Texte intégral
Nous célébrons cette année le cinquantième anniversaire dune institution qui a joué un rôle majeur dans la construction de lEurope daujourdhui. LOTAN sest trouvée au coeur des questions stratégiques fondamentales qui ont marqué le développement de notre continent et du monde occidental dans son ensemble. Lorganisation dune défense face à une menace venue de lEst, la réintégration de lAllemagne dans 1a communauté de défense occidentale, la gestion du couplage stratégique entre lAmérique du Nord et lEurope.
1. Lélément majeur du paysage au moment de la naissance et du développement de lOTAN, cest-à-dire la menace claire et identifiable dune attaque massive venue de lEst, a aujourdhui disparu. Le mur cachait des réalités que nous soupçonnions parfois, que nous avons quelquefois su anticiper, mais qui nous ont aussi à plusieurs reprises surpris et quelquefois plongés dans lhorreur.
LOTAN a su, tant bien que mal, sy adapter et contribuer à ce que le bilan de 1a dernière décennie soit positif, si on peut parler de bilan lorsquil sagit de la vie et de la mort des hommes.
Mais cest aujourdhui léchelle du temps qui a changé. La menace à long terme a été remplacée par 1e risque, presque au jour le jour. LEurope de lEst et du Sud-est nous invitent à lhumilité en nous montrant que linacceptable peut surgir à tout moment provoqué par des réflexes que lon croyait effacés depuis des décennies, du moins chez nous en Europe. Ce nest plus un affrontement brutal que nous devons anticiper, mais une instabilité, des dizaines dinstabilités régionales que nous devons traiter sous peine de voir bafouer nos valeurs et notre crédibilité.
2. LEurope, qui se révèle chaque jour davantage comme un acteur majeur sur léchiquier mondial, doit jouer tout son rôle dans la sécurité de la zone euro-atlantique. Peu importe que nous agissions dans un cadre OTAN ou dans un cadre plus autonome : on ne peut pas laisser certaines régions sombrer dans la violence faute dêtre en mesure de mettre en oeuvre les moyens nécessaires.
Il en va des valeurs communes sur lesquelles sest bâtie lEurope au sortir de la Seconde guerre mondiale et de lespace démocratique quelle a construit sur le principe du droit. Pour défendre ces valeurs, pour agrandir cet espace, pour faire respecter le droit international, lEurope doit développer ses capacités dintervention militaires sans lesquelles son discours sur la liberté des peuples et des communautés reste une rhétorique creuse, sans lesquelles des désastres humanitaires graves peuvent se produire sur son propre sol.
Nous, responsables politiques de toutes les nations européennes, en avons pris conscience, nos opinions ne sont plus prêtes à supporter que nos principes soient bafoués à notre porte. Notre espace de responsabilité doit correspondre à un espace où le droit, les Droits de lHomme sont plus et mieux mis en oeuvre quailleurs.
3. Personne ne peut raisonnablement imaginer que cette réflexion sur une plus grande responsabilité européenne est susceptible de remettre en cause le lien transatlantique, aujourdhui ou demain.
Ce lien garde en effet toute sa valeur, à trois titres au moins.
Dabord, il est une réponse à léventualité de la résurgence dune menace de grande ampleur. Nous essayons de travailler dans le long terme, et il serait irresponsable décarter cette éventualité.
Ensuite, elle est lun des cadres possibles dintervention sur les crises qui secouent notre continent, comme lont montré nos réactions communes aux événements en ex-Yougoslavie depuis le début de cette décennie. Nous navons pas toujours su empêcher linacceptable, mais un regard en arrière nous montre que lOTAN a été un des éléments déterminants dans notre action. Posons-nous simplement à cet égard la question : « aurions nous agi seuls ? »
Enfin, elle procure à tous un forum de dialogue, la sécurité de lappartenance à une communauté dont nous avons oublié le confort parce que nous y sommes habitués. Ce confort, cette sécurité, cest une joie pour nous de les partager avec trois nouveaux alliés dans quelques jours.
Mais nous savons bien que le processus de prise de décision aux Etats-Unis est fondé sur un délicat mécanisme de balances et contrepoids, et que des tendances à éviter les engagements inutiles dans des crises lointaines se font souvent jour au Congrès. Et la lourde charge dêtre la seule superpuissance et davoir à relever tant de défis ne peut qualimenter cette réticence sous-jacente.
Dans le cas de lOTAN, lidée de partage du fardeau a fait son chemin, et je pense quil existe bel et bien un socle de convergence entre cette idée et lévolution vers un meilleur partage des responsabilités auquel aspirent les Européens.
4 . Car lUnion européenne se renforce inexorablement.
Lavènement de leuro a été loccasion dune vaste prise de conscience dans le monde. Mais nous voyons bien, ici, depuis des années, progresser le sentiment dappartenance européenne auprès de nos concitoyens. Les élections européennes seront une fois encore loccasion de vérifier à quel point les courants pro-européens sont majoritaires au sein des Etats membres. Cest encore plus vrai auprès des jeunes, cest de plus en plus vrai auprès des acteurs sociaux.
Peu à peu lUnion acquiert les grands attributs de souveraineté - elle négocie par exemple comme un seul groupe à lOMC -, elle acquiert les éléments nécessaires à une grande puissance : un mécanisme de prise de décision conjoint, une monnaie commune fondée sur une économie solide, une architecture judiciaire partagée. On ne pouvait imaginer laisser indéfiniment en friche le terrain de la défense et cest en cela que linitiative britannique du Premier ministre Blair a été précieuse. Elle est déterminante non seulement dans ce domaine, mais pour lavenir de toute la construction européenne.
5. Un climat nouveau pour lEurope de la Défense est donc logiquement apparu, que je lis par plusieurs signes :
1) Avancées de Maastricht et dAmsterdam, et plus récemment de Saint-Malo après les propositions du président Chirac et du Premier ministre Jospin de lété 1998 et linitiative de Tony Blair en octobre à Pörtschach. La double présidence UE/UEO de lAllemagne au premier semestre 1999 est une promesse de progrès solides et concertés.
2) Avancées au sein de lAlliance atlantique : Sommet de Bruxelles de 1994, de Berlin 1996, de Madrid 1997 : progrès de lIESD (Identité européenne de sécurité et de défense). Mais aussi, au cours des années 1990, lintégration des pays de lex-bloc soviétique dans différents cercles concentriques autour de lAlliance, et enfin, intégration dans quelques jours de trois nouveaux alliés.
3) Avancées confirmées sur le terrain, cest-à-dire en ex-Yougoslavie :
· Accord politique entre Européens, et avec les Américains, plus grand quauparavant (ex.
« Actord » en octobre 1 998).
· Prise de responsabilité dans les actions militaires : force dextraction dans le cadre de lOTAN à linitiative de la France. Si les accords de Rambouillet aboutissent, existe la possibilité dune force de lOTAN, la KFOR, à majorité européenne.
Gardons-nous pourtant de tout enthousiasme prématuré. La route est encore longue vers une véritable Europe de la Défense. Souvenons-nous quil a fallu dix ans pour la réalisation de leuro, et ce nétait pas un premier essai. II serait raisonnable de se contenter pour lheure dune démarche réaliste, pragmatique, par paliers : trouvons dabord les moyens de gérer ensemble les crises de notre continent. Nous devons pour cela être en mesure dassocier efficacement la gestion politique et le menace du recours à la force. Cest en Europe ce qui a déjà fonctionné, ce qui fonctionnera encore, nous lespérons tous, dans le cadre des négociations qui souvriront lundi à Paris sous une coprésidence franco-britannique.
6. Cest bien là notre priorité : fournir à lEurope les moyens institutionnels et opérationnels de produire des décisions concernant les crises qui affectent la stabilité du continent.
A cet égard, lavenir est à un rôle plus important de lUnion européenne, qui sera appelée à intégrer les capacités et les fonctions de lUEO. Cest le Conseil européen, composé des chefs dEtat et de gouvernement élus dEurope qui est le pole de légitimité politique auquel nous pouvons rattacher des capacités dintervention dans le domaine de la sécurité, pour en faire un acteur complet.
Cest là lexpression de quinze souverainetés qui ont décidé dagir ensemble ; autrement dit, cest le second pilier, la logique intergouvernementale qui peut exprimer pleinement cette volonté avec le flexibilité nécessaire au respect de chaque souveraineté.
A lappui du Conseil européen dans sa formation du Conseil Affaires générales (ministres des Affaires étrangères avec le renfort, lorsque cela est nécessaire, des ministres de la Défense), il faudra sans doute prévoir dautres institutions, ainsi un organe de hauts responsables qui aurait en charge toutes les affaires de la PESC, et serait compétent pour prendre des décisions courantes sur les affaires politico-militaires, ou encore le comité militaire de lUE et lEtat-major européen.
7. Dans le respect de notre engagement à éviter les duplications inutiles par rapport à lOTAN, lEurope doit disposer de moyens solides et crédibles de gestion des crises, et de moyens opérationnels de planification et de commandement, comme lobjectif en a été posé à Saint-Malo.
II est à noter que bien des ressources sont dores et déjà disponibles, à la fois dans lUE et dans lUEO (centre de situation, centre satellitaire de Torrejon...) ; il revient aux Européens de se mettre daccord pour progresser sur la rationalisation et la bonne intégration des ressources dont ils disposent.
Par ailleurs, au sein de lAlliance, il nous faut mettre en oeuvre pleinement les décisions prises ces dernières années, notamment à Berlin, pour concrétiser le renforcement du pilier européen afin de mieux équilibrer lorganisation.
Il faut aussi, je crois, aller au-delà de Berlin en dotant le SACEUR adjoint des moyens lui permettant dassumer pleinement ses fonctions européennes, et en permettant à lUE davoir accès sans entrave aux moyens de lOTAN, notamment dans le domaine de la planification.
A cet égard, léchéance du sommet de Washington en avril prochain sera importante.
8. Ces moyens accrus vont dans le bon sens pour lAlliance, puisquils renforcent et diversifient la capacité commune dintervention sans dupliquer inutilement les moyens de lOTAN. Renforcer le pilier européen, cest renforcer lOrganisation et améliorer son équilibre.
Cest rajeunir et adapter le lien transatlantique, en instituant une relation plus stable et plus créative avec les Etats-Unis.
Cest enfin, pour lEurope, disposer dune palette plus large doptions pour agir sur les problèmes de sécurité du continent.
Cest sur une base de solidarité durable que nous devons réfléchir au partenariat euro-atlantique au sein de lAlliance. Toute démarche qui sinscrirait dans une logique de concurrence serait vouée à léchec parce quelle ne correspond ni aux souhaits de lécrasante majorité des Européens, ni à ce qui est raisonnablement envisageable.
Nous devons poursuivre sur cette vole, avec au coeur la volonté partagée de faire progresser lEurope, de façon pragmatique tous les Européens doivent être associés à chaque étape, quils appartiennent à lUnion Européenne, à lUEO ou quils y soient associés. Et ce cheminement doit se faire dans la transparence vis-à-vis des Etats-Unis.
Ce ne sont pas de vagues principes que jénumère ici, ce sont les règles de conduite que nous mettons en oeuvre, au jour le jour, pour la gestion des crises dramatiques qui marquent notre continent, aujourdhui au Kossovo, Dieu sait où demain.
Personne ne peut dire aujourdhui si nous connaîtrons le succès, mais ce qui est sûr, cest que nous agissons ensemble, dans la loyauté et la solidarité en percevant la volonté collective des Européens de poursuivre dans cette voie.
Devant cette assemblée distinguée et familière, je me trouve dans la meilleure position possible pour exprimer tout la fois le voeu et le souhait de notre réussite.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 mars 1999)
1. Lélément majeur du paysage au moment de la naissance et du développement de lOTAN, cest-à-dire la menace claire et identifiable dune attaque massive venue de lEst, a aujourdhui disparu. Le mur cachait des réalités que nous soupçonnions parfois, que nous avons quelquefois su anticiper, mais qui nous ont aussi à plusieurs reprises surpris et quelquefois plongés dans lhorreur.
LOTAN a su, tant bien que mal, sy adapter et contribuer à ce que le bilan de 1a dernière décennie soit positif, si on peut parler de bilan lorsquil sagit de la vie et de la mort des hommes.
Mais cest aujourdhui léchelle du temps qui a changé. La menace à long terme a été remplacée par 1e risque, presque au jour le jour. LEurope de lEst et du Sud-est nous invitent à lhumilité en nous montrant que linacceptable peut surgir à tout moment provoqué par des réflexes que lon croyait effacés depuis des décennies, du moins chez nous en Europe. Ce nest plus un affrontement brutal que nous devons anticiper, mais une instabilité, des dizaines dinstabilités régionales que nous devons traiter sous peine de voir bafouer nos valeurs et notre crédibilité.
2. LEurope, qui se révèle chaque jour davantage comme un acteur majeur sur léchiquier mondial, doit jouer tout son rôle dans la sécurité de la zone euro-atlantique. Peu importe que nous agissions dans un cadre OTAN ou dans un cadre plus autonome : on ne peut pas laisser certaines régions sombrer dans la violence faute dêtre en mesure de mettre en oeuvre les moyens nécessaires.
Il en va des valeurs communes sur lesquelles sest bâtie lEurope au sortir de la Seconde guerre mondiale et de lespace démocratique quelle a construit sur le principe du droit. Pour défendre ces valeurs, pour agrandir cet espace, pour faire respecter le droit international, lEurope doit développer ses capacités dintervention militaires sans lesquelles son discours sur la liberté des peuples et des communautés reste une rhétorique creuse, sans lesquelles des désastres humanitaires graves peuvent se produire sur son propre sol.
Nous, responsables politiques de toutes les nations européennes, en avons pris conscience, nos opinions ne sont plus prêtes à supporter que nos principes soient bafoués à notre porte. Notre espace de responsabilité doit correspondre à un espace où le droit, les Droits de lHomme sont plus et mieux mis en oeuvre quailleurs.
3. Personne ne peut raisonnablement imaginer que cette réflexion sur une plus grande responsabilité européenne est susceptible de remettre en cause le lien transatlantique, aujourdhui ou demain.
Ce lien garde en effet toute sa valeur, à trois titres au moins.
Dabord, il est une réponse à léventualité de la résurgence dune menace de grande ampleur. Nous essayons de travailler dans le long terme, et il serait irresponsable décarter cette éventualité.
Ensuite, elle est lun des cadres possibles dintervention sur les crises qui secouent notre continent, comme lont montré nos réactions communes aux événements en ex-Yougoslavie depuis le début de cette décennie. Nous navons pas toujours su empêcher linacceptable, mais un regard en arrière nous montre que lOTAN a été un des éléments déterminants dans notre action. Posons-nous simplement à cet égard la question : « aurions nous agi seuls ? »
Enfin, elle procure à tous un forum de dialogue, la sécurité de lappartenance à une communauté dont nous avons oublié le confort parce que nous y sommes habitués. Ce confort, cette sécurité, cest une joie pour nous de les partager avec trois nouveaux alliés dans quelques jours.
Mais nous savons bien que le processus de prise de décision aux Etats-Unis est fondé sur un délicat mécanisme de balances et contrepoids, et que des tendances à éviter les engagements inutiles dans des crises lointaines se font souvent jour au Congrès. Et la lourde charge dêtre la seule superpuissance et davoir à relever tant de défis ne peut qualimenter cette réticence sous-jacente.
Dans le cas de lOTAN, lidée de partage du fardeau a fait son chemin, et je pense quil existe bel et bien un socle de convergence entre cette idée et lévolution vers un meilleur partage des responsabilités auquel aspirent les Européens.
4 . Car lUnion européenne se renforce inexorablement.
Lavènement de leuro a été loccasion dune vaste prise de conscience dans le monde. Mais nous voyons bien, ici, depuis des années, progresser le sentiment dappartenance européenne auprès de nos concitoyens. Les élections européennes seront une fois encore loccasion de vérifier à quel point les courants pro-européens sont majoritaires au sein des Etats membres. Cest encore plus vrai auprès des jeunes, cest de plus en plus vrai auprès des acteurs sociaux.
Peu à peu lUnion acquiert les grands attributs de souveraineté - elle négocie par exemple comme un seul groupe à lOMC -, elle acquiert les éléments nécessaires à une grande puissance : un mécanisme de prise de décision conjoint, une monnaie commune fondée sur une économie solide, une architecture judiciaire partagée. On ne pouvait imaginer laisser indéfiniment en friche le terrain de la défense et cest en cela que linitiative britannique du Premier ministre Blair a été précieuse. Elle est déterminante non seulement dans ce domaine, mais pour lavenir de toute la construction européenne.
5. Un climat nouveau pour lEurope de la Défense est donc logiquement apparu, que je lis par plusieurs signes :
1) Avancées de Maastricht et dAmsterdam, et plus récemment de Saint-Malo après les propositions du président Chirac et du Premier ministre Jospin de lété 1998 et linitiative de Tony Blair en octobre à Pörtschach. La double présidence UE/UEO de lAllemagne au premier semestre 1999 est une promesse de progrès solides et concertés.
2) Avancées au sein de lAlliance atlantique : Sommet de Bruxelles de 1994, de Berlin 1996, de Madrid 1997 : progrès de lIESD (Identité européenne de sécurité et de défense). Mais aussi, au cours des années 1990, lintégration des pays de lex-bloc soviétique dans différents cercles concentriques autour de lAlliance, et enfin, intégration dans quelques jours de trois nouveaux alliés.
3) Avancées confirmées sur le terrain, cest-à-dire en ex-Yougoslavie :
· Accord politique entre Européens, et avec les Américains, plus grand quauparavant (ex.
« Actord » en octobre 1 998).
· Prise de responsabilité dans les actions militaires : force dextraction dans le cadre de lOTAN à linitiative de la France. Si les accords de Rambouillet aboutissent, existe la possibilité dune force de lOTAN, la KFOR, à majorité européenne.
Gardons-nous pourtant de tout enthousiasme prématuré. La route est encore longue vers une véritable Europe de la Défense. Souvenons-nous quil a fallu dix ans pour la réalisation de leuro, et ce nétait pas un premier essai. II serait raisonnable de se contenter pour lheure dune démarche réaliste, pragmatique, par paliers : trouvons dabord les moyens de gérer ensemble les crises de notre continent. Nous devons pour cela être en mesure dassocier efficacement la gestion politique et le menace du recours à la force. Cest en Europe ce qui a déjà fonctionné, ce qui fonctionnera encore, nous lespérons tous, dans le cadre des négociations qui souvriront lundi à Paris sous une coprésidence franco-britannique.
6. Cest bien là notre priorité : fournir à lEurope les moyens institutionnels et opérationnels de produire des décisions concernant les crises qui affectent la stabilité du continent.
A cet égard, lavenir est à un rôle plus important de lUnion européenne, qui sera appelée à intégrer les capacités et les fonctions de lUEO. Cest le Conseil européen, composé des chefs dEtat et de gouvernement élus dEurope qui est le pole de légitimité politique auquel nous pouvons rattacher des capacités dintervention dans le domaine de la sécurité, pour en faire un acteur complet.
Cest là lexpression de quinze souverainetés qui ont décidé dagir ensemble ; autrement dit, cest le second pilier, la logique intergouvernementale qui peut exprimer pleinement cette volonté avec le flexibilité nécessaire au respect de chaque souveraineté.
A lappui du Conseil européen dans sa formation du Conseil Affaires générales (ministres des Affaires étrangères avec le renfort, lorsque cela est nécessaire, des ministres de la Défense), il faudra sans doute prévoir dautres institutions, ainsi un organe de hauts responsables qui aurait en charge toutes les affaires de la PESC, et serait compétent pour prendre des décisions courantes sur les affaires politico-militaires, ou encore le comité militaire de lUE et lEtat-major européen.
7. Dans le respect de notre engagement à éviter les duplications inutiles par rapport à lOTAN, lEurope doit disposer de moyens solides et crédibles de gestion des crises, et de moyens opérationnels de planification et de commandement, comme lobjectif en a été posé à Saint-Malo.
II est à noter que bien des ressources sont dores et déjà disponibles, à la fois dans lUE et dans lUEO (centre de situation, centre satellitaire de Torrejon...) ; il revient aux Européens de se mettre daccord pour progresser sur la rationalisation et la bonne intégration des ressources dont ils disposent.
Par ailleurs, au sein de lAlliance, il nous faut mettre en oeuvre pleinement les décisions prises ces dernières années, notamment à Berlin, pour concrétiser le renforcement du pilier européen afin de mieux équilibrer lorganisation.
Il faut aussi, je crois, aller au-delà de Berlin en dotant le SACEUR adjoint des moyens lui permettant dassumer pleinement ses fonctions européennes, et en permettant à lUE davoir accès sans entrave aux moyens de lOTAN, notamment dans le domaine de la planification.
A cet égard, léchéance du sommet de Washington en avril prochain sera importante.
8. Ces moyens accrus vont dans le bon sens pour lAlliance, puisquils renforcent et diversifient la capacité commune dintervention sans dupliquer inutilement les moyens de lOTAN. Renforcer le pilier européen, cest renforcer lOrganisation et améliorer son équilibre.
Cest rajeunir et adapter le lien transatlantique, en instituant une relation plus stable et plus créative avec les Etats-Unis.
Cest enfin, pour lEurope, disposer dune palette plus large doptions pour agir sur les problèmes de sécurité du continent.
Cest sur une base de solidarité durable que nous devons réfléchir au partenariat euro-atlantique au sein de lAlliance. Toute démarche qui sinscrirait dans une logique de concurrence serait vouée à léchec parce quelle ne correspond ni aux souhaits de lécrasante majorité des Européens, ni à ce qui est raisonnablement envisageable.
Nous devons poursuivre sur cette vole, avec au coeur la volonté partagée de faire progresser lEurope, de façon pragmatique tous les Européens doivent être associés à chaque étape, quils appartiennent à lUnion Européenne, à lUEO ou quils y soient associés. Et ce cheminement doit se faire dans la transparence vis-à-vis des Etats-Unis.
Ce ne sont pas de vagues principes que jénumère ici, ce sont les règles de conduite que nous mettons en oeuvre, au jour le jour, pour la gestion des crises dramatiques qui marquent notre continent, aujourdhui au Kossovo, Dieu sait où demain.
Personne ne peut dire aujourdhui si nous connaîtrons le succès, mais ce qui est sûr, cest que nous agissons ensemble, dans la loyauté et la solidarité en percevant la volonté collective des Européens de poursuivre dans cette voie.
Devant cette assemblée distinguée et familière, je me trouve dans la meilleure position possible pour exprimer tout la fois le voeu et le souhait de notre réussite.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 mars 1999)