Texte intégral
LE BIEN PUBLIC-LES Dépêches : En tant que député de la IVe circonscription, quel est le chantier ou l'action initié(e) sous votre dernier mandat dont vous êtes le plus satisfait ?
François Sauvadet.- Difficile de répondre à cette question en une phrase. Si je dois choisir une action, c'est sans doute la création de la Maison de l'Emploi et de la Formation qui a été la première de Bourgogne et qui rassemble tous les acteurs de la formation et de l'emploi, les employeurs, l'Éducation nationale, etc. L'apprentissage, la formation sont des défis majeurs pour préparer nos jeunes à l'avenir et à l'emploi. Il y a aussi l'Ecopôle de La-Roche-en-Brenil que j'ai suivi avec Gilles de Montalembert qui se traduira par la création d'une centaine d'emplois d'ici la fin de l'année.
Je suis aussi heureux d'avoir lancé avec mon ami regretté Christian Myon le programme d'accès au haut débit dans nos territoires ruraux.
BP-LD. - Comment voyez-vous l'avenir de ce territoire rural, affecté par l'érosion de sa démographie notamment ?
F.S. - Je pense profondément que nous avons des atouts importants et qu'il nous faut nous organiser davantage pour les faire valoir: le TGV, nos infrastructures ferrées, nos autoroutes. Nos villes et bourgs d'équilibre participent à la structuration du territoire et au développement économique et j'observe que de plus en plus de personnes viennent chercher ici l'équilibre entre qualité de vie et activité. Le mouvement d'attractivité s'est renforcé même s'il reste encore insuffisant. Je tiens d'ailleurs à vous indiquer que nous atteignons un taux de chômage historiquement faible sur le territoire: il est passé à 6 % soit une baisse de 20 % en un an. Nous devons amplifier notre attractivité en poursuivant le développement de services de proximité qui favorisent l'accueil dans nos territoires (pôles scolaires, garderies, cantines, collèges, lycées). Nous avons une chance dans nos établissements c'est la qualité de l'enseignement et un climat de sécurité pour nos jeunes, il faut le faire savoir.
BP-LD. - Quels sont les grands projets structurants à venir ?
F.S. - D'abord, poursuivre l'équipement en haute technologie de communication de notre territoire qui est une des clés du développement y compris pour les artisans, les agriculteurs et pour les nouveaux métiers: compléter la couverture en téléphonie mobile et favoriser l'accès au haut et très haut débit. Conforter le TGV et les liaisons ferrées et je me battrai pour le raccordement de la branche Est du TGV Rhin Rhône sur la ligne actuelle à hauteur de Turcey, car c'est de l'avenir de Montbard et de la Haute Côte-d'Or dont il s'agit dans les prochaines années.
Il nous faut mieux utiliser et développer le potentiel des réseaux routiers. Je pense là à la liaison Dijon - Is-sur-Tille qui est une nécessité tout comme la Lino. Je souhaite aussi engager la réflexion sur le Châtillonnais avec une liaison rapide vers l'A5 ce qui serait une nouvelle perspective pour le Châtillonnais et Châtillon-sur-Seine. Le développement économique s'est toujours fait autour des axes de circulation et nous avons en plus ici la qualité de la vie.
"Le seul regret que j'ai, c'est que certains n'ont pas compris les enjeux de la coopération"
BP-LD. - Quelle place comptez-vous donner au tourisme ? À l'économie ?
F.S. - Il n'y a pas d'emploi sans activité et je tiens à saluer les clubs des chefs d'entreprises qui font un travail remarquable. J'entends être à leurs côtés pour porter l'idée de mise en réseau. Quant au Tourisme, il fait partie de l'économie: on peut et on doit mieux faire. Je compte beaucoup sur le programme Alésia et sur les liens avec Vix pour donner une nouvelle impulsion aux côtés de nos grands opérateurs privés ou publics. Nous avons lancé dans le Pays de l'Auxois un plan d'actions qui va déboucher sur un vrai plan marketing. Nous allons valoriser le Label Pays d'Art et d'Histoire, valoriser le Canal, etc.
Nous avons des atouts fantastiques depuis les Sources de la Seine dont j'espère le déblocage du dossier pour améliorer le site (le Conseil Général y est prêt) jusqu'à l'histoire moderne de la métallurgie. Je souhaite encourager la mise en place d'un Pass Pays de Haute Côte-d'Or qui permettrait d'avoir accès aux musées, aux manifestations culturelles qui sont nombreuses et pas suffisamment connues notamment des Dijonnais. Nous allons bien sûr continuer de travailler à l'accueil des personnes handicapées et à mobilité réduite. Il y a en France 6 millions de personnes concernées soit 10 % de la population.
BP-LD. - Sur ces dernières années avez-vous un regret ?
F.S. - Le seul regret que j'ai, c'est que certains n'ont pas compris les enjeux et n'ont pas forcément joué le jeu de la coopération, joué le jeu des Pays et finalement jouent contre l'intérêt collectif. Il y a un temps pour les élections et il y a un temps pour l'action et je ne pense pas qu'on peut gagner l'avenir des territoires sans rassembler toutes celles et tous ceux qui veulent y contribuer. C'est ce que je m'évertue à faire en Haute Côte-d'Or.
BP-LD. - Comment vivez-vous cette forme de "concurrence" entre les villes de Haute Côte-d'Or ?
F.S. - Je crois que les choses ont beaucoup changé. Nous ne sommes plus au temps où les villes se livraient des combats acharnés. Les liens que nous avons tissés notamment en coopération hospitalière ou en matière économique ont permis de développer tous nos sites au service de la population dans le contexte difficile que l'on connaît. Il y a toujours la tentation pour certains à "tirer la couverture à soi" comme on le dit trivialement mais je suis persuadé qu'on ne continuera de progresser, ce qui est le cas aujourd'hui, qu'en jouant la carte du collectif.
Regardez ce qui s'est passé sur les tribunaux d'instance. Nous avons été concernés par le vaste mouvement de réorganisation de la carte judiciaire et nous sommes un des rares territoires français où nous avons obtenu la création d'un tribunal d'instance. C'est une solution qui permettra de maintenir de manière pérenne les services au public. Pour cela, il faut s'organiser. Ne pas se laisser mettre dos au mur par des réorganisations qui sont nécessaires sans doute mais qui doivent avoir pour objectif d'être au service de la population en tout point du territoire. Il faudra organiser tout cela pour que les habitants s'y retrouvent. L'avantage c'est que je ne suis pas le Maire d'une des plus grandes villes du territoire. Mon travail à moi, c'est de faire des arbitrages non pas dans l'intérêt de tel ou tel mais de chacun des 17 cantons de ma circonscription et de leurs habitants.
BP-LD. - Beaucoup vous reprochent votre distance à propos du centre d'enfouissement des déchets de Vic-de-Chassenay. Pourquoi le Député de l'Auxois, ne s'est-il pas plus impliqué dans ce dossier ?
F.S. - Distance ? Ce n'est pas sérieux. Simplement, nous avons un problème à régler: Celui du traitement de nos ordures ménagères. Chacun le sait, je l'ai dit, j'aurais préféré une solution départementale que n'a pas voulue le maire de Dijon qui dispose d'une unité de traitement pour la communauté de l'agglomération dijonnaise. Il nous faut donc nous organiser sur le territoire. Je suis convaincu que l'enfouissement est aujourd'hui la meilleure solution, ce que disent d'ailleurs, la plupart des écologistes.
Déchets : "Je suis convaincu qu'enfouir est la meilleure solution"
Cela dit, aucun site n'est idéal. Je voudrais rappeler que pour Vic-de-Chassenay, il s'agit d'une initiative privée et que j'ai eue à l'égard de Vic la même attitude que lorsqu'il s'est agi du projet d'enfouissement proche de mon canton, à Bellenot. J'ai demandé aux services de l'État que toutes les garanties soient prises quand les inquiétudes se sont exprimées. J'ai saisi moi-même directement l'Agence Française de Sécurité des Aliments ainsi que l'ensemble des services de l'État. Il y a des recours. Je fais confiance à la fois aux services de l'État et à la juridiction administrative de notre Pays.
BP-LD. - Est-il facile d'être élu Nouveau Centre dans ce contexte post-présidentiel? Avez-vous trouvé votre place au sein de la majorité ?
F.S. - J'ai fait un choix clair que j'ai assumé devant les électeurs. J'ai partagé les combats de François Bayrou mais comme d'autres y compris récemment Jean-Marie Cavada, je ne me reconnais pas dans l'attitude du Modem dont je ne vois pas où il va et où il veut conduire le Pays. Je n'ai pour ma part renoncé à aucune de mes idées. J'ai souhaité simplement les rendre utiles au sein de la majorité présidentielle, librement mais de manière engagée. Je préside le groupe politique du Nouveau Centre à l'Assemblée Nationale.
Nous avons trois ministres au Gouvernement. Nous faisons entendre notre voix clairement. Je le fais directement auprès du Premier Ministre que je vois chaque semaine et auprès du Président de la République que je rencontre lui aussi très régulièrement.
Nous avons notamment fait évoluer les choses en matière de révision générale des politiques publiques pour que l'argent public soit utilement utilisé, nous nous sommes exprimés sur l'effort que nous devons partager pour qu'il soit juste, sur la question des régimes spéciaux.
Nous avons été entendus quand nous avons demandé de renoncer à taxer nos aînés pour la redevance audiovisuelle.
Nous nous battons pour la revalorisation des retraites qui sont insuffisantes. Nous entendons assumer librement et de manière engagée notre participation à la majorité présidentielle. C'est le contrat que j'ai passé avec les habitants de la circonscription. Je tiendrai mes engagements. Je me sens bien dans mes baskets.
BP-LD. - Comment vivez-vous les grincements de dents au sein de votre famille politique ?
F.S. - Grincements de dents ? Je ne vois pas de quoi vous voulez parler.
Au Nouveau Centre, nous avons créé un mouvement de centre droit pour reprendre les idées de l'UDF et le flambeau du grand mouvement des indépendants. Nous ne sommes pas un mouvement de caporalistes. Chacun s'exprime comme il l'entend et si vous faites allusion à la démission des fonctions de porte-parole de Nicolas Perruchot, il a estimé qu'il devait avoir son entière liberté de ton personnel. C'est un choix qui lui appartient. Il siège dans mon groupe aux côtés de Christian Blanc, de Charles de Courson et de nos 21 autres collègues. Le débat, le pluralisme, c'est utile parce qu'il permet de faire progresser les choses particulièrement au sein de nos familles politiques. Nous avons les moyens de fonctionner et la volonté de peser dans les choix politiques.
BP-LD. - Vous accumulez les réussites. Quel bilan en tirez-vous sur un plan personnel ?
F.S. - Vous savez, ce qui compte c'est ce qu'on fait concrètement. Et ce qui me plaît, ce n'est pas d'assumer des fonctions importantes, c'est d'être utile ; utile au territoire, utile aux habitants. En quelques mois, on a continué de faire progresser les choses sur le territoire, on a investi dans les hôpitaux à Vitteaux, à Saulieu, à Semeur. Je souhaite que ça bouge, que ça évolue pour stabiliser la situation de l'Hôpital à Châtillon-sur-Seine, voilà. Des emplois sont créés ou vont l'être dans les pôles d'excellence comme dans les TPE et les PME. Redonner confiance dans l'avenir, redonner l'envie de faire, avoir la fierté du territoire où l'on vit, c'est ça qui compte: C'est ce qu'on fait d'utile et c'est cela qui me motive chaque jour. Ce qui compte ce n'est pas la reconnaissance c'est la confiance. Et cette confiance que beaucoup me témoignent, j'entends la leur rendre par l'action.
BP-LD. - Comptez-vous vous représenter dans votre commune ?
F.S. - Je ne vais pas tourner autour du pot. Oui.
Je l'annoncerai d'une manière plus officielle dans les semaines qui viennent. Je travaille avec une équipe qui est composée de personnalités très diverses, positives, disponibles, et ça, c'est vraiment appréciable quand on est maire d'une commune.
BP-LD. - N'êtes-vous pas tenté par une ville plus importante ?
F.S. - Je vis à Vitteaux avec ma famille. Nous nous y sentons bien. J'ai tissé avec de nombreux habitants de la commune, du canton, de la circonscription des liens d'amitié et de confiance et je n'imagine pas un seul instant autre chose que travailler là où j'ai commencé aux côtés de Gilbert Mathieu. La confiance qui m'a été témoignée, ça compte plus que tout.
BP-LD. - Ancien journaliste, vous sentez-vous aujourd'hui "homme politique" ?
F.S. - Si je vous disais le contraire, vous ne me croiriez pas. J'ai fait un choix de vie: celui de me consacrer pleinement, entièrement à mes fonctions électives. Mais j'ai gardé de mon métier de journaliste le goût de l'écoute de chacun et le recul nécessaire pour ne pas se laisser porter par les événements. J'ai côtoyé beaucoup de responsables qui m'ont appris qu'un jour chasse l'autre et que ce qui compte c'est ce qui reste.
Propos recueillis par Jean-Philippe Guillot
source http://www.le-nouveaucentre.org, le 22 janvier 2008