Texte intégral
Bonjour R. Bachelot.
Bonjour R. Arzt.
Q- Quel est votre sentiment face à ce Tour de France où s'accumulent les soupçons, mais aussi les vraies mises en cause, pour dopage ?
R- Oh ! Des sentiments mêlés de tristesse, de fureur, de consternation. Je viens d'entendre C. Prudhomme, j'ai assisté à ses côtés à l'étape Grand Bornand-Tignes. Quand on voit les dizaines de milliers de spectateurs qui font du Tour de France la manifestation sportive la plus populaire de notre pays, et peut-être du monde, on peut imaginer le désappointement et le désarroi de ces gens pour qui le Tour de France, c'est d'abord une fête, et véritablement, je veux exprimer mon soutien aux organisateurs, au Tour de France, et c'est la raison d'ailleurs, pour laquelle j'assisterai à l'arrivée de la dernière étape du Tour, à Paris, dimanche, pour exprimer mon soutien à la manifestation et à la lutte contre le dopage qui est menée par ces organisateurs.
Q- En même temps, C. Prudhomme dit "qu'il n'y a pas de volonté de s'en sortir depuis des années".
R- Il y a une grande volonté de la part des organisateurs du Tour, Monsieur Clerc et Monsieur Prudhomme. D'ailleurs, quand on fait le bilan des contrôles antidopage, qui sont faits sur le Tour, qui font d'ailleurs, que c'est sans doute au Tour de France que les contrôles antidopage sont les plus nombreux et les plus efficaces. 400 screenings sanguins avant et pendant le Tour...
Q- Apparemment ça ne suffit pas...
R- Des contrôles urinaires... et la grande majorité de ces contrôles sanguins et urinaires se révèlent négatifs. Le Tour est une manifestation extrêmement contrôlée. Il y a du dopage hélas, généralement dans tous les sports, et c'est au moment où le Tour de France fait aussi ce grand nettoyage, pour faire du cyclisme un sport propre, que très logiquement, ces affaires sortent. Mais il ne faut pas oublier que des centaines de contrôles se sont révélés négatifs...
Q- Qu'est-ce qu'il faudrait faire de plus ou de mieux ?
R- Ce qu'il faut faire de plus, d'abord il faut évidemment renforcer encore ces contrôles antidopage, persuader évidemment - on est d'ailleurs surpris qu'ils n'en aient pas été convaincus - les coureurs qu'ils n'ont aucun intérêt à faire cela, sans doute mieux régler les responsabilités de chacun. C'est la raison pour laquelle, dès que le Tour va être terminé, je vais organiser une confrontation entre les différents acteurs, c'est-à-dire l'Agence mondiale contre le dopage, l'union cycliste internationale, les organisateurs du Tour de France, les offices qui s'occupent de la répression des trafics, pour faire en sorte que chacun soit mis devant ses responsabilités.
Q- Il y a quand même, on le sent bien, peut-être que les équipes qui sont choisies sont un peu légères sur les questions de dopage, c'est peut-être la faute de l'UCI, il y a bien un conflit là-dessus entre...
R- Il y a un conflit, et ce conflit il faut le régler. Il est tout à fait anormal que les organisateurs d'une telle épreuve n'aient pas la main complète sur les équipes qui sont autorisées à participer au Tour de France. C'est actuellement l'union cycliste internationale, et on ne peut que regretter le laxisme, enfin un certain laxisme de l'UCI. Il y a certainement des équipes qui n'auraient pas été autorisées à concourir au Tour de France.
Q- C'est l'affaire de contrôles médicaux, mais aussi d'enquêtes policières ?
R- Exactement. Il faut aller dans trois directions : le renforcement des contrôles ; deuxièmement, la lutte contre les trafics. Il y a actuellement deux organismes qui sont chargés de la lutte contre les trafics : un sous l'autorité de la gendarmerie du ministère de la Défense ; l'autre sous la responsabilité du ministère de l'intérieur. Il faut sans doute regrouper les forces, il faut durcir aussi la législation, ça c'est très important. Et puis faire de la prévention, parce qu'on est frappé d'une chose : c'est que le dopage est une attitude, ce sont des comportements qui se généralisent y compris dans le sport non professionnel, le sport non de haut niveau. On voit des matchs sans enjeu où des enfants se dopent pour participer à ces compétitions. Donc la prévention c'est quelque chose aussi de très important.
Q- Est-ce qu'on peut gagner un Tour de France sans être dopé ?
R- J'en suis persuadée, j'en suis persuadée. D'ailleurs, un certain nombre de participants ne se dopent pas, c'est la majorité et ils font d'excellents Tour de
France.
Q- S'il y avait pas de dopage, peut-être que la course irait moins vite ?
R- La course irait moins vite, mais quelle importance ? Que la moyenne de la course baisse de 4 ou 5 kilomètres par heure, si tout le monde joue avec les mêmes, j'allais dire de la même façon, le Tour reste une épreuve sportive magnifique.
Q- On peut craindre que le Tour de France ne se remette pas de cette succession d'épisodes ?
R- C'est effectivement un risque. C'est pour ça que je veux apporter mon soutien au Tour de France et que je veux manifester ma confiance aux organisateurs, tout en menant avec eux une lutte féroce contre le dopage.
Q- Vous êtes allée vous-même sur le Tour mais le Président Sarkozy aussi ; il a suivi une étape ; est-ce que ce n'était pas un peu imprudent, rétrospectivement ?
R- Non au contraire, au contraire. Au moment où le cyclisme est un sport qui fait des efforts considérables, c'est notre rôle d'aider les organisateurs, de manifester notre confiance aux sportifs qui ne sont pas dopés. C'est dans les difficultés qu'on reconnaît ses amis.
Q- Est-ce que vous parlez de tous ces sujets, est-ce que vous consultez B. Laporte, qui sera prochainement dans les fonctions de secrétaire d'État auprès de vous ? Vous en parlez déjà ?
R- Bien entendu, on parle déjà de tous les dossiers qui concernent le sport et que j'ai à gérer, que ce soit l'organisation des Championnats du Monde à Val d'Isère - j'ai mis les organisateurs devant leurs responsabilités - le maintien du Grand Prix à Magny- Cours en 2008 et sans doute en 2009. Bien sûr la Coupe du Monde de rugby. Je veux que, quand Bernard va arriver, il ait tous les dossiers en main.
Merci R. Bachelot.Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 25 juillet 2007