Texte intégral
Messieurs les présidents (de fédération),
Messieurs les directeurs (INSEP, DRDJS, POP),
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
C'est avec un très grand plaisir que j'ouvre cette journée de travail réunissant, en un lieu aussi prestigieux pour le sport français, les principaux acteurs de l'organisation et de la gestion de la filière d'accès au sport de haut niveau, que ce soit les directeurs régionaux, les directeurs techniques nationaux, les chefs d'établissement ou les représentants de préparation olympique et paralympique. Cette réunion constitue la première pierre de ce qui va permettre un renouveau du sport de haut niveau français, dès la prochaine olympiade.
J'ai tenu à être parmi vous, ce matin, pour vous exposer les grandes lignes de la politique que je souhaite mener en ce domaine. J'ai voulu être présent pour vous faire partager toute l'ambition que j'ai pour ces questions. Chacun doit comprendre que nous sommes à un moment charnière dans la gestion du sport de haut niveau français. Lors de la dernière Commission Nationale du Sport de Haut Niveau, je me suis permis de citer Napoléon : « Se faire battre est excusable, se faire surprendre est impardonnable ! ». Cette formule pleine de vérité, du plus grand de nos stratèges, doit guider l'action que nous avons à mener ensemble.
Certes, la situation est loin d'être catastrophique. La France reste dans le peloton de tête des nations mondiales. Mais, insensiblement, son rang décline. Nous étions 5e à Atlanta, 6e à Sydney et 7e à Athènes. Nous ne pouvons pas rester inertes. Nous devons regarder autour de nous et prendre en compte la concurrence féroce qui existe sur la scène sportive internationale pour définir ce qui doit nous permettre de réintégrer, à terme, le club des cinq premières nations sportives. Et pour commencer, ne nous laissons pas laisser enfermer par l'existant : ce n'est pas parce qu'un système est bon, et parfois même envié à l'étranger, qu'il ne peut pas être très largement amélioré !
Pour moi, le sport de haut niveau est caractérisé par la recherche constante de l'excellence. Une excellence qui s'applique bien sûr au sportif lui-même, mais aussi à son environnement : les hommes, les structures, les moyens et... la politique sportive. Je vais donc présenter, en quelques points, les enjeux de ce renouvellement de la filière d'accès au haut niveau. Et plus que d'un renouvellement ou d'une réécriture, je préférerais que l'on parle sans tabous et avec beaucoup d'ambitions d'une refondation de la filière du sport de haut niveau.
Il me semble nécessaire, auparavant, de dresser le bilan de cette filière créée - je le rappelle - en 1985. Nous pouvons en retenir des enseignements très utiles à nos réflexions.
Ce bilan, quel est-il ? Après dix années de fonctionnement, en 1995, une première évaluation nationale du dispositif a été réalisée. L'objectif annoncé était une vaste rénovation de l'ensemble du dispositif existant. Quatre grandes recommandations avaient alors été dégagées :
. Les filières devaient présenter une stratégie fédérale globale pour chaque discipline, tenant compte, au premier chef, des besoins du sportif ;
. Les filières de haut niveau devaient être mises en place par discipline sportive et devaient comprendre un ensemble de moyens humains, financiers, matériels et de structures mis à disposition des sportifs de haut niveau et des sportifs espoirs ;
. Les pôles des filières devaient être des « centres ressources » organisés en un réseau ouvert à l'ensemble des sportifs concernés et non plus aux seuls athlètes hébergés dans un centre ;
. La création de « pôles interdisciplinaires » devait constituer l'épine dorsale du sport de haut niveau en France.
Les diagnostics étaient, me semble-t-il, très justes. Les recommandations étaient ambitieuses. D'ailleurs, il faut se féliciter de la réussite de la mise en place des « pôles France » et « pôles Espoir » dans les différentes fédérations. Ces nouvelles structures ont apporté un regain de dynamisme au sport de haut niveau français. Cependant, douze ans après, on peut faire le constat que ce projet de rénovation ne s'est pas réalisé totalement comme prévu :
. Les principales actions relevant de l'Etat, telles que les « centres ressources » ou les « pôles interdisciplinaires » n'ont pas été menés à bien.
. Celles qui relevaient à la fois de l'Etat et des fédérations, comme les « stratégies globales par discipline », le « suivi des sportifs de haut niveau hors structures » ou la « reconversion des sportifs » au terme de leur carrière, ont été réalisées très inégalement selon les fédérations.
. A ceci s'ajoute le fait que le ministère a consacré l'essentiel de son action à la labellisation des pôles, en délaissant de fait d'autres éléments du projet de rénovation de la filière.
Bref, on ne peut, aujourd'hui, que regretter le retard accumulé. Mais, la concurrence internationale est telle aujourd'hui, que nous n'avons pas les moyens de rater une seconde fois cette refondation ! Notre travail devra être ambitieux, efficace et opérationnel.
Parmi les nombreux sujets que vous allez aborder au cours de cette journée et des prochains mois, je souhaite mettre l'accent, plus particulièrement, sur trois d'entre eux :
1. Premièrement, nous devons réaffirmer et renforcer le rôle de l'Etat dans le pilotage du sport de haut niveau français. Le soutien de l'Etat au sport de haut niveau relève d'une volonté politique forte et clairement affichée : le sport haut niveau constitue la vitrine du sport de masse, mais aussi de la France. Il se doit donc de briller. Et nous devons lui offrir toutes les meilleures conditions pour pouvoir le faire. Ce renforcement du rôle de l'Etat passera par une plus grande implication du ministère chargé des sports dans les domaines suivants :
. L'évaluation stratégique des politiques fédérales pour le haut niveau ;
. Le contrôle général du dispositif proposé et des structures opérationnelles retenues par les fédérations ;
. Enfin, l'accompagnement des contenus techniques et pédagogiques de ces dispositifs, notamment, par la Préparation Olympique et Paralympique (POP).
2. Deuxièmement, le dispositif mis en place depuis 1995 semble s'être cantonné à reproduire partout un modèle unique et pyramidal. Je ne crois pas que c'était son ambition de départ... L'athlète de haut niveau soit, bien sûr, s'adapter au dispositif. Mais, c'est aussi au dispositif de s'adapter à l'athlète : il doit être conçu pour cela, parce que notre priorité, c'est que celui-ci obtienne les meilleurs résultats mondiaux. Il faut donc faire en sorte que la fédération concernée ait la possibilité de réagir rapidement, de modifier ses priorités et de s'adapter, avec souplesse, efficacité... et bien sûr, en concertation avec l'Etat. Comment y parvenir ? Soyons capable de sortir, s'il le faut, du confort d'un schéma unique pour présenter plusieurs entrées possibles selon la situation particulière et les approches stratégiques des fédérations. Ainsi, la « filière haut niveau » pourrait présenter - si nécessaire - des structures complémentaires, de nature différente, mais validées par la fédération. On peut en donner des exemples :
. Des structures associatives fédérales (clubs, centre de perfectionnement, centre de formation, etc...) ;
. Un groupe que l'on qualifiera de « groupe d'entraînement » et qui pourrait être constitué et validé à partir d'un (ou plusieurs) binôme composé d'un sportif de haut niveau et d'un entraîneur ; . Des structures privées, agrées par le ministère chargé des sports (dans les cas des sports équestres, des sports de glace, du tennis ou des sports mécaniques par exemple) ;
. Ou, tout simplement, des structures familiales, identifiées par la fédération sportive selon des critères très stricts et offrant toutes les garanties d'une formation sportive et scolaire de haut niveau. Que cela soit clair : je ne propose pas le désordre, je propose la souplesse et la réactivité du système.
3. Troisièmement, dans le cadre de cette « refondation », nous devons absolument nous interroger sur le rôle et les missions des établissements de notre ministère. Et ceci concerne aussi bien nos établissements nationaux que nos CREPS. Pour ma part, j'ai mon idée sur la question : la valorisation et le renforcement de ces établissements me semblent être l'un des enjeux de l'avenir. Chacun à leur niveau, ils doivent devenir de véritables « Centres Ressources » regroupant des équipes d'aide à la performance au service des sportifs de haut niveau, qu'ils soient dans ou hors établissement. Ce nouveau concept de services et d'aide à la performance doit porter sur tous les facteurs participant à la réussite du sportif : technique, médical, scientifique, scolaire et professionnel. L'idée est de développer les expertises les plus élevées pour répondre aux exigences actuelles du sport de haut niveau.
4. D'autres sujets déterminants devront bien sûr être abordés et discutés. Le temps étant compté, je ne ferai que les citer ce matin :
. La détection des jeunes talents ;
. La place et le rôle des « Pôles Espoir » dans le dispositif ;
. La réflexion sur l'âge d'entrée dans la filière ;
. Et j'en passe bien sûr de nombreux...
Vous le comprenez, le chantier est vaste, les attentes sont nombreuses et les enjeux déterminants pour l'avenir du sport de haut niveau français. Et au regard des différentes pistes d'évolution que je viens de suggérer, je voudrais ouvrir une réflexion d'ordre plus sémantique : est-ce que la dénomination de « filière » reste toujours d'actualité ? En effet, la conception ouverte et modulable du dispositif que j'appelle de mes voeux peut sembler en contradiction avec le concept même de « filière ». Symboliquement, je crois qu'une autre appellation doit être aujourd'hui envisagée : pourquoi pas un nouveau dispositif qui prendrait le nom de « parcours de l'excellence sportive »... Mais nous aurons l'occasion d'y revenir dans les mois à venir et je compte sur vos propositions.
Pour conclure, je tiens à vous renouveler l'espoir que je fonde dans vos réflexions et propositions à venir. Je souhaite que vos échanges soient riches et constructifs, guidés par une cause commune qui nous rassemble tous ici : celle du sport, des sportives et des sportifs de haut niveau français...
Je vous remercie.Source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 10 décembre 2007