Déclaration de M. Patrick Devedjian, secrétaire général de l'UMP, sur les ambitions de l'UMP et les enjeux des élections municipales de 2008, Pornic le 10 novembre 2007.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion du Conseil national de l'UMP "Forum Grand-Ouest" à Pornic (Loire-Atlantique), le 10 novembre 2007

Texte intégral

Mes chers amis
Je veux d'abord vous dire que je suis très sensible à votre invitation.
J'aurais pu être tenté de vous laisser entre gens de bonne compagnie.
Mais j'ai trop à vous dire.
Je suis venu avec les clés de la maison.
Non pas les clés, au sens propre, celles que m'a laissées Nicolas Sarkozy, mais les clés de son avenir.
Et je voudrais vous faire partager cette réflexion.

Nous sommes entrés dans une nouvelle ère.
La rupture, chère au candidat Sarkozy, est consommée.
Le politique est en train de reprendre le pouvoir.
Nous avons quitté l'ère des cols amidonnés, de la distance et de la froideur. Nous faisons de la politique autrement.
Les Français l'ont compris. Ils sont en train de se réconcilier avec la politique.
Mais ce n'est pas gagné. Ce n'est jamais gagné. Ce n'est pas le moment de baisser la garde.

François Fillon nous l'a rappelé à l'Assemblée nationale : nous allons entrer dans une zone de turbulence.
Il faudra toute la détermination de Nicolas Sarkozy, le doigté et le sang froid du pilote François Fillon et, j'ajoute, le soutien du peuple de France pour accomplir la traversée qui nous sépare encore de la France de demain, de la France réformée.

Le soutien du peuple de France, il commence par nous.
La grande famille de la droite. L'UMP!

Les médias, accrochés aux basques du nouveau Président de la République, à la fois subjugués par ce style inattendu, cette façon de faire de la politique au pas de charge et en première ligne, sont à l'affût du moindre faux pas.
Une tête dépasse. Et comme nous sommes en France, il est bien naturel qu'on attende la chute.
La France retient son souffle.

Et si cet homme restait debout ?
Il va rester debout !
Et nous devons l'y aider.
Vous allez l'y aider.
Comme vous l'avez aidé à accéder aux plus hautes responsabilités.
Mais pour cela, nous allons devoir muer.
Nous avons été un parti de conquête. Nous allons devenir un parti de vie.
Nous voulons transformer la France, cela suppose d'abord de nous transformer.
Ce qui est valable pour le pays est valable pour l'UMP.
" Vous devez être le changement que vous voulez voir dans ce monde ", disait Gandhi.

Vous le savez, la victoire comporte le risque du conservatisme.
Nos idées ont triomphé, cela ne nous autorise en aucun cas à nous asseoir dans une posture auto-satisfaite.
Au contraire, nous devons impérativement et sans cesse nous remettre en question.
Ce que le peuple de France nous a confié, ce n'est pas les pleins pouvoirs, c'est le droit d'affirmer, en son nom, la dynamique du changement.
Nos familles d'origine, le RPR et l'UDF - avec toutes ses composantes, du centre aux libéraux - ont réussi à fusionner.

L'efficacité électorale a eu lieu, mais si nous en restons là, nous ne pouvons pas prétendre à une autre dimension, plus universelle.
Il faut développer chez nous un nouvel état d'esprit, une nouvelle culture politique.
Quand Nicolas Sarkozy a pris en main l'UMP, c'était un parti de circonstance. Nous étions 100 000.
Il en a fait un parti de conquête. Il l'a habité. Il l'a emmené vers la victoire. De sorte que nous étions plus de 230 000, quand il nous a laissé les rênes de l'UMP pour présider au destin de notre pays.
Depuis, nous avons accueilli 100 000 cotisations. 100 000 personnes qui, la victoire acquise, sont venues nous rejoindre.
Qu'est-ce que cela signifie ? Qu'un souffle se poursuit, que l'UMP est devenu un mouvement permanent.
Un grand mouvement populaire !

Alors, la question que nous devons aujourd'hui nous poser, la seule question qui vaille, c'est : " Comment faire vivre le P de Populaire ? "

En faisant vivre le parti !

Et c'est là l'essentiel de votre rôle que d'animer un laboratoire d'idées.
Mais attention : la discipline qui prévaut pour la bataille électorale ne doit pas devenir un corset intellectuel une fois le combat terminé.
L'addition de nos forces ne saurait se traduire en une addition d'idées.
Les idées ne s'additionnent pas, elles se confrontent. Et c'est dans la confrontation qu'elles s'affinent et que les solutions s'ébauchent.
C'est votre rôle. Nourrir le débat. Refléter l'âme de la nation. Débattre, discuter. Faire des propositions.
La parenté qui relie nos familles d'origine ne doit pas nous réduire à rechercher en toute chose le plus petit dénominateur commun. Ca, c'est ce qui conduit à la pensée unique. Et nous n'en voulons plus.
Si Nicolas Sarkozy à souhaité me confier la tâche de poursuivre son oeuvre au sein de notre mouvement, c'est bien sûr parce qu'il me fait confiance, mais c'est aussi parce qu'il connaît mon attachement à la liberté de pensée.
Comme président de l'UMP, Nicolas Sarkozy a atteint son ambition : en faire le premier parti de France.
Comme président de la République, il a l'ambition de faire de la France le leader de l'Europe.
Nous nous devons, dans son sillage, de faire de l'UMP "le" grand parti européen, "la" référence en matière de grand parti populaire !
Si nous voulons changer de braquet, nous devons, impérativement nous élever au dessus de nos divergences.
Et, permettez-moi cette mise en garde : l'UMP, ce n'est pas un bastion que seuls seraient autorisés à revendiquer ceux qui étaient là "avant".
C'est un lieu de rencontre. C'est un lieu d'ouverture. C'est un état d'esprit qui doit se hisser au-dessus, bien au-dessus de nos spécificités, de nos mentalités et de nos tempéraments.
La fusion réussie, ce sera celle de l'énergie, de l'organisation, du volontarisme qui a fait l'efficacité du RPR, et de l'ouverture d'esprit, de tolérance qui a fait les beaux jours de l'UDF.
Si nous voulons faire de l'UMP le grand parti populaire français, il faut pouvoir y entrer comme dans une auberge espagnole. Non pas avec l'idée d'une joyeuse pagaille, mais comme dans un endroit où chacun est le bienvenu avec ce qu'il a, avec ce qu'il est.
L'UMP doit être le lieu d'un grand brassage sociologique.
L'UMP ne doit être le parti de personne en particulier, d'aucune caste, d'aucun milieu.
Nous aurons peut-être réussi notre pari le jour où les instituts de sondage ne seront plus capables de dire qui vote pour l'UMP.
L'UMP, ce doit être un miroir de la France d'aujourd'hui. Dans toute sa diversité. L'UMP, c'est la parti de toutes les familles françaises, de tous les métiers, de tous les âges et de toutes les races, celui où ont lieu les débats de notre temps.
C'est le parti de toutes les bonnes volontés, de ceux qui ont en commun de partager nos choix de société.
Le point de rencontre de ceux qui se reconnaissent dans les orientations fondamentales incarnées par Nicolas Sarkozy.

Les aspirations du peuple évoluent. Nous devons les entendre, les traduire. C'est la meilleure façon de nous rendre utiles.
Nous devons marcher au devant du Gouvernement, défricher le terrain, sentir l'air du temps, le comprendre.
Nous devons être une force de propositions.
Il faut précéder l'opinion. Pas courir derrière elle.
Pendant la campagne présidentielle, Madame Royal a fait un tour de France dans une pure optique de marketing politique. C'est à dire qu'elle est allée demander à nos concitoyens ce qu'ils voulaient qu'elle dise. Et elle l'a dit.
Hélas, trois fois hélas !
Hélas, parce que les Français lui ont dit ce qu'ils souhaitaient.
Hélas, parce que ce qu'ils souhaitaient était contraire aux idées du parti socialiste.
Hélas, parce que ce que voulaient les Français, c'est ce qu'incarnait Nicolas Sarkozy.
Pas seulement ses idées. Les nôtres. Ses idées et une adéquation entre nos idées et la personne qui les porte.
En un mot, un homme vrai. Sincère. Avec de la chair, avec des sentiments, un homme avec ses blessures, ses failles, son énergie et son caractère.
Un homme porté par le goût de la réussite et l'amour de son pays.
Un être incarné pour incarner une politique.
Il affirmait son style, et toute son humanité, quand le Parti Socialiste n'était préoccupé, je le cite, que de changer son « logiciel » .
Dans le même moment, François Bayrou donnait à son nouveau parti un nom très poétique : le Modem.
Entre ces délicieuses alternatives informatiques, le peuple a tranché. Il a choisi un homme.
Avec notre contribution, avec Votre contribution, Nicolas Sarkozy a dessiné une vision de le France qui s'est traduite par 15 engagements.
Parmi lesquels « mettre fin à l'impuissance publique » et garantir à nos concitoyens « Une démocratie irréprochable ».
Deux engagements impliquant à eux seuls l'impérieuse obligation d'honorer ses engagements.
C'est ce qui nous a donné l'idée, pour continuer de tenir notre rôle, de créer le Tableau de bord que nous avons mis en ligne le 6 novembre sur le site Internet de l'UMP.
Il ne s'agit nullement de contrôler l'action du Gouvernement. Ca, c'est le rôle du parlement.
Ce Tableau de bord, ouvert à chacun d'entre vous, et accessible à tous nos concitoyens, c'est le moyen de visualiser en permanence l'état d'avancement des 15 engagements pris par Nicolas Sarkozy, Président de la République.
Ce n'est pas non plus un instrument de propagande. Vous n'y trouverez pas d'opinion, politique ou philosophique, de jugement sur ce qui est fait ou à faire, mais uniquement des faits concrets, scrupuleusement datés et sourcés.
Ce Tableau de bord, que je vous invite tous à découvrir et à consulter, est un instrument destiné à retracer la mise en oeuvre des réformes entreprises, d'en mesurer les étapes, et le degré de leur réussite.
C'est pour nous l'instrument d'une autocritique salutaire.
Et vis à vis de nos concitoyens le témoin de notre bonne foi.
Je vous précise qu'un blog y est associé, où vous êtes invités à vous exprimer. Nous avons bien l'intention de tenir compte de ce qui y est dit. Et je crois savoir que le Gouvernement aussi.
C'est une première dans l'histoire des partis politiques. Une première mondiale, sans doute sur ce plan là.
C'est un baromètre pour nous, comme pour le Président de la République.
Un bel instrument de crédibilité.
Nous faisons, au fond, ce qu'aurait dû faire la gauche, si elle avait été capable de nous prendre au mot. Mais la gauche française reste en mauvais termes avec le réel.
Cela dit, ne nous voilons pas la face.
Le PS, aujourd'hui, est en ruine. Mais, n'en doutons pas un instant, il va se reconstruire. Et prendre certainement le chemin qu'ont emprunté avant lui toutes les gauches européennes qui gouvernent aujourd'hui : celui du pragmatisme.
Je l'y encourage et j'y aspire, pour le bien du pays. Même s'il deviendra alors très dangereux pour nous.
Comme il sait l'être parfois au plan local.
Alors, au plan local, ici, puisque c'est le sujet qui nous occupe aujourd'hui, comment cela se traduit-il ?
Autant vous le dire tout de suite, je n'ai pas l'intention, arrivant de Paris, de vous dire ce que vous avez à faire pour répondre concrètement à la spécificité électorale du Grand Ouest.
Nous sommes ici dans une sociologie particulière. Une région pas tout à fait désenclavée.
Le TGV s'arrête à Nantes. Là où le Jacobinisme s'essouffle. Les Verts n'ont pas voulu aller plus loin. Comme si l'ouest n'avait pas véritablement besoin d'être relié à la modernité.
Et, au fond, il me semble que c'est un peu ça, le Grand Ouest. Le pays des travailleurs pauvres. Celui où l'on ne se plaint pas. On l'on ne proteste que lorsqu'on est exaspéré. A l'image des marins, qui voient le prix du pétrole augmenter et leur pouvoir d'achat baisser sans cesse.
Ici, on n'est pas assis sur des puits de pétrole. On se lève tôt le matin pour aller se faire gifler par les embruns.
Chez vous, les valeurs qui priment, ce sont la famille, le travail, et celles qui leur sont attachées : l'égalité, la solidarité, la fraternité.
Finalement, les valeurs républicaines ; celles que l'UMP incarne, que nous sommes en train de réhabiliter mais qui, paradoxalement, aux yeux des habitants de cette région, semblent parfois mieux défendues par la gauche.
Je pense à la famille, en particulier, et à l'idée qu'on se fait de la fraternité, du partage.
Pour m'être un peu penché sur la sociologie du Grand Ouest, j'ai constaté que si l'Etat et les valeurs d'autorité et d'identité nationale qui lui sont attachées sont considérés comme mieux défendus par notre famille politique que par le PS, nous accusons une moindre crédibilité en matière sociale.
Or, ici, peut-être plus qu'ailleurs, les préoccupations touchent bien sûr à l'environnement, mais aussi et surtout au pouvoir d'achat, à la précarité, et à la lutte contre les inégalités.
Si la population semble extrêmement favorable aux réformes qui visent à changer en profondeur la mentalité française dans ce qu'elle peut avoir de plus archaïque, si elle nous considère comme plus aptes à faire face aux grands enjeux du monde moderne - je pense à l'Europe, à la mondialisation, à la croissance économique -, on voit clairement l'inquiétude d'une population qui, un peu comme pour le TGV, craint de se retrouver oubliée par le train de l'histoire.
Le PS semble recueillir à peu près comme nous un tiers des intentions de vote au premier tour. La gauche semble avoir sur nous une petite avance.
Vous serez partout en mesure de la rattraper. J'en suis sûr.
Dans cette belle région peuplée d'hommes et de femmes qui n'ont jamais rompu avec l'idée d'un destin collectif, il faut leur dire que c'est chez nous qu'ils trouveront les solutions d'avenir et les valeurs qui sont en train de faire renaître la République.
Nous cultivons la responsabilité individuelle, pas l'individualisme.
L'individualisme, aujourd'hui, ce n'est pas dans nos rangs qu'il faut le chercher.
C'est chez François Bayrou, qui a fait le vide autour de lui, comme Ségolène Royal l'a si bien fait au Parti Socialiste.
Si je peux me permettre de vous donner un conseil, c'est autour des valeurs du partage, de l'entraide et de l'ouverture aux autres qu'il faut construire vos programmes.
Nous savons que les enjeux municipaux porteront moins sur l'homme que sur le projet, et qu'une très large majorité d'électeurs s'exprimera au regard de considérations exclusivement locales.
Et c'est encore plus vrai ici que dans le reste du pays.
L'ouverture semble y être encore mieux accueillie que partout ailleurs.
Les élections municipales se joueront sur votre capacité à réunir les bonnes volontés au-delà de notre famille politique.
Nous battrons la gauche partout où nous serons capables d'attirer à nous les indifférents et les indécis.
Alors, mon cher Pierre, mon cher Jean-Pierre, je me tourne vers vous. Les solutions, elles sont ici. C'est à vous qu'il appartient, au cas par cas, de répondre à l'inquiétude, aux espoirs et aux attentes des habitants du Grand Ouest.
Et à vous tous, j'ai simplement envie de recommander de méditer ce proverbe chinois qui dit :
« Plus on prend de la hauteur, plus on voit loin ».
Merci.Source http://www.u-m-p.org, le 12 novembre 2007