Texte intégral
Le Parisien : Pourquoi les fonctionnaires s'estiment-ils mal payés ?
Jean-Claude Mailly : Depuis plusieurs années, leur pouvoir d'achat, c'est-à-dire la différence entre la hausse générale des salaires et l'inflation, n'est pas assuré. Nous évaluons à près de 6% cette perte de pouvoir d'achat depuis 2000.
Le Parisien : Le gouvernement avance au contraire une hausse moyenne du pouvoir d'achat de 2% depuis 2004...
J.-C. Mailly : C'est une réponse d'employeur, comme dans le privé. Le gouvernement raisonne en masse salariale budgétaire alors que les salariés regardent leur niveau de salaire. Un vieux débat qui dure depuis vingt ans. Le minimum pour tous les salariés -y compris les fonctionnaires- est d'obtenir le maintien du pouvoir d'achat, quelle que soit la situation de chacun. Qu'ils aient une promotion ou pas. C'est l'augmentation du point d'indice (base de calcul du salaire) permettant des augmentations générales des salaires qui doit assurer ce maintien du pouvoir d'achat.
Le Parisien : L'objectif de la conférence qui s'ouvre aujourd'hui est justement de sortir de cette polémique. Vous êtes prêts à jouer le jeu ?
J.-C. Mailly : Si l'on veut avoir un débat serein, cela suppose au préalable que le gouvernement accepte d'ouvrir des négociations pour 2007, une année vierge de toute revalorisation. Les 0,8 point accordés en février 2007 correspondent à un rattrapage de l'année 2006, comme le confirment les courriers du ministre de l'époque, Christian Jacob. Pour nous, le compte n'y est pas. Aujourd'hui, nous allons rendre publique la lettre adressée au Premier ministre, dans laquelle nous demandons l'ouverture de négociations salariales dans le public, mais aussi dans le privé, pour lequel nous réclamons notamment que l'augmenta-tion du SMIC reste de la responsabilité de l'État. Nous attendons des réponses courant octobre. Sinon, nous envisagerons de nous mobiliser.
Le Parisien : Comme dans le privé, le gouvernement promet aux fonctionnaires de gagner plus grâce aux heures supplémentaires, financées en partie avec les économies réalisées par le non-remplacement des départs en retraite...
J.-C. Mailly : Cela ne répond pas à la question des augmentations de salaires. Le message envoyé aux fonctionnaires est : si vous voulez gagner plus, acceptez les diminutions d'effectifs. C'est ce que le gouvernement est en train de dire. Ce raisonnement n'est pas acceptable. Avec les baisses d'effectifs réalisées ces dernières années, il y a déjà des marges de manoeuvre financières pour négocier.
Le Parisien : Et la rémunération au mérite souhaitée par Nicolas Sarkozy ?
J.-C. Mailly : Elle peut avoir beaucoup d'effets pervers. C'est la rémunération à la tête du client. A trop jouer sur l'individualisation, on casse la motivation des salariés.
Propos recueillis par C.G-P. Source http://www.force-ouvriere.fr, le 8 octobre 2007