Texte intégral
Q - Bonsoir, Monsieur le Ministre. Plus de 7 milliards de dollars dont 650 millions débloqués par l'Union européenne, premier contributeur international, ont été annoncés pour l'Etat palestinien. Quand cette somme sera-t-elle débloquée et où cet argent va-t-il aller ?
R - Tout d'abord, il faut contrôler que chacune des sommes promises sera versée.
Q - N'est-ce pas évident ?
R - Se serait-on trompés ? Aurions-nous mal entendu ? Non, généralement, les choses se passent bien mais il y a toujours quelques surprises.
Pour la France, par exemple, qui a promis environ 300 millions de dollars sur trois ans, 25 millions de dollars seront immédiatement versés à l'Autorité palestinienne pour permettre de démarrer le paiement des salaires des fonctionnaires dès le début du mois de janvier.
Cet argent est directement versé au budget car les Palestiniens en ont besoin. Il y a beaucoup plus d'argent sur les projets.
Ce qui fut intéressant, c'est que le travail du Premier ministre palestinien, M. Fayyad, basé sur des projets, était un travail agréé par le FMI et la Banque mondiale.
Q - Quels projets ?
R - Des projets concernant l'eau, l'industrie, le commerce et la sécurité pour ne citer que ceux-là. Tout cela sera, je l'espère, mis en oeuvre. Mais il faudra contrôler strictement cet argent.
Q - Et qui se chargera du contrôle ?
R - Plusieurs personnes. Tout d'abord, la Conférence de Paris avec Tony Blair, Jonas Stoere qui utilisait déjà un système de contrôle qui s'appelait "Ad hoc-committee", car les Norvégiens sont très impliqués dans l'aide aux Palestiniens. Il y aura la Commission européenne. Très concrètement, il y aura une réunion tous les mois, à Paris ou à Londres, autour de Tony Blair pour donner des informations sur ce qui a été versé.
Q - Quelles certitudes aurez-vous ? Comment être certains que cet argent ne se retrouvera pas dans les mains du Hamas qui contrôle, je le rappelle, la bande de Gaza depuis le mois de juin dernier ?
R - Ce projet est fait pour tout le peuple palestinien, la Cisjordanie et Gaza. La France et l'Union européenne continuent à fournir de l'argent et de l'aide humanitaire à Gaza.
Le problème politique ne concerne que les Palestiniens. Ils parlent d'un référendum, nous verrons. Il y a évidemment un problème entre la bande de Gaza, contrôlée par le Hamas et l'Autorité palestinienne, qui contrôle la Cisjordanie. Le plan de Salam Fayyad inclut l'ensemble. Tout est compris, même, par exemple, l'écoulement des eaux qui a déjà été pris en charge par Tony Blair, Salam Fayyad et Ehud Barak le ministre israélien de la Défense à Gaza-même. Les choses débutent.
Q - Pourquoi les Palestiniens ne cessent-ils pas de s'appauvrir, sachant que c'est l'un des peuples de la planète les plus soutenus financièrement ?
R - Oui, en effet, ils sont très soutenus. Rien n'est possible, vous avez vu, il y a 500 barrages. Il est évident que l'on ne pourra pas développer l'économie si les Israéliens maintiennent les barrages.
Hier soir, à Paris, il y a eu une longue conversation entre le ministre israélien des Affaires étrangères et le Premier ministre palestinien, Salam Fayyad. Honnêtement, les choses commencent à bouger.
Ce n'est pas moi qui le dit, ce serait trop facile, mais Salam Fayyad l'a dit lui-même lors de la Conférence d'aujourd'hui.
Ce n'est pas simple et la seule garantie de la sécurité israélienne à laquelle nous tenons tous, c'est l'Etat palestinien.
Ce qui est formidable avec cette Conférence d'aujourd'hui, c'est que le soutien politique à un Etat palestinien, vivant côte à côte avec Israël, soutien que tout le monde attendait depuis longtemps, a été beaucoup plus considérable que l'apport d'argent, en réalité. Ce fut une Conférence, certes de donateurs, mais c'était surtout une Conférence politique.
Ce qui est remarquable, c'est que de tous petits pays, des pays très pauvres, dont certains se trouvent parmi les cinq pays les plus pauvres de la planète, étaient venus à Paris pour apporter un peu d'argent, peu, mais le geste fut formidable pour les Palestiniens.
Q - C'est justement une conférence qui intervient à peine trois semaines après celle d'Annapolis aux Etats-Unis, conférence qui a prévu un calendrier qui espère voir les contours d'un Etat palestinien avant la fin 2008, avez-vous bon espoir ?
R - Nous verrons bien.
Q - Mais la fin 2008, c'est demain !
R - Nous avons été tellement et si souvent déçus. Il y a eu plein de conférences, à maintes reprises et j'espère que cette fois-ci, tout le monde aura compris que c'est le moment ; peut-être aussi parce que le Hamas existe, peut-être aussi parce qu'il y a eu des combats inter-palestiniens à Gaza. Ce qui est formidable, c'est que nous sommes en droite ligne avec Annapolis.
Cette Conférence aux Etats-Unis signalait le départ de l'idée d'un Etat palestinien, et aujourd'hui, c'est la Conférence internationale des donateurs pour l'Etat palestinien. Cela donnait du corps, de la chair à une démarche qui se reconstruit et qui devrait se prolonger. Il faut construire une administration, il faut que la sécurité soit assurée. Il y a eu deux choses auxquelles les Israéliens ont fait référence aujourd'hui : un vieux projet avec l'Union européenne "EU Cops", c'est-à-dire former la police et la question de l'argent palestinien bloqué en Israël qui sera débloqué et versé aux Palestiniens.
Gaza est bloquée. Il faut ouvrir cette bande. Les choses se décident petit à petit.
Les Israéliens ont également fait des ouvertures remarquables aujourd'hui.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 décembre 2007