Texte intégral
C. Barbier.- La Commission de Bruxelles menace Paris dans l'affaire de la Société Générale, en appelant le pouvoir exécutif français à rester neutre en cas d'OPA. "Nous ne resterons pas les bras croisés", avait pourtant dit H. Guaino ; "la Société Générale doit rester française", avait insisté F. Fillon. Est-ce le début d'une guerre Bruxelles-Paris ?
R.- Non, je ne le crois pas. D'une part, nous n'en sommes pas là, la Société Générale reste une banque qui est très solide, qui est très forte, il n'y a pas de risque pour les déposants, pas de risque d'OPA, cela a été démenti hier par les responsables de la Société Générale.
Q.- Mais il y a des appétits quand même !
R.- Il y a des appétits, mais vous avez aussi des appétits français et des appétits européens. On est dans une économie ouverte, et puis la Commission est dans son rôle lorsqu'elle dit que les règles de concurrence européenne doivent être respectées.
Q.- La France a-t-elle les moyens, de toute façon, de s'opposer à une OPA et de choisir les racheteurs ?
R.- Quand on est dans des secteurs très sensibles - le secteur financier en est un puisque c'est un secteur qui est structurant pour l'économie -, il est assez normal que les pouvoirs publics regarde comment l'argent des Français, dans quel main l'argent des Français se trouve.
Q.- N. Sarkozy est-il sorti de son rôle en demandant à demi-mot le départ de D. Bouton ? A-t-il "perdu son sang-froid", comme le dit votre ami F. Hollande ?
R.- Non, je ne le crois pas. Les mêmes choses avaient été dites d'ailleurs par mon ami F. Hollande, auparavant, qui s'était ému de tout ce qui se passait, à juste titre, à la Société Générale. Le véritable problème est le suivant : c'est qu'on a un système financier qui marche quand même un peu sur la tête. Quand vous regardez les résultats de la Générale, c'est une banque qui faisait cinq à six milliards de résultats chaque année. Aujourd'hui, il y a un trou de cinq milliards, qui est lié à des conditions que l'on va mieux connaître dans les prochains jours, compte tenu des enquêtes et des rapports qui sont en cours. Ce qui apparaît, c'est que les banques aujourd'hui, et la Générale en est l'exemple, ne vivaient pas sur une véritable richesse, vivaient sur des phénomènes et des mouvements qui étaient des mouvements spéculatifs qui faisaient l'essentiel des bénéfices. Quand ces mouvements se passent mal, vous n'avez plus de bénéfices dans le cadre des banques. Donc il faut revenir à un système financier qui soit plus assaini et à des règles de base, c'est-à-dire que les banques sont là pour financer l'économie et pour prêter aux entreprises et aux particuliers.
Q.- Dans ce moment de crise, on voit la Fed américaine aider l'économie, changer de ligne, s'adapter et la Banque centrale européenne restée rigide. Est-ce que "J.-C. Trichet est l'homme orchestre du Titanic", comme l'a dit un eurodéputé UMP ?
R.- Je ne le crois pas. J.-C. Trichet est un grand professionnel. Il est à la tête de la Banque centrale européenne. Il a à gérer une situation qui est difficile entre ce que peuvent être les tensions de l'inflation et ce qu'est le ralentissement de la croissance. Je crois qu'il devrait tenir compte de manière équilibrée de ces deux éléments. Ce qui est le plus inquiétant, c'est l'écart de taux qui se crée des deux cotés de l'Atlantique. Pourquoi est-ce que c'est le plus inquiétant ? C'est parce que cela a une évolution sur le cours des changes, sur le cours de l'euro par rapport au dollar, et qu'à ce moment là, nous risquons de nous trouver à des niveaux de l'euro par rapport au dollar, qu'aucun Européen, quel que qu'il soit, ne souhaite. Pour autant, en matière de taux d'intérêt, c'est à la Banque centrale européenne de prendre ses responsabilités.
Q.- Vous appelez à une baisse quand même, pour ne pas laisser l'Amérique filer devant !
R.- Ce que je souligne simplement, c'est qu'il faut veiller à ce que les écarts de taux des deux cotés de l'Atlantique ne continuent pas à diverger de manière aussi importante, même si la situation en Europe n'est pas celle des Etats-Unis, même si la situation sur le plan économique et les déséquilibres existant aux Etats-Unis sont beaucoup plus forts que ceux que nous rencontrons en Europe. Ce que je veux dire, c'est - et c'est un domaine dans lequel les prérogatives des Etats membres, ceux de la Banque centrale sont partagées - qu'il faut faire attention aux conséquences de tout cela sur les taux de change.
Q.- La Commission de Bruxelles insiste : la France doit accélérer sa réduction des déficits publics. Objectif 2010, pas objectif 2012. Est-ce que la Commission a raison ? Est-ce que le Gouvernement doit aller plus vite ? "Les caisses sont vides, plus que vides", a dit E. Woerth, le ministre du Budget.
R.- Ce qui est important, c'est ce qu'a indiqué le Premier ministre. C'est-à-dire que la France doit continuer ses réformes, et F. Fillon continue, avec son Gouvernement, à mener ses réformes.
Q.- A quel rythme ?
R.- A un rythme qui est assez important. Vous voyez ce qui se passe sur le marché du travail. Vous voyez ce qui a été fait sur les négociations sur les partenaires sociaux. Cela continue en ce qui concerne également la réforme de l'Etat, la rationalisation d'un certain nombre de dépenses, les effectifs. Le Premier ministre a annoncé qu'il y aurait un gel des dépenses en volume d'ici la fin de la législature. Tout cela, ce sont des résultats que nous allons porter à Bruxelles pour montrer que nous sommes sur une voie d'assainissement des finances publiques et de réforme.
Q.- Vous y croyez à l'équilibre en 2010 ?
R.- Je crois que l'équilibre sera plutôt en 2012 qu'en 2010. Je crois qu'en 2010, on aura du mal à être à l'équilibre. Et dans les circonstances actuelles, je crois que même le président de la Commission européenne, monsieur Barroso - qui va voir le président de la République aujourd'hui - a reconnu qu'en termes de croissance, ce qui avait été fait dès l'été en France, notamment dans le cadre du plan de soutien de relance de l'activité, ce qui avait été fait sur les droits de succession, sur les allègements d'impôts, avait permis d'atténuer les conséquences du ralentissement de la croissance liées aux subprimes. La France est un des pays dans lequel la croissance baisse le moins par rapport à d'autres pays, quand vous regardez l'Angleterre et l'Italie, qui voient également leurs déficits augmenter.
Q.- A. Merkel était hier au soir à Paris, invitée de l'UMP. C'est pour cela que vous n'êtes pas aller l'écouter...
R.- Non, on ne peut pas être partout.
Q.- Est-ce que ce n'est pas aussi parce que vous partagez ses angoisses, les angoisses allemandes vis-à-vis de l'Union méditerranéenne ? Vous recommandez d'ailleurs de mettre ce projet un peu en sourdine.
R.- Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Je suis pour l'Union pour ma Méditerranée, parce que je vois bien les enjeux stratégiques. Ce sont quand même des enjeux de paix, ce sont des enjeux de développement, ce sont donc des enjeux de réduction des inégalités entre le Nord et le Sud. Et cela crée une certaine communauté.
Q.- Alors, pendant la présidence française, il faut pousser cela très fort.
R.- Nous devons faire en sorte qu'il y ait une très bonne articulation entre l'Union européenne et l'Union pour la Méditerranée. Et nous devons faire en sorte que ceux qui veulent travailler avec nous, dans le cadre de ce projet, qu'ils soient riverains de la Méditerranée ou pas - et c'est là où se pose le problème avec nos Allemands (sic) - soient associés à ce projet. Donc ce que je souhaite, comme A. Merkel et comme d'autres, c'est de faire en sorte que nous travaillions en étroite relation avec l'Union européenne, avec la Commission, et avec nos partenaires, méditerranéens ou pas, dans le cadre de cette union.
Q.- Néanmoins, P. Devedjian vous a attaqué, il trouve que vous ne soutenez pas assez ce projet, en plus vous voulez voter B. Delanoë à Paris. Alors lui il menace, Devedjian, de ne pas voter votre budget. Que lui répondez-vous ?
R.- Rien, cela ne mérite pas de réponse.
Q.- A ce point là ? C'est du mépris, c'est...
R.- Ce n'est pas du mépris, cela m'indiffère, mais alors, totalement.
Q.- L'immigration sera au coeur de la présidence française de l'Union, dès juillet. La France portera-t-elle un projet d'Europe bunker, dans laquelle on ne rentre plus ?
R.- Absolument pas. Les questions qui sont liées à la gestion des migrations sont des questions qui paraissent très idéologiques en France ; lorsque vous les regardez au niveau européen, ce sont des questions qui se posent à peu près en les mêmes termes à Vilnius, à Lisbonne et à Madrid. Que faut-il faire ? Il faut faire en sorte qu'il y ait, si chacun est d'accord là-dessus, un contrôle aux frontières - que ce soit maritimes, terrestres ou aériennes - qui soit renforcé. Deuxièmement, qu'il y ait une lutte une coopération dans la lutte contre l'immigration illégale. Troisièmement, qu'il y ait des règles communes en matière de droit d'asile et également de délivrance de visas. Et quatrièmement, qu'il y ait des échanges sur les politiques de régularisation qui sont faites, et les politiques d'intégration aussi, puisque dans ce qui est porté au niveau européen, vous avez des politiques d'intégration. Et vous devez faire plus en termes de développement également. C'est donc une approche qui est équilibrée au niveau européen. Et ce que je dis, c'est France doit se situer dans le cadre de ces politiques, uniquement au niveau européen.
Q.- Si le Traité dit "simplifié" est adopté au niveau européen, il y aura un Président pour l'Europe. Est-ce que T. Blair est votre candidat.
R.- C'est prématuré de répondre à cette question. Tout cela ne sera pas fait avant la fin de l'année. Ce qui me paraît important, c'est d'avoir un profil qui soit à la fois, une personne -d'ailleurs une femme ou un homme - qui ait suffisamment de leadership pour bien animer les travaux du Conseil européen...
Q.- C'est le cas pour Blair...
R.- Et qui soit proche des valeurs et des solidarités qui sont celles de l'Union européenne...
Q.- C'est moins le cas...
R.- Et qui soit au coeur, quand même, des solidarités et des valeurs européennes, et qui vive bien, vraiment, dans ce qu'est le coeur de l'Europe, que ce soit l'euro ou Schengen.
Q.- Lundi, en France, le Congrès devrait modifier la Constitution pour que le Traité dit "simplifié" soit adopté. 59 % des Français, selon CSA, interrogés par l'Huma Dimanche, voulaient un référendum. C'est dommage quand même, d'annuler par un Congrès ce que les Français avaient choisi de faire dans un référendum.
D'une part, ce n'est pas le Congrès qui va l'annuler, le Congrès est chargé de réviser la Constitution. Après, nous aurons une ratification du Traité à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Q.- Et pas de référendum, nulle part ?
R.- Il n'y aura pas de référendum. Trois observations : la première, c'est que ce Traité n'est pas une constitution, il est différent de ce qu'est une constitution. La deuxième observation, c'est que tous les pays qui ont également une tradition référendaire, je pense au Danemark, aux Pays- Bas, qui ont également voté par référendum, vont procéder par voie de ratification parlementaire. Il y a 26 et 27 Etats membres qui vont procéder par ratification parlementaire et qui ne vont pas procéder au référendum. Seule l'Irlande y est contrainte de par sa Constitution. Et enfin, troisièmement, N. Sarkozy a été extrêmement clair durant sa campagne électorale sur les choix qu'il allait faire en ce domaine. Cela a été dit et aux Français et à nos partenaires.
Q.- Comment jugez-vous l'attitude du PS face à ce processus ?
R.- J'aurais souhaité que l'attitude du Parti socialiste soit plus claire, entre l'abstention sur la révision et le fait qu'il vote le Traité. L'important au bout du compte, c'est qu'il y ait cette majorité, que le Parti socialiste qui, pris de quelle contorsion, va finalement voter le Traité de Lisbonne, ce qui me paraît le plus important.
Q.- Les sondages ne sont pas bons pour N. Sarkozy en ce moment. Vous regrettez d'avoir saisi la perche de l'ouverture ?
R.- Non, l'ouverture est une chose importante, chacun y va avec sa sensibilité. Je comprends que cela ne plaise pas à tout le monde. Moi, on sait d'où je viens, je viens de la gauche, je viens du socialisme, j'apporte ma sensibilité, c'est une certaine liberté de ton
Q.- Pas de malaise ?
R.- Non, le malaise que l'on constate est général, lié à une situation économique qui est plus importante, et lié à une certaine impatience légitime des Français de voir les réformes se mettre en oeuvre.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 31 janvier 2008
R.- Non, je ne le crois pas. D'une part, nous n'en sommes pas là, la Société Générale reste une banque qui est très solide, qui est très forte, il n'y a pas de risque pour les déposants, pas de risque d'OPA, cela a été démenti hier par les responsables de la Société Générale.
Q.- Mais il y a des appétits quand même !
R.- Il y a des appétits, mais vous avez aussi des appétits français et des appétits européens. On est dans une économie ouverte, et puis la Commission est dans son rôle lorsqu'elle dit que les règles de concurrence européenne doivent être respectées.
Q.- La France a-t-elle les moyens, de toute façon, de s'opposer à une OPA et de choisir les racheteurs ?
R.- Quand on est dans des secteurs très sensibles - le secteur financier en est un puisque c'est un secteur qui est structurant pour l'économie -, il est assez normal que les pouvoirs publics regarde comment l'argent des Français, dans quel main l'argent des Français se trouve.
Q.- N. Sarkozy est-il sorti de son rôle en demandant à demi-mot le départ de D. Bouton ? A-t-il "perdu son sang-froid", comme le dit votre ami F. Hollande ?
R.- Non, je ne le crois pas. Les mêmes choses avaient été dites d'ailleurs par mon ami F. Hollande, auparavant, qui s'était ému de tout ce qui se passait, à juste titre, à la Société Générale. Le véritable problème est le suivant : c'est qu'on a un système financier qui marche quand même un peu sur la tête. Quand vous regardez les résultats de la Générale, c'est une banque qui faisait cinq à six milliards de résultats chaque année. Aujourd'hui, il y a un trou de cinq milliards, qui est lié à des conditions que l'on va mieux connaître dans les prochains jours, compte tenu des enquêtes et des rapports qui sont en cours. Ce qui apparaît, c'est que les banques aujourd'hui, et la Générale en est l'exemple, ne vivaient pas sur une véritable richesse, vivaient sur des phénomènes et des mouvements qui étaient des mouvements spéculatifs qui faisaient l'essentiel des bénéfices. Quand ces mouvements se passent mal, vous n'avez plus de bénéfices dans le cadre des banques. Donc il faut revenir à un système financier qui soit plus assaini et à des règles de base, c'est-à-dire que les banques sont là pour financer l'économie et pour prêter aux entreprises et aux particuliers.
Q.- Dans ce moment de crise, on voit la Fed américaine aider l'économie, changer de ligne, s'adapter et la Banque centrale européenne restée rigide. Est-ce que "J.-C. Trichet est l'homme orchestre du Titanic", comme l'a dit un eurodéputé UMP ?
R.- Je ne le crois pas. J.-C. Trichet est un grand professionnel. Il est à la tête de la Banque centrale européenne. Il a à gérer une situation qui est difficile entre ce que peuvent être les tensions de l'inflation et ce qu'est le ralentissement de la croissance. Je crois qu'il devrait tenir compte de manière équilibrée de ces deux éléments. Ce qui est le plus inquiétant, c'est l'écart de taux qui se crée des deux cotés de l'Atlantique. Pourquoi est-ce que c'est le plus inquiétant ? C'est parce que cela a une évolution sur le cours des changes, sur le cours de l'euro par rapport au dollar, et qu'à ce moment là, nous risquons de nous trouver à des niveaux de l'euro par rapport au dollar, qu'aucun Européen, quel que qu'il soit, ne souhaite. Pour autant, en matière de taux d'intérêt, c'est à la Banque centrale européenne de prendre ses responsabilités.
Q.- Vous appelez à une baisse quand même, pour ne pas laisser l'Amérique filer devant !
R.- Ce que je souligne simplement, c'est qu'il faut veiller à ce que les écarts de taux des deux cotés de l'Atlantique ne continuent pas à diverger de manière aussi importante, même si la situation en Europe n'est pas celle des Etats-Unis, même si la situation sur le plan économique et les déséquilibres existant aux Etats-Unis sont beaucoup plus forts que ceux que nous rencontrons en Europe. Ce que je veux dire, c'est - et c'est un domaine dans lequel les prérogatives des Etats membres, ceux de la Banque centrale sont partagées - qu'il faut faire attention aux conséquences de tout cela sur les taux de change.
Q.- La Commission de Bruxelles insiste : la France doit accélérer sa réduction des déficits publics. Objectif 2010, pas objectif 2012. Est-ce que la Commission a raison ? Est-ce que le Gouvernement doit aller plus vite ? "Les caisses sont vides, plus que vides", a dit E. Woerth, le ministre du Budget.
R.- Ce qui est important, c'est ce qu'a indiqué le Premier ministre. C'est-à-dire que la France doit continuer ses réformes, et F. Fillon continue, avec son Gouvernement, à mener ses réformes.
Q.- A quel rythme ?
R.- A un rythme qui est assez important. Vous voyez ce qui se passe sur le marché du travail. Vous voyez ce qui a été fait sur les négociations sur les partenaires sociaux. Cela continue en ce qui concerne également la réforme de l'Etat, la rationalisation d'un certain nombre de dépenses, les effectifs. Le Premier ministre a annoncé qu'il y aurait un gel des dépenses en volume d'ici la fin de la législature. Tout cela, ce sont des résultats que nous allons porter à Bruxelles pour montrer que nous sommes sur une voie d'assainissement des finances publiques et de réforme.
Q.- Vous y croyez à l'équilibre en 2010 ?
R.- Je crois que l'équilibre sera plutôt en 2012 qu'en 2010. Je crois qu'en 2010, on aura du mal à être à l'équilibre. Et dans les circonstances actuelles, je crois que même le président de la Commission européenne, monsieur Barroso - qui va voir le président de la République aujourd'hui - a reconnu qu'en termes de croissance, ce qui avait été fait dès l'été en France, notamment dans le cadre du plan de soutien de relance de l'activité, ce qui avait été fait sur les droits de succession, sur les allègements d'impôts, avait permis d'atténuer les conséquences du ralentissement de la croissance liées aux subprimes. La France est un des pays dans lequel la croissance baisse le moins par rapport à d'autres pays, quand vous regardez l'Angleterre et l'Italie, qui voient également leurs déficits augmenter.
Q.- A. Merkel était hier au soir à Paris, invitée de l'UMP. C'est pour cela que vous n'êtes pas aller l'écouter...
R.- Non, on ne peut pas être partout.
Q.- Est-ce que ce n'est pas aussi parce que vous partagez ses angoisses, les angoisses allemandes vis-à-vis de l'Union méditerranéenne ? Vous recommandez d'ailleurs de mettre ce projet un peu en sourdine.
R.- Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Je suis pour l'Union pour ma Méditerranée, parce que je vois bien les enjeux stratégiques. Ce sont quand même des enjeux de paix, ce sont des enjeux de développement, ce sont donc des enjeux de réduction des inégalités entre le Nord et le Sud. Et cela crée une certaine communauté.
Q.- Alors, pendant la présidence française, il faut pousser cela très fort.
R.- Nous devons faire en sorte qu'il y ait une très bonne articulation entre l'Union européenne et l'Union pour la Méditerranée. Et nous devons faire en sorte que ceux qui veulent travailler avec nous, dans le cadre de ce projet, qu'ils soient riverains de la Méditerranée ou pas - et c'est là où se pose le problème avec nos Allemands (sic) - soient associés à ce projet. Donc ce que je souhaite, comme A. Merkel et comme d'autres, c'est de faire en sorte que nous travaillions en étroite relation avec l'Union européenne, avec la Commission, et avec nos partenaires, méditerranéens ou pas, dans le cadre de cette union.
Q.- Néanmoins, P. Devedjian vous a attaqué, il trouve que vous ne soutenez pas assez ce projet, en plus vous voulez voter B. Delanoë à Paris. Alors lui il menace, Devedjian, de ne pas voter votre budget. Que lui répondez-vous ?
R.- Rien, cela ne mérite pas de réponse.
Q.- A ce point là ? C'est du mépris, c'est...
R.- Ce n'est pas du mépris, cela m'indiffère, mais alors, totalement.
Q.- L'immigration sera au coeur de la présidence française de l'Union, dès juillet. La France portera-t-elle un projet d'Europe bunker, dans laquelle on ne rentre plus ?
R.- Absolument pas. Les questions qui sont liées à la gestion des migrations sont des questions qui paraissent très idéologiques en France ; lorsque vous les regardez au niveau européen, ce sont des questions qui se posent à peu près en les mêmes termes à Vilnius, à Lisbonne et à Madrid. Que faut-il faire ? Il faut faire en sorte qu'il y ait, si chacun est d'accord là-dessus, un contrôle aux frontières - que ce soit maritimes, terrestres ou aériennes - qui soit renforcé. Deuxièmement, qu'il y ait une lutte une coopération dans la lutte contre l'immigration illégale. Troisièmement, qu'il y ait des règles communes en matière de droit d'asile et également de délivrance de visas. Et quatrièmement, qu'il y ait des échanges sur les politiques de régularisation qui sont faites, et les politiques d'intégration aussi, puisque dans ce qui est porté au niveau européen, vous avez des politiques d'intégration. Et vous devez faire plus en termes de développement également. C'est donc une approche qui est équilibrée au niveau européen. Et ce que je dis, c'est France doit se situer dans le cadre de ces politiques, uniquement au niveau européen.
Q.- Si le Traité dit "simplifié" est adopté au niveau européen, il y aura un Président pour l'Europe. Est-ce que T. Blair est votre candidat.
R.- C'est prématuré de répondre à cette question. Tout cela ne sera pas fait avant la fin de l'année. Ce qui me paraît important, c'est d'avoir un profil qui soit à la fois, une personne -d'ailleurs une femme ou un homme - qui ait suffisamment de leadership pour bien animer les travaux du Conseil européen...
Q.- C'est le cas pour Blair...
R.- Et qui soit proche des valeurs et des solidarités qui sont celles de l'Union européenne...
Q.- C'est moins le cas...
R.- Et qui soit au coeur, quand même, des solidarités et des valeurs européennes, et qui vive bien, vraiment, dans ce qu'est le coeur de l'Europe, que ce soit l'euro ou Schengen.
Q.- Lundi, en France, le Congrès devrait modifier la Constitution pour que le Traité dit "simplifié" soit adopté. 59 % des Français, selon CSA, interrogés par l'Huma Dimanche, voulaient un référendum. C'est dommage quand même, d'annuler par un Congrès ce que les Français avaient choisi de faire dans un référendum.
D'une part, ce n'est pas le Congrès qui va l'annuler, le Congrès est chargé de réviser la Constitution. Après, nous aurons une ratification du Traité à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Q.- Et pas de référendum, nulle part ?
R.- Il n'y aura pas de référendum. Trois observations : la première, c'est que ce Traité n'est pas une constitution, il est différent de ce qu'est une constitution. La deuxième observation, c'est que tous les pays qui ont également une tradition référendaire, je pense au Danemark, aux Pays- Bas, qui ont également voté par référendum, vont procéder par voie de ratification parlementaire. Il y a 26 et 27 Etats membres qui vont procéder par ratification parlementaire et qui ne vont pas procéder au référendum. Seule l'Irlande y est contrainte de par sa Constitution. Et enfin, troisièmement, N. Sarkozy a été extrêmement clair durant sa campagne électorale sur les choix qu'il allait faire en ce domaine. Cela a été dit et aux Français et à nos partenaires.
Q.- Comment jugez-vous l'attitude du PS face à ce processus ?
R.- J'aurais souhaité que l'attitude du Parti socialiste soit plus claire, entre l'abstention sur la révision et le fait qu'il vote le Traité. L'important au bout du compte, c'est qu'il y ait cette majorité, que le Parti socialiste qui, pris de quelle contorsion, va finalement voter le Traité de Lisbonne, ce qui me paraît le plus important.
Q.- Les sondages ne sont pas bons pour N. Sarkozy en ce moment. Vous regrettez d'avoir saisi la perche de l'ouverture ?
R.- Non, l'ouverture est une chose importante, chacun y va avec sa sensibilité. Je comprends que cela ne plaise pas à tout le monde. Moi, on sait d'où je viens, je viens de la gauche, je viens du socialisme, j'apporte ma sensibilité, c'est une certaine liberté de ton
Q.- Pas de malaise ?
R.- Non, le malaise que l'on constate est général, lié à une situation économique qui est plus importante, et lié à une certaine impatience légitime des Français de voir les réformes se mettre en oeuvre.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 31 janvier 2008