Déclaration de M. Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO, sur la préparation du 21ème congrès de juin 2007 et les élections présidentielles de 2007, Paris le 7 mars 2007.

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Circonstance : Comité confédéral national de FO à Paris les 7 et 8 mars 2007

Texte intégral


Mes chers camarades,
Je vous souhaite la bienvenue à ce Comité confédéral national qui se tient un peu plus tôt que d'ordinaire afin de tenir compte de la proximité de notre 21ème congrès confédéral en juin de cette année.
Nous avons en effet dû repousser les dates du congrès après les élections présidentielles et législatives. Il n'aurait pas été souhaitable que le congrès se déroule au beau milieu du processus électoral avec les risques d'interaction que cela pourrait entraîner. Notre congrès aura donc l'avantage de se tenir quand tous les résultats seront connus, ce qui délivrera de l'incertitude et des hypothèses !
Bien entendu, mes chers camarades, pas plus en 2007 qu'en 2002 ou lors de tout autre élection, la confédération ne donnera pas de consignes de vote. Et je vous engage tous, en tant que responsables et administrateurs de la confédération, à faire respecter la plus stricte indépendance, nonobstant les convictions personnelles que naturellement, personne ne conteste.
Ce CCN n'échappera pas pour autant à l'ambiance électorale. Il n'y a pas de raison pour cela, d'ailleurs, le syndicalisme n'étant ni apolitique, au sens partisan du terme, ni indifférent à ce qui concerne les travailleurs, je réagirai à certaines de propositions des candidats au long de ce rapport. Pour autant, conformément aux traditions d'indépendance de l'organisation, j'ai refusé de me prononcer sur les programmes électoraux, même si j'ai ponctuellement réagi sur certaines des propositions touchant directement le domaine social.
Mes chers camarades, je veux tout d'abord, comme à l'accoutumée, rendre hommage à nos camarades récemment décédés (liste des décédés). Président, je te demande de bien vouloir faire respecter une minute de silence.
Mes chers camarades, ainsi que nous l'avions décidé, nous avons organisé le 6 février un colloque sur l'économie avec la participation d'universitaires, mais aussi de syndicalistes du TUAC et du DGB. Malgré quelques péripéties de dernière minute et l'absence involontaire de M. GALBRAITH, ce fut un succès, comme les camarades qui ont pu y assister peuvent en témoigner. Nous rééditerons l'expérience et un livre sortira bientôt afin de servir à alimenter le débat économique.
Il y a débat effectivement, sur la nature du développement économique. Il y a débat et interrogations sur l'accroissement continu des inégalités dans des sociétés qu'on dit évoluées. Il y a débat et interrogation sur la nature du capitalisme contemporain, sur la mondialisation, sur la nature actuelle de la construction européenne etc. Vous avez pu lire que, au mois de novembre, Jacques DELORS a remis au Premier ministre le rapport du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale, le CERC. On y apprend que, je cite « l'emploi instable est l'une des principales causes de la croissance des inégalités de revenus ». Ça alors ! On ne s'en serait jamais doutés ! Et le rapport poursuit : « chaque année, 40 % des salariés voient leur salaire baisser » parce qu'ils partent en retraite ou se retrouvent au chômage.
La situation n'est guère plus flamboyante au niveau européen. Un rapport publié, celui-là, par la Commission européenne pour la protection sociale, établissait récemment qu'un européen sur six vit en dessous du seuil de pauvreté. Bien sûr la situation varie selon les pays et les nouveaux entrants tirent les moyennes vers le bas. Encore que l'on ait des surprises. Par exemple, 10 % des adultes européens en âge de travailler vivaient, en 2006, dans des ménages composés uniquement de personnes sans emploi. Pour la Pologne, c'est 13 %. Mais pour la Belgique aussi. Et la palme est détenue par... la Grande Bretagne, le pays qui a soi disant éradiqué le chômage. 16 % d'adultes en âge de travailler vivent dans des foyers où personne n'a de boulot !
Et si l'on considère la situation des travailleurs ayant un emploi, ce n'est pas plus enthousiasmant. 8 % des travailleurs européens sont en dessous du seuil de pauvreté, bien qu'ils aient un emploi. Le moins que l'on puisse dire est que ce n'est pas un bilan brillant ! Et pourtant, quand on voit les résultats de TOTAL ou ceux de la BNP, on se dit qu'il y a du grain à moudre. Je rappelais récemment dans une interview que la productivité du travail dans certains secteurs d'activité a augmenté de 100 % entre 1990 et 2004 mais que dans le même temps, le taux de salaire réel n'avait augmenté que de 25 %.
Mes chers camarades, l'économie n'est pas une science exacte, nous l'avons vérifié au cours du colloque du mois dernier mais il y a des constats qui sont imparables. Personne ne nie que, en France, mais aussi dans beaucoup de pays dits développés, ce soit la consommation qui tire les revenus, mais nous avons un gros problème de partage des richesses. Comme la consommation est progressivement asphyxiée par l'insuffisance de la feuille de paie, l'économie se grippe lentement. Si l'on prend l'exemple du pétrole, on se dit que les fameuses « lois du marché » ont du plomb dans l'aile. Le baril de brut a baissé de près de 80 dollars l'an passé à moins de 50 fin janvier. On peut se dire « tant mieux ! Ça va donner un peu d'air ». Le problème est que les 37 % de baisse du baril, vous ne les avez pas vu répercutés sur le prix à la pompe. Donc quelqu'un ou quelques-uns se sont mis la différence dans la poche ! J'ai le sentiment que M. BRETON devrait re-convoquer les grandes enseignes dans son bureau pour leur parler des lois du marché !
Les économistes expliquent pourtant que 10 dollars de moins, c'est un gros demi point de croissance supplémentaire. Or, cela ne se vérifie pas vraiment dans tous les pays dépendant de l'étranger pour leur approvisionnement en pétrole. De surcroît, la politique de la BCE vient, encore une fois, étrangler la reprise. Elle craint que la baisse du pétrole ne relance les importations, donc l'inflation et a remonté le taux de l'argent au nom de la stabilité de la monnaie, ce qui bien sûr, freine encore la capacité des ménages à maintenir leur consommation et celle des entreprises à investir. Cette attitude a conduit N. SARKOZY à qualifier « d'autiste » la BCE, ce qui cette fois, se justifie pleinement.
Avec ce système : mauvais partage des richesses et argent rare, on est arrivé à ce que la croissance ait été nulle au 3ème trimestre 2006. Au total, elle n'aura d'ailleurs pas dépassé 2 % sur toute l'année. Du coup, nos gouvernants sont obligés de prendre une loupe grossissante et de déclarer que c'était une croissance forte alors qu'avec le même chiffre, les Etats-Unis parleraient de période de récession.
Donc, mes chers camarades, nous sommes fondés à nous interroger et à considérer que la politique économique de nos gouvernants, de la Commission européenne, n'est pas la bonne. Le peu de croissance est porté à bout de bras par la consommation qui s'alimente par le recours au bas de laine, à l'épargne, et par le recours à l'endettement, de plus en plus répandu alors que les foyers français étaient plutôt peu endettés.
Car il faut aussi parler de la dette. Nous serions parait-il irresponsables car nous nous apprêterions à laisser une dette considérable à nos enfants. Donc, il faudrait moins de fonctionnaires, moins de services publics, moins d'Etat pour que nos enfants et petits enfants vivent heureux ! Et on nous dit : « mais si c'est possible, regardez le Canada qui a fait passer sa dette publique de 80 % de son PIB à quelque chose comme 35 % ». Le secteur économique a regardé les choses et est tombé sur un tableau du FMI confirmant les chiffres que l'on nous oppose. Mais il démontre aussi qu'en fait, la dévolution de nouvelles compétences aux provinces canadiennes a permis de déplacer de nombreuses charges pesant auparavant sur l'Etat fédéral. Et si on les réintègre dans les dépenses publiques, on retombe à peu près sur le même taux d'endettement qu'avant, c'est-à-dire 85 % ! « Les statistiques sont la forme la plus élaborée du mensonge », disait un connaisseur.
Et par ailleurs, il faudrait s'intéresser aussi au taux d'endettement des ménages, des citoyens eux-mêmes. A quoi sert d'avoir un budget national avec une dette faible si les citoyens sont endettés jusqu'au cou ? Or, ce taux d'endettement varie considérablement selon le pays et les ménages français sont plutôt moins endettés que les autres.
A bien considérer les choses, l'un des problèmes en Europe est bien celui d'un manque d'investissement dans l'outil industriel. Nos capitaines d'industrie considèrent que les coûts sont trop élevés et investissent en Chine. Les grosses locomotives de l'économie procèdent au rachat de leurs actions plutôt qu'à l'investissement dans les techniques de pointe ou dans d'autres secteurs. C'est une attitude suicidaire sur le long terme et qui compromet l'avenir des futures générations bien plus que le problème de la dette publique. En tout état de cause, la revendication salariale est moins que jamais déplacée, elle devient au contraire une question de survie des économies face à des multinationales capables de déplacer des sommes gigantesques d'un simple clic de clavier d'ordinateur.
Mes chers camarades, j'avais longuement évoqué la situation internationale, y compris au plan syndical, lors du CCN d'Amiens. Je me bornerai donc à fournir quelques éléments complémentaires.
Tout d'abord, il nous faut dire que la situation internationale reste marquée par l'IRAK où le pays s'enfonce dans une guerre civile et où l'on parle de plus en plus ouvertement d'une partition du pays en fonction des divisions entre zone sunnite et zone chiite sans que la paix soit garantie pour autant. Le peuple et les travailleurs américains ont, lors des élections de décembre, envoyé au congrès une majorité démocrate avec un mandat implicite de désengagement. Tony BLAIR est lui-même acculé au retrait de ses troupes au terme d'une opération qui aura été, pour son gouvernement, un échec cinglant.
Lors d'un récent voyage à Washington à l'invitation de John SWEENEY et de l'AFL CIO, j'ai pu me faire expliquer l'implication du syndicalisme américain dans la victoire des démocrates en décembre dernier. Bien sûr, cela nous surprend profondément compte tenu de notre tradition d'indépendance. Disons que nous sommes à peu près aussi incompréhensibles à leurs yeux qu'ils le sont aux nôtres. Ceci étant, on peut comprendre l'acharnement des syndicats de l'AFL CIO à faire chuter BUSH quand on se rappelle comment il a utilisé l'état de guerre pour casser certains mouvements sociaux au nom de l'anti-terrorisme, ou comment il s'est montré indifférent à la catastrophe qui a frappé la population -majoritairement noire- de La Nouvelle Orléans. Cette rencontre nous a permis de resserrer les liens avec nos camarades américains et d'évoquer aussi, entre autres, la question de la CSI.
La Confédération Syndicale Internationale a donc été créée début novembre à Vienne. Au cours des séances, nous avons déposé plusieurs amendements dont certains ayant abouti, tel celui sur l'objectif d'émancipation des travailleurs. J'ai également pu indiquer à la tribune que la CSI devait éviter absolument une structuration en tendances, ce qui créerait des facteurs de distorsion au sein de cette organisation.
J'ai également fait valoir -comme nous l'avions fait à la CES- que la nouvelle internationale n'est pas une holding, faisant descendre des consignes à ses filiales. Chaque organisation reste libre de ses positions à l'échelon national. La CSI est le produit de ses organisations adhérentes, avec des sensibilités et des positions différentes, des histoires différentes et doit donc en tenir compte.
Sa mission principale doit être la promotion et la défense des normes internationales du travail de l'OIT, la pression sur l'action d'organismes internationaux tels que le FMI et la Banque Mondiale, ou encore de l'OMC. De ce point de vue, la CSI a d'ailleurs réagi à la publication conjointe d'un rapport rédigé par l'OMC et l'OIT. Elle a apprécié l'importance donnée aux questions de délocalisations, à l'absence de filets de protection sociale dans beaucoup de pays. Par contre, elle a critiqué l'absence du rapport sur les questions de discrimination subie par les femmes, l'interdiction des syndicats dans les 5 000 zones franches d'exportation existant dans le monde. Elle a également critiqué le silence du rapport de l'OMC/OIT sur la politique répressive du gouvernement chinois en matière de droit du travail.
Je ne dis pas que nous n'irions pas plus loin nous-mêmes dans cette critique mais je considère que s'en prendre au gouvernement chinois alors que celui-ci est entré à l'OMC relève du rôle d'une internationale syndicale.
Par ailleurs, la réunion de Vienne nous a permis de discuter entre confédérations françaises et de nous mettre d'accord, comme cela a toujours été le cas, sur la répartition des postes à l'international comme cela s'est toujours fait. Si tout le monde était d'accord pour adopter le principe du tourniquet, disons que la CGT voulait pratiquement tout, tout de suite ! Cela a même conduit à un accrochage entre CGT et CFDT sur la répartition. Il faut dire que ce n'était pas simple, chaque proposition d'arrangement devant être soumise par THIBAULT à un aréopage d'accompagnateurs. Finalement, Force ouvrière gardera le BIT jusqu'en 2011, la CGT allant au Comité directeur de la CES et la CFDT au bureau exécutif de la CSI.
Mes chers camarades, la CSI est née. Guy RYDER en a été élu à la tête, Sharon BURROW, la présidente de l'ACTFU australienne, ex présidente de la CISL a été élue présidente de la CSI. Le discours du nouveau Secrétaire général était un discours de syndicaliste et il est resté ferme sur la question des tendances. Ceci étant, c'est le positionnement sur les questions futures qui permettra de juger : les rapports avec la Chine, l'Inde, la question palestinienne, les droits syndicaux face au capitalisme ultra libéral.
Je veux à ce propos signaler la solidarité internationale qui s'est manifestée à l'occasion de la grève générale illimitée lancée par nos camarades de l'USTG et des autres centrales syndicales contre la décision du président CONTÉ de nommer un Premier ministre faisant partie de ses obligés.
Comme vous le savez, les heurts ont été violents et les forces de police et l'armée ont tiré, faisant au moins 113 morts parmi les travailleurs et la population. La confédération avait réagi officiellement et en avait appelé au gouvernement français à l'occasion du sommet France Afrique à Cannes. Elle relayait ainsi l'appel lancé par le Bureau International du Travail et la Confédération Syndicale Internationale, exigeant que cesse la violence et que la sécurité des militants syndicaux soit assurée.
Nous avons reçu le 21 février une délégation de camarades de l'USTG dont la camarade Mariama PENDA DIALLO, l'adjointe du Secrétaire général Ibrahima FOFANA, pour lui apporter notre soutien et avons facilité ses contacts avec l'Elysée.
La situation semble s'apaiser, la chose étant facilitée par la décision de l'Assemblée nationale de la République de Guinée de rejeter la demande du président CONTÉ de proroger l'état de siège. Guy RYDER qui s'est rendu sur place, a, au nom de la CSI, appelé « le président à respecter la volonté du peuple guinéen et respecter l'appel des syndicats à mettre en oeuvre les accords signés il y a près d'un mois ».
Mes chers camarades, la solidarité syndicale internationale a joué son rôle et a pesé dans la balance. Je rappelle que nos camarades guinéens se sont impliqués dans le refus de la nomination d'un serviteur de CONTÉ parce qu'il symbolise le bradage des richesses nationales d'un pays potentiellement très riche. C'est contre ce pillage et pour le retour au peuple des richesses du pays que se sont élevés les travailleurs guinéens. Là bas comme ici, les problèmes sont de même nature.
J'en termine avec ces questions en indiquant que nous avons présenté la candidature de John MONKS au poste de secrétaire général de la CES. J'avais fait mention de son interview dans « Libération » au dernier CCN. Il y expliquait que le « non » français et néerlandais à la constitution européenne avait, en définitive, eu un effet bénéfique en permettant de s'opposer et de renégocier sur les directives européennes, en particulier la directive Bolkestein. Cela avait d'ailleurs mis CHEREQUE en colère, lui qui avait soutenu le traité ! J'ai été amené à dire que, sur ce sujet, MONKS avait raison.
Ceci ne nous empêche pas de prendre nos distances vis-à-vis de propositions de la CES. Ainsi, la confédération européenne avait lancé une pétition pour les services publics, pour leur défense et leur renforcement. Nous avons considéré que le fait de parler ouvertement de « service public » et pas de SIEG est un progrès. Pour autant, nous avons exprimé notre opposition à la proposition de la CES qui voulait faire, en commun avec les employeurs, une contre proposition afin de bloquer l'actuelle directive sur les services.
Nous avons donc repris la pétition de la CES mais à notre sauce, c'est-à-dire dans un cadre syndical. Nous l'avons expliqué à John MONKS et nous avons mis le texte en ligne sur le site Internet FO. Nous avons déjà plus de 3 500 signatures, ce qui nous classe plutôt bien compte tenu de l'objectif de 1 million de signatures que s'est fixé la CES. A noter d'ailleurs qu'en l'état actuel des choses, les signatures en France représentent 38 % du total, ce qui encore une fois permet de relativiser fortement la représentativité syndicale entre la France et les autres pays. Le congrès de la CES aura lieu fin mai. Nous y défendrons nos positions.
Mes chers camarades, je vais peut être vous donner le sentiment de refaire le même discours qu'au dernier CCN, mais je dois revenir sur les questions touchant au dialogue social et à la représentativité syndicale. Il y a du bon et du moins bon mais surtout, il y va de l'avenir de nos syndicats et de l'organisation.
S'agissant de la loi sur le dialogue social, nous avons pu faire en sorte de déminer tout ce qui était dangereux, ce qui nous a permis, le 6 novembre, de donner un avis positif sur le texte lors de la Commission nationale de la négociation collective. Nous avons fait retirer le comité du dialogue social qui était une sorte de parlement social chargé de définir les thèmes de négociation. Nous avons fait retirer l'agenda partagé et la soumission du Parlement aux accords signés par les interlocuteurs sociaux, ce qui aurait fait des syndicats des co-législateurs.
Il ne reste donc dans ce texte que l'obligation pour le gouvernement de consulter en amont les organisations syndicales et patronales sur tout projet de loi social, ce qui n'est pas une mauvaise chose. De plus, le gouvernement devra proposer une négociation aux organisations syndicales et patronales avant que de légiférer le cas échéant, sur les thèmes du ressort de la négociation, bien entendu.
Il était important pour nous que ces précisions soient apportées. Autant nous tenons à pouvoir négocier dans le champ d'action qui est le nôtre, autant nous ne voulons pas devenir des colégislateurs du social, qui seraient ainsi moralement obligés d'appliquer les textes rédigés dans ce cadre.
Ce premier point nous convient mais la façon dont les choses se sont déroulées au CES nous a beaucoup moins satisfaits. Le Premier ministre avait demandé l'avis du Conseil économique et social sur le rapport HADAS LEBEL relatif à la représentativité syndicale. Le président du CES, malgré les assurances qu'il avait données, a poussé les feux pour rendre un avis conforme aux attentes des politiques et de ceux que j'ai appelé les Dupont-Dupond dans un billet d'humeur.
L'avis du CES est un paradoxe : il parle de démocratie à chaque paragraphe mais il évite de la pratiquer dans ses propres débats en inventant le 49-3 social. Près de 200 propositions d'amendement au texte de l'avis ont été purement et simplement passées à la trappe !
Ça c'est pour la forme. Pour le fond, il y a deux points capitaux : la représentativité et les accords majoritaires. Le CES propose une mesure de l'audience syndicale qui interviendrait régulièrement pour déterminer la légitimité des organisations syndicales et donc leur capacité à contracter au nom des salariés.
J'attire votre attention sur le fait que l'ambiguïté du texte permet d'envisager une mesure à différents niveaux : nationale, de branche, d'entreprise. A partir d'un seuil donné, une organisation serait représentative et obtiendrait le droit de négocier, de désigner des délégués syndicaux. En dessous, elle serait ravalée au rang d'incapacité sociale, un peu comme les incapables majeurs sont interdits d'actes juridiques. Et on nous parle de démocratie !
Pour FO, je l'ai dit : si mesure de représentativité il doit y avoir, il n'y a qu'une façon de faire : remettre en place les élections à la sécurité sociale qui permettent le vote des salariés actifs, chômeurs, retraités. C'est un vote de classe en quelque sorte, un vote qui permettra par exemple aux retraités de sanctionner la façon dont auront négocié les représentants de telle ou telle organisation. Or, c'est bien ce dont certains ne veulent pas ! Il faut savoir que nous sommes les seuls à nous prononcer ainsi.
Nous avons du peser pour qu'il n'y ait pas d'avant-projet de loi sur la représentativité. Ceci étant, les contacts que nous avons eus avec le gouvernement et les fiches d'orientation que nous avons reçues, nous font redouter un système dans lequel seuls les actifs seront consultés. Soit la mesure se ferait par l'intermédiaire des élections aux prud'hommes soit par un agrégat statistique des élections des institutions représentatives du personnel. Et on ajouterait les résultats aux élections des CAP dans les 3 fonctions publiques pour assurer la représentation du secteur public.
Deuxième point litigieux dans l'avis du CES : les accords majoritaires. Ça parait une vérité de Lapalisse : un bon accord serait celui qui satisfait le plus grand nombre de signataires.
Voire ! Vous pouvez tous me citer dans vos secteurs respectifs des accords signés par des organisations majoritaires dans l'entreprise ou la branche et qui ont été de mauvais accords ou qui se sont révélés inapplicables. Et FO a très bien pu signer seule d'excellents accords, tellement bons que personne ne s'est risqué à les contester par une procédure d'opposition !
C'est vrai que les DRH cherchent en général à obtenir plusieurs signatures sur leur texte, pensant, c'est légitime, qu'ils ont plus de chance d'avoir ainsi la paix sociale.
Mais ce que nous devons garder à l'esprit, c'est que tout cela se déroule dans le cadre de la loi Fillon 2004 qui devra faire l'objet d'un bilan et d'un débat, loi qui ouvre la voie aux accords dérogatoires, c'est-à-dire à des accords remettant en cause une partie de l'ordre social, au mépris de la hiérarchie des normes. Et cela, nous ne l'acceptons pas.
L'accord dérogatoire, c'est celui qui dans une entreprise reviendrait sur le temps de travail en vigueur dans la branche par exemple. Mais pour ne pas risquer d'avoir une procédure d'opposition, les patrons veulent que toutes les organisations représentatives signent, ce qui conforterait durablement l'accord dérogatoire. L'un ne va pas sans l'autre, comme Dupont et Dupond, une fois de plus !
Cela soulève des questions redoutables que nous avons essayé de recenser avec les fédérations du privé et du public lors d'une réunion de travail le 9 janvier. Si, avec un seuil de 5 % nous n'avons pas trop de craintes à avoir, il y a tout de même certains secteurs où nous pourrions rencontrer des difficultés. Car vous avez vu que nos amis Dupont et Dupond ont des idées. Je parle bien sûr de Chérèque et de Thibault ! Il paraît d'ailleurs que ça énerve Thibault que je les appelle ainsi, signe que Chérèque a au moins le sens de l'humour ! Donc la CGT et la CFDT ont envoyé un projet d'amendement aux parlementaires dans la loi sur le dialogue social. Il n'a pas été adopté, Larcher s'y étant engagé. Mais l'amendement prévoyait des dispositifs de « représentation territoriale de branche », là où les élections d'entreprise ne peuvent avoir lieu, un peu sur le mode des syndicats de site préconisés par la CGT ou des RSU (représentation syndicale unique) des syndicats italiens.
Or, une représentation « au niveau territorial et des branches professionnelles », c'est un risque pour les conventions collectives nationales et pour le type de fonctionnement syndical que nous connaissons. Une négociation locale, par accord dérogatoire, dans le cadre d'un accord majoritaire, n'aura plus pour but d'améliorer l'existant mais de gérer des reculs sociaux. Et pour couronner le tout, le CES a même proposé une « approbation majoritaire par les salariés des accords qui les concernent », autrement dit, il veut généraliser le référendum, par dessus la tête des représentants syndicaux. Pour notre part, nous restons partisans du droit d'opposition.
Mes chers camarades, il n'y a pas de hasard. Quand Mme PARISOT déclare dans une conférence de presse qu'elle ne comprend pas que ce sont des délégués non élus qui négocient et que ceux qui sont élus n'ont pas le droit de négocier, elle trahit le fond de sa pensée : elle ne veut plus de syndicat dans l'entreprise ! A la rigueur au niveau national pour négocier les accords cadres mais pour le reste, un syndicat maison suffira.
L'avis a finalement été adopté mais avec l'opposition de FO, la CFTC, la CGC, le Medef, la CGPME, l'UNAPL et 8 abstentions. Ce qui veut dire que la majorité des négociateurs sociaux ont rejeté ce texte.
Mes chers camarades, on parle beaucoup de démocratie dans cette affaire, comme si les syndicats n'étaient pas une des expressions de la démocratie. ! Comme si nos représentants ne se soumettaient pas régulièrement à des scrutins dans le champ des entreprises et des services publics ! Quand j'entends tel candidat proposer que tout le monde ait le droit de proposer des candidats dès le 1er tour, je me demande quelle conséquence il en tire ? Par exemple, les accords majoritaires ne seront-ils valables que le temps d'une mandature ou devront-ils être renégociés à chaque mandature ? Seront-ils applicables aux seuls syndiqués des organisations signataires comme aux Etats-Unis par exemple ? Ce serait évidemment aller contre les principes républicains, comme le principe de l'extension sur lequel repose tout le droit des accords de branches depuis un demi siècle.
Les promoteurs de ces projets sont loin d'être tous d'accords entre eux même quand ils font une interview croisée dans « Le Monde », et ils pourraient bien un jour regretter d'avoir ouvert la boîte de Pandore. Mais quoi qu'il en soit, nous avons l'obligation, dans les entreprises, les usines, les services, de nous renforcer et nous préparer aux prochaines élections : pas une voix ne doit manquer ! Et surtout, quoi qu'il arrive, il est évident que les élections prud'homales de 2008 pèseront lourd. En ce sens, nous avons enregistré avec satisfaction nos résultats aux élections dans les HLM où nous avons obtenu 108 sièges. Nous aurions pu avoir plus si nous avions présenté des listes dans un plus grand nombre d'endroits. Même constat aux élections dans les Chambres d'agriculture ou nous avons renforcé notre présence. Ce sont des éléments qui joueront un rôle dans le dossier de la représentativité.
Pendant ce temps là, mes chers camarades, la situation de l'emploi, celle des salariés, ne s'améliore pas. Le taux de chômage est à 8,6 %, ce qui représente 2,09 millions de demandeurs d'emploi de catégorie 1. Les cris de victoire du gouvernement n'y changeront rien : l'hémorragie d'emplois industriels se poursuit. Près de 95 000 emplois industriels ont été supprimés en France et délocalisés entre 1995 et 2001 selon l'Insee. Les travaux de l'IRES et ceux de la commission permanente de concertation pour l'industrie ont confirmé la stagnation de l'industrie française en 2005 et sa perte de parts de marché.
Dans le même temps, le Centre d'analyse stratégique et la DARES publient une étude qui confirme le ralentissement de la croissance de la population active. Autrement dit, elle continue à augmenter, mais plus lentement qu'avant. Cela confirme ce que nous disons sur le facteur démographique, comme une des causes de la baisse du chômage. C'est évidemment inquiétant même si la bonne santé démographique du pays permet de penser qu'un renversement interviendra dans une génération.
Mais en attendant, la situation se détériore. L'ANPE a produit une étude démontrant que la part des chômeurs indemnisés a diminué depuis 3 ans, de 59,3 % en juin 2003 à 53,3 % en juin 2006. Quant aux Assedic, la proportion des chômeurs indemnisés est passée de 50,9 % à 44 %. C'est le résultat direct des dernières conventions d'assurance chômage qui ont durci les conditions d'indemnisation et que FO a refusé de signer.
A ce propos, mes chers camarades, je rappelle que le secteur économique de la confédération avait demandé aux UD de recenser la situation de l'emploi dans leur domaine. Avoir des chiffres précis pourrait nous permettre d'argumenter et de lancer des initiatives. Je sais que vous êtes débordés de demandes et que vous préparez le congrès, mais faites un effort. Nous n'avons reçu qu'une dizaine de réponses.
C'est dans ce cadre que s'est tenue le 14 décembre la conférence sur l'emploi et les revenus. Nous ne sommes pas partisans de ces grands-messes, mais fidèles à notre ligne de conduite, nous sommes allés y porter les revendications de Force ouvrière. Elles sont constantes et ce seront celles, sous réserve du mandat que nous donnera le congrès, que nous porterons au prochain gouvernement.
? La première : encore et toujours les salaires ! Nous avons demandé une relance des négociations de branche sur les minima conventionnels (qui serait d'autant plus urgente si le Smic venait à augmenter sensiblement) et en même temps, une relance des négociations sur l'ensemble des branches et des grilles du privé et du public, afin de desserrer les grilles conventionnelles de salaires. Même si nous militons pour que le Smic reste un instrument politique et économique à la disposition du gouvernement, nous ne pouvons pas ignorer que près de la moitié de la population salariée est en dessous de 1,6 fois le Smic. C'est inacceptable.
? Deuxième revendication : c'est le relèvement du Smic au 1er mars, avant le 1er juillet de chaque année, afin de se donner du temps pour négocier ensuite dans les branches. Nous l'avons réaffirmé à la dernière CNNC mais il faut bien remarquer que les autres organisations syndicales ne sont pas basculées pour reprendre cette revendication. Le Ministre du travail s'est contenté d'indiquer que c'était à l'étude.
? Troisième point : pour en finir avec la controverse sur le « ressenti » ou non des hausses de prix, nous demandons la mise en place d'indices du coût de la vie qui permettent de retracer le coût des biens de consommation et l'évolution du pouvoir d'achat. Au passage, j'indique que la prime de transport ne correspond pas à notre demande puisque la décision est laissée à l'appréciation du patron. C'est un chèque sans provision en quelque sorte !
? Quatrièmement sur l'emploi : nous avons demandé le 14 décembre, comme nous l'avions fait auparavant à l'Unedic, la mise en place d'une sur cotisation spéciale sur le travail précaire et une modulation des aides aux entreprises qui favorisent le CDI. Vous avez remarqué que cette idée a fait son chemin.
? Cinquième point : la question des stages. Les stages obligatoires doivent être des contrats de travail à durée déterminée, s'ils se produisent dans le cadre d'une formation diplômante. Sinon, les stages hors cursus n'ont plus lieu d'être car c'est tout simplement du travail gratuit.
Au final, il n'est pas ressorti grand-chose de cette opération médiatique. Tout juste peut-on se féliciter qu'il ait été annoncé, par la suite, que la commission de suivi des branches sera pérennisée. Elle supervise la situation des minima de branches du point de vue de la référence au Smic et constitue donc une incitation à la relance des négociations salariales. Mais par ailleurs, les salaires des fonctionnaires n'ont pas fait l'objet d'un quelconque engagement. Les stages n'ont suscité qu'un appel à négocier le niveau de gratification et il n'y eut pas de réponse à notre demande de sur cotisation patronale sur les contrats précaires.
Franchement, mes chers camarades, on se demande si ça valait vraiment la peine de réunir tant de monde devant le Premier ministre, les interlocuteurs sociaux, la presse, etc. pour un si maigre bilan. Ce fut une opération de com' ratée du Premier ministre.
Mes chers camarades, les pouvoirs publics ont pu vérifier qu'il ne suffit pas de faire une conférence sur l'emploi pour que celui-ci s'améliore.
C'est ainsi que Monsieur de VILLEPIN a annoncé 10 000 suppressions de postes envisagées dans le plan de restructuration d'Airbus, essentiellement pour demander qu'il n'y ait aucun licenciement sec. On peut gloser sur le souci social du Premier ministre mais remarquer aussi que des voix du côté de l'entourage d'un candidat se sont fait entendre pour dire en substance : « l'Etat n'a pas à s'occuper des affaires d'une entreprise privée ». Le hic, c'est que l'Etat est encore actionnaire du groupe et qu'il n'a échappé à personne que les autorités allemandes se sont impliquées fortement -et on peut le comprendre- dans le dossier.
Il faut dire que l'on est dans une situation institutionnelle particulière à la suite de l'instauration du quinquennat. Le fait d'avoir mis les élections présidentielles et législatives en même temps entraîne que nous allons être quatre mois sans gouvernement. Dans un dossier comme AIRBUS, il est évident que ça pèse.
En attendant, le fait que le plan « POWER 8 » ait été retardé n'était pas de bon augure dans la mesure où cela fait plus de 6 mois qu'il est annoncé. Et je constate qu'une fois encore, les salariés français comme allemands sont utilisés comme variable d'ajustement puisque le but du plan est d'économiser 5 milliards d'ici à 2010 puis 2 milliards par an. Il y a bien sûr les retards sur l'A380, mais il y a aussi la faiblesse du dollar face à l'euro ce qui plaide là aussi contre la politique désastreuse de la BCE. Rendez vous compte que 10 centimes d'écart entre le dollar et l'euro coûtent 1 milliards d'euros à Airbus. En fait, Airbus a besoin d'argent pour la recherche et l'innovation. Donc, l'Etat doit monter en puissance.
Notre fédération a rencontré les camarades allemands de la métallurgie pour manifester leur inquiétude commune et c'est une bonne chose. Il faut être conscient qu'au-delà de répartition des licenciements, c'est l'avenir du secteur aéronautique qui se joue. Or, ce secteur, avec celui de l'automobile, a toujours eu en France, comme en Allemagne d'ailleurs, une place prépondérante, un rôle de locomotive en quelque sorte, structurant une grande partie de l'industrie du pays à travers son réseau de sous traitants.
Avec la fédération, nous avons multiplié les contacts, tant au niveau de l'entreprise que des pouvoirs publics. J'ai déclaré que les pouvoirs publics étaient incompétents et désinvoltes. Ca commence à bouger un peu. Les manifestations d'hier ont été un succès important à Toulouse, Méaulte et Saint Nazaire. Il faut donc maintenir la pression. Le gouvernement commence à bouger. Une manifestation européenne sur Airbus est prévue pour le 16 mars.
Autre dossier, celui d'ALCATEL LUCENT. La fusion entre les deux sociétés a produit ses fruits : les économies d'échelle qui conduisent à des licenciements répartis entre les différents pays pour permettre de valoriser le titre. Les suppressions toucheraient 20 % des effectifs en Allemagne contre 15 % en France soit un total 1 800 emplois au plan national.
Mes chers camarades, les salariés européens faut les frais d'une guerre industrielle et d'une guerre financière, guerre industrielle pour occuper le leadership dans les créneaux de pointe et guerre financière pour obtenir des taux de rendements financiers toujours plus élevés. Pour avoir des taux de rendement de l'action de 12 %, 15 %, voire plus, les managers de choc multiplient les charrettes.
On nous dira : il y a des difficultés industrielles. Mais cela s'est produit à d'autres époques et les pouvoirs publics avaient fait des pieds et des mains pour garder un outil industriel et technologique même quand les carnets de commande étaient vides. Aujourd'hui les carnets de commande d'AIRBUS sont pleins mais on se concentre sur les détails du futur plan social ! Nous avons les libéraux les plus libéraux de la planète !
Nous avons un problème de pilotage industriel. Qu'on l'approuve ou pas, l'Etat a toujours eu en France un rôle moteur dans le domaine industriel et aéronautique : il a restructuré le secteur et maintenu l'activité après la guerre. Il ne peut pas se désintéresser brutalement du dossier au nom d'une idéologie libérale qui aurait des effets destructeurs. La confédération soutiendra les efforts de ses syndicats et de la fédération dans ce dossier. Et l'Etat serait bien avisé de se redonner une politique industrielle et les moyens de celle-ci.
Mais, mes chers camarades, on a parfois le sentiment que l'Etat ne cherche plus à garder la main et qu'il ne s'intéresse au social que pour ouvrir la porte au marché. Ainsi dans le dossier de l'ANPE et de l'Unedic. Le Chef de l'Etat a souhaité pour 2007 une fusion de l'ANPE et de l'Unedic. Il s'agit dans son esprit de faire le pendant des « Job centers » britanniques, ou de préparer les esprits à la « flexisécurité » à la danoise.
Et bien, disons le : c'est une mauvaise idée ! Nous avons, à chaque étape des discussions, indiqué que nous n'étions pas opposés à une meilleure coordination mais qu'il était illusoire de croire que la fusion réglerait les problèmes du chômage. On veut, en fait, accroître la pression sur les chômeurs dont j'ai dit auparavant qu'elle avait déjà abouti à faire baisser le nombre de travailleurs indemnisés.
Et puis, la fusion, cela revient à étatiser l'Unedic et paradoxalement à permettre de sous-traiter une partie de plus en plus importante de ses fonctions au bénéfice des marchands de soupe. Accessoirement, cela reviendrait à faire disparaître le régime paritaire d'assurance chômage.
Enfin, la mise en place d'un GIE au dernier conseil d'administration de l'Unedic est un non-sens. Il s'agit de regrouper les activités informatiques de l'ANPE et de l'Unedic, or l'ANPE tourne maintenant avec le système informatique de l'Unedic. Quel besoin y a-t-il, dès lors, de créer un GIE pour cela ? De fait, les partenaires sociaux vont être dessaisis d'une partie de leurs prérogatives.
La réalité, c'est que l'Etat va prêter la main à l'externalisation des fonctions et des missions tant de l'Unedic que de l'ANPE, avec des portefeuilles de demandeurs d'emplois gérés par des entreprises privées. La réalité, c'est aussi qu'il va renflouer l'ANPE avec les fonds de l'UNEDIC. Les représentants FO ont voté contre la mise en place d'une telle structure qui remet en cause l'indépendance des deux institutions.
Le dossier de l'ANPE et de l'Unedic est indissociable du projet dit de « sécurité sociale professionnelle ». Ce projet est largement porté par la CGT qui en revendique la paternité, et a été repris par deux candidats à la présidentielle sans que l'on soit sûrs de ce qu'ils mettent à l'intérieur. Le risque fondamental dans ce dossier, c'est l'individualisation des droits au détriment des garanties collectives apportées par les régimes sociaux. On en arriverait à la mise en place d'un revenu minimum d'existence pour tous. Le salarié ne serait plus membre d'un groupe social ayant mis sur pied l'Unedic, mais aussi les retraites, la sécurité sociale, etc. Il ne serait plus qu'un individu détenant à titre personnel un certain nombre de droits.
On peut comprendre que cette conception corresponde à la vision des choses du Medef en matière « d'employabilité », de « séparabilité », vision dans laquelle les salariés accepteraient sans traumatisme de perdre leur emploi, à l'amiable en quelque sorte. C'est conforme avec les attaques du Medef contre le Code du travail, contre les charges sociales, c'est-à-dire le salaire différé et les garanties qu'il implique. On (mais comme disait mon grand père « on c'est un con ») a un peu plus de mal à imaginer cela de la CGT. Pourtant, c'est cohérent car elle a une vision étatiste des choses depuis l'origine. Rappelez-vous son hostilité aux assurances sociales. Elle ne s'est jamais vraiment reconnue dans les régimes paritaires considérant qu'ils s'étaient bâtis contre elle. Le problème est qu'une individualisation des droits à travers la sécurité sociale professionnelle conduirait à une individualisation dans d'autres domaines dont la protection sociale.
C'est en fait une adaptation aux conceptions économiques de la commission européenne qui insiste sur la libre circulation des travailleurs et s'attaque à tout ce qui s'y oppose. La question des régimes nationaux de protection sociale et de la transférabilité des droits est un des sujets sur lequel elle travaille régulièrement.
Nous préférons pour notre part parler de droits individuels garantis collectivement. Que quelqu'un qui a travaillé 4 ans ait des droits à l'assurance chômage différents de celui qui n'a travaillé que 8 mois se comprend. Ce qui pose problème, c'est le montant et la durée des droits. Mais ces droits sont garantis par l'existence du régime. Par ailleurs, quelle que soit son indemnisation, il a droit à une aide à la recherche d'emploi par l'ANPE, à la formation professionnelle... et en tant que chômeur, il a droit à la sécurité sociale et à la retraite.
Faisons donc fonctionner ce qui existe sans pour autant le remettre en cause. Ce qui est nécessaire, c'est d'assurer des revenus corrects à un chômeur après un licenciement, une formation adéquate et une aide à la recherche d'emploi que l'ANPE réalise aussi bien et à moindre coût.
J'en terminerai par une anecdote. Lors d'une réunion au Conseil d'analyse stratégique, notre représentant est intervenu sur l'accompagnement des chômeurs. Il a démontré, chiffres en main, que l'Unedic va verser 20 millions d'euros à la société privée INGEUS pour accompagner 6 000 chômeurs et que INGEUS va faire 12 millions d'euros de profits. Dans la salle, il y avait le directeur général de l'ANPE (qui pousse à la fusion avec l'Unedic) et le Ministre du travail. Ni l'un ni l'autre n'a contredit ! Parce que tout simplement, ils n'ont aucun élément pour nous contredire !
Au passage, mes chers camarades, nous avons accepté de nous rendre au Medef discuter du marché du travail à la fin du mois d'octobre de l'an passé. Mme PARISOT voulait lancer une délibération sociale sur ce thème. Nous avions indiqué que délibération n'est pas négociation, mais que nous pourrions confronter nos idées.
3 groupes de travail ont donc été constitués pour le relevé de conclusion, à savoir sur les sujets suivants :
- système d'assurance chômage,
- contrat de travail (la séparabilité),
- sécurisation des parcours professionnels.
Les contacts ont lieu actuellement. Une présentation des résultats des travaux devait intervenir vers la fin mars, mais est reportée en juin. Mais ce que je peux vous dire, c'est que cela avance à la vitesse d'un escargot. Il va de soi que les positions que je vous ai indiquées sur ces sujets y sont défendues par nos représentants sans que l'on puisse dire pour l'instant sur quoi tout cela débouchera. Vous avez sans doute remarqué que la CGT assiste aux réunions mais n'intervient pas.
Un mot sur le Code du travail pour indiquer que nous suivons toujours attentivement le processus de réécriture. Cela nous a amenés à protester contre l'annonce du gouvernement de le publier début mars, mais sous une forme incomplète. On promulguerait d'abord la partie législative puis, lorsqu'elle serait terminée, la partie réglementaire. Le Code du travail sous forme de feuilleton en quelque sorte. Une telle procédure aurait comme conséquence que certains articles du Code, déclassés de la loi du règlement disparaîtraient temporairement du Code, en attendant la publication de la seconde partie.
Nous avons fait partir, en commun avec les 4 autres confédérations syndicales, une lettre à Gérard LARCHER demandant de différer l'entrée en vigueur de la partie législative jusqu'à ce que la partie réglementaire soit prête. Le Code du travail est menacé par la tendance à l'individualisation et il était souhaitable que les confédérations manifestent leur attachement à ce qui est l'outil de travail des délégués dans les entreprises et devant les conseils des prud'hommes. Nous venons de recevoir confirmation que les pouvoirs publics attendront finalement que le travail soit terminé, c'est-à-dire théoriquement vers la fin de l'année.
Et puis, mes chers camarades, nous allons voir revenir le dossier des retraites au premier plan. Le Conseil d'orientation des retraites a rendu un avis que nous n'avons pas cautionné, fidèles à notre refus de tout diagnostic partagé.
Si on peut considérer que le rapport a raison d'estimer que l'on devrait inclure dans l'assiette des cotisations certains revenus comme l'intéressement, etc. il est plus que condamnable lorsqu'il annonce un allongement de la durée de cotisation comme une piste possible au dossier des retraites.
Car nous n'avons pas la mémoire courte. En 2003 M. FILLON avait expliqué que la baisse du chômage permettrait de récupérer deux ou trois points de financement que l'on pourrait ré attribuer à la Caisse nationale d'assurance vieillesse. On sait ce qu'il en est puisque les droits des chômeurs ont été révisés à la baisse, voire aggravés pour les saisonniers.
Et dans le même temps, les exonérations de cotisations se poursuivent sans qu'aucun bilan sérieux de leur efficacité n'ait jamais été fait.
Il faut le réaffirmer, la loi Fillon sur les retraites est une escroquerie. Dans la logique actuelle, nous sommes en train de préparer des retraités et pensionnés pauvres.
Il est donc clair que nous ne pouvions pas valider cette orientation du COR et que nous ne pouvions pas admettre un allongement supplémentaire dans les discussions qui viendront. De même, nous défendrons les régimes spéciaux dont la remise en cause ne résoudrait pas le problème de financement des retraites.
Nous rappellerons également que si le Fonds de réserve retraites n'atteint pas les 150 milliards d'euros puisqu'en fait, on en est tout juste à 30, cela correspond aux choix faits par les pouvoirs publics qui préfèrent le désendettement budgétaire au provisionnement des retraites.
J'ai pris acte qu'une candidate voulait revigorer le Fonds. J'en prends acte tout en notant que depuis qu'il avait été créé par un ancien Premier ministre, tous les gouvernements ont préféré les allègements de charge et le désendettement budgétaire à l'avenir de nos seniors et de leurs retraites.
Et nous rappellerons enfin que, malgré les promesses de favoriser l'emploi des seniors, les entreprises continuent de licencier les salariés âgés de 50 ans et plus. Quant au CDD senior, il est pratiquement « terra incognita » pour les DRH des entreprises !
Et bien non, mes chers camarades, ce ne sera pas, une fois de plus, tous les efforts pour les salariés et rien pour les entreprises ! Bien entendu, nous allons en débattre et commencer à préparer nos analyses et revendications pour l'ouverture du dossier en 2008, analyses et revendications qui seront bien sûr discutées lors du congrès de Lille.
Puisque nous en sommes au chapitre des retraites, je confirme que nous sommes situation de blocage avec les employeurs sur les régimes de retraite complémentaire. Ils ont annulé au dernier moment une réunion qui devait se tenir le 16 février. Il s'agissait d'explorer les pistes pour le reclassement de l'AGIRC qui passent nécessairement par un apport financier. Mais au sein du groupe patronal lui-même, il y a des tensions qui ont fait que les employeurs n'ont pu se présenter avec une position arrêtée, d'où l'annulation.
De ce fait, le problème est renvoyé en 2008, c'est-à-dire en même temps que l'échéance de la loi Fillon sur les retraites, ce qui n'est peut être pas la meilleure configuration pour l'AGIRC. Nous avons dû constater une baisse de rendement du mode de calcul actuel sur lequel il faudra bien se pencher pour maintenir les droits des salariés.
Par ailleurs, nous avons été saisis d'une demande de Gérard LARCHER au sujet d'une réforme pour le développement des complémentaires santé. Cela fait suite à la conférence emploi revenu dont j'ai déjà parlé et au cours de laquelle VILLEPIN avait abordé la question. En application de la loi sur le dialogue social, le Ministre demande donc aux interlocuteurs sociaux s'ils veulent se saisir du sujet. Mais bien sûr, il essaie en même temps de fixer le cadre et les pistes de travail.
Nous avons discuté de la question en bureau confédéral et décidé d'une approche qui laisse une large place aux négociations de branche. En effet, le gouvernement vise spécifiquement les salariés des TPE PME qui ont rarement des complémentaires santé avec participation de l'employeur. Mais, il n'est pas question de se diriger vers un accord interprofessionnel qui ne concernerait que les TPE PME. Diviser le champ d'action de la négociation en fonction de ce critère serait un précédent dangereux. Nous favoriserons donc un accord interprofessionnel rendant obligatoire les négociations de branches.
D'autre part, le ministère nous demande si nous envisageons un accord à caractère facultatif ou obligatoire. Même si nous sommes par principe favorables à des accords normatifs, on ne voit pas bien comment ce serait possible compte tenu de la complexité des situations, branche après branche. Dans ces conditions, c'est au niveau des branches que cela doit se régler. Le bureau confédéral a donc opté pour la négociation d'un accord national interprofessionnel « cadre », c'est-à-dire un accord incitatif, préparant les négociations de branche en se contentant de réaffirmer quelques grands principes en forme de garde-fous : solidarité, situation des retraités, etc. et de donner un délai aux branches pour les négociations.
Nous devons garder en mémoire le contenu du rapport CHADELAT remis en avril 2003 au Ministre des affaires sociales de l'époque, M. MATTEI. Il s'agissait pour lui de redéfinir le champ de compétence entre l'assurance maladie de base et les assurances complémentaires avec la tentation de limiter le domaine et le poids de la sécurité sociale au profit des assurances complémentaires, dont les assurances privées.
Nous avons donc réaffirmé, en préalable à l'ouverture de toute négociation, que celle-ci ne devra en aucun cas conduire à figer la part des régimes obligatoires ni à favoriser la création d'un troisième niveau de couverture. En clair, il ne faudrait pas en arriver à clôturer aussi le champ des mutuelles complémentaires de manière autoritaire, grâce à l'accord national interprofessionnel. Ça voudrait dire que le reste du champ serait ouvert à toutes les sociétés d'assurances pour offrir le 3ème étage, forcément plus lucratif que les deux premiers.
Nous avons également indiqué que le futur nouvel accord devra garantir l'existant, c'est-à-dire ne pas déstabiliser les accords d'entreprises qui existent déjà, ce qui ne peut se faire, encore une fois, que dans le cadre d'une négociation de branche.
Puisque nous en sommes aux négociations, une séance sur la branche accidents du travail / maladies professionnelles a eu lieu le 13 février. En dépit de ce qu'a pu déclarer ici ou là la représentante CGC, parfois en contradiction avec sa propre confédération, les choses avancent même si tout n'est pas parfait.
Tout d'abord, malgré les déclarations d'intention du Medef qui aimerait bien les confier aux assurances privées, là aussi, les accidents de trajet doivent rester pris en charge dans le cadre de la branche et de la sécurité sociale.
C'est ce que nous avons réaffirmé comme base incontournable d'un accord. Nous avons insisté pour que les salariés des TPE et PME bénéficient des dispositions de cet accord et aient accès aux services de la médecine du travail. C'est aussi l'objectif s'agissant des salariés travaillant dans certains secteurs comme celui des aides à la personne. Nous avons également fait une proposition novatrice en faveur des victimes d'AT/MP qui sont pénalisées par les délais entre la décision du médecin conseil de la sécurité sociale et celle du médecin du travail en cas d'inaptitude. L'idée serait de faire en sorte de prendre en charge cette période qui est de 45 jours au moins et qui, bien sûr, peut gravement déstabiliser les finances des salariés concernés.
Juste un mot sur le dossier de la pénibilité. Vous vous souvenez que ces négociations découlaient de la loi sur les retraites. Il s'agit de déterminer quelles sont les professions dans les branches, qui présentent un caractère de pénibilité tel qu'il justifie des carrières écourtées par rapport aux durées de cotisations imposées par la loi.
Malheureusement, le patronat a fait blocage en avançant des propositions inacceptables jusqu'à ce que le dossier soit bloqué. Nous nous étions faits à l'idée que la question ne serait pas traitée et qu'il faudrait remettre cela au moment du rendez-vous quinquennal de 2008. Mais le patronat a repris contact en proposant de rouvrir la négociation. Nous allons donc nous revoir vraisemblablement le 3 avril. Dans le même temps, le Ministère nous avait proposé l'avis technique de l'IGAS sur cette question. Nous avons dit OK sous réserve que ce soit sous forme de consultations bilatérales. Nous ne voulons pas d'un comité d'experts qui piloteraient la négociation.
Maintenant, mes chers camarades, je voudrais revenir sur les questions touchant au secteur public. J'ai fait part de mon inquiétude, il y a un instant, au sujet de la mollesse des réactions du gouvernement sur les questions d'AIRBUS et d'ALCATEL LUCENT. Nos hommes publics sont devenus tellement libéraux, qu'ils n'osent même plus avoir de politique industrielle. Alors on peut tout craindre lorsqu'il s'agit du service public et des entreprises publiques !
Je l'ai dit devant les médias, il y a un malaise dans la fonction publique. Il y a un malaise du point de vue des salaires : il y a quand même peu de catégories professionnelles qui en soient réduites, année après année, à constater la baisse de leur pouvoir d'achat. Et ce n'est pas avec les 0,8 % annoncés pour 2007 par le Ministre de tutelle que les choses vont changer. Vous vous souvenez qu'en 2003, M. DELEVOYE avait expliqué que les augmentations de salaires devaient être gagées par les suppressions de poste. Nos camarades de la FGF s'étaient amusés à calculer le rapport de 5 000 suppressions de postes : on avait à peine de quoi se payer un paquet de cigarettes !
Or, cette ligne de conduite aberrante est toujours la même. Nous avons entendu N. SARKOZY déclarer qu'il y avait trop de douaniers puisque depuis 1980 on avait supprimé les frontières dans l'Union européenne ! Je crois qu'il faudrait lui faire remarquer que les frontières, il en reste et que les missions de la douane ne s'arrêtent pas à lever les barrières au passage des voitures. Ce genre de déclaration agite inutilement le chiffon rouge sans que pour autant on y voie plus clair dans les projets de campagne.
Quelle fonction publique ? Pour quelles missions de l'Etat républicain? Avec quels moyens et quels objectifs ? A quelle échéance ? Réduire le nombre de fonctionnaires n'est pas un objectif en soi, sauf à considérer qu'ils ne constituent qu'une charge pour la dette publique, celle qu'on nous ramène sur le tapis dès qu'il s'agit de justifier une coupe supplémentaire dans les budgets publics. Ça reviendrait à considérer que la politique économique, c'est juste de la comptabilité. Or, les services publics, c'est un principe républicain qui veut qu'un citoyen de ce pays ait le même accès à un certain nombre de services, qu'il soit riche ou pauvre, qu'il habite Neuilly, la grande banlieue ou la France profonde.
Ce qui est écoeurant, c'est que la question de la fonction publique soit instrumentalisée régulièrement : aux élections, au moment du budget, des discussions sur les pensions, les régimes spéciaux, la réforme de l'Etat... Mais en définitive, personne ne sait expliquer où on veut aller !
Nos camarades fonctionnaires se sont mobilisés, le 8 février, dans toute la France, lors de la journée nationale d'action appelée par les fédérations de fonctionnaires. Les cheminots et les enseignants ont été particulièrement mobilisés. Nos camarades enseignants, en particulier, ont en travers de la gorge les modifications des arrêtés du 25 mai 1950 définissant les obligations de service. En clair, le ministre impose la polyvalence sur plusieurs matières, la baisse des salaires et l'allongement du temps de travail dans un contexte de suppression de postes.
Je comprends parfaitement la colère des fonctionnaires et on a pu remarquer une montée en puissance de la mobilisation par rapport à celle du 2 février 2006 sur le même thème. Mais il est clair que la fonction publique ne pourra pas en rester là. Depuis 2000, la fédération explique qu'il manque plus de 5 % d'augmentation collective pour seulement maintenir le pouvoir d'achat. C'est une façon de briser les reins des fonctionnaires en tapant au portefeuille.
Une nouvelle mobilisation est envisagée mais il va falloir passer la vitesse supérieure, se faire entendre en tant que FO et répondre à toutes les remises en cause du statut, des missions et des conditions de travail dans la fonction publique, et les entreprises publiques : EDF, GDF, La Poste, etc. les sujets ne manquent pas !
Et puis, mes chers camarades, je veux dire un mot sur le projet de retenue à la source. L'an passé, le président de la République voulait asseoir les cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises. Le projet a fait « pschitt ! ». Aujourd'hui, voila qu'on veut prélever les impôts à la source, c'est-à-dire, directement sur le salaire, sans connaître la base imposable. Et bien j'espère que là, ça va faire « plouf ! ». Car c'est une mauvaise idée, chers camarades ! Nous sommes allés l'expliquer avec la Fédération des finances FO aux parlementaires, mais aussi à la mission mandatée sur ce sujet par le Premier ministre. C'est bien sûr M. BEBEAR qui s'y colle, encore qu'il n'ait pas été présent le jour du rendez vous.
C'est une mauvaise idée parce que de toute façon, 70 % des ménages sont mensualisés, ce qui d'ailleurs assure une rentrée régulière de revenus aux caisses de l'Etat. Et donc ils ne cesseront pas de payer l'impôt, même la fameuse année de transition, celle que l'Etat renoncerait à imposer. Simplement, c'est la base du calcul qui changera, sachant qu'il faudra toujours faire une déclaration pour régulariser les écarts entre la base prévisionnelle et la base réelle, comme la fin d'année.
Conclusion : ça ne simplifie rien du tout pour les contribuables. Mais ce serait les entreprises qui feraient le prélèvement, donc cela permettrait bien sûr de faire des économies de fonctionnaires dans les services du recouvrement de l'impôt. Et cela veut dire que les patrons auraient accès à la vie privée de leurs salariés : tiens, madame unetelle ne déclare qu'une part et demi, elle à divorcé ! Etc.
Et bien sûr, certains demandent déjà à être rémunérés pour ce service. Et puis, ils expliqueront que tout cela est très compliqué et que ce serait plus simple si l'on n'avait qu'un seul taux d'imposition ! Cela veut dire que l'impôt progressif, l'impôt républicain, serait ainsi abandonné pour des raisons techniques évidemment ! Mais abandonné quand même ! Il resterait la TVA qui, proportionnellement taxe plus les pauvres que les riches. Nous allons continuer à dire le mal que nous pensons de cette proposition et à défendre une véritable réforme de l'impôt sur les revenus, qui déloge de leurs niches fiscales certains revenus et qui en finisse avec l'idée de bouclier fiscal qui ne profite qu'aux plus aisés.
Mes chers camarades, je veux également signaler le succès de la 8ème journée nationale handicap et travail qui a réuni plus de 900 personnes au Cirque d'Hiver. Autour de différents débats et d'une table ronde avec le Ministre du travail, nous avons réaffirmé la place que la confédération tient dans les questions touchant au handicap. C'est particulièrement important dans la mesure où les travailleurs handicapés veulent être considérés comme des travailleurs avant tout.
Nous avons récemment renouvelé notre convention avec l'AGEFIPH afin de renouveler bien sûr cette opération, mais aussi en vue de l'étendre et de monter des journées régionales sur ces mêmes questions.
Je rappelle également que la Commission confédérale Egalité s'est réunie le 16 janvier 2007. Près de 120 camarades ont participé à cette journée qui a travaillé sur 4 axes concernant les femmes : le travail, les retraites, la formation professionnelle, les responsabilités syndicales. Sur ce dernier point, je rappelle que le bureau confédéral et la commission exécutive ont pris l'initiative en septembre dernier de créer 2 groupes de travail. Il s'agit de préparer les discussions dans les résolutions du congrès confédéral sur le thème de l'égalité professionnelle et sur celui de la prise de responsabilités syndicales pour les femmes.
Un point sur deux de nos structures.
D'abord la Fédération des Jeunesses syndicalistes. Nous allons devoir procéder à la transformation de ses statuts et de ses structures. Nous avons un problème un peu semblable à celui de l'AFOC. La fédération sollicite un agrément pour bénéficier de subvention de fonctionnement mais celle-ci risque de nous être refusée pour cause de structures non conformes. Des propositions de modification seront faites dans une prochaine assemblée générale.
Ensuite, l'Union Confédérale des Retraités. Le bureau confédéral a travaillé en lien avec le bureau de l'UCR. La Commission exécutive a été informé.
Le but est d'arriver à garder le maximum de nos camarades qui partent en retraite au sein de l'UCR, afin de maintenir la solidarité actifs/retraités sans cependant faire concurrence à l'action des fédérations qui ont leur propre structure de retraités. Un certain nombre de propositions de modification des statuts de l'UCR seront faits à l'AG de l'UCR de même que nous proposerons une modification des statuts confédéraux lors du congrès. La carte confédérale et la vignette UCR seront obligatoires pour les retraités. Les retraités devront être obligatoirement adhérents à leur UDR. Un représentant de chaque UDR ainsi que les membres du bureau national de l'UCR pourront assister, à ce titre, au Congrès confédéral.
Mes chers camarades, c'est donc notre dernier CCN avant le congrès. Comme vous l'avez lu dans nos circulaires, les opérations de préparation de cet événement important sont bien engagées à Lille avec l'appui de nos camarades du Nord. Nous avons pris tous les contacts nécessaires pour que nos délégués soient bien installés et bien reçus.
Conformément à l'article 38 de nos statuts, il me revient de soumettre au CCN l'ordre du jour du congrès qui se déroulera donc du 25 au 29 juin 2007 à Lille.
L'ordre du jour serait le suivant :
1. ouverture du congrès par le président de séance,
2. mise en place des commissions du congrès,
3. intervention du secrétaire général de l'UD du Nord,
4. rapport d'activité par le secrétaire général,
5. intervention des délégués,
6. réponse du secrétaire général aux interventions,
7. vote du rapport d'activité,
8. vote du rapport financier,
9. discussion et vote des modifications statutaires,
10.réunion des commissions du congrès
- résolution générale,
- résolution sociale,
- résolution protection sociale,
- résolution développement et syndicalisation,
- résolution DOM TOM.
11.discussion et vote des résolutions,
12.clôture du congrès.
Par ailleurs, j'indique que les modifications statutaires porteront sur l'UCR, comme je l'ai déjà indiqué et la transformation de la référence à la CISL en référence à la CSI. Enfin, nous modifierons les conditions de cotisation pour assister au congrès en calculant sur 3 ans le montant moyen des cotisations versées.
Certains d'entre vous ont éprouvé des difficultés dans les opérations de validation des mandats que ce soit au niveau du syndicat, de la validation par l'union départementale ou la fédération. Il faut dire que nous avons innové en adoptant un système de validation par code barre et que par ailleurs, nous avons mis en oeuvre une refonte complète du fichier des syndicats.
Ces difficultés sont agaçantes mais inévitables. Je propose que vous ne nous étendiez pas sur ces questions à la tribune. Roland HOUP fera un point sur ces questions et se tiendra à votre disposition avec son équipe pour résoudre vos difficultés point par point. Alors, une peu de patience, d'ordre et de discipline et ça se passera bien : même à FO, on est capables d'avoir les trois choses en même temps !
J'en profite pour indiquer que nous allons devoir procéder à une modification du bureau confédéral. Comme vous l'avez lu dans la circulaire d'appel à candidature, notre camarade Roland HOUP n'ayant pas l'intention de demander le renouvellement de son mandat, il convenait de préparer les choses afin d'assurer une transition aussi harmonieuse que possible. Notre camarade Rose BOUTARIC a été présentée par plusieurs organisations. Il s'agit de la seule candidature, le CCN sera appelé à se prononcer après ma réponse de demain.
Mes chers camarades, j'en ai pratiquement fini avec ce rapport d'activité. Comme vous l'avez vu, je me suis imposé de ne pas trop réagir sur les questions liées à la campagne électorale. Mais ce n'est pas le cas de tout le monde ! Vous avez vu que le Medef a tenu un grand show à Bercy qui était sa façon de se positionner dans la campagne électorale. Moi, je ne crois pas que le patronat, ou plutôt l'entreprise, ait vocation à faire de la politique et à gérer la République. Pourtant, c'est un fait que les propositions patronales sont à la limite du politique.
Alors, mes chers camarades, je me lâche ! Je suis parfaitement en droit de répondre aux propositions patronales au nom de mon organisation syndicale et si cela soulève des échos dans certains programmes politiques, ce n'est pas ma faute !
1. Le patronat veut la suppression de la durée légale du travail : nous ne sommes pas d'accord ! C'est une attaque contre les 35 heures afin d'obtenir un alignement sur « l'opt out » britannique, c'est-à-dire la flexibilité maximum, jusqu'à 48 heures par semaine sans heures supplémentaires payées. C'est le pendant du « travailler plus pour gagner plus » que l'on entend souvent ! Or, mes chers camarades, c'est du bidon. Vous avez lu l'étude parue dans La Tribune au début de février, qui s'appuie sur des chiffres de l'OCDE et de l'ex Commissariat au Plan ? Si on intègre heures normales et heures supplémentaires, il s'avère que la France est toujours dans le peloton de tête des pays qui travaillent le plus ! Et nous sommes donc au-dessus de la moyenne des heures travaillées en Europe ! Comment peut on nous dire qu'il faut travailler plus pour gagner plus alors que dans les faits, c'est déjà le cas ? Il y a des heures supplémentaires demandées par le patron ? Les salariés les prennent ! Sauf que, au bout du compte, c'est le patron qui propose, en fonction de son plan de charge ! Et évidemment, s'ils pouvait les payer au tarif normal plutôt qu'en heures sup', il préférerait. Donc, le Medef, c'est plutôt travailler plus pour gagner moins !
2. La séparabilité ou le divorce par consentement mutuel est demandé par le patronat. J'ai déjà dit que le Code du travail n'est pas le Code civil. Dans les relations de travail, le salarié est sous dépendance hiérarchique. Il ne fixe pas les objectifs, il n'émarge pas aux bénéfices et même en CDI, il est licenciable à tout moment. Le Code du travail contrebalance ce déséquilibre en protégeant les droits des salariés. Quand les candidats parlent de sécurité sociale professionnelle, ils mettent le plus souvent en avant une sorte d'apaisement des relations patrons-salariés. Ah, si les licenciements pouvaient se passer tranquillement ! Comme les politiques seraient tranquilles ! Et les patrons, donc ! Nous sommes désolés mais les travailleurs ont des droits et ne les laissent pas remettre en cause ! L'assurance chômage existe et nous nous félicitons de la position unanime du bureau de l'Unedic contre le rapprochement ANPE - Unedic.
3. Le Medef veut l'impossibilité pour le Parlement de modifier un accord interprofessionnel, ce qui ferait des interlocuteurs sociaux des quasi législateurs. Et deux candidats veulent « clarifier une bonne fois pour toutes les domaines respectifs du législateur et des partenaires sociaux ». Et bien non ! Il n'y a pas un mur de Berlin entre loi et contrat. On a même vu le Medef aller au Parlement essayer de faire passer ce qu'il ne pouvait obtenir sur la table des négociations ! Pourquoi ne pourrions nous pas saisir la représentation nationale le cas échéant ? Ceci ne nous empêchera pas de proposer des thèmes de négociation comme sur la sous-traitance par exemple, ni de défendre nos positions devant les parlementaires. Ce n'est pas la loi contre le contrat : ce que nous voulons ce sont de bonnes lois et de bons contrats de travail !
4. Le Medef veut faire glisser des « charges » (entre guillemets) sociales des entreprises vers le budget de l'Etat. Rien de nouveau, direz vous sauf que cette revendication là est reprise pratiquement par tous les candidats qui se refusent en bloc à comprendre ce qu'est la sécurité sociale. Et bien nous disons, nous, qu'il serait temps de procéder à une évaluation des aides publiques de l'Etat aux entreprises ! Et il serait temps de les supprimer aux entreprises qui licencient ou qui délocalisent. Pour être honnête, je crois avoir lu cette proposition ici ou là : alors chiche, suppression des aides aux patrons émigrants, aux entreprises prédatrices qui butinent, de pays en pays, les subventions et les aides publiques. Et réattribution à AIRBUS ou d'autres contre l'engagement de maintenir l'emploi sur 5, 10, 15 ans ! Et pourquoi pas ?
5. Mise en place d'un nouveau contrat de travail « entre le CDI et le CDD », un contrat de mission avec rupture automatique en fin de mission. C'est le « contrat unique » que certains candidats relient encore une fois à la sécurité sociale professionnelle, la flexisécurité ! Ce contrat unique, c'est le CNE partout, le CPE pour toutes les classes d'âge ! On n'en veut pas, c'est clair ! Déjà que le CNE ne fait pas la preuve de son utilité pour les PME/TPE, on ne voit pas l'intérêt de l'étendre à tout le monde sinon d'installer la précarité à l'échelle d'un pays, de transformer tous les CDI en espèce de CNE généralisés.
6. Il y a d'autres propositions mais j'ai gardé la dernière idée du Medef pour la fin parce que celle là, elle concrétise tous les risques que le Medef voudrait transférer des entreprises vers la collectivité publique. Il s'agirait d'inscrire dans la constitution le principe d'équilibre des finances publiques, ce qui interdirait tout déficit budgétaire. Nous savons tous qu'on ne peut inscrire de nouvelle dépense dans le budget sans inscrire une recette en regard. Mais il arrive que des dépenses dérapent ou que des recettes diminuent. Inscrire le principe d'équilibre signifierait qu'en cas de déficit sur un poste de dépenses, le couperet comptable tomberait automatiquement. Ce serait transformer la société, le pays, la nation en société anonyme : France S.A. ! Mes chers camarades, aucun candidat n'a, pour l'instant, repris en tant que telle cette proposition mais je ne suis pas sûr que nous en sommes si loin que cela : le 3 % de déficit imposé par le traité de stabilité et de croissance, c'est un peu cela !
Non, mes chers camarades, la République n'est pas une société anonyme et les travailleurs ne sont pas des fournisseurs. Ce sont des hommes et des femmes qui se battent pour vivre, travailler, se loger, améliorer leur sort et celui de leurs enfants ! Notre rôle à nous, organisation syndicale libre et indépendante, c'est de les aider, c'est de défendre leurs droits, c'est en conquérir de nouveaux, c'est bâtir un monde meilleur, non pas accompagner sa destruction progressive !
Un article de presse faisait récemment état d'un regain des conflits du travail en France. Il indiquait que dans la plupart des cas, ils portent sur les salaires. Et ça concerne presque une entreprise sur trois parmi celles de plus de 20 salariés. La technique, c'est le débrayage, l'arrêt de moins d'une journée.
Ça, mes chers camarades, ça prouve que les salariés ne sont pas près de se laisser faire et c'est plutôt encourageant ! Nous soutenons depuis plus d'un mois nos camarades de LECLERC à Vandoeuvre et c'est vrai qu'ils en bavent face à une direction antisyndicale. Je soutiens nos camarades d'AIRBUS et ils en bavent face à un plan de restructuration qui veut laminer les droits et les avantages pour créer de la valeur boursière.
Mais, dans un petit syndicat comme dans un gros, rien n'est jamais perdu quand on se bat. Bien sûr, on ne sait pas si on va gagner mais si on ne fait rien, on est sûr d'avoir perdu !
Alors mes chers camarades, il nous faut nous développer, nous renforcer, nous construire là où nous n'existons pas !
Seul le syndicalisme libre peut aider à mobiliser, à négocier, à gagner !
Construisons notre outil de défense des salariés, recrutons, militons, discutons et il y aura un avenir pour les travailleurs !
Vive la CGT Force ouvrière !
Et maintenant, vous avez la parole.Source http://fo44.free.fr, le 23 août 2007