Texte intégral
Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs,
Je tiens à remercier les organisateurs et tout particulièrement, le professeur Benhayoun, président du groupe d'Aix, de m'avoir invité à participer à la session conclusive de cette importante conférence.
J'ai eu l'occasion dans le passé de prendre connaissance de vos travaux et me réjouis de l'honneur qui m'est donné aujourd'hui de pouvoir m'adresser à vous.
1. Enjeux de l'intégration économique dans le Processus de paix
Comme Bernard Kouchner l'a souligné dans le message qu'il vous a adressé hier, la dimension économique occupe une place centrale dans le processus en cours. La présence parmi nous de MM. Ramon et Hassouneh, la qualité des intervenants, viennent souligner l'intérêt tout particulier du volet économique, qui, nous n'en doutons pas occupera une place centrale dans la résolution du conflit.
Engagé sous des auspices difficiles, il y a trois ans, votre travail voit aujourd'hui son utilité pleinement confirmée :
- alors que ces dernières années ont été particulièrement difficiles en Israël et dans les Territoires palestiniens, il est d'autant plus méritoire que votre groupe ait pu continuer à travailler et maintenir ainsi un espace de discussions entre Israéliens et Palestiniens ;
- ce groupe a pu démontrer que le dialogue entre tous les acteurs demeurait une nécessité, quelles que soient les circonstances : nul ne doute que le processus que vous avez engagé, que la portée des travaux que nous avez menés dépassent amplement la seule sphère économique ;
- vos rapports qui portent sur des sujets aussi difficiles que Jérusalem, les réfugiés ou la coopération en matière d'infrastructures, montrent que l'intégration économique, dont vous avez démontré qu'elle serait dans un premier temps coûteuse - et qu'elle exigera des compromis - devrait offrir à moyen terme d'importantes perspectives de prospérité pour Israël, les Territoires palestiniens et toute la région.
2. Le soutien européen
Vos travaux constitueront une base de réflexion précieuse pour notre action dans le cadre de l'Union européenne.
Je souhaiterais à cet égard rappeler le rôle que l'Union européenne a joué - et jouera encore - un rôle éminent dans la recherche d'une solution au conflit.
- l'Union européenne a ainsi très tôt créé un poste de représentant spécial, l'un des tout premiers (avant même la création du poste de Haut représentant pour la PESC) occupé aujourd'hui avec brio par M. Marc Otte, dont la mission est entièrement consacrée au Processus de paix au Proche-Orient. Elle a ainsi affirmé la place particulière du Proche-Orient dans sa politique extérieure commune ;
- à travers les nouveaux instruments de la PESD, l'Union européenne a mis en place une mission d'assistance au poste frontière de Rafah, le seul point de sortie de la bande de Gaza, qui accompagne les douaniers palestiniens dans l'exercice de leurs fonctions ; elle a mis en place un bureau de coordination pour le soutien à la police palestinienne qui accompagne l'Autorité palestinienne dans son plan de réforme des services de sécurité ; vous le voyez, l'Union européenne ne s'est pas engagée dans les tâches les plus simples témoignant ainsi de son engagement dans la région ;
- les Européens sont les principaux soutiens financiers aux Territoires palestiniens et contribuent ainsi à la stabilisation de la région.
C'est la Commission européenne qui a été chargée par le Quartet de mettre en oeuvre le TIM (mécanisme temporaire international) dont la mission est de centraliser et d'acheminer l'aide financière internationale à destination des populations palestiniennes.
Ce mécanisme constitue un succès technique incontestable et sera sans doute prolongé pour permettre d'accompagner la réforme du ministère des finances palestinien.
L'Union européenne est ainsi le premier contributeur de l'aide internationale aux Territoires palestiniens, avec un total d'environ 500 millions d'euros par an en moyenne.
- en tant que membre du Quartet, l'Union européenne participe directement à la définition des demandes politiques de la communauté internationale adressées à Israël et à l'Autorité palestinienne.
- enfin, c'est un Européen, M. Tony Blair, qui a été désigné comme nouvel émissaire du Quartet pour la paix au Proche Orient.
Comme vous le savez, à l'initiative de Bernard Kouchner, les dix ministres des Affaires étrangères des pays méditerranéens de l'Union européenne réunis en Slovénie lui ont adressé une lettre pour lui apporter leur soutien et l'encourager à agir de manière déterminée.
3. Le soutien de la France
Pour la France, qui, comme vous le savez, est l'amie d'Israël et des Palestiniens, la seule solution durable passe, sur la base des résolutions du Conseil de sécurité, par l'établissement de deux Etats viables, démocratiques, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité, dans des frontières sûres et reconnues.
C'est le message que portera Bernard Kouchner au cours de son déplacement en Israël et dans les Territoires palestiniens, à partir du 10 septembre.
Cette vision est largement partagée, notamment par les pays de la région. Nous avons salué l'initiative arabe de paix du Sommet de Riyad et je sais que votre groupe va s'attacher à évaluer les conséquences économiques de cette initiative.
La France s'est engagée activement au Proche-Orient. Outre ses efforts incessants pour la stabilisation de la situation au Liban, la France cherche par tous les moyens à rétablir la confiance entre les parties afin de favoriser une relance du processus de paix.
La France a joué un rôle moteur pour convaincre ses partenaires européens qu'il fallait reprendre l'aide budgétaire directe à l'Autorité palestinienne, ce qui a été fait lors de la réunion du Conseil en juin.
4. L'exemple européen
L'Union européenne, sa construction et sa prospérité, repose sur une réconciliation. Cette réconciliation a d'abord été le fait de visionnaires qui ont compris que l'intégration économique était la clé d'un rapprochement des peuples. Vous en êtes les héritiers. Les "réalisations concrètes créant une solidarité de fait" - comme l'illustrent l'Union européenne - permettront de rapprocher les peuples. Votre travail y contribue.
Comme vous la savez, le président de la République a voulu mettre à profit l'expérience européenne pour l'espace méditerranéen, qui est actuellement la seule région du monde à ne pas apparaître à travers une organisation qui lui soit propre dans la mondialisation.
Le moment est venu de franchir un pas supplémentaire et de démontrer par nos actes plutôt que par nos discours, la réalité des liens qui unissent toutes les rives de la Méditerranée.
Il ne s'agit pas d'ignorer ce qui a déjà été accompli mais d'aller au-delà, en partant de la démarche qui fut celle de Jean Monnet à propos de l'Europe : celle des "solidarités" concrètes.
Nous proposons de la bâtir autour de quatre piliers :
- l'environnement ;
- le dialogue des cultures ;
- la croissance économique ;
- la sécurité.
Nous devons travailler ensemble, dans chacun de ces domaines, à quelques projets ambitieux mais réalistes mobilisant des Etats, des entreprises, des associations.
Vos travaux s'inscrivent pleinement dans cette démarche et constituent même une préfiguration de la méthode, pragmatique, que nous devons suivre pour bâtir étape par étape l'Union méditerranéenne.
Naturellement, l'Union européenne, à travers ses institutions, en particulier la Commission, devrait être acteur de plein droit de l'Union méditerranéenne.
Nous devons maintenant préparer une première réunion de chefs d'Etat et de gouvernement qui devra se tenir au premier semestre 2008.
Je forme dès à présent le voeu que Israéliens et Palestiniens occupent la place qui leur revient dans ce processus.
En guise de conclusion, je tiens à vous féliciter une nouvelle fois pour le précieux travail que vous avez accompli.
Sachez que vos travaux sont des contributions décisives au processus de paix, que nous les utiliserons, que nous nous en inspirerons et suivrons très attentivement la suite de votre action.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 septembre 2007