Texte intégral
Monsieur le Président
Monsieur le Directeur
Mesdames et Messieurs
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
S'il est une question, en forme d'inquiétude collective, qui fait de nous des citoyens d'une même terre, d'une même humanité, par delà les conflits d'intérêts entre les peuples, c'est bien la question de l'environnement.
Non que cette préoccupation soit nouvelle. Mais longtemps, d'autres défis occupèrent nos esprits et mobilisèrent nos volontés.
L'écologie n'était pas, il faut bien le dire notre premier souci et l'humanité le paye aujourd'hui au prix fort.
La planète souffre, nous souffrons. Le problème a changé de dimension et de tempo. Les écosystèmes mondiaux sont profondément perturbés.
Et, il y a URGENCE. Car tous les rapports, toutes les études, toutes les constatations des scientifiques les plus réputés, le démontrent de façon unanimes : la dégradation de notre environnement s'est fortement accélérée ces dernières années. Le responsable : l'homme.
Chacun d'entre nous est source de cette pollution mais chacun d'entre nous en est aussi victime.
Chacun d'entre nous a aussi désormais conscience de ce qui menace sa santé, de ce qui modifie et détériore son patrimoine naturel, fragile et irremplaçable.
La protection de l'environnement est devenue l'affaire de tous....Elle s'impose à tous et elle est une évidence et une priorité pour moi, qui ai l'honneur d'être en charge de l'outre-mer , au sein du gouvernement français :
Car l'Outre-mer français, c'est :
97 % de la superficie des eaux maritimes françaises ;
plus de la moitié des espèces de cétacés et pinnipèdes (phoques, otaries, morses..) existants qui vivent, se nourrissent ou migrent dans cet espace maritime ;
98 % des vertébrés (380 espèces) et 96 % des plantes vasculaires (3 450 espèces)
l'un des 15 derniers grands massifs de forêt tropicale non encore fragmenté par les activités humaines ;
L'Outre-mer français, c'est aussi la totalité des cinq mille kilomètres de coraux, soit 10 % des récifs du monde.
Je suis ainsi, en quelque sorte, le Ministre de la Biodiversité et du Corail ! Et c'est ce qui m'amène aujourd'hui à défendre devant vous l'inscription des lagons de Nouvelle Calédonie au patrimoine mondial de l'Unesco, qui consacrerait la valeur universelle et exceptionnelle de la deuxième barrière récifale du monde.
Cette démarche me tient particulièrement à coeur car mon implication personnelle dans la préservation de l'environnement ne date pas d'aujourd'hui et s'inscrit donc parfaitement dans le cadre de mes responsabilités ministérielles.
C'est donc un honneur et un grand moment d'émotion que de m'exprimer devant vous aujourd'hui, au nom de la France, en cette année 2008, année particulièrement symbolique et importante pour nous tous : l'année internationale des récifs coralliens.
Je tiens à remercier tout particulièrement Madame Stéphanie CASWELL du département d'Etat des Etats Unis, et Monsieur Robert CUDNEY, de la commission nationale des aires marines protégées qui, depuis juillet 2007, président le secrétariat de l'initiative. Ils ont élaboré et défini un programme de travail très dense et de qualité.
Depuis 1994, l'initiative internationale pour les récifs coralliens réunit des gouvernements, des agences internationales, des communautés de scientifiques, des organisations non gouvernementales et des entreprises, afin d'oeuvrer pour la protection et la préservation des récifs coralliens.
A tous ceux ici présents, je suis heureux de pouvoir présenter mes voeux les plus sincères et les plus chaleureux, cédant ainsi à la tradition. Ces voeux s'adressent également aux gouvernements et institutions que vous représentez. Je forme enfin des voeux de réussite pour cette initiative internationale pour les récifs coralliens.
Notre responsabilité à l'égard de notre planète et des futures générations est énorme. Notre détermination et notre ambition doivent donc être extraordinaires. En continuant à unir nos efforts, comme nous le faisons depuis 14 ans et en les amplifiant, je suis convaincu que nous atteindrons nos objectifs et que nos récifs seront préservés. C'est dans cet esprit constructif que la France s'engage et apporte son soutien à votre action.
Tous ici, nous sommes convaincus que les récifs sont un des écosystèmes les plus productifs du monde, concentrant à eux seuls un quart de la biodiversité marine. Avec les herbiers marins et les mangroves, qui leur sont souvent associés, ils sont tout simplement essentiels à la survie de centaines de milliers d'espèces.
Les plages des atolls qui n'existent que, grâce à la protection contre la houle, des récifs et dont le mythique sable blanc vient des débris des coraux, sont essentielles pour la reproduction de beaucoup d'espèces de tortues marines. Fréquentées par 15 000 tortues vertes femelles, les plages d'Europa, dans l'océan Indien, constituent l'un des sites de ponte les plus importants du monde pour cette espèce.
Sans cette protection naturelle des récifs, c'est une part importante de la biodiversité qui est menacée.
Mais ce sont aussi 500 millions de femmes et d'hommes qui pourraient perdre leurs lieux de vie, leurs ressources alimentaires, leurs lieux de travail, sans ces récifs.
Notre tâche est immense, et la France est décidée à y prendre toute sa part.
2008, année internationale des récifs coralliens est une opportunité formidable de rassembler, de faire partager au plus grand nombre la certitude que, par delà leur beauté, les récifs sont utiles à l'homme, de leur faire partager la conviction qu'il est indispensable de les protéger.
Lors de mes déplacements en tant que membre du gouvernement français chargé de l'outre-mer, j'ai tenu à vérifier par moi-même l'état de nos coraux à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les Caraïbes.
J'ai pu admirer de près ces écostructures, en apprécier la fragilité et en mesurer parfois les dégâts causés par l'activité humaine ou le réchauffement climatique.
J'ai pu surtout m'entretenir avec des équipes scientifiques françaises ou internationales. J'ai pu écouter leurs craintes et partager leurs espoirs, devant les chantiers de recherche gigantesques qu'il faudrait entreprendre. Grâce à tous ces échanges, j'ai réalisé l'impérieuse nécessité d'établir une collaboration sans faille entre toutes les équipes de recherche.
Les phénomènes concernant la survie des récifs, auxquels la communauté internationale doit faire face, sont si complexes qu'ils ne peuvent être appréhendés par le fruit du travail d'une seule équipe ou d'un seul pays. Seule une coopération internationale exemplaire permettra de trouver des solutions efficaces.
C'est vraiment ENSEMBLE qu'il faut agir pour les récifs coralliens. C'est un défi sur plusieurs années que nous devons relever. L'initiative internationale va dans ce sens, et je m'en réjouis. La France compte prendre toute sa part à cette coopération si bien représentée par l'ICRI.
J'ai également compris qu'il faut associer étroitement les populations concernées à la définition de plan de gestion des récifs. On ne pourrait impunément tout interdire ou tout sanctuariser sans tenir compte des besoins de ces « peuples de la mer ». Mais je sais, pour le mesurer dans d'autres domaines, que la protection n'exclut pas le développement économique. Je sais aussi que nous avons beaucoup à apprendre de ces populations.
Pour s'en convaincre, il faut se référer à des coutumes ancestrales, telles celles de Nouvelle Calédonie, qui conduisent par exemple, à mettre en « jachère » des portions de récifs, le temps que la nature puisse reprendre ses droits.
La France est fière de compter parmi les fondateurs de l'ICRI (en 1994), qui a incité en 1998, la naissance d'IFRECOR "the French Initiative". Et je voudrais ici saluer le Professeur Bernard SALVAT que vous connaissez tous. Le succès d'IFRECOR aujourd'hui résulte de son immense savoir, de sa ténacité et de ses qualités d'animateur.
L'IFRECOR a fait émerger une prise de conscience importante des autorités et des populations dans l'outre-mer français.
Chacun des comités locaux et le comité national rassemblent, à leur niveau, l'ensemble des acteurs concernés par la protection et la gestion durable des récifs coralliens à travers plusieurs collèges : élus, scientifiques, associations, administration.
Le plan national d'action pour les récifs coralliens, élaboré avec l'ensemble des comités locaux, a été adopté en 2000 à Bora-Bora en Polynésie française.
Il s'agit d'un plan cadre à long terme qui doit périodiquement être évalué et révisé. Les actions des 5 premières années (2000 - 2005) ont été évaluées lors de la réunion du comité national tenue en Nouvelle-Calédonie en mai 2006 et une nouvelle phase du plan d'action (2006 - 2010) a été approuvée à cette occasion.
Je souhaite d'ailleurs profiter de cette occasion qui m'est offerte de vous présenter les progrès des activités françaises en faveur des récifs :
- la mise en place de nouvelles aires coralliennes protégées au niveau national et international comme en Polynésie française
- la poursuite du suivi de l'état de santé ;
- une première étude d'évaluation socio-économique des récifs coralliens en Martinique, qui sera reproduite dans les autres collectivités ;
- les travaux sur l'état des mangroves dans l'Outre-mer français ;
- l'évaluation des risques dus aux changements climatiques sur les récifs ;
- la sensibilisation du public qui fera l'objet, justement dans le cadre de l'année internationale des récifs, d'expositions et de manifestations médiatisées à Paris et en province, dont je fera l'annonce lors de la manifestation « L'environnement et l'Outre-mer » le 5 février prochain.
La prochaine réunion du comité national de l'IFRECOR se tiendra en Guadeloupe, au mois avril prochain et nous invitons les représentants de l'ICRI à assister à ces travaux.
Enfin, à la suite du premier colloque français sur les aires marines protégées qui s'est tenu à Boulogne sur mer en novembre 2007, organisé par la toute récente Agence française des Aires Marines Protégées, j'ai indiqué que je souhaitais accroître la protection des surfaces coralliennes et lagunaires, dans le cadre d'une gestion participative des communautés riveraines, dans leur contexte social, économique et culturel.
A cette occasion, le gouvernement de la Polynésie française et l'Agence française des Aires Marines Protégées ont signé une convention pour la mise en place d'un réseau plus étendu des zones récifales protégées.
C'est aussi dans un esprit d'interaction avec douze États insulaires voisins dans le Pacifique, que l'Agence Française de Développement à lancée le CRISP en 2005. Cette initiative qui se poursuivra jusqu'en 2010 enregistre des débuts encourageants avec l'organisation d'un symposium à Townsville, avec l'Australie en octobre dernier. La France attend beaucoup de cette coopération et recherche dès à présent des relais pour le prolonger.
En revanche, comme pour beaucoup d'autres dégradations écologiques, les dégâts causés aux récifs sont le plus souvent le fruit de l'ignorance. Changer les mentalités est d'une urgence absolue.
En prenant l'initiative du Grenelle de l'Environnement, le Président de la République, Nicolas SARKOZY a très clairement démontré que la protection de l'environnement était l'une des grandes priorités de la France.
Cette concertation nationale a réussi à fédérer l'ensemble des acteurs impliqués dans ce défi, dans un esprit de dialogue très constructif.
Les conclusions de cette consultation, énoncée par le Président de la République, ont été saluées par le Prix Nobel de la Paix, M. Al GORE.
Il a pu constater à quel point ce dialogue national, très suivi par les médias, avait profondément et durablement changé le regard des Français sur l'avenir des ressources de la planète.
Le moment est venu pour chaque citoyen de prendre part à cette nouvelle ambition pour l'environnement et la qualité de vie. Nous pouvons désormais espérer une véritable adhésion des citoyens aux exigences que cela implique, une adhésion allant bien au-delà de la simple compréhension et du soutien aux idées.
Il est maintenant du devoir du gouvernement de capitaliser ce changement des mentalités, par la diffusion de l'information pour contrer l'ignorance et l'engagement d'actions concrètes.
La politique que je conduis est définie dans le document retenu dans les conclusions du Grenelle de l'environnement, intitulé « vers un Outre-mer exemplaire.
Ce plan d'actions s'articule autour de 8 axes stratégiques pour lesquels est défini un objectif pour 2020.
Bien entendu, certains des axes de ce plan auront un impact positif direct pour la défense des récifs, comme la préservation de la biodiversité, ou l'amélioration de la qualité des eaux et la lutte contre les pollutions.
Mais ce plan inclut également des dispositions permettant de diminuer fortement les rejets de CO2, responsables notamment de l'acidification des océans dont les effets destructeurs sur les coraux ne sont plus à démontrer.
En ce qui concerne ces rejets de CO2, savez-vous que dans le plus grand nombre d'îles tropicales, 30 % de l'électricité consommée sert à la seule climatisation? Ce chiffre est déraisonnable.
Les méthodes pour diminuer ces rejets existent pourtant, et je m'attache à voir les déployer le plus rapidement possible.
Ainsi, l'objectif fixé par « vers un Outre-mer exemplaire » est de couvrir 50 % de la consommation électrique de ces territoires par des énergies renouvelables à l'horizon 2020. Pour le cas particulier de l'île de La Réunion, dont 36 % des besoins sont déjà d'origine renouvelable, cet objectif est de 100 % à l'horizon 2030.
De tels résultats n'appellent pas uniquement l'application de solutions technologiques. C'est une vraie mutation sociologique que la France a engagée, sous le regard de la communauté internationale.
L'aboutissement de ces efforts sera, je l'espère, l'inscription des récifs de Nouvelle-Calédonie à l'inventaire du Patrimoine mondial de l'UNESCO, dont je soutien la candidature, au nom de la France, avec la plus grande joie et la plus sincère conviction.
Avec ses 23 400 km² de lagons et ses 8 000 km² de constructions récifales, cet écosystème corallien est tout à fait remarquable et représente l'un des plus variés et des plus vastes ensembles récifaux du monde.
La longueur du récif-barrière continu de Nouvelle-Calédonie ceinturant la Grande Terre est estimée approximativement à 1600 km et apparaît donc comme comparable à l'étendue des récifs de la Grande Barrière d'Australie. Il est reconnu par la communauté internationale comme étant un « hot spot » de la biodiversité planétaire.
Présentant une série de six sites représentatifs de l'ensemble des récifs de Nouvelle-Calédonie, la proposition de l'inscription « bien en série » sous le titre « les lagons de Nouvelle-Calédonie : diversité récifale et écosystèmes associés » comprend plus de 15 000 km2 de lagons et récifs, soit 60 % des lagons de la Grande Terre et des îles Loyauté.
Cette demande, si elle de concrétisait, serait la première inscription au patrimoine mondial d'un territoire français d'outre-mer. Elle serait aussi la
première inscription d' un récif corallien.
Et ce n'est pas un hasard si elle est présentée en cette année internationale des récifs corallien.
C'est pour le gouvernement auquel j'appartiens, une occasion d'affirmer sa volonté, de s'engager résolument dans le combat pour la préservation de notre environnement, dont les récifs sont un élément important.
Associée à l'ICRI depuis sa création, la France a toujours été très présente dans vos travaux, notamment sur les questions de l'évaluation économique des récifs, et la définition et la promotion d'un tourisme durable. Dans la continuité de ses interventions lors des précédentes assemblées de l'ICRI, la France se félicite de l'extension des activités de l'initiative aux mangroves. Elle insiste de nouveau pour que des pays encore absents et abritant des mangroves sur leur littoral soient invités à s'associer à notre démarche commune.
Pour s'impliquer encore davantage, la France souhaiterait dans l'avenir, être membre du secrétariat de l'ICRI. Je tiens, aujourd'hui, à vous faire part de cette proposition, empreinte de solennité, et de volonté de poursuivre et d'accroître notre engagement.
C'est pour l'ensemble de ces raisons que j'ai tenues, par ma présence ici ce matin, à vous exprimer toute l'importance que la France porte à son engagement, auprès de toutes les nations concernées, pour la sauvegarde des récifs. La France réaffirme avec force, sa volonté d'assumer toute sa responsabilité envers la préservation de ses cinq mille kilomètres récifs et de la protection de la biodiversité des onze millions de km2 de son espace maritime.
Mais au-delà de mes fonctions, j'ai une autre raison impérative de participer avec vous à la protection de cette biodiversité marine.
J'ai eu le privilège de rêver devant l'élégance du ballet des dauphins dans la passe d'un atoll, j'ai pu admirer la grâce des requins le long des tombants, j'ai pu interroger le regard d'une murène à la porte de son abri, je me suis émerveillé devant les tombants si gigantesque construis pendant si longtemps par des millions d'animaux si minuscules qu'il me semble inconcevable que ces récifs qui abritent et nourrissent un quart de la biodiversité de notre planète puissent risquer un jour de disparaître.
Sans audace, pas d'action,
Sans action, pas d'avenir durable.
source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 30 janvier 2008
Monsieur le Directeur
Mesdames et Messieurs
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
S'il est une question, en forme d'inquiétude collective, qui fait de nous des citoyens d'une même terre, d'une même humanité, par delà les conflits d'intérêts entre les peuples, c'est bien la question de l'environnement.
Non que cette préoccupation soit nouvelle. Mais longtemps, d'autres défis occupèrent nos esprits et mobilisèrent nos volontés.
L'écologie n'était pas, il faut bien le dire notre premier souci et l'humanité le paye aujourd'hui au prix fort.
La planète souffre, nous souffrons. Le problème a changé de dimension et de tempo. Les écosystèmes mondiaux sont profondément perturbés.
Et, il y a URGENCE. Car tous les rapports, toutes les études, toutes les constatations des scientifiques les plus réputés, le démontrent de façon unanimes : la dégradation de notre environnement s'est fortement accélérée ces dernières années. Le responsable : l'homme.
Chacun d'entre nous est source de cette pollution mais chacun d'entre nous en est aussi victime.
Chacun d'entre nous a aussi désormais conscience de ce qui menace sa santé, de ce qui modifie et détériore son patrimoine naturel, fragile et irremplaçable.
La protection de l'environnement est devenue l'affaire de tous....Elle s'impose à tous et elle est une évidence et une priorité pour moi, qui ai l'honneur d'être en charge de l'outre-mer , au sein du gouvernement français :
Car l'Outre-mer français, c'est :
97 % de la superficie des eaux maritimes françaises ;
plus de la moitié des espèces de cétacés et pinnipèdes (phoques, otaries, morses..) existants qui vivent, se nourrissent ou migrent dans cet espace maritime ;
98 % des vertébrés (380 espèces) et 96 % des plantes vasculaires (3 450 espèces)
l'un des 15 derniers grands massifs de forêt tropicale non encore fragmenté par les activités humaines ;
L'Outre-mer français, c'est aussi la totalité des cinq mille kilomètres de coraux, soit 10 % des récifs du monde.
Je suis ainsi, en quelque sorte, le Ministre de la Biodiversité et du Corail ! Et c'est ce qui m'amène aujourd'hui à défendre devant vous l'inscription des lagons de Nouvelle Calédonie au patrimoine mondial de l'Unesco, qui consacrerait la valeur universelle et exceptionnelle de la deuxième barrière récifale du monde.
Cette démarche me tient particulièrement à coeur car mon implication personnelle dans la préservation de l'environnement ne date pas d'aujourd'hui et s'inscrit donc parfaitement dans le cadre de mes responsabilités ministérielles.
C'est donc un honneur et un grand moment d'émotion que de m'exprimer devant vous aujourd'hui, au nom de la France, en cette année 2008, année particulièrement symbolique et importante pour nous tous : l'année internationale des récifs coralliens.
Je tiens à remercier tout particulièrement Madame Stéphanie CASWELL du département d'Etat des Etats Unis, et Monsieur Robert CUDNEY, de la commission nationale des aires marines protégées qui, depuis juillet 2007, président le secrétariat de l'initiative. Ils ont élaboré et défini un programme de travail très dense et de qualité.
Depuis 1994, l'initiative internationale pour les récifs coralliens réunit des gouvernements, des agences internationales, des communautés de scientifiques, des organisations non gouvernementales et des entreprises, afin d'oeuvrer pour la protection et la préservation des récifs coralliens.
A tous ceux ici présents, je suis heureux de pouvoir présenter mes voeux les plus sincères et les plus chaleureux, cédant ainsi à la tradition. Ces voeux s'adressent également aux gouvernements et institutions que vous représentez. Je forme enfin des voeux de réussite pour cette initiative internationale pour les récifs coralliens.
Notre responsabilité à l'égard de notre planète et des futures générations est énorme. Notre détermination et notre ambition doivent donc être extraordinaires. En continuant à unir nos efforts, comme nous le faisons depuis 14 ans et en les amplifiant, je suis convaincu que nous atteindrons nos objectifs et que nos récifs seront préservés. C'est dans cet esprit constructif que la France s'engage et apporte son soutien à votre action.
Tous ici, nous sommes convaincus que les récifs sont un des écosystèmes les plus productifs du monde, concentrant à eux seuls un quart de la biodiversité marine. Avec les herbiers marins et les mangroves, qui leur sont souvent associés, ils sont tout simplement essentiels à la survie de centaines de milliers d'espèces.
Les plages des atolls qui n'existent que, grâce à la protection contre la houle, des récifs et dont le mythique sable blanc vient des débris des coraux, sont essentielles pour la reproduction de beaucoup d'espèces de tortues marines. Fréquentées par 15 000 tortues vertes femelles, les plages d'Europa, dans l'océan Indien, constituent l'un des sites de ponte les plus importants du monde pour cette espèce.
Sans cette protection naturelle des récifs, c'est une part importante de la biodiversité qui est menacée.
Mais ce sont aussi 500 millions de femmes et d'hommes qui pourraient perdre leurs lieux de vie, leurs ressources alimentaires, leurs lieux de travail, sans ces récifs.
Notre tâche est immense, et la France est décidée à y prendre toute sa part.
2008, année internationale des récifs coralliens est une opportunité formidable de rassembler, de faire partager au plus grand nombre la certitude que, par delà leur beauté, les récifs sont utiles à l'homme, de leur faire partager la conviction qu'il est indispensable de les protéger.
Lors de mes déplacements en tant que membre du gouvernement français chargé de l'outre-mer, j'ai tenu à vérifier par moi-même l'état de nos coraux à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les Caraïbes.
J'ai pu admirer de près ces écostructures, en apprécier la fragilité et en mesurer parfois les dégâts causés par l'activité humaine ou le réchauffement climatique.
J'ai pu surtout m'entretenir avec des équipes scientifiques françaises ou internationales. J'ai pu écouter leurs craintes et partager leurs espoirs, devant les chantiers de recherche gigantesques qu'il faudrait entreprendre. Grâce à tous ces échanges, j'ai réalisé l'impérieuse nécessité d'établir une collaboration sans faille entre toutes les équipes de recherche.
Les phénomènes concernant la survie des récifs, auxquels la communauté internationale doit faire face, sont si complexes qu'ils ne peuvent être appréhendés par le fruit du travail d'une seule équipe ou d'un seul pays. Seule une coopération internationale exemplaire permettra de trouver des solutions efficaces.
C'est vraiment ENSEMBLE qu'il faut agir pour les récifs coralliens. C'est un défi sur plusieurs années que nous devons relever. L'initiative internationale va dans ce sens, et je m'en réjouis. La France compte prendre toute sa part à cette coopération si bien représentée par l'ICRI.
J'ai également compris qu'il faut associer étroitement les populations concernées à la définition de plan de gestion des récifs. On ne pourrait impunément tout interdire ou tout sanctuariser sans tenir compte des besoins de ces « peuples de la mer ». Mais je sais, pour le mesurer dans d'autres domaines, que la protection n'exclut pas le développement économique. Je sais aussi que nous avons beaucoup à apprendre de ces populations.
Pour s'en convaincre, il faut se référer à des coutumes ancestrales, telles celles de Nouvelle Calédonie, qui conduisent par exemple, à mettre en « jachère » des portions de récifs, le temps que la nature puisse reprendre ses droits.
La France est fière de compter parmi les fondateurs de l'ICRI (en 1994), qui a incité en 1998, la naissance d'IFRECOR "the French Initiative". Et je voudrais ici saluer le Professeur Bernard SALVAT que vous connaissez tous. Le succès d'IFRECOR aujourd'hui résulte de son immense savoir, de sa ténacité et de ses qualités d'animateur.
L'IFRECOR a fait émerger une prise de conscience importante des autorités et des populations dans l'outre-mer français.
Chacun des comités locaux et le comité national rassemblent, à leur niveau, l'ensemble des acteurs concernés par la protection et la gestion durable des récifs coralliens à travers plusieurs collèges : élus, scientifiques, associations, administration.
Le plan national d'action pour les récifs coralliens, élaboré avec l'ensemble des comités locaux, a été adopté en 2000 à Bora-Bora en Polynésie française.
Il s'agit d'un plan cadre à long terme qui doit périodiquement être évalué et révisé. Les actions des 5 premières années (2000 - 2005) ont été évaluées lors de la réunion du comité national tenue en Nouvelle-Calédonie en mai 2006 et une nouvelle phase du plan d'action (2006 - 2010) a été approuvée à cette occasion.
Je souhaite d'ailleurs profiter de cette occasion qui m'est offerte de vous présenter les progrès des activités françaises en faveur des récifs :
- la mise en place de nouvelles aires coralliennes protégées au niveau national et international comme en Polynésie française
- la poursuite du suivi de l'état de santé ;
- une première étude d'évaluation socio-économique des récifs coralliens en Martinique, qui sera reproduite dans les autres collectivités ;
- les travaux sur l'état des mangroves dans l'Outre-mer français ;
- l'évaluation des risques dus aux changements climatiques sur les récifs ;
- la sensibilisation du public qui fera l'objet, justement dans le cadre de l'année internationale des récifs, d'expositions et de manifestations médiatisées à Paris et en province, dont je fera l'annonce lors de la manifestation « L'environnement et l'Outre-mer » le 5 février prochain.
La prochaine réunion du comité national de l'IFRECOR se tiendra en Guadeloupe, au mois avril prochain et nous invitons les représentants de l'ICRI à assister à ces travaux.
Enfin, à la suite du premier colloque français sur les aires marines protégées qui s'est tenu à Boulogne sur mer en novembre 2007, organisé par la toute récente Agence française des Aires Marines Protégées, j'ai indiqué que je souhaitais accroître la protection des surfaces coralliennes et lagunaires, dans le cadre d'une gestion participative des communautés riveraines, dans leur contexte social, économique et culturel.
A cette occasion, le gouvernement de la Polynésie française et l'Agence française des Aires Marines Protégées ont signé une convention pour la mise en place d'un réseau plus étendu des zones récifales protégées.
C'est aussi dans un esprit d'interaction avec douze États insulaires voisins dans le Pacifique, que l'Agence Française de Développement à lancée le CRISP en 2005. Cette initiative qui se poursuivra jusqu'en 2010 enregistre des débuts encourageants avec l'organisation d'un symposium à Townsville, avec l'Australie en octobre dernier. La France attend beaucoup de cette coopération et recherche dès à présent des relais pour le prolonger.
En revanche, comme pour beaucoup d'autres dégradations écologiques, les dégâts causés aux récifs sont le plus souvent le fruit de l'ignorance. Changer les mentalités est d'une urgence absolue.
En prenant l'initiative du Grenelle de l'Environnement, le Président de la République, Nicolas SARKOZY a très clairement démontré que la protection de l'environnement était l'une des grandes priorités de la France.
Cette concertation nationale a réussi à fédérer l'ensemble des acteurs impliqués dans ce défi, dans un esprit de dialogue très constructif.
Les conclusions de cette consultation, énoncée par le Président de la République, ont été saluées par le Prix Nobel de la Paix, M. Al GORE.
Il a pu constater à quel point ce dialogue national, très suivi par les médias, avait profondément et durablement changé le regard des Français sur l'avenir des ressources de la planète.
Le moment est venu pour chaque citoyen de prendre part à cette nouvelle ambition pour l'environnement et la qualité de vie. Nous pouvons désormais espérer une véritable adhésion des citoyens aux exigences que cela implique, une adhésion allant bien au-delà de la simple compréhension et du soutien aux idées.
Il est maintenant du devoir du gouvernement de capitaliser ce changement des mentalités, par la diffusion de l'information pour contrer l'ignorance et l'engagement d'actions concrètes.
La politique que je conduis est définie dans le document retenu dans les conclusions du Grenelle de l'environnement, intitulé « vers un Outre-mer exemplaire.
Ce plan d'actions s'articule autour de 8 axes stratégiques pour lesquels est défini un objectif pour 2020.
Bien entendu, certains des axes de ce plan auront un impact positif direct pour la défense des récifs, comme la préservation de la biodiversité, ou l'amélioration de la qualité des eaux et la lutte contre les pollutions.
Mais ce plan inclut également des dispositions permettant de diminuer fortement les rejets de CO2, responsables notamment de l'acidification des océans dont les effets destructeurs sur les coraux ne sont plus à démontrer.
En ce qui concerne ces rejets de CO2, savez-vous que dans le plus grand nombre d'îles tropicales, 30 % de l'électricité consommée sert à la seule climatisation? Ce chiffre est déraisonnable.
Les méthodes pour diminuer ces rejets existent pourtant, et je m'attache à voir les déployer le plus rapidement possible.
Ainsi, l'objectif fixé par « vers un Outre-mer exemplaire » est de couvrir 50 % de la consommation électrique de ces territoires par des énergies renouvelables à l'horizon 2020. Pour le cas particulier de l'île de La Réunion, dont 36 % des besoins sont déjà d'origine renouvelable, cet objectif est de 100 % à l'horizon 2030.
De tels résultats n'appellent pas uniquement l'application de solutions technologiques. C'est une vraie mutation sociologique que la France a engagée, sous le regard de la communauté internationale.
L'aboutissement de ces efforts sera, je l'espère, l'inscription des récifs de Nouvelle-Calédonie à l'inventaire du Patrimoine mondial de l'UNESCO, dont je soutien la candidature, au nom de la France, avec la plus grande joie et la plus sincère conviction.
Avec ses 23 400 km² de lagons et ses 8 000 km² de constructions récifales, cet écosystème corallien est tout à fait remarquable et représente l'un des plus variés et des plus vastes ensembles récifaux du monde.
La longueur du récif-barrière continu de Nouvelle-Calédonie ceinturant la Grande Terre est estimée approximativement à 1600 km et apparaît donc comme comparable à l'étendue des récifs de la Grande Barrière d'Australie. Il est reconnu par la communauté internationale comme étant un « hot spot » de la biodiversité planétaire.
Présentant une série de six sites représentatifs de l'ensemble des récifs de Nouvelle-Calédonie, la proposition de l'inscription « bien en série » sous le titre « les lagons de Nouvelle-Calédonie : diversité récifale et écosystèmes associés » comprend plus de 15 000 km2 de lagons et récifs, soit 60 % des lagons de la Grande Terre et des îles Loyauté.
Cette demande, si elle de concrétisait, serait la première inscription au patrimoine mondial d'un territoire français d'outre-mer. Elle serait aussi la
première inscription d' un récif corallien.
Et ce n'est pas un hasard si elle est présentée en cette année internationale des récifs corallien.
C'est pour le gouvernement auquel j'appartiens, une occasion d'affirmer sa volonté, de s'engager résolument dans le combat pour la préservation de notre environnement, dont les récifs sont un élément important.
Associée à l'ICRI depuis sa création, la France a toujours été très présente dans vos travaux, notamment sur les questions de l'évaluation économique des récifs, et la définition et la promotion d'un tourisme durable. Dans la continuité de ses interventions lors des précédentes assemblées de l'ICRI, la France se félicite de l'extension des activités de l'initiative aux mangroves. Elle insiste de nouveau pour que des pays encore absents et abritant des mangroves sur leur littoral soient invités à s'associer à notre démarche commune.
Pour s'impliquer encore davantage, la France souhaiterait dans l'avenir, être membre du secrétariat de l'ICRI. Je tiens, aujourd'hui, à vous faire part de cette proposition, empreinte de solennité, et de volonté de poursuivre et d'accroître notre engagement.
C'est pour l'ensemble de ces raisons que j'ai tenues, par ma présence ici ce matin, à vous exprimer toute l'importance que la France porte à son engagement, auprès de toutes les nations concernées, pour la sauvegarde des récifs. La France réaffirme avec force, sa volonté d'assumer toute sa responsabilité envers la préservation de ses cinq mille kilomètres récifs et de la protection de la biodiversité des onze millions de km2 de son espace maritime.
Mais au-delà de mes fonctions, j'ai une autre raison impérative de participer avec vous à la protection de cette biodiversité marine.
J'ai eu le privilège de rêver devant l'élégance du ballet des dauphins dans la passe d'un atoll, j'ai pu admirer la grâce des requins le long des tombants, j'ai pu interroger le regard d'une murène à la porte de son abri, je me suis émerveillé devant les tombants si gigantesque construis pendant si longtemps par des millions d'animaux si minuscules qu'il me semble inconcevable que ces récifs qui abritent et nourrissent un quart de la biodiversité de notre planète puissent risquer un jour de disparaître.
Sans audace, pas d'action,
Sans action, pas d'avenir durable.
source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 30 janvier 2008