Point presse de Mme Laurence Parisot, présidente du MEDEF, sur l'Université d'été du MEDEF, les heures supplémentaires pour les PME et les TPE et le bouclier fiscal, Paris le 10 juillet 2007.

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Université d'été
Je voudrais commencer cette conférence de presse par un point sur notre Université d'été, qui se tiendra les 29, 30 et 31 août Le titre de notre Université d'été est « Jouer le jeu ». Jouer le jeu est une règle du jeu. Une règle qui n'est pas écrite et si elle l'est, je pense que l'on ne prend pas assez de temps à la lire et à la relire. Jouer le jeu est un comportement, une méthode, une éthique. Un comportement, une méthode, une éthique qui font que l'on a des partenaires, on garde des partenaires, on développe ces partenaires. Ne pas jouer le jeu, c'est prendre le risque de s'isoler. Ne pas jouer le jeu, c'est prendre le risque de ne pas tenir compte des autres, de tout ce qui nous entoure. Ce, dans le quotidien, mais aussi à une plus vaste échelle, je pense aux chefs de la planète.
Notre Université d'été sera organisée autour de quatre grands thèmes ou sous-thèmes à partir de « jouer le jeu ».
Le premier thème est « Fair play or not fair play, telle est la question ». D'emblée, dans cette partie, nous aborderons des questions d'éthique, de dialogue, y compris dans ses dimensions les plus dramatiques. C'est ainsi que nous ouvrirons l'Université d'été par une plénière tout-à-fait exceptionnelle, consacrée principalement à la question irakienne et à la question iranienne. Nous aurons à la fois le Chef d'Etat Major des Armées, Jean-Louis Georgelin mais aussi Javier Solana, le secrétaire général du Conseil de l'Union Européenne. Dans cette partie, l'on se posera la question de savoir si la Chine joue le jeu. Et pour cet atelier sur la Chine, nous aurons le plaisir de recevoir Valéry Giscard d'Estaing. A la question « fair play or not fair play ? », nous avons choisi aussi de poser la problématique du sport. On ne peut pas parler de jouer le jeu sans parler du sport. Donc, nous aurons aussi un atelier spécifique sur le sport et les gestes fair et les gestes unfair, avec la ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports, Roselyne Bachelot, mais aussi avec quelques sportifs, et notamment David Douillet. Dans cette partie, j'attire l'attention sur un atelier, qui aura beaucoup de succès : il sera consacré aux « hedge funds ». Est ce que les « hedge fund » sont des pirates qui ne jouent pas le jeu ou au contraire, sont-ils des joueurs d'exceptions ?
Deuxième sous-thème : « connaître les règles du jeu ». On ne peut pas jouer le jeu sans connaître les règles du jeu .Or, il y a depuis quelques années de nouvelles règles du jeu. Par exemple, le Web. C'est une sacrée nouvelle règle du jeu qui bouleverse d'ailleurs votre métier, celui de journaliste. Pour cette plénière sur le Web, nous avons aussi un plateau tout-à-fait exceptionnel. Nous aurons Bruno Racine, Président de la Bibliothèque Nationale de France; il y a tout un enjeu de transformation éventuelle du patrimoine de la bibliothèque sur un mode interactif. Nous aurons également Jean-Philippe Courtois , c'est le président de Microsoft Europe, Moyen-Orient et Afrique et c'est le seul Français qui fait partie du Comité exécutif de Microsoft. Dans cette partie « connaître les règles du jeu », il y aura un atelier important sur l'opinion publique internationale, sur la transmission des règles sur le patrimoine linguistique qui est, peut-être, une règle en voie de disparition quand on pense à la langue française, avec notamment, la participation exceptionnelle du linguiste Claude Hagège. Il y aura aussi un atelier sur les monnaies : est-ce que l'on connaît bien la règle du jeu des monnaies ? Je pense qu'un débat va s'instaurer de manière très intéressante entre Jean-Pierre Jouyet, Alain Madelin et Michel Aglietta sur le yen, le yuan, le dollar et l'euro.
Troisième sous-thème :« faire bouger les règles du jeu ». En fait, il ne s'agit pas seulement de connaître les règles, il s'agit, à certains moments, de les faire évoluer. Nous n'avons pas peur de poser la question de l'évolution du capitalisme. Est-ce que celui-ci doit évoluer et comment ? Comment peut-il intégrer la solidarité ? Doit-il l'intégrer ? A mon avis, oui. Pour cette partie, j'ai le grand plaisir d'inviter l'ex-Secrétaire général adjoint des Nations Unies, l'écrivain indien Shashi Tharoor, qui était candidat à la succession de Kofi Annan et est arrivé deuxième derrière Ban Ki Moon. Il viendra réfléchir sur l'évolution du capitalisme, en compagnie notamment d'Alpha Oumar Konaré, le président de l'Union Africaine, l'ancien président de la République du Mali. Avec la venue de ces personnalités, nous avons pu donner à notre Université d'été une dimension internationale forte, au-delà de la dimension européenne que, déjà, nous avions donné l'année dernière. Sur la dimension européenne, les commissaires européens qui viendront à notre Université d'été seront nombreux. Dans cette demi-journée consacrée à « faire bouger les règles du jeu », un autre atelier est exceptionnel, il est consacré aux « règles de la concurrence ». Est-ce que nous sommes en train ou pas de faire bouger les règles du jeu sur la concurrence dans les grandes négociations commerciales internationales qui se tiennent actuellement ? Nous aurons, à la fois, autour de la table, Christine Lagarde qui a confirmé sa venue et François David, président de la Coface, Peter Mandelson et probablement Pascal Lamy. Donc, nous aurons là le coeur de la négociation sur l'OMC.
Dernière demi-journée : après la réflexion sur « comment faire bouger les règles du jeu », nous voulons terminer en beauté sur « jouer le jeu du monde entier ». La première fois que j'ai parlé de Notre université d'été, j'ai insisté sur le fait que nous devions être tous internationaux jusqu'aux bouts des ongles. Cela est vrai sur le plan économique, mais évidement sur toutes les autres questions qui sont l'objet des préoccupations de chacun et, évidemment, sur les questions environnementales ou climatiques. Donc, l'ensemble de cette demi-journée sera consacré à ces enjeux-là avec, par exemple, un atelier consacré aux réfugiés climatiques. Notre plénière de clôture va essayer de faire une synthèse de toutes ces questions. Le titre de cette dernière plénière est « ne tirez pas sur la planète ! ». Cette dernière plénière verra à la table, à la fois, le président de PSA Peugeot Citroën, Christian Streiff, le président d'EDF, Pierre Gadonneix, la présidente d'AREVA, Anne Lauvergeon d'autres grands patrons également mais aussi, et pour moi, c'est très important, la philosophe Elizabeth de Fontenay qui accepte, pour la première fois, de s'exprimer devant un public comme le nôtre. Nous recevrons également et le vice-Premier ministre de Tuvalu. Tuvalu est un micro-Etat du Pacifique qui vit une situation absolument apocalyptique car si la montée du niveau de la mer continue, comme nous l'observons depuis quelques années, ce micro-Etat va disparaître d'ici 20 à 30 ans. Donc, nous allons jusqu'au bout des questions en invitant le vice-Premier ministre de Tuvalu qui peut, peut-être mieux que beaucoup d'autres, parler de l'aspect absolument dramatique du changement climatique.
Cette Université d'été sera tout-à-fait exceptionnelle par la diversité et la qualité des intervenants qui sont attendus.
Questions d'actualité
Je voudrais insister sur une chose et vous dire à quel point je suis, avec le MEDEF, « TPE, PME oriented », comme on pourrait le dire avec un anglicisme, je le conçois peu élégant, mais qui dit bien ce que ça veut dire. Je n'ai pas d'autre préoccupation, quand je réfléchis aux questions économiques et sociales, que le développement de nos TPE et PME. Or, aujourd'hui, il y a beaucoup de sujets qui peuvent soit leur permettre, enfin de grandir, soit de les limiter dans leur croissance. C'est pour cela que, quand j'ai lu l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 6 juillet 2007 sur le CNE, sur un cas particulier de CNE, j'ai immédiatement demandé à rencontrer le président de la Cour d'Appel de Paris. Nous tenons à votre disposition le courrier que j'ai adressé au président de la Cour d'Appel. Il y a des motifs juridiques qui relèvent du cas d'espèce et qu'il ne m'appartient pas de débattre, de discuter d'aucune façon.
Mais il y a aussi dans la motivation de ce jugement des arguments qui sont des arguments économiques qui, sont contestables. Je souhaiterais apporter à la connaissance du président de la Cour d'Appel d'autres arguments économiques qui vont à l'encontre de ce qui est dit dans cet arrêt rendu dernièrement. En effet, si le débat est purement économique, nous avons parfaitement le droit de prendre la parole. Le CNE va bientôt avoir deux ans et il faut attendre l'évaluation qui est prévue. Je ne sais pas quand la DARES compte rendre publics les chiffres qui permettent vraiment de comprendre l'impact du CNE ; toutes les informations dont nous disposons à l'heure actuelle laissent entendre à l'évidence que l'impact du CNE sur l'emploi a été très favorable. Je trouve donc un peu curieux de prononcer des positions définitives, sans attendre l'évaluation sérieuse etaboutie de cette formule de contrat de travail qu'est le CNE.
Quand je dis que nous sommes « TPE et PME oriented », je pense beaucoup à ce qui va être à l'ordre du jour de l'Assemblée Nationale cet après-midi même. C'est-à-dire les dispositifs qui concernent les heures supplémentaires et les dispositifs qui concernent l'investissement qui peut être fait en déduction du montant de l'ISF en faveur d'une PME.
Sur les heures supplémentaires, le dispositif tel qu'il a été conçu à l'origine n'est pas favorable ou très peu pour les entreprises de moins de 20 salariés. Il est donc paradoxal de vouloir créer une incitation à développer les heures supplémentaires en rendant le coût de ces heures supplémentaires plus élevé aujourd'hui qu'il ne l'était jusqu'alors. C'est le cas pour toutes les entreprises de moins de salariés à partir de 1,27 fois le SMIC. Donc je demande au gouvernement de faire un effort et de considérer la question spécifique des entreprises de moins de 20 salariés.
Sur l'investissement de 50 000 euros qui peut être fait en déduction de son ISF dans une PME. Cette affaire est fondamentale. On a tous dit - le tous, c'est les économistes et les politiques de droite comme de gauche - que l'une des difficultés pour nos PME est d'avoir accès à des capitaux pour renforcer leurs fonds propres. Le dispositif dans son principe est quelque chose qui remplit parfaitement cette exigence. Il ne faudrait pas que dans sa version finale le libellé de la loi restreigne les possibilités de déploiement de ce dispositif. Nous avons écrit « Besoin d'air », nous continuons à dire « besoin d'air » et, si dans une mesure de ce type, on commence déjà à corseter les choses, on s'autolimite au lieu de se donner la possibilité de multiplier les investissements, de multiplier l'émergence de nouveaux « business angels ». Ce que nous demandons, c'est qu'il y est la plus grande possibilité de mise en oeuvre de ce dispositif. Il ne doit pas être limité au seul cadre des investissements directs. Si vous êtes un patron de PME, vous voulez avoir la possibilité, si vous cherchez un investisseur, soit de trouver un investisseur direct, soit d'aller trouver des investisseurs dans une formule trouvée par votre banquier, assureur, conseiller ou toute autre formule. Mais il faut laisser le marché se créer de lui-même sur ce sujet.
Je voudrai revenir sur « Jouer le jeu » parce que c'est le thème de notre Université d'été. Ce n'est pas un hasard puisque c'est ce que nous avons essayé de faire depuis deux ans. Nous avons notamment bien joué le jeu avec les organisations syndicales et je voudrais ici, très solennellement mais très sincèrement, remercier les organisations d'avoir elles aussi accepté de jouer le jeu. La preuve en est le texte sur la politique industrielle, c'est une vraie nouveauté. Cela n'a pas été facile, mais nous avons joué le jeu ensemble pour essayer de dire quelque chose de commun sur une stratégie industrielle pour notre pays et peut-être faudra-t-il dire quelque chose sur la politique industrielle européenne. Nous avons joué le jeu en préparant ensemble les conditions d'ouverture de la grande négociation sur la modernisation du marché du travail. La Délibération sociale a été le premier pas pour jouer le jeu et il a été indispensable pour que la négociation se passe dans de bonnes conditions. La première séance a été de bonne qualité et il y a la le signe que nous avons changé de méthode puisque nous avons décidé de nous rencontrer tous les vendredi matin. Nous ne sommes pas en train de truquer le jeu avec, déjà, des manoeuvres d'agendas puisque nous nous sommes fixés des réunions de travail régulières. Tout cela constitue de bons signes. Alors, j'attire l'attention sur cet état d'esprit vraiment positif. En outre, puisque nous sommes à la veille d'un débat constitutionnel, il est important, que ceux qui vont être amenés à porter ce débat -le président de la République, la Commission qu'il va peut être amené à créer, - la place donnée aux partenaires sociaux va être déterminante pour dire si nous sommes vraiment dans une évolution significative de notre mode de fonctionnement en France. Encore une fois, je demande que soit défini constitutionnellement un champ d'autonomie des partenaires sociaux afin que nous puissions contracter ensemble, librement, pleinement et avec toutes les responsabilités que cela implique. Par exemple, il serait bon que la durée du travail soit d'ordre contractuel et non légal.
Pour clôre cette conférence de presse, j'aimerais aborder quelque chose qui vous touche personnellement de manière très forte, très sensible et qui est lié au rachat ou en tout cas à la mise en vente par le groupe Pearson des Echos. J'ai plusieurs choses à vous dire sur cette question. Déjà, vous dire à quel point je respecte et, plus que ça, j'aime profondément le métier que vous exercez. Vous êtes des journalistes et, je pense que j'ai eu plusieurs fois l'occasion de le dire à certains d'entre vous, c'est un métier tout a fait exceptionnel, c'est un métier passionnant, exigeant, c'est un métier qui, à la fois, donne beaucoup de puissance mais exige certainement aussi beaucoup de modestie. C'est un métier individuel mais qui s'exprime de manière collective. Et c'est un métier, vous le savez, que j'ai très très très longtemps souhaité et rêvé d'exercer. Ce sont les circonstances de la vie, quant j'étais à Sciences Po qui ont fait que je suis allée vers le métier de sondeur. D'une certaine façon, faire du sondage d'opinion publique a quelques points communs avec votre métier. En tout cas, il y a en a un qui est évident : c'est que votre métier, comme le mien, est consubstantiel à la démocratie. Il n'y a pas de liberté de la presse qui ne soit pas liée ou vitale à la démocratie. Et il n'y a pas de démocratie sans liberté de la presse. La liberté de la presse est plus que largement respectée en France, en tout cas, elle l'est certainement beaucoup plus que dans d'autres pays. Evidement, on peut penser tous à la Palestine avec ce qui s'est passé récemment ou bien sûr à la Russie. Mais je ne suis pas naïve et je sais très bien, que y compris dans les démocraties les plus avancées ou qui ont d'ailleurs une forte histoire en matière de liberté de la presse, celle-ci peut toujours être fragile. J'ai été très frappée, comme beaucoup d'entre vous, par ce qui s'est passé en 2005 aux Etats-Unis quand la journaliste du New York Times, Judith Miller avait été emprisonnée. Cela m'avait semblé tout-à-fait grave. La liberté de la presse ne peut pas se concevoir sans la liberté d'entreprise, sans la liberté d'entreprendre. C'est l'entrepreneur qui crée le journal ou le groupe d'entrepreneurs. C'est lui qui permet le développement du journal ou des médias. Parce que si ce n'est pas l'entrepreneur, qui cela peut-il être ? Est-ce que c'est l'Etat ? Le politique ? Je crois que c'est pire que tout. Alors, à partir de ce moment là, je ne peux pas vouer aux gémonies a priori un entrepreneur. Je ne peux pas le faire a priori. Ce serait contraire, non seulement à ma fonction mais aussi à mon éthique personnelle. Toutefois, la question qui est posée est très complexe et je pense qu'un patron de presse n'est pas un patron comme un autre. Dans ce domaine, plus que dans d'autres domaines, il doit y avoir une sensibilité particulière aux produits et pour moi, dans ce raisonnement, le mot produit n'est pas péjoratif. Il doit y avoir une affinité particulière au produit à délivrer et forcément avec l'équipe chargée de le délivrer. Il y a certainement une dimension intellectuelle spécifique. Ce que je dis pour le patron de presse, je le pense beaucoup pour un patron d'un institut de sondage d'opinion. Est-ce que ces critères sont remplis dans ce cas d'espèce ? Je ne suis pas en mesure de répondre. Je pense que ce sont les équipes concernées qui peuvent répondre. Je ne pense pas qu'il faille s'empêcher de débattre du sujet. Surtout pas. Vous allez lancé le débat et vous avez eu raison. C'est pour cela d'ailleurs que dès que j'ai reçu, hier après-midi après le Conseil exécutif à 17 heures, la lettre de la Société des rédacteurs des Echos demandant un entretien, j'ai, dans les dix minutes qui ont suivi, appelé le président de la société des rédacteurs pour lui proposer un rendez vous et je le vois cet après-midi à 15 heures. Et par ailleurs, je vais faire en sorte d'avoir un rendez-vous avec la Société des rédacteurs de la Tribune.
source http://www.medef.fr, le 12 juillet 2007