Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Monsieur le Recteur,
Monsieur le Directeur,
Monsieur le Conseiller et Ministre, à qui je veux d'emblée adresser mes plus vifs remerciements pour les paroles qu'il vient de prononcer. Je voudrais également vous charger de dire à Monsieur l'Ambassadeur combien vous avons été désolés de son absence. Mais ce n'est que partie remise ! Nous aurons encore de nombreuses occasions de nous retrouver ensemble, Français et Brésiliens.
En effet, notre coopération, qui atteint aujourd'hui ce niveau d'excellence que vous incarnez, Mesdames, Messieurs les stagiaires, prend sa place à l'intérieur d'un ensemble de coopérations qui vont en s'intensifiant et qui vont s'intensifier davantage encore. Il y va de la vision du monde que nous partageons, de la place que nous voulons occuper, les uns comme les autres, dans l'ordre du monde. Cette place ne peut être une place seconde. Nous aspirons à une égalité de droit et de dignité avec les plus puissants - le plus puissant - parce que telle est la tradition de nos peuples. Nous croyons être en état d'apporter des réponses aux défis de notre temps. Nous en avons mûri les éléments par le long travail de formation de nos nations.
Vous et nous, nous sommes parvenus à un haut niveau de développement. En dépit des inégalités territoriales, sociales, humaines, que ce haut niveau recouvre, nous tâchons, par le choix libre de nos peuples, d'apporter les réponses qui permettent d'en réduire les effets les plus néfastes qui nous sont connus. De même que dans l'ordre international le développement inégal est source de retard et source de meurtrissures, de même en est-il à l'intérieur des nations. Vous et nous le savons. Et nous déployons toute l'énergie nécessaire pour résorber ces inégalités.
Aujourd'hui, le Brésil est le premier partenaire des coopérations universitaires avec la France pour l'Amérique latine. Ce n'est pas un hasard. Il y a dans la vie de nos peuples bien des choses qui nous rapprochent. Si elles peuvent sembler dérisoires à quelques esprits superficiels pour qui la culture n'est rien, elles sont en réalité, comme l'a rappelé le recteur Blanchet, essentielles. On peut les résumer en un mot - la latinité. Mais plus qu'un mot, c'est une manière de vivre, de penser, de ressentir ensuite le haut niveau de développement de nos patries respectives. Vous êtes (j'espère ne pas me tromper) la dixième puissance économique du monde ; nous en sommes la quatrième. Si bien que l'ambition qui nous conduit à vouloir que nos peuples développent leur personnalité, leurs acquis, nous la vivons dans le mouvement vers l'excellence qui règne à notre époque. Cela rapproche indubitablement.
Nous avons également à répondre à des défis communs. Je vais en dire quelques mots.
Mais auparavant, chers amis brésiliens, notre premier partenaire, je ne veux pas laisser passer l'occasion qui m'est donnée de vous dire combien nous sommes fiers et heureux que vous nous ayez choisis pour ce partenariat, parmi bien d'autres choix qui se présentaient à vous. Il est donc juste que je vous dise combien nous en sommes remplis d'orgueil.
Je veux dire un mot des défis. Les systèmes d'enseignement professionnel de nos pays ont à répondre à des tensions extrêmement complexes sous l'impulsion, en tout cas en Europe, d'une vigoureuse reprise de la croissance et de l'emploi. Notre système est interpellé. On lui demande de répondre sur le champ à des exigences de main-d'uvre qualifiée qu'on semblait hier avoir oubliées. Comment faire ? Quelles doivent être nos règles de comportement ?
On nous invite ici et là à spécialiser autant qu'on le peut les formations. Nous croyons que si nous nous y abandonnions ce serait une erreur coûteuse durablement pour notre modèle éducatif. Pourquoi ? Votre présence, votre travail, le stage que vous avez accompli en attestent. Je m'explique.
La professionnalisation réussie, disons-le pour commencer, est une exigence démocratique. Oui, les finalités professionnalisantes des modèles éducatifs doivent être sans cesse rappelées. D'une part, les systèmes éducatifs ne s'appartiennent pas, ils appartiennent à la nation qui les met en place. D'autre part, compte tenu de ce qu'est le mouvement des sciences et des techniques, l'adaptabilité de toute évidence exigible du travailleur qualifié, de l'ingénieur, dépend d'une conception particulière de sa formation. Sur ce point, deux modèles s'opposent. Mais je crois que nous partageons la même analyse. Nous sommes porteurs de la même conception, celle que je nomme : la professionnalisation durable. C'est le premier défi qui s'offre à nous.
Cela signifie que nous avons en commun une même analyse de ce que sont les métiers de notre époque. Tous les métiers. Non seulement ceux qui se présentent spontanément à l'esprit, ceux qui sont porteurs de contenu technique avancé, mais également les métiers traditionnels, qui eux aussi se trouvent bouleversés, c'est-à-dire impliqués dans ce grand mouvement d'évolution technique, de transformation du processus de production par l'introduction de l'informatique. À ne pas confondre, bien sûr, lorsqu'on parle de nouvelle économie, avec les pantalonnades de pacotille qui voudraient faire croire que le virtuel demain remplacerait le réel, et que l'avenir des peuples serait à pianoter devant leurs écrans d'ordinateur pour y accumuler des fortunes faciles. Nous ne serons jamais, fort heureusement, émancipés du réel. La nouvelle économie est, comme l'ancienne - si je puis me permettre de parler ainsi - une nouvelle économie productive. Ce que nous devons apprendre à discerner, c'est la transformation du processus de production. C'est bien là le cur de notre affaire.
Nous, les Français, nous croyons à cette nouvelle économie productive. J'ai la fierté de pouvoir vous dire que nous nous considérons comme en tête de la course parce que notre système éducatif est le premier d'Europe pour l'informatisation de ses enseignements. Et vous le savez sans doute : le héros informatique de notre époque n'est pas Bill Gates, bien qu'il ait inventé un magnifique logiciel de secrétariat personnalisé. Les héros de notre époque en matière de nouvelle économie productive, j'ai la fierté de vous le dire, ce sont des Français.
Dans ce monde, depuis décembre dernier, il ne se produit plus un avion, un train, un bateau, bientôt une voiture, qui n'aient été conçus, modélisés, réalisés sur le logiciel aujourd'hui le plus perfectionné du monde. Et ce logiciel est produit par une entreprise française, par des ingénieurs, des informaticiens, formés dans nos écoles. Si je signale à votre attention cet objet d'excellence, c'est précisément parce que nous ne l'avons pas réservé au plus haut niveau d'excellence. S'il est vrai que dans certaines universités américaines on propose des stages payants pour apprendre la maniement de ce logiciel, en France, nous avons mis ce logiciel à la disposition de notre enseignement secondaire, non seulement dans les branches que vous connaissez, où vous vous attendez à le trouver (la mécanique, l'aéronautique, la métallerie) mais également dans des productions considérées comme plus traditionnelles ou en tout cas relevant de la tradition. Et contrairement au modèle américain, le modèle républicain de notre école est celui de l'école gratuite pour tout le monde.
Pour en revenir au cur de mon propos, notre attention, notre volonté affirmée, est d'accompagner, dans tous les compartiments de la production, cette modification des processus de production qu'on nomme " nouvelle économie " et qui concerne donc, pour faire bref, tous les métiers et tous les niveaux de qualification.
Si elles veulent faire la course en tête, si elles veulent d'une manière concrète résister à un certain rouleau compresseur qui ne voudrait entendre dans le monde qu'une seule langue, une seule manière de faire, une seule source à l'intelligence, nos deux patries ont tout intérêt à promouvoir tout ce qui, dans nos manières de faire, permet à nos peuples, à tous les niveaux d'intervention, à tous les niveaux de la production, de faire la course en tête. C'est, je crois, le sens profond de ce que nous entreprenons à travers nos échanges.
La professionnalisation durable apparaît donc dès lors comme un modèle assez ordinaire pour nous les Français. Je crois que vous êtes également sur ce chemin. Nous avons compris que l'adaptabilité et l'employabilité des travailleurs, quel que soit leur niveau d'intervention dans la production, leur capacité à accompagner les mutations techniques de la production, nécessitent que le plus haut niveau de savoir dans les sciences fondamentales et le plus haut niveau de savoir dans les pratiques technologiques soient acquis. Ce modèle c'est celui que nous essayons de faire vivre. Ce modèle, c'est celui que nous réussissons à faire vivre. C'est, selon nous, un modèle démocratique. Car pour que sa réussite soit avérée, il faut que le plus grand nombre, d'une façon ou d'une autre, se trouve impliqué dans sa réalisation. On ne peut pas être une société avancée, une société qui fait la course en tête, sans que la diffusion des savoirs, notamment des savoirs de plus haut niveau, ne soit partagée par le plus grand nombre.
Deuxième défi - et là, je crois que nous allons faire de la bonne ouvrage ensemble : tout ce que nous faisons au bout du compte est tourné vers un projet, un idéal d'humanité rassemblé. Le chemin est long. Les occasions d'avancer nombreuses. De régresser tout autant. Mais voyons le côté positif : la mobilité des chercheurs, des étudiants, des travailleurs. Ce que nous faisons ensemble y concourt, mais si nous allions plus au fond des choses, nous verrions que la matière même que nous avons à traiter y concourt.
Vous entendez à cet instant parler un héritier des Lumières et qui s'en réclame avec fierté. La science, la technique, les méthodes de production avancées que nous mettons en uvre, vous et nous, constituent une langue universelle. Il est donc du plus grand intérêt d'avancer vers cette idée d'une espèce de monnaie commune diplômante, vers des référentiels communs. C'est possible à faire. Nous avons commencé à le faire et à en ouvrir les voies avec Monsieur Ruy Berger, votre ministre, lorsqu'il est venu visiter avec nous le lycée professionnel Louis Rascol d'Albi. Nous devons poursuivre en ce sens.
Naturellement les postes de travail, dans nos deux économies, ne sont pas les mêmes. Nous savons bien que l'organisation du travail est très étroitement liée à la culture nationale, à des modes d'organisation sociale qui résultent d'une histoire dont nous sommes chacun les héritiers. Soit. Mais le contenu, les référentiels, les savoir-faire sont les mêmes - en tout cas quand on veut le meilleur - et nos deux pays, qui marchent en tête dans un certain nombre de compartiments de la production, sont en état de proposer la définition des contenus universels par les savoirs qu'ils impliquent comme par l'excellence qu'ils portent.
Voilà ce à quoi je crois en Europe. Nous en avons saisi les ministres de l'Éducation Nationale d'Amérique latine lorsque nous nous sommes rencontrés, il y a peu. Nous, les Français, nous avons pris des initiatives pour aller dans ce sens à travers des exemples d'une ou deux industries. Nous pensons, par exemple, à l'industrie aéronautique puisque nous avons en Europe une production intégrée européenne dans l'industrie aéronautique. Le Brésil est lui aussi un producteur en aéronautique. On voit que sur ces sujets nous pourrions marquer des convergences concrètes, donnant à nos intellectuels, ingénieurs, ouvriers qualifiés, cadres, des repères, des références, des contenus communs. Ce serait une très grande avancée pour nous tous, pour progresser, en matière de mobilité, en matière d'échanges de technologies.
Monsieur l'Ambassadeur, c'est un grand sujet de joie que d'en voir une manifestation aujourd'hui - et ce ne sera pas la dernière - à travers la coopération qui nous a rapprochés autour de ces trois cents ingénieurs que nous avons eu la joie et l'honneur d'accueillir parmi nous. Mes derniers mots seront donc pour saluer cet effort.
Mesdames et messieurs les stagiaires, vous êtes, si vous me permettez de le dire, à un âge où les échanges peuvent être, quelle qu'en soit la nature, extrêmement étendus. J'espère que vous avez bien profité de la France. Au moment où vous repartez, je forme le vu que, comme tout jeune se doit de le faire, vous ayez une reconnaissance personnelle pour vos maîtres de stage, pour tout ce qu'ils ont mis d'amour de savoir-faire dans le rapport qu'ils ont eu avec vous. Peut-être que vous repartirez avec une bonne idée de ce que nous savons faire, nous les Français, et n'hésitez pas à nous le dire : nous adorons les compliments ! Mais plus généralement, puissiez-vous un peu à cette occasion de votre vie ressentir quelque chose de la grande amour que nous avons pour notre patrie française. Et s'il vous en restait quelque chose et que demain les hasards de la vie vous conduisent à en témoigner, sachez d'avance qu'à cet instant-là nous serons tous de cur avec vous.
Je vous remercie.
Source http://www.enseignement-professionnel.gouv.fr, le 12 février 2001)
Monsieur le Recteur,
Monsieur le Directeur,
Monsieur le Conseiller et Ministre, à qui je veux d'emblée adresser mes plus vifs remerciements pour les paroles qu'il vient de prononcer. Je voudrais également vous charger de dire à Monsieur l'Ambassadeur combien vous avons été désolés de son absence. Mais ce n'est que partie remise ! Nous aurons encore de nombreuses occasions de nous retrouver ensemble, Français et Brésiliens.
En effet, notre coopération, qui atteint aujourd'hui ce niveau d'excellence que vous incarnez, Mesdames, Messieurs les stagiaires, prend sa place à l'intérieur d'un ensemble de coopérations qui vont en s'intensifiant et qui vont s'intensifier davantage encore. Il y va de la vision du monde que nous partageons, de la place que nous voulons occuper, les uns comme les autres, dans l'ordre du monde. Cette place ne peut être une place seconde. Nous aspirons à une égalité de droit et de dignité avec les plus puissants - le plus puissant - parce que telle est la tradition de nos peuples. Nous croyons être en état d'apporter des réponses aux défis de notre temps. Nous en avons mûri les éléments par le long travail de formation de nos nations.
Vous et nous, nous sommes parvenus à un haut niveau de développement. En dépit des inégalités territoriales, sociales, humaines, que ce haut niveau recouvre, nous tâchons, par le choix libre de nos peuples, d'apporter les réponses qui permettent d'en réduire les effets les plus néfastes qui nous sont connus. De même que dans l'ordre international le développement inégal est source de retard et source de meurtrissures, de même en est-il à l'intérieur des nations. Vous et nous le savons. Et nous déployons toute l'énergie nécessaire pour résorber ces inégalités.
Aujourd'hui, le Brésil est le premier partenaire des coopérations universitaires avec la France pour l'Amérique latine. Ce n'est pas un hasard. Il y a dans la vie de nos peuples bien des choses qui nous rapprochent. Si elles peuvent sembler dérisoires à quelques esprits superficiels pour qui la culture n'est rien, elles sont en réalité, comme l'a rappelé le recteur Blanchet, essentielles. On peut les résumer en un mot - la latinité. Mais plus qu'un mot, c'est une manière de vivre, de penser, de ressentir ensuite le haut niveau de développement de nos patries respectives. Vous êtes (j'espère ne pas me tromper) la dixième puissance économique du monde ; nous en sommes la quatrième. Si bien que l'ambition qui nous conduit à vouloir que nos peuples développent leur personnalité, leurs acquis, nous la vivons dans le mouvement vers l'excellence qui règne à notre époque. Cela rapproche indubitablement.
Nous avons également à répondre à des défis communs. Je vais en dire quelques mots.
Mais auparavant, chers amis brésiliens, notre premier partenaire, je ne veux pas laisser passer l'occasion qui m'est donnée de vous dire combien nous sommes fiers et heureux que vous nous ayez choisis pour ce partenariat, parmi bien d'autres choix qui se présentaient à vous. Il est donc juste que je vous dise combien nous en sommes remplis d'orgueil.
Je veux dire un mot des défis. Les systèmes d'enseignement professionnel de nos pays ont à répondre à des tensions extrêmement complexes sous l'impulsion, en tout cas en Europe, d'une vigoureuse reprise de la croissance et de l'emploi. Notre système est interpellé. On lui demande de répondre sur le champ à des exigences de main-d'uvre qualifiée qu'on semblait hier avoir oubliées. Comment faire ? Quelles doivent être nos règles de comportement ?
On nous invite ici et là à spécialiser autant qu'on le peut les formations. Nous croyons que si nous nous y abandonnions ce serait une erreur coûteuse durablement pour notre modèle éducatif. Pourquoi ? Votre présence, votre travail, le stage que vous avez accompli en attestent. Je m'explique.
La professionnalisation réussie, disons-le pour commencer, est une exigence démocratique. Oui, les finalités professionnalisantes des modèles éducatifs doivent être sans cesse rappelées. D'une part, les systèmes éducatifs ne s'appartiennent pas, ils appartiennent à la nation qui les met en place. D'autre part, compte tenu de ce qu'est le mouvement des sciences et des techniques, l'adaptabilité de toute évidence exigible du travailleur qualifié, de l'ingénieur, dépend d'une conception particulière de sa formation. Sur ce point, deux modèles s'opposent. Mais je crois que nous partageons la même analyse. Nous sommes porteurs de la même conception, celle que je nomme : la professionnalisation durable. C'est le premier défi qui s'offre à nous.
Cela signifie que nous avons en commun une même analyse de ce que sont les métiers de notre époque. Tous les métiers. Non seulement ceux qui se présentent spontanément à l'esprit, ceux qui sont porteurs de contenu technique avancé, mais également les métiers traditionnels, qui eux aussi se trouvent bouleversés, c'est-à-dire impliqués dans ce grand mouvement d'évolution technique, de transformation du processus de production par l'introduction de l'informatique. À ne pas confondre, bien sûr, lorsqu'on parle de nouvelle économie, avec les pantalonnades de pacotille qui voudraient faire croire que le virtuel demain remplacerait le réel, et que l'avenir des peuples serait à pianoter devant leurs écrans d'ordinateur pour y accumuler des fortunes faciles. Nous ne serons jamais, fort heureusement, émancipés du réel. La nouvelle économie est, comme l'ancienne - si je puis me permettre de parler ainsi - une nouvelle économie productive. Ce que nous devons apprendre à discerner, c'est la transformation du processus de production. C'est bien là le cur de notre affaire.
Nous, les Français, nous croyons à cette nouvelle économie productive. J'ai la fierté de pouvoir vous dire que nous nous considérons comme en tête de la course parce que notre système éducatif est le premier d'Europe pour l'informatisation de ses enseignements. Et vous le savez sans doute : le héros informatique de notre époque n'est pas Bill Gates, bien qu'il ait inventé un magnifique logiciel de secrétariat personnalisé. Les héros de notre époque en matière de nouvelle économie productive, j'ai la fierté de vous le dire, ce sont des Français.
Dans ce monde, depuis décembre dernier, il ne se produit plus un avion, un train, un bateau, bientôt une voiture, qui n'aient été conçus, modélisés, réalisés sur le logiciel aujourd'hui le plus perfectionné du monde. Et ce logiciel est produit par une entreprise française, par des ingénieurs, des informaticiens, formés dans nos écoles. Si je signale à votre attention cet objet d'excellence, c'est précisément parce que nous ne l'avons pas réservé au plus haut niveau d'excellence. S'il est vrai que dans certaines universités américaines on propose des stages payants pour apprendre la maniement de ce logiciel, en France, nous avons mis ce logiciel à la disposition de notre enseignement secondaire, non seulement dans les branches que vous connaissez, où vous vous attendez à le trouver (la mécanique, l'aéronautique, la métallerie) mais également dans des productions considérées comme plus traditionnelles ou en tout cas relevant de la tradition. Et contrairement au modèle américain, le modèle républicain de notre école est celui de l'école gratuite pour tout le monde.
Pour en revenir au cur de mon propos, notre attention, notre volonté affirmée, est d'accompagner, dans tous les compartiments de la production, cette modification des processus de production qu'on nomme " nouvelle économie " et qui concerne donc, pour faire bref, tous les métiers et tous les niveaux de qualification.
Si elles veulent faire la course en tête, si elles veulent d'une manière concrète résister à un certain rouleau compresseur qui ne voudrait entendre dans le monde qu'une seule langue, une seule manière de faire, une seule source à l'intelligence, nos deux patries ont tout intérêt à promouvoir tout ce qui, dans nos manières de faire, permet à nos peuples, à tous les niveaux d'intervention, à tous les niveaux de la production, de faire la course en tête. C'est, je crois, le sens profond de ce que nous entreprenons à travers nos échanges.
La professionnalisation durable apparaît donc dès lors comme un modèle assez ordinaire pour nous les Français. Je crois que vous êtes également sur ce chemin. Nous avons compris que l'adaptabilité et l'employabilité des travailleurs, quel que soit leur niveau d'intervention dans la production, leur capacité à accompagner les mutations techniques de la production, nécessitent que le plus haut niveau de savoir dans les sciences fondamentales et le plus haut niveau de savoir dans les pratiques technologiques soient acquis. Ce modèle c'est celui que nous essayons de faire vivre. Ce modèle, c'est celui que nous réussissons à faire vivre. C'est, selon nous, un modèle démocratique. Car pour que sa réussite soit avérée, il faut que le plus grand nombre, d'une façon ou d'une autre, se trouve impliqué dans sa réalisation. On ne peut pas être une société avancée, une société qui fait la course en tête, sans que la diffusion des savoirs, notamment des savoirs de plus haut niveau, ne soit partagée par le plus grand nombre.
Deuxième défi - et là, je crois que nous allons faire de la bonne ouvrage ensemble : tout ce que nous faisons au bout du compte est tourné vers un projet, un idéal d'humanité rassemblé. Le chemin est long. Les occasions d'avancer nombreuses. De régresser tout autant. Mais voyons le côté positif : la mobilité des chercheurs, des étudiants, des travailleurs. Ce que nous faisons ensemble y concourt, mais si nous allions plus au fond des choses, nous verrions que la matière même que nous avons à traiter y concourt.
Vous entendez à cet instant parler un héritier des Lumières et qui s'en réclame avec fierté. La science, la technique, les méthodes de production avancées que nous mettons en uvre, vous et nous, constituent une langue universelle. Il est donc du plus grand intérêt d'avancer vers cette idée d'une espèce de monnaie commune diplômante, vers des référentiels communs. C'est possible à faire. Nous avons commencé à le faire et à en ouvrir les voies avec Monsieur Ruy Berger, votre ministre, lorsqu'il est venu visiter avec nous le lycée professionnel Louis Rascol d'Albi. Nous devons poursuivre en ce sens.
Naturellement les postes de travail, dans nos deux économies, ne sont pas les mêmes. Nous savons bien que l'organisation du travail est très étroitement liée à la culture nationale, à des modes d'organisation sociale qui résultent d'une histoire dont nous sommes chacun les héritiers. Soit. Mais le contenu, les référentiels, les savoir-faire sont les mêmes - en tout cas quand on veut le meilleur - et nos deux pays, qui marchent en tête dans un certain nombre de compartiments de la production, sont en état de proposer la définition des contenus universels par les savoirs qu'ils impliquent comme par l'excellence qu'ils portent.
Voilà ce à quoi je crois en Europe. Nous en avons saisi les ministres de l'Éducation Nationale d'Amérique latine lorsque nous nous sommes rencontrés, il y a peu. Nous, les Français, nous avons pris des initiatives pour aller dans ce sens à travers des exemples d'une ou deux industries. Nous pensons, par exemple, à l'industrie aéronautique puisque nous avons en Europe une production intégrée européenne dans l'industrie aéronautique. Le Brésil est lui aussi un producteur en aéronautique. On voit que sur ces sujets nous pourrions marquer des convergences concrètes, donnant à nos intellectuels, ingénieurs, ouvriers qualifiés, cadres, des repères, des références, des contenus communs. Ce serait une très grande avancée pour nous tous, pour progresser, en matière de mobilité, en matière d'échanges de technologies.
Monsieur l'Ambassadeur, c'est un grand sujet de joie que d'en voir une manifestation aujourd'hui - et ce ne sera pas la dernière - à travers la coopération qui nous a rapprochés autour de ces trois cents ingénieurs que nous avons eu la joie et l'honneur d'accueillir parmi nous. Mes derniers mots seront donc pour saluer cet effort.
Mesdames et messieurs les stagiaires, vous êtes, si vous me permettez de le dire, à un âge où les échanges peuvent être, quelle qu'en soit la nature, extrêmement étendus. J'espère que vous avez bien profité de la France. Au moment où vous repartez, je forme le vu que, comme tout jeune se doit de le faire, vous ayez une reconnaissance personnelle pour vos maîtres de stage, pour tout ce qu'ils ont mis d'amour de savoir-faire dans le rapport qu'ils ont eu avec vous. Peut-être que vous repartirez avec une bonne idée de ce que nous savons faire, nous les Français, et n'hésitez pas à nous le dire : nous adorons les compliments ! Mais plus généralement, puissiez-vous un peu à cette occasion de votre vie ressentir quelque chose de la grande amour que nous avons pour notre patrie française. Et s'il vous en restait quelque chose et que demain les hasards de la vie vous conduisent à en témoigner, sachez d'avance qu'à cet instant-là nous serons tous de cur avec vous.
Je vous remercie.
Source http://www.enseignement-professionnel.gouv.fr, le 12 février 2001)