Texte intégral
En ce 11 novembre, ma pensée va aux deux derniers survivants de la plus atroce des guerres. Ils ont vécu toute leur vie avec le souvenir de tous ceux qui sont tombés à leurs côtés, des corps déchiquetés par la mitraille, des hommes enterrés vivants dans la boue des tranchées, des morts qu'on piétinait pendant l'assaut.
Quand la bataille a été finie, quand le silence s'est fait sur la terre où tant d'hommes s'étaient battus jusqu'à l'extrême limite de leurs forces, ceux qui avaient survécu ont déposé leurs armes, quitté leurs uniformes et sont rentrés chez eux.
Ils ont montré leurs blessures à leurs enfants. Ils ont raconté leurs combats, ils les ont emmenés sur les lieux où avaient été versés tant de sang et de larmes, ils leur ont fait visiter les grands cimetières où tant de morts dorment sous les croix blanches.
Ils n'ont pas parlé à leurs enfants de gloire et de victoire. Ils n'ont pas dit à leurs enfants qu'ils étaient des héros. Ils leur ont parlé de souffrances, de sacrifices, des horreurs de la guerre. Ils ont voulu leur apprendre à détester la guerre et à aimer la paix...
Ils disaient à leurs enfants : « Plus jamais ça , plus jamais une telle horreur ».
Mais la guerre appelait la guerre, le meurtre appelait le meurtre. Dans le coeur de ceux qui avaient trop souffert, dans le coeur de ceux qui avaient été vaincus, un esprit de revanche, de vengeance et de haine grandissait. La folie s'empara de nouveau de l'Europe.
Les anciens combattants de la Grande Guerre qui avaient encore l'âge de se battre partirent le coeur lourd. Les autres regardèrent partir leurs enfants avec la même angoisse qu'éprouvaient leurs parents jadis en attendant leurs lettres écrites au fond des tranchées dans un instant de répit entre deux carnages. Tous se demandèrent pourquoi ils avaient tant souffert si c'était pour recommencer encore.
Et quand la guerre une fois de plus fut terminée, quand les portes des camps s'ouvrirent, quand l'entreprise de domination et d'extermination qui avait menacé l'Europe fut connue de tous, chacun en lui-même fut effrayé de ce qui s'était passé, chacun se sentit coupable de n'avoir pas fait assez pour l'empêcher.
Alors quelques-uns se levèrent au nom de tous ceux qui avaient péri dans ces deux guerres sanglantes, au nom des mutilés, au nom de ceux qui avaient connu l'horreur des camps, au nom des mères, des pères, des veuves, des enfants qui avaient pleuré ceux qui n'étaient jamais revenus.
Et ces hommes de bonne volonté se tendirent la main par-delà les frontières pour lesquelles tant de femmes et tant d'hommes avaient autant souffert.
Et les peuples les suivirent. Nul n'oublia les douleurs du passé, ni ses morts, ni ses souffrances. Mais nul ne demanda à l'autre d'expier ses fautes. Tous déclarèrent : soyons amis maintenant et pour toujours. Et ayant décidé de surmonter leurs blessures en ouvrant leurs coeurs, d'opposer l'amour à la haine, ils construisirent l'Europe. Qu'exprimait-elle d'autre en vérité que la volonté de regarder ensemble vers l'avenir pour des peuples las de tant de guerres qui les avaient portés jusqu'au bord de leur anéantissement matériel et moral ?
En ce 11 novembre, nous ne rendons pas seulement l'hommage de la Nation à tous les morts sur le champ de bataille, à travers les soldats héroïques qui sont allés jusqu'à l'extrême limite de leurs forces pour défendre la cause sacrée de la patrie.
Nous nous souvenons aussi que de tant de sang et de larmes est né un grand rêve de paix.
Tant que restera vivante la mémoire des grandes tragédies du XXe siècle, nul n'aura à craindre pour l'amitié qui lie entre eux les peuples européens. Maintenant que s'en vont les derniers témoins il nous faut continuer de faire vivre ce souvenir pour que nos enfants n'oublient jamais et pour qu'ils le transmettent à leur tour à leurs enfants.
Aujourd'hui en nous souvenant nous célébrons l'avenir. Un avenir de paix et de fraternité entre les nations. Un avenir de compréhension et de solidarité entre les peuples.
Cet avenir nous lui avons donné le nom d'Europe.
Quand la bataille a été finie, quand le silence s'est fait sur la terre où tant d'hommes s'étaient battus jusqu'à l'extrême limite de leurs forces, ceux qui avaient survécu ont déposé leurs armes, quitté leurs uniformes et sont rentrés chez eux.
Ils ont montré leurs blessures à leurs enfants. Ils ont raconté leurs combats, ils les ont emmenés sur les lieux où avaient été versés tant de sang et de larmes, ils leur ont fait visiter les grands cimetières où tant de morts dorment sous les croix blanches.
Ils n'ont pas parlé à leurs enfants de gloire et de victoire. Ils n'ont pas dit à leurs enfants qu'ils étaient des héros. Ils leur ont parlé de souffrances, de sacrifices, des horreurs de la guerre. Ils ont voulu leur apprendre à détester la guerre et à aimer la paix...
Ils disaient à leurs enfants : « Plus jamais ça , plus jamais une telle horreur ».
Mais la guerre appelait la guerre, le meurtre appelait le meurtre. Dans le coeur de ceux qui avaient trop souffert, dans le coeur de ceux qui avaient été vaincus, un esprit de revanche, de vengeance et de haine grandissait. La folie s'empara de nouveau de l'Europe.
Les anciens combattants de la Grande Guerre qui avaient encore l'âge de se battre partirent le coeur lourd. Les autres regardèrent partir leurs enfants avec la même angoisse qu'éprouvaient leurs parents jadis en attendant leurs lettres écrites au fond des tranchées dans un instant de répit entre deux carnages. Tous se demandèrent pourquoi ils avaient tant souffert si c'était pour recommencer encore.
Et quand la guerre une fois de plus fut terminée, quand les portes des camps s'ouvrirent, quand l'entreprise de domination et d'extermination qui avait menacé l'Europe fut connue de tous, chacun en lui-même fut effrayé de ce qui s'était passé, chacun se sentit coupable de n'avoir pas fait assez pour l'empêcher.
Alors quelques-uns se levèrent au nom de tous ceux qui avaient péri dans ces deux guerres sanglantes, au nom des mutilés, au nom de ceux qui avaient connu l'horreur des camps, au nom des mères, des pères, des veuves, des enfants qui avaient pleuré ceux qui n'étaient jamais revenus.
Et ces hommes de bonne volonté se tendirent la main par-delà les frontières pour lesquelles tant de femmes et tant d'hommes avaient autant souffert.
Et les peuples les suivirent. Nul n'oublia les douleurs du passé, ni ses morts, ni ses souffrances. Mais nul ne demanda à l'autre d'expier ses fautes. Tous déclarèrent : soyons amis maintenant et pour toujours. Et ayant décidé de surmonter leurs blessures en ouvrant leurs coeurs, d'opposer l'amour à la haine, ils construisirent l'Europe. Qu'exprimait-elle d'autre en vérité que la volonté de regarder ensemble vers l'avenir pour des peuples las de tant de guerres qui les avaient portés jusqu'au bord de leur anéantissement matériel et moral ?
En ce 11 novembre, nous ne rendons pas seulement l'hommage de la Nation à tous les morts sur le champ de bataille, à travers les soldats héroïques qui sont allés jusqu'à l'extrême limite de leurs forces pour défendre la cause sacrée de la patrie.
Nous nous souvenons aussi que de tant de sang et de larmes est né un grand rêve de paix.
Tant que restera vivante la mémoire des grandes tragédies du XXe siècle, nul n'aura à craindre pour l'amitié qui lie entre eux les peuples européens. Maintenant que s'en vont les derniers témoins il nous faut continuer de faire vivre ce souvenir pour que nos enfants n'oublient jamais et pour qu'ils le transmettent à leur tour à leurs enfants.
Aujourd'hui en nous souvenant nous célébrons l'avenir. Un avenir de paix et de fraternité entre les nations. Un avenir de compréhension et de solidarité entre les peuples.
Cet avenir nous lui avons donné le nom d'Europe.