Fillon.

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Circonstance : Trois attentats terroristes déjoués en Grande-Bretagne, les 6 et 7 juillet 2007

Média : La Chaîne Info

Texte intégral

C. Barbier.- D. Bussereau, bonjour. Alerte maximale en Grande-Bretagne face aux attentats et aux menaces terroristes En
France, à cette période de départs en vacances, faut-il craindre aussi les attentats ?
 
D. Bussereau.- Le Gouvernement considère que nous devons être extrêmement prudents, donc toutes les mesures sont prises dans
les gares, dans les aérogares, dans les ports, dans tous les lieux, dans lesquels il y a des risques habituels et donc
naturellement la surveillance est renforcée dans tous ces lieux. Et nous souhaitons, que nos concitoyens aient la même
vigilance que nos amis britanniques, cette vigilance qui a permis d'éviter les attentats de Londres.
 
Q.- Que va-t-il se passer concrètement ? M. Alliot-Marie a réactivé hier le plan Vigipirate. Vous étiez de cette réunion, est
ce qu'on va fouiller les bagages ?
 
R.- Les mesures existent déjà. Nous avons déjà dans nos aéroports le dispositif certainement le plus performant d'Europe en
matière de fouille des bagages, en matière de contrôle des passagers, en matière de re-contrôle avant l'entrée dans l'avion.
Nous avons déjà un dispositif très au point également, dans les gares, dans les trains. Donc ce dispositif a été activé au
maximum avec les forces de police, de gendarmerie, le concours de l'armée dans le cadre du plan Vigipirate et puis de
l'attention générale de nos concitoyens. Donc, voila, il n'y a pas de raison d'avoir un affolement quelconque, mais nous
sommes en alerte maximum, comme nous le sommes toujours dans des cas comme celui-ci.
 
Q.- Est-ce que le Gouvernement va lancer, relancer au grand programme d'équipement en caméras vidéo dans les rues ?
 
R.- Cela, c'est la responsabilité du ministre de l'Intérieur et du ministre de la Justice. Je veux dire simplement que, dans
le domaine des transports, qui est celui dont j'ai la responsabilité avec J-L Borloo, nous avons déjà, je pense, un des
meilleurs dispositifs en Europe. Alors, c'est vrai qu'on s'aperçoit en Grande-Bretagne, que la présence des caméras permet
d'identifier les auteurs ou les présumés auteurs de ce type d'attentats ; là c'est un problème plus général qui est d'abord
de responsabilité de l'Etat, du ministre de l'Intérieur et ministre de la Justice et puis aussi des maires, puisque vous
savez dans les collectivités territoriales, ce sont les maires qui décident de l'implantation de programmes de caméras pour
améliorer la situation de leurs concitoyens.
 
Q.- Les syndicats de la SNCF se réunissent aujourd'hui pour réfléchir sur les projets du Gouvernement en matière de service
minimum. Est ce que débute la grande offensive syndicale contre ce texte ?
 
R.- Je ne le crois pas. Le Gouvernement, avec X. Bertrand, a fait un texte équilibré. C'est quoi ce texte ? C'est répondre, à
l'engagement du Président de la République de faire en sorte que lorsqu'il y a une grève - et la grève par nature est
légitime -, il y ait la possibilité pour nos concitoyens d'aller travailler normalement, de revenir le soir de leur travail
et pour les jeunes - on attend les résultats du bac aujourd'hui - pour aller suivre leur études et de revenir. Donc ce
système de service minimum sera fondé, d'abord sur un système de prévention, un peu sur le modèle de ce qui existe déjà
depuis de nombreuses années en région parisienne à la RATP, ensuite la définition d'un niveau de transport entre l'autorité
organisatrice et les entreprises de transport et puis un certains nombre d'engagements qui seront pris par les salariés
d'annoncer leurs grèves de faire en sorte qu'on puisse être en prévision et donc assurer le service essentiel, le jour de
l'arrêt de travail.
 
Q.- Alors deux points font litiges justement : prévenir 48 h avant une grève et puis 8 jours après, dans une entreprise de
transport organiser un vote à bulletins secrets. Etes-vous prêt à négocier sur ces 2 points ?
 
R.- Attendez, alors cela d'abord, c'est de la responsabilité de X. Bertrand ; c'est lui qui a mené ce dossier, le ministère
des Transports n'est que le conseiller technique du ministre en charge des Affaire sociales.
 
Q.- Vous pensez qu'il faut lâcher un peu ?
 
R.- Le fait de prévenir, si vous voulez, c'est tout a fait légitime. Regardez ! Déjà, depuis de nombreuses années, la SNCF
publie à l'avance dans les grands journaux, avec un site Internet, un site téléphonique, les prévisions de circulation,
lorsqu'il y a une grève. Comment le fait-elle ? Parce qu'elle sait, à l'avance, sur quels agents elle pourra compter pour
conduire ses trains et pour assurer la sécurité. Donc prévenir à l'avance me paraît normal. Au bout de huit jours, qu'est ce
qui se passe parfois - je ne parle pas de la SNCF ? Prenons par exemple, les dépôts de bus. Il y a des dépôts occupés ; cela
veut dire qu'une minorité de travailleurs empêche une majorité de travailler. Cela veut dire qu'au bout de 8 jours, qu'il y
ait un vote qui fait le point sur la situation ne me paraît pas exorbitant. Mais je vous le répète, la négociation sur le
projet de loi, qui n'est pas encore passé en Conseil des ministres et qui n'est pas encore devant l'Assemblée Nationale, est
du ressort de X. Bertrand et s'il estime, à un moment ou à un autre qu'il faut modifier le texte de loi, il en portera
naturellement la responsabilité, et le fera avec l'habitude de travailler avec les syndicats qui est la sienne.
 
Q.- J-C Mailly qui vient d'être reconduit à la tête de Force ouvrière doit déjeuner, normalement ave le Président de la
République aujourd'hui. Il est inquiet ; il dit : "c'est une atteinte au droits de grève". Que doit lui dire le Président de
la République pour le rassurer ?
 
R.- Je ne veux surtout pas dire ce que doit dire le Président de la République. Ce que je peux dire simplement, c'est que 90
ou 95 % des Français, quand on les interroge demandent ce service minimum ou service essentiel ou service garanti. Cela,
c'est la demande des Français. Nous faisons un projet de loi qui me paraît équilibré, qui n'est pas trop dur mais qui en même
temps modifie et améliore considérablement la situation. Je trouve que l'on a un bon équilibre. Ceci étant, vous l'avez vu
sur le projet des universités, le Président de la République quand il estime qu'il faut rétablir tel ou tel équilibre le fait
et c'est naturellement la responsabilité du chef de l'exécutif.
 
Q.- Alors N. Sarkozy a promis d'augmenter d'un quart avant 2012, la part fret rails ferroviaire dans notre pays. En même
temps, la SNCF veut supprimer 751 emplois dans le fret ; c'est contradictoire ?
 
R.- C'est le Président de la République est venu inaugurer la semaine dernière le terminal de Roissy. Et le terminal de
Roissy, on s'attendait tous à un discours sur l'aéronautique, il l'a fait. Il a parlé également de deux sujets qui ne vont
pas en France dans le domaine des transports le fret ferroviaire et les ports. Sur les frets ferroviaires il a constaté que
cela ne fonctionne pas que la SNCF, et les opérateurs privés d'ailleurs, n'assurent pas la part que nous souhaiterions. Et
donc il a demandé qu'un quart du trafic marchandises actuellement sur les routes soit reporté sur le fer sur la voie fluviale
et sur la voie d'eau maritime. Sur cinq ans, ce qui est un objectif énorme ; donc nous allons devoir définir les moyens et
cela passe naturellement par une SNCF qui fonctionne pour le fret ferroviaire. La SNCF, cela marche très bien pour le TGV ;
avec les régions, le TER se développe ; on voit bien que sur le fret ferroviaire ,cela ne marche pas du tout ; donc, la SNCF
met en place un plan, et j'espère que ce plan sera à la hauteur de la situation . Et cela ne marche pas non plus,
malheureusement, pour l'information des voyageurs en banlieue et je regrette profondément ce qui c'est passé à la gare du
Nord, la semaine dernière, où on a laissé en déshérence des centaines de voyageurs sans leur apporter l'information, le
service, le dépannage qui auraient du être apportés.
 
Q.- Est-ce qu'A-M Idrac qui termine son mandat en début d'année prochaine joue son poste sur ces deux dossiers là ?
 
R.- C'est absurde de dire cela. A-M. Idrac a été la présidente de la RATP, la présidente de la SNCF, c'est une femme de très
grande qualité, ce n'est pas A-M. Idrac qui est en cause. Nous demandons au système ferroviaire français de transporter plus
de marchandises. On ne peut pas continuer à avoir ces files de camions sur les routes, ce qui est d'ailleurs sans intérêt, y
compris pour les entreprises de transport routier. Il faut absolument que nous ayons aujourd'hui un transport ferroviaire de
fret de qualité dans notre pays. Le régime spécial de retraite des cheminots. Quand aborderez-vous la réforme ? Cela, c'est
encore la responsabilité du ministre des Affaires sociales qui, le moment venu et dans le calendrier gouvernemental,
reparlera de ces problèmes de retraite.
 
Q.- Les automobilistes peuvent consulter dès aujourd'hui le nombre de points qui leur restent sur leur permis un système très
compliqué, avec demande à la préfecture...
 
R.- Non. Vous allez à votre préfecture, votre sous-préfecture, dans une petite ville en région, vous arrivez avec votre
permis, une pièce d'identité et on vous le donne tout de suite. Si vous ne voulez pas faire le déplacement, à ce moment là,
vous envoyez un courrier avec une photocopie de votre permis, une photocopie de votre pièce d'identité, de quoi payer le
courrier en retour et puis vous l'avez dans les jours qui viennent.
 
Q.- Est-ce que les radars servent encore à quelque chose ? Est-ce que au fond, ça ne s'est pas banalisé ?
 
R.- Non, il y aura bientôt 2000 radars fixes qui sont les radars précédés d'une indication pour ne pas prendre en traître
l'automobiliste, des radars mobiles mis en route par les forces de police et de gendarmerie. 2000 radars, cela veut dire
quand même quand on regarde bien ce qui c'est passé depuis 5 ans, 2000 morts en moins chaque années depuis 2002 ; cela veut
dire 10 000 vies de gens qui sont peut-être proches de chacune et de chacun de ceux qui nous écoutent épargnées. Cela mérite
que l'on continue cette politique.
 
Q.- Préparez-vous avec J.-L. Borloo, le ministre de l'Ecologie dont vous dépendez une fiscalité dure contre les pollueurs,
notamment contre les véhicules polluants ?
 
R.- Si vous voulez je pense par exemple à cette affaire de fret routier dont vous me parliez tout à l'heure... Je pense que
des milliers, des milliers de poids lourds étrangers traversent notre pays sans payer le moindre écot à la société française.
Ils ont le carburant à bord du véhicule, la nourriture pour le chauffeur et finalement, ils ne payent rien de nos
infrastructures et de la détérioration de notre environnement. Il faut que nous étudions dans le cadre de la préparation du
Grenelle de l'environnement du mois d'octobre certainement quelque chose qui permette que ces poids lourds payent un péage
quand ils n'utilisent pas les autoroutes à péage. Les Allemands l'ont fait, les Autrichiens, les Tchèques. Voila l'exemple de
quelque chose qui nous permettrait à la fois de réduire la pollution, de faire le transport modal dont vous me parliez tout à
l'heure mais également de payer nos grandes infrastructures, car nous devons construire des TGV, un grand aéroport en
Bretagne, un grand canal entre Paris et la Belgique. Donc nous avons des infrastructures à payer et là, nous pourrions
trouver un moyen de les réaliser.
 
Q.- A quoi sert un Premier ministre dans un pays ou le Président de la république s'occupe de tout ?
 
R.- Le Président de la République a été élu par les Français pour s'occuper de tout. Quand on connaît N. Sarkozy, on sait que
son tempérament n'est pas de rester inactif, de ne pas être simplement un président arbitre. Le Premier ministre est le
numéro deux, c'est-à-dire que c'est lui qui, auprès du Président de la République, dirige le quotidien de l'action
gouvernementale. J-P. Raffarin l'a très bien rappelé, il y a quelques jours dans une interview dans le Journal du dimanche et
dans le Parisien. Et vous verrez demain, par la qualité du discours du Premier ministre qu'il est là et qu'il dirige l'action
gouvernementale sous l'autorité du Président de la République.
 
Q.- Toutes les annonces se font à l'Elysée, tous les dossiers s'arbitrent à l'Elysée, il ne reste rien pour le Premier
ministre !
 
R.- La logique de la Vème République, c'est que les Françaises et les Français viennent de voter à quatre reprises pour N.
Sarkozy .Premier tour de l'élection présidentielle, deuxième tour, ils ont élu aux élections législatives des hommes et des
femmes certes sur leurs qualités, sur leur implantation, sur leurs présence sur le terrain mais aussi sur le fait qu'ils se
préparaient à soutenir la politique de N. Sarkozy. Donc le Président a la légitimité et le Premier ministre et les ministres
qui dépendent du Premier ministre ont une légitimité issue de la légitimité présidentielle.
 
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 2 juillet 2007