Texte intégral
Je viens vous rendre compte des principales discussions que nous avons eues dans le cadre de ce Conseil qui n'est pas encore terminé. Je passe rapidement sur la partie "Affaires générales" qui n'a pas donné lieu à de véritables débats et sur laquelle il y a eu accord sur la préparation du Conseil européen de décembre et sur la présentation du livre bleu sur la politique maritime. Nous y avons apporté tout notre soutien. Nous ferons, en sorte au cours de la Présidence française, qu'il y ait une véritable stratégie de politique maritime et de surveillance maritime qui puisse se mettre en oeuvre. Pour ce qui a trait au programme de travail de la Commission pour 2008, il correspond, comme vous le savez, aux principales priorités de la Présidence française. C'est satisfaisant pour nous et cela nous permet d'envisager une très bonne coopération avec la Commission pour préparer la Présidence française.
Pour les aspects relatifs à la Politique étrangère et de sécurité, il y a eu une session conjointe avec les ministres de la Défense. Cela a permis de souligner les progrès qui ont été accomplis en matière de Politique européenne de sécurité et de défense, qui s'est affirmée comme étant efficace et crédible. Comme vous le savez, il y a eu plus de quinze opérations civiles et militaires menées dans les Balkans, en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. Nous sommes tombés d'accord pour dire qu'il fallait aller plus loin dans la définition des outils de cette politique. Nous pensons qu'il faut faire plus et qu'il faut faire mieux en matière de capacités. Nous avons, sur ce point, trouvé un accord lors de la réunion de ce matin.
En ce qui concerne les opérations au Tchad et en République centrafricaine, tout le monde a souligné l'urgence de la mise en place opérationnelle des forces, et a souligné que des efforts très importants avaient été accomplis dans un délai remarquablement bref. Il reste à finaliser la préparation de l'opération et à faire en sorte que les questions de mutualisation financière, notamment dans le mécanisme Athéna, puissent être réalisées rapidement. Une réunion est prévue mercredi pour trouver la meilleure répartition possible en termes financiers.
Les autres sujets traités ont eu trait à la préparation des sommets avec la Chine, l'Inde et l'Afrique, j'y reviendrai si vous le voulez. Au cours du déjeuner, l'accent a été mis sur les positions de l'Union européenne sur plusieurs sujets d'actualité. Notamment, sur le Pakistan où l'Union européenne a maintenu sa position ferme, a demandé la libération des prisonniers, a appelé à ce que l'état d'urgence soit levé et à ce que des élections se tiennent le plus rapidement possible. Il faut un véritable régime démocratique au Pakistan. Ce n'est pas seulement une question de démocratie interne au Pakistan mais il est important de prendre en compte la dimension géostratégique de ce pays, notamment au regard de ce qui se passe aux frontières, en particulier afghanes et en matière de lutte contre le terrorisme.
Autre point évoqué : la mission OSCE en Russie. Chacun a considéré que l'on devait faire en sorte, malgré tout, de maintenir la crédibilité du bureau de vérification des opérations électorales, le BIDDH. Il faut voir dans quelles conditions cette mission pourrait avoir lieu, notamment pour les prochains examens qui auront lieu lors de l'élection présidentielle russe. Nous avons souhaité montrer l'unité de l'Union face à ce problème et je crois que le président en titre de l'OSCE, M. Moratinos, devra faire en sorte de trouver des solutions appropriées pour qu'une présence du BIDDH soit malgré tout assurée en Russie.
En ce qui concerne le Moyen-Orient et le processus de paix, nous avons apporté notre plein soutien au plan d'action de l'Union européenne et salué la mission effectuée par M. Solana. Celui-ci a rappelé que nous tenions à ce que la Conférence d'Annapolis aboutisse à des propositions convaincantes sur la viabilité du futur Etat palestinien, sur la sécurité d'Israël et à des actions concrètes et rapides en faveur des populations civiles concernées. Comme vous le savez, nous avons également dit qu'au-delà de la Conférence d'Annapolis, nous souhaitions une préparation de la Conférence de Paris, dite "conférence des donateurs". L'ampleur de cette conférence à Paris dépendra des résultats d'Annapolis. Mais je crois que, sur la base de ce qu'ont indiqué Javier Solana et Benita Ferrero-Waldner, nous avons les moyens en tant qu'Union européenne de nous réinvestir activement dans le règlement final du conflit israélo-palestinien. C'est également ce qui ressort des conversations qui ont eu lieu entre Tony Blair et Bernard Kouchner. Bernard Kouchner, comme vous le savez, est absent aujourd'hui. Il était hier en Israël et en Palestine et il est aujourd'hui au Liban, dans le cadre de la préparation des élections présidentielles.
Nous avons eu un rapport fait par Javier Solana sur l'état des relations avec l'Iran. Il nous a redit ce que vous savez déjà : le rapport du directeur général de l'AIEA est pour le moins mitigé, il y a de nouvelles informations mais pas de suspension des activités nucléaires sensibles. Il y a beaucoup d'incertitudes qui demeurent et il n'y a toujours pas de mise en oeuvre de son protocole. Javier Solana espère rencontrer le négociateur iranien d'ici la fin de la semaine pour faire un point plus complet. Mais nous n'avons pas encore de réponses des Iraniens et, comme vous le savez, nous devons maintenir la pression internationale en ce qui concerne les sanctions et tenter de convaincre les Iraniens de négocier.
Enfin, nous avons reçu le ministre des Affaires étrangères irakien, M. Zebari. C'est une première. Cela montre - et nous l'avons salué en tant que tel - que le dialogue se renoue entre les autorités irakiennes et l'Union européenne. Il lui a été indiqué que nous étions prêts à porter notre soutien au processus de stabilisation et à l'aide aux populations irakiennes. Il y a un certain nombre de précisions, bien évidemment, qui ont été demandées sur l'action du PKK sur le territoire irakien. Le ministre des Affaires étrangères irakien a rappelé sa condamnation du mouvement, souligné l'autonomie de ce mouvement par rapport aux autorités irakiennes. Il a également souligné que la Conférence d'Istanbul avait été utile et avait montré que nous étions à un moment charnière en Irak. Il semble qu'il y ait des nouvelles qui marquent une certaine amélioration de la situation en termes de sécurité. De plus, sur les rapports de voisinage entretenus par l'Irak, avec l'Iran et la Syrie, un certain nombre de progrès ont été constatés. Nous l'avons, pour notre part, vivement encouragé à améliorer la situation en ce qui concerne le système judiciaire, à faire des efforts en ce qui concerne le respect des droits fondamentaux, et notamment tout ce qui est relatif à la suspension de la peine de mort. Voilà pour les observations qui ont pu être faites par les autorités françaises durant cette discussion. D'autres questions ont été abordées, sur le statut de Kirkouk ou sur les évolutions constitutionnelles envisagées ainsi que sur les évolutions en matière de législation sur les hydrocarbures.
Voilà quels ont été les principaux points de ce Conseil extrêmement nourri. Les discussions sont encore en cours en ce qui concerne le Kosovo avec la mission menée par M. Ischinger et sur la Bosnie. Voilà ce que je souhaitais vous indiquer.
Q - Comment cela se passe pour les Balkans ? Pouvez-vous nous faire un point de la situation? Autre question : sur Athéna, sur la mobilisation financière ?
R - Deux points sur le Kosovo. Ce que chacun salue, c'est le travail remarquable qui est accompli par M. Ischinger, et un soutien total à la Troïka. Il y a un certain nombre de pistes qui sont évoquées par la Troïka pour se préparer à l'échéance du 10 décembre. Notre sentiment est qu'aucune piste ne doit rester inexplorée d'ici le 10 décembre. Comme vous le savez, nous sommes à la veille d'une nouvelle rencontre, qui aura lieu ici, entre Kosovars et Serbes. La seule certitude, c'est que l'Union devra prendre ses responsabilités et développer une mission de PESD sur les aspects police, justice et douane, qui soit efficace, nécessaire à la stabilisation du Kosovo et à la crédibilité de l'Union européenne.
En ce qui concerne votre seconde question, le problème qui se pose est celui de la répartition du financement de la mission EUFOR au Tchad et en Centrafrique. Le problème est que nous souhaitons, étant principaux opérateurs, obtenir une mutualisation des financements et des efforts faits. C'est une mission qui est importante, comme le disent les spécialistes que j'ai entendus ce matin, même si ce n'est pas une mission à haute intensité. Ce n'est pas une mission qui présente les risques les plus importants mais c'est une mission de stabilisation qui est lourde et qui comporte des engagements humanitaires lourds. Il faut donc la financer. Il faut essayer de trouver, mercredi prochain, la meilleure clé de financement étant entendu que le principe de mutualisation a été accepté par la France dans le cadre de l'OTAN en ce qui concerne les opérations de stabilisation et de maintien de l'ordre en Afghanistan. Nous attendons donc que, dans le cadre de la Politique européenne de sécurité et de défense, le même principe de mutualisation soit respecté.
Q - Au sujet du refus britannique de doter l'Agence européenne de défense d'un budget pluriannuel. Est-ce compatible avec leur volonté de relancer la politique de défense ?
R - De ce que j'ai compris, il ne me semble pas que la situation soit aussi nette que vous l'ayez décrite. Il y a quand même une compréhension des Britanniques sur la possibilité de renforcer les moyens de l'Agence européenne de Défense. Lors de la réunion de ce matin, nous avons progressé dans ce domaine.
Q - Sur le Kosovo. Vous avez dit que l'Union européenne doit prendre ses responsabilités. Quelle sera la solution au problème du Kosovo ? Il y a-t-il un consensus quant à la mission de l'Union s'il y a une déclaration unilatérale d'indépendance ou non ?
R - Cela dépend de la situation à laquelle nous serons confrontés. Mais nous sommes là pour assurer la stabilisation, notamment dans le cas où il y aurait une déclaration unilatérale d'indépendance. Cela nous paraît important de développer cette mission et ce sera le symbole de l'unité de l'Union européenne. Il peut y avoir des divergences d'appréciation entre les Européens, il peut y avoir des attitudes différentes en terme de délais. Mais il y a deux points de consensus : ne négliger aucune des voies d'accord d'ici le 10 décembre et au cas où, postérieurement au 10 décembre, nous nous trouverions dans une situation qui n'a pas permis de trouver d'accord, que nous puissions prendre nos responsabilités et assurer une mission de stabilisation. Je pense que sur ces deux points, il y a un accord.
Q - Quelle est la base juridique de cette opération ?
R - La base juridique dans le cadre de cette opération dépendra de ce que l'on pourra trouver dans le cadre des Nations unies.
Q - Sur la mutualisation. En gros, vous demandez aux Etats qui n'envoient pas de troupes - on ne les citera pas, par exemple l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni - de verser plus d'argent ?
R - Ne citez personne. Ce que l'on demande c'est effectivement qu'il y ait tout au moins des contributions financières pour montrer l'engagement européen. Ceci, comme je vous le dis, a eu lieu dans le cadre d'autres opérations et notamment en Afghanistan.
Q - Sur le Kosovo : y a t-il de nouvelles pistes évoquées ? Si oui, lesquelles ?
R - Il appartient aux membres de la Troïka de vous le dire. Toutes ces pistes tournent autour du maintien d'un lien entre la Serbie et le Kosovo, et sur le fait qu'il y ait dans un cadre à déterminer des relations qui puissent exister entre la Serbie et une nouvelle entité. C'est autour de ces éléments que s'articulent les principales pistes de réflexion.
Q - Ce sont toujours les 14 points, il n'y a pas de modifications ?
R - Il n'y a pas de nouveautés, mais M. Ischinger fait vraiment preuve de beaucoup d'imagination. Et c'est bien.
Q - Et si cela ne marche pas ?
R - Si cela ne marche pas, on se retrouve dans la situation que j'ai décrite tout à l'heure.
Q - L'ambassadeur Ischinger a parlé tout à l'heure de la nécessité d'être ensemble, de maintenir l'unité. Croyez-vous que cela est possible ? Que s'il y a une déclaration unilatérale d'indépendance du coté kosovar tous les pays de l'Union européenne vont être ensemble et accepter cette déclaration unilatérale d'indépendance ?
R - Le problème n'est pas tant de savoir à quel moment tout cela sera fait. Si cet événement que vous décrivez se produit, les uns et les autres se prononceront sur cet acte. L'important c'est qu'il n'y ait pas de précipitation. L'important c'est de faire en sorte que nous prenions nos responsabilités pour assurer la stabilisation. C'est là-dessus que l'on jugera la crédibilité de l'Union européenne, de la politique extérieure de sécurité et de défense. C'est donc sur ce point là, fondamentalement, que doit s'assurer l'unité. Par ailleurs, nous devons donner, dans ce cadre, des perspectives à la Serbie. Ce n'est pas un troc entre l'Europe et le Kosovo pour la Serbie. Cela, nous le savons parfaitement. Mais nous devons donner à la Serbie des perspectives en ce qui concerne la place qu'elle devra avoir dans l'Union européenne. Elle a, pour nous, toute sa place dans l'Union européenne à terme. Comme vous le savez, il y a déjà un progrès puisqu'il y a eu un paraphe de l'accord de stabilisation et d'association. Nous sommes prêts à aller au-delà si, d'une part, la coopération avec le Tribunal pénal international est reconnue pleine et entière par les autorités de ce tribunal et, d'autre part, si la question kosovare est résolue de la manière la plus sage possible. Voilà ce que nous demandons. Mais en même temps nous avons bien conscience qu'il convient d'aider le plus possible ceux qui en Serbie font le plus preuve de responsabilités parce que nous risquons de nous retrouver avec un problème extrêmement délicat à gérer. Nous souhaitons, de ce point de vue, aider le plus possible la Serbie à montrer le plus de compréhension possible.
Q - Est-ce que la Russie peut mettre un veto au Conseil de sécurité des Nations unies pour la mission européenne ?
R - Elle peut mettre un veto dans le cadre d'une résolution sur les Nations unies. Ce serait à nous de voir ce que nous faisons s'il n'y a pas de résolution. C'est en cela que je dis qu'il appartiendra à l'Union de prendre ses responsabilités en début d'année. Nous souhaitons qu'il y ait une résolution aux Nations unies, nous souhaitons agir sur la base d'une résolution des Nations unies mais nous souhaitons également faire en sorte que la stabilisation soit assurée au cas où il y aurait une déclaration unilatérale d'indépendance.
Q - Est-ce que, en l'absence d'une résolution de l'ONU, l'UE pourrait quand même lancer cette opération ?
R - Les débats sont encore en cours et donc je ne peux pas vous apporter la réponse la plus complète possible
Q - Est-ce que les Serbes agréent à l'idée d'une force européenne ?
R - C'est une bonne question. Nous la traiterons le moment venu. Mais ce qui me paraît clair c'est que tout le monde a intérêt à la stabilisation. De toutes les façons, nous n'échapperons pas à ces responsabilités, nous les prendrons le moment venu. Parce que l'Europe ne peut pas en être absente.
Q - Si la Belgique se sépare, vous en avez parlé ?
R - Non, on ne parle pas de probl??mes internes, nous avons suffisamment à faire comme cela.
Q - Par rapport à l'observation des élections en Russie. Est-ce pour les élections législatives, les élections présidentielles ou plus tard ?
R - Ce qui a été dit, c'est qu'il était important de conserver la crédibilité du BIDDH. Il y a eu peut-être des problèmes de forme sur lesquels je ne veux pas entrer. Mais indépendamment des problèmes de formes, nous ne devons pas transiger sur les principes. Le BIDDH doit être présent. Il y a plusieurs formes de présence. Ce que l'on a demandé au président de l'OSCE, c'est de rechercher encore tous les moyens de présence du BIDDH y compris dans le cadre de missions techniques limitées, de voir avec le secrétaire général du BIDDH ce qu'il est possible de faire mais d'essayer d'assurer une mission technique, si possible pour les législatives, bien que les délais soient brefs mais en tout cas aux présidentielles. Et là, l'Union doit également marquer son unité, il en va du processus de surveillance des opérations électorales dans l'ensemble des pays où l'OSCE intervient. C'est la crédibilité de l'outil qui est enjeu. Quelles que soient les missions parlementaires qui peuvent être envoyées par ailleurs, seul cet outil est crédible en matière de surveillance des opérations électorales. Seul le BIDDH a la technicité voulue pour conduire ces opérations.
Q - Vous avez appelé la Serbie à être responsable. Quelle est votre position face aux déclarations faites au Kosovo d'une intention de déclarer, immédiatement après le 10 décembre, l'indépendance ?
R - Nous avons demandé de la retenue et de la sagesse par rapport à ces déclarations.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 novembre 2007
Pour les aspects relatifs à la Politique étrangère et de sécurité, il y a eu une session conjointe avec les ministres de la Défense. Cela a permis de souligner les progrès qui ont été accomplis en matière de Politique européenne de sécurité et de défense, qui s'est affirmée comme étant efficace et crédible. Comme vous le savez, il y a eu plus de quinze opérations civiles et militaires menées dans les Balkans, en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. Nous sommes tombés d'accord pour dire qu'il fallait aller plus loin dans la définition des outils de cette politique. Nous pensons qu'il faut faire plus et qu'il faut faire mieux en matière de capacités. Nous avons, sur ce point, trouvé un accord lors de la réunion de ce matin.
En ce qui concerne les opérations au Tchad et en République centrafricaine, tout le monde a souligné l'urgence de la mise en place opérationnelle des forces, et a souligné que des efforts très importants avaient été accomplis dans un délai remarquablement bref. Il reste à finaliser la préparation de l'opération et à faire en sorte que les questions de mutualisation financière, notamment dans le mécanisme Athéna, puissent être réalisées rapidement. Une réunion est prévue mercredi pour trouver la meilleure répartition possible en termes financiers.
Les autres sujets traités ont eu trait à la préparation des sommets avec la Chine, l'Inde et l'Afrique, j'y reviendrai si vous le voulez. Au cours du déjeuner, l'accent a été mis sur les positions de l'Union européenne sur plusieurs sujets d'actualité. Notamment, sur le Pakistan où l'Union européenne a maintenu sa position ferme, a demandé la libération des prisonniers, a appelé à ce que l'état d'urgence soit levé et à ce que des élections se tiennent le plus rapidement possible. Il faut un véritable régime démocratique au Pakistan. Ce n'est pas seulement une question de démocratie interne au Pakistan mais il est important de prendre en compte la dimension géostratégique de ce pays, notamment au regard de ce qui se passe aux frontières, en particulier afghanes et en matière de lutte contre le terrorisme.
Autre point évoqué : la mission OSCE en Russie. Chacun a considéré que l'on devait faire en sorte, malgré tout, de maintenir la crédibilité du bureau de vérification des opérations électorales, le BIDDH. Il faut voir dans quelles conditions cette mission pourrait avoir lieu, notamment pour les prochains examens qui auront lieu lors de l'élection présidentielle russe. Nous avons souhaité montrer l'unité de l'Union face à ce problème et je crois que le président en titre de l'OSCE, M. Moratinos, devra faire en sorte de trouver des solutions appropriées pour qu'une présence du BIDDH soit malgré tout assurée en Russie.
En ce qui concerne le Moyen-Orient et le processus de paix, nous avons apporté notre plein soutien au plan d'action de l'Union européenne et salué la mission effectuée par M. Solana. Celui-ci a rappelé que nous tenions à ce que la Conférence d'Annapolis aboutisse à des propositions convaincantes sur la viabilité du futur Etat palestinien, sur la sécurité d'Israël et à des actions concrètes et rapides en faveur des populations civiles concernées. Comme vous le savez, nous avons également dit qu'au-delà de la Conférence d'Annapolis, nous souhaitions une préparation de la Conférence de Paris, dite "conférence des donateurs". L'ampleur de cette conférence à Paris dépendra des résultats d'Annapolis. Mais je crois que, sur la base de ce qu'ont indiqué Javier Solana et Benita Ferrero-Waldner, nous avons les moyens en tant qu'Union européenne de nous réinvestir activement dans le règlement final du conflit israélo-palestinien. C'est également ce qui ressort des conversations qui ont eu lieu entre Tony Blair et Bernard Kouchner. Bernard Kouchner, comme vous le savez, est absent aujourd'hui. Il était hier en Israël et en Palestine et il est aujourd'hui au Liban, dans le cadre de la préparation des élections présidentielles.
Nous avons eu un rapport fait par Javier Solana sur l'état des relations avec l'Iran. Il nous a redit ce que vous savez déjà : le rapport du directeur général de l'AIEA est pour le moins mitigé, il y a de nouvelles informations mais pas de suspension des activités nucléaires sensibles. Il y a beaucoup d'incertitudes qui demeurent et il n'y a toujours pas de mise en oeuvre de son protocole. Javier Solana espère rencontrer le négociateur iranien d'ici la fin de la semaine pour faire un point plus complet. Mais nous n'avons pas encore de réponses des Iraniens et, comme vous le savez, nous devons maintenir la pression internationale en ce qui concerne les sanctions et tenter de convaincre les Iraniens de négocier.
Enfin, nous avons reçu le ministre des Affaires étrangères irakien, M. Zebari. C'est une première. Cela montre - et nous l'avons salué en tant que tel - que le dialogue se renoue entre les autorités irakiennes et l'Union européenne. Il lui a été indiqué que nous étions prêts à porter notre soutien au processus de stabilisation et à l'aide aux populations irakiennes. Il y a un certain nombre de précisions, bien évidemment, qui ont été demandées sur l'action du PKK sur le territoire irakien. Le ministre des Affaires étrangères irakien a rappelé sa condamnation du mouvement, souligné l'autonomie de ce mouvement par rapport aux autorités irakiennes. Il a également souligné que la Conférence d'Istanbul avait été utile et avait montré que nous étions à un moment charnière en Irak. Il semble qu'il y ait des nouvelles qui marquent une certaine amélioration de la situation en termes de sécurité. De plus, sur les rapports de voisinage entretenus par l'Irak, avec l'Iran et la Syrie, un certain nombre de progrès ont été constatés. Nous l'avons, pour notre part, vivement encouragé à améliorer la situation en ce qui concerne le système judiciaire, à faire des efforts en ce qui concerne le respect des droits fondamentaux, et notamment tout ce qui est relatif à la suspension de la peine de mort. Voilà pour les observations qui ont pu être faites par les autorités françaises durant cette discussion. D'autres questions ont été abordées, sur le statut de Kirkouk ou sur les évolutions constitutionnelles envisagées ainsi que sur les évolutions en matière de législation sur les hydrocarbures.
Voilà quels ont été les principaux points de ce Conseil extrêmement nourri. Les discussions sont encore en cours en ce qui concerne le Kosovo avec la mission menée par M. Ischinger et sur la Bosnie. Voilà ce que je souhaitais vous indiquer.
Q - Comment cela se passe pour les Balkans ? Pouvez-vous nous faire un point de la situation? Autre question : sur Athéna, sur la mobilisation financière ?
R - Deux points sur le Kosovo. Ce que chacun salue, c'est le travail remarquable qui est accompli par M. Ischinger, et un soutien total à la Troïka. Il y a un certain nombre de pistes qui sont évoquées par la Troïka pour se préparer à l'échéance du 10 décembre. Notre sentiment est qu'aucune piste ne doit rester inexplorée d'ici le 10 décembre. Comme vous le savez, nous sommes à la veille d'une nouvelle rencontre, qui aura lieu ici, entre Kosovars et Serbes. La seule certitude, c'est que l'Union devra prendre ses responsabilités et développer une mission de PESD sur les aspects police, justice et douane, qui soit efficace, nécessaire à la stabilisation du Kosovo et à la crédibilité de l'Union européenne.
En ce qui concerne votre seconde question, le problème qui se pose est celui de la répartition du financement de la mission EUFOR au Tchad et en Centrafrique. Le problème est que nous souhaitons, étant principaux opérateurs, obtenir une mutualisation des financements et des efforts faits. C'est une mission qui est importante, comme le disent les spécialistes que j'ai entendus ce matin, même si ce n'est pas une mission à haute intensité. Ce n'est pas une mission qui présente les risques les plus importants mais c'est une mission de stabilisation qui est lourde et qui comporte des engagements humanitaires lourds. Il faut donc la financer. Il faut essayer de trouver, mercredi prochain, la meilleure clé de financement étant entendu que le principe de mutualisation a été accepté par la France dans le cadre de l'OTAN en ce qui concerne les opérations de stabilisation et de maintien de l'ordre en Afghanistan. Nous attendons donc que, dans le cadre de la Politique européenne de sécurité et de défense, le même principe de mutualisation soit respecté.
Q - Au sujet du refus britannique de doter l'Agence européenne de défense d'un budget pluriannuel. Est-ce compatible avec leur volonté de relancer la politique de défense ?
R - De ce que j'ai compris, il ne me semble pas que la situation soit aussi nette que vous l'ayez décrite. Il y a quand même une compréhension des Britanniques sur la possibilité de renforcer les moyens de l'Agence européenne de Défense. Lors de la réunion de ce matin, nous avons progressé dans ce domaine.
Q - Sur le Kosovo. Vous avez dit que l'Union européenne doit prendre ses responsabilités. Quelle sera la solution au problème du Kosovo ? Il y a-t-il un consensus quant à la mission de l'Union s'il y a une déclaration unilatérale d'indépendance ou non ?
R - Cela dépend de la situation à laquelle nous serons confrontés. Mais nous sommes là pour assurer la stabilisation, notamment dans le cas où il y aurait une déclaration unilatérale d'indépendance. Cela nous paraît important de développer cette mission et ce sera le symbole de l'unité de l'Union européenne. Il peut y avoir des divergences d'appréciation entre les Européens, il peut y avoir des attitudes différentes en terme de délais. Mais il y a deux points de consensus : ne négliger aucune des voies d'accord d'ici le 10 décembre et au cas où, postérieurement au 10 décembre, nous nous trouverions dans une situation qui n'a pas permis de trouver d'accord, que nous puissions prendre nos responsabilités et assurer une mission de stabilisation. Je pense que sur ces deux points, il y a un accord.
Q - Quelle est la base juridique de cette opération ?
R - La base juridique dans le cadre de cette opération dépendra de ce que l'on pourra trouver dans le cadre des Nations unies.
Q - Sur la mutualisation. En gros, vous demandez aux Etats qui n'envoient pas de troupes - on ne les citera pas, par exemple l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni - de verser plus d'argent ?
R - Ne citez personne. Ce que l'on demande c'est effectivement qu'il y ait tout au moins des contributions financières pour montrer l'engagement européen. Ceci, comme je vous le dis, a eu lieu dans le cadre d'autres opérations et notamment en Afghanistan.
Q - Sur le Kosovo : y a t-il de nouvelles pistes évoquées ? Si oui, lesquelles ?
R - Il appartient aux membres de la Troïka de vous le dire. Toutes ces pistes tournent autour du maintien d'un lien entre la Serbie et le Kosovo, et sur le fait qu'il y ait dans un cadre à déterminer des relations qui puissent exister entre la Serbie et une nouvelle entité. C'est autour de ces éléments que s'articulent les principales pistes de réflexion.
Q - Ce sont toujours les 14 points, il n'y a pas de modifications ?
R - Il n'y a pas de nouveautés, mais M. Ischinger fait vraiment preuve de beaucoup d'imagination. Et c'est bien.
Q - Et si cela ne marche pas ?
R - Si cela ne marche pas, on se retrouve dans la situation que j'ai décrite tout à l'heure.
Q - L'ambassadeur Ischinger a parlé tout à l'heure de la nécessité d'être ensemble, de maintenir l'unité. Croyez-vous que cela est possible ? Que s'il y a une déclaration unilatérale d'indépendance du coté kosovar tous les pays de l'Union européenne vont être ensemble et accepter cette déclaration unilatérale d'indépendance ?
R - Le problème n'est pas tant de savoir à quel moment tout cela sera fait. Si cet événement que vous décrivez se produit, les uns et les autres se prononceront sur cet acte. L'important c'est qu'il n'y ait pas de précipitation. L'important c'est de faire en sorte que nous prenions nos responsabilités pour assurer la stabilisation. C'est là-dessus que l'on jugera la crédibilité de l'Union européenne, de la politique extérieure de sécurité et de défense. C'est donc sur ce point là, fondamentalement, que doit s'assurer l'unité. Par ailleurs, nous devons donner, dans ce cadre, des perspectives à la Serbie. Ce n'est pas un troc entre l'Europe et le Kosovo pour la Serbie. Cela, nous le savons parfaitement. Mais nous devons donner à la Serbie des perspectives en ce qui concerne la place qu'elle devra avoir dans l'Union européenne. Elle a, pour nous, toute sa place dans l'Union européenne à terme. Comme vous le savez, il y a déjà un progrès puisqu'il y a eu un paraphe de l'accord de stabilisation et d'association. Nous sommes prêts à aller au-delà si, d'une part, la coopération avec le Tribunal pénal international est reconnue pleine et entière par les autorités de ce tribunal et, d'autre part, si la question kosovare est résolue de la manière la plus sage possible. Voilà ce que nous demandons. Mais en même temps nous avons bien conscience qu'il convient d'aider le plus possible ceux qui en Serbie font le plus preuve de responsabilités parce que nous risquons de nous retrouver avec un problème extrêmement délicat à gérer. Nous souhaitons, de ce point de vue, aider le plus possible la Serbie à montrer le plus de compréhension possible.
Q - Est-ce que la Russie peut mettre un veto au Conseil de sécurité des Nations unies pour la mission européenne ?
R - Elle peut mettre un veto dans le cadre d'une résolution sur les Nations unies. Ce serait à nous de voir ce que nous faisons s'il n'y a pas de résolution. C'est en cela que je dis qu'il appartiendra à l'Union de prendre ses responsabilités en début d'année. Nous souhaitons qu'il y ait une résolution aux Nations unies, nous souhaitons agir sur la base d'une résolution des Nations unies mais nous souhaitons également faire en sorte que la stabilisation soit assurée au cas où il y aurait une déclaration unilatérale d'indépendance.
Q - Est-ce que, en l'absence d'une résolution de l'ONU, l'UE pourrait quand même lancer cette opération ?
R - Les débats sont encore en cours et donc je ne peux pas vous apporter la réponse la plus complète possible
Q - Est-ce que les Serbes agréent à l'idée d'une force européenne ?
R - C'est une bonne question. Nous la traiterons le moment venu. Mais ce qui me paraît clair c'est que tout le monde a intérêt à la stabilisation. De toutes les façons, nous n'échapperons pas à ces responsabilités, nous les prendrons le moment venu. Parce que l'Europe ne peut pas en être absente.
Q - Si la Belgique se sépare, vous en avez parlé ?
R - Non, on ne parle pas de probl??mes internes, nous avons suffisamment à faire comme cela.
Q - Par rapport à l'observation des élections en Russie. Est-ce pour les élections législatives, les élections présidentielles ou plus tard ?
R - Ce qui a été dit, c'est qu'il était important de conserver la crédibilité du BIDDH. Il y a eu peut-être des problèmes de forme sur lesquels je ne veux pas entrer. Mais indépendamment des problèmes de formes, nous ne devons pas transiger sur les principes. Le BIDDH doit être présent. Il y a plusieurs formes de présence. Ce que l'on a demandé au président de l'OSCE, c'est de rechercher encore tous les moyens de présence du BIDDH y compris dans le cadre de missions techniques limitées, de voir avec le secrétaire général du BIDDH ce qu'il est possible de faire mais d'essayer d'assurer une mission technique, si possible pour les législatives, bien que les délais soient brefs mais en tout cas aux présidentielles. Et là, l'Union doit également marquer son unité, il en va du processus de surveillance des opérations électorales dans l'ensemble des pays où l'OSCE intervient. C'est la crédibilité de l'outil qui est enjeu. Quelles que soient les missions parlementaires qui peuvent être envoyées par ailleurs, seul cet outil est crédible en matière de surveillance des opérations électorales. Seul le BIDDH a la technicité voulue pour conduire ces opérations.
Q - Vous avez appelé la Serbie à être responsable. Quelle est votre position face aux déclarations faites au Kosovo d'une intention de déclarer, immédiatement après le 10 décembre, l'indépendance ?
R - Nous avons demandé de la retenue et de la sagesse par rapport à ces déclarations.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 novembre 2007