Texte intégral
C. Roux, B. Toussaint et L. Mercadet C. Roux : A. Santini, secrétaire d'Etat à la Fonction publique, président délégué du Nouveau Centre. Comme ses petits camarades du Gouvernement, il a bien entendu le rappel à l'ordre du Président, N. Sarkozy. Ulcéré par les attaques contre son collaborateur - non pas F. Fillon, qui grimpe dans les sondages mais C. Guéant - la majorité rappelée à l'ordre est priée de serrer les rangs avant les municipales. Un scrutin qui conduit même le Président à enterrer ce qui a fait sa marque de fabrique : la rupture. Bonjour ! Salut ! B. Toussaint : Bonjour A. Santini, merci d'être avec nous ce matin. Alors effectivement, N. Sarkozy rappelle à l'ordre, cela s'est passé en Conseil des ministres. Il a promis de prendre les décisions qui s'imposent après les municipales. Vous vous êtes senti visé par ce rappel à l'ordre ?
R.- J'étais très content de retrouver Nicolas, parce que je commençais à être fatigué d'entendre des gens qui lui doivent leur élection se permettre de critiquer. C'est vraiment misérable, c'est bien sûr le jeu politique, mais quand même, Nicolas a été un grand candidat à la présidentielle. Il a été élu avec un taux de participation de 85 % et une majorité extraordinaire. Il a gagné les législatives, on lui a même reproché de ne pas être intervenu entre les deux tours pour ne pas gagner encore plus de députés. On ne saura jamais s'il l'a fait express ou si c'était un hasard. Et aujourd'hui bien sûr, ah ! Comment ? Il a perdu la main etc.
C. Roux : Parce que les sondages sont en baisse c'est ça ?
R.- Parce que les sondages sont en baisse et puis cela grogne, c'est toujours pareil. Certains sont impliqués dans les municipales et leur génie ne suffit pas à les faire gagner, alors ils disent : c'est évidemment, ah, si le roi savait ça !
C. Roux : Alors vous lui devez tout, fermez là !
R.- Je leur dis : occupez-vous des affaires qui sont à votre portée, c'est-à-dire des affaires municipales. Battez-vous sur place, soyez autre chose que des gens qui dépendent du Président. Et puis je leur dis aussi : méfiez-vous, Nicolas n'est jamais aussi bon que quand il est menacé. On le voit actuellement, il est reparti...
C. Roux : Mais vous dites, il est reparti, on l'a retrouvé, il était où A. Santini ?
R.- Il n'oubliera pas ceux qui l'ont trahi, voilà.
C. Roux : Il était où, parce que vous dites : "il est reparti, on l'a retrouvé". Il était où ?
R.- Oui, il a eu à un moment une pause personnelle, parce que lui, il assume, il le dit, régulièrement, il a le droit, il a le droit au bonheur aussi. L'autre jour, il nous a fait un très joli discours au Conseil des ministres, il n'y avait pas que des problèmes politiques, n'est-ce pas.
B. Toussaint : Il vous a parlé de son mariage ?
R.- Il nous a parlé de son bonheur et il nous a souhaité, à nous, le bonheur, en disant qu'en politique - je suis en train de trahir des secrets, là - mais qu'en politique il y a peu de moments heureux et qu'il fallait, de temps en temps savoir les prendre et j'ai trouvé ça émouvant.
C. Roux : C'est la priorité en ce moment à votre avis ?
R.- Non, mais la priorité pour lui c'est de travailler. J'ai été très content, vous ne m'en avez pas parlé, qu'il ait reçu les buralistes...
C. Roux : On va en parler, vous pensez bien. Mais d'abord, on va parler des conseillers du Président qui ont été la cible de nombreuses attaques. Vous êtes de quel côté vous : vous êtes du côté des parlementaires ou des conseillers ? De quel côté vous vous situez, vous, en tant que ministre, c'est compliqué ?
R.- Je suis du côté du Président, c'est tout, voilà c'est clair, et du Premier ministre que je respecte beaucoup.
C. Roux : Mais vous trouvez que ce n'est pas un problème que les conseillers s'expriment sans rendre de comptes, les conseillers du Président ?
R.- Mais c'est le Président qui décide. Ils ont déjà reçu un rappel à l'ordre d' E. Mignon, la directrice de cabinet, qui est une femme remarquable. Et donc, ils n'agissent plus maintenant que sur autorisation c'es très bien.
C. Roux : Donc vous êtes devenu légitimiste ... C'est le rappel à l'ordre qui vous a fait rentrer dans le rang, A. Santini ?
B. Toussaint : C'est le bonheur, j'ai l'impression. Le discours sur le bonheur cela vous a... L. Mercadet : Mais, oui, il a le coeur tendre.
R.- Vous êtes vraiment des hyènes !
C. Roux : Pas du tout. Vous dites à propos de N. Sarkozy : les sondages au fond, cela va, cela vient. J.-P. Raffarin a dit, enfin laisse comprendre qu'il y avait un problème de gouvernance. Il dit : "il faut revenir à la nécessaire protection du président de la République par le Premier ministre", c'est ce matin dans Libération. Est-ce que c'est aussi un conseil que vous adressez à N. Sarkozy ? Est-ce qu'il faut qu'il se protége derrière F. Fillon ?
R.- Oui, ça Nicolas, il n'aime pas beaucoup qu'on lui dise, voilà. Il dit toujours : j'ai été élu pour travailler, je n'ai pas été élu pour faire la sieste. Le Premier ministre, bon, il fait ce qui lui est dévolu, mais lui, il ne se cache pas. Il est comme ça, il assume, c'est bien pour ça qu'on l'a élu. Alors on est en train de lui dire maintenant : "Ah ! Tu ferais mieux de rester chez toi ; les buralistes, il ne faut pas s'en occuper. Les taxis, c'est le bordel, mais laisse faire à d'autres". Enfin, ce n'est pas du tout son tempérament et ce n'est pas pour ça que le contrat a été signé avec l'opinion.
C. Roux : Je vois bien que vous avez envie de parler des buralistes, on va en parler. Le Gouvernement donne le sentiment... d'ailleurs a fait machine arrière sur les taxis, une prime pour les petites retraites de 200euros, fait un geste aux buralistes. On a l'impression, pardon, mais que N. Sarkozy c'est du Raffarin. Où est passée la rupture ? C'est-à-dire qu'on fait des cadeaux avant les élections et on ne va pas au bout d'une logique, qui était par exemple de déréglementer des professions, comme celle des taxis.
R.- Vous croyez que s'en prendre aux buralistes - enfin je sais bien que tous mes amis ayatollah sont en train de s'agiter derrière leur écran, mais moi je l'avais dit dès le mois de janvier, c'était peut-être sur cet écran, sur ce plateau...
C. Roux : C'était chez nous A. Santini.
R.- Voilà et j'ai obligé ma copine Roselyne et mon copain Xavier à sortir ensemble.
B. Toussaint : Bachelot et Bertrand.
R.- « Bonjour ma copine, bonjour mon copain », voilà, enfin ils avaient relancé l'opération. Et j'avais dit : on est en train de piétiner une spécificité française, car c'est vrai qu'il n'y a qu'en France qu'on a des buralistes qui vendent du tabac et qui à côté permettent de consommer. Et puis surtout, en milieu rural, je l'avais aussi dit ça. Alors je l'avais dit, respectueusement, puisque je suis évidemment solidaire et que c'est un décret seulement, ce n'est pas une loi qui a été votée. Alors maintenant...
C. Roux : Sur le reste, cela donne le sentiment que le Gouvernement fait machine arrière et en perd la rupture.
R.- Mais non, le Gouvernement... mais la rupture sur les buralistes, vous vous rendez compte, enfin, oh, Caroline, arrêtez...
C. Roux : Je vous en prie André !
R.- La rupture sur les buralistes.
B. Toussaint : On va vous laisser. C. Roux : Les buralistes, les taxis...
R.- Mais les taxis, il y a aussi un problème à régler.
C. Roux : Eh bien justement, il avait dit : on va bien réglementer, je ferai tout du rapport Attali.
R.- Leur retraite c'est leur plaque. Il faut trouver un système. Moi j'ai vu les taxis de chez moi qui m'ont dit : voilà, on a vendu de justesse, on attend 20.000 euros, c'était leur retraite. Il faut trouver des solutions humaines, des solutions qui soient économiques, bien sûr. C'est vrai qu'on manque de taxis...
C. Roux : Il ne faut pas réformer, il faut céder au lobbying, c'est ça qui est en train de se passer ?
R.- Non, il faut trouver des formules. Qu'est-ce que je suis en train de faire moi avec des fonctionnaires et avec E. Woerth ? Eh bien nous sommes en train d'écouter des gens, de dialoguer, de "perdre du temps", entre guillemets. Ce n'est pas vrai, on ne perd pas de temps. Hier, j'étais à Berlin pour rencontrer mes homologues, ils nous regardent avec intérêt, parce que, eux, ils commencent à avoir des grèves dures. Alors ils nous demandent un peu : et vous, comment vous faites ? Eh bien on leur apprend, nous on est gentil et là c'est très dur actuellement chez eux, ils demandent 8 %, vous vous rendez compte.
C. Roux : Vous vous rendez compte de ce que vous êtes en train de dire ? Cela veut dire qu'il faut faire des grèves dures et que le Gouvernement va céder !
R.- Alors, les Allemands sont en train de me dire, finalement... parce que j'ai également rencontré les syndicats, c'est très intéressant. Et d'ailleurs je vous donne un scoop : je vais proposer à E. Woerth et au Premier ministre que, pendant que la France présidera l'Union européenne, on échange les secrétaires d'Etat aux fonctions publiques et qu'on échange aussi les syndicats.
B. Toussaint : C'est-à-dire ?
R.- Eh bien que nos huit organisations syndicales iraient à Berlin, pendant un ou deux jours, et les deux VerDi et DGB allemands iraient en France.
C. Roux : Cela sert à quoi ?
R.- Eh bien c'est pour que l'on sente que le même problème n'est pas traité de la même façon.
B. Toussaint : Alors au-delà de toute cette agitation, l'impression qu'on a aussi c'est qu'effectivement avec les buralistes, avec les petites retraites, les chauffeurs de taxi, le Président sort l'extincteur à quelques jours des municipales, c'est une évidence. Est-ce que vous pensez que c'est une bonne stratégie ?
R.- Cela se fait tout le temps, je ne vois pas pourquoi avant les élections, on va se flageller...
C. Roux : La rupture A. Santini, voilà on y est.
R.- Mais la rupture sur les municipales, allons.
C. Roux : Cela se fait tout le temps, mais justement ! B. Toussaint : Vous ne craignez pas la déculottée aux municipales ?
R.- On verra selon les candidats. J'ai vu déjà un sondage ce matin où cela remontait, alors vous voyez.
B. Toussaint : Un point, oui.
R.- Plus un c'est beaucoup vous savez, un point. La première fois que j'ai été élu, c'était avec 44 voix d'avance.
L. Mercadet : Mais inversement, cela veut dire qu'après les municipales, il y a de la rupture dans l'air, de la déréglementation, voire de resserrement de vis, de la rigueur, c'est ça que cela veut dire ?
R.- Oui, mais c'est ce que racontent les socialistes. Vous n'êtes pas devenu socialiste ? Ils passent leur temps à l'Assemblée à dire : après, il y aura un plan de rigueur, il y aura...
L. Mercadet : Vous, vous dites que non !
R.- Non, mais non.
C. Roux : Remaniement non plus ?
R.- Remaniement, sans doute et alors ?
C. Roux : Cela vous effraye ?
R.- Non, mais je ne sais pas, vous savez, ministre c'est bien, ancien ministre cela dure plus longtemps.
B. Toussaint : Quelle lucidité !
R.- Ah ! Moi je l'ai été, j'ai été longtemps ancien ministre.
C. Roux : Encore J.-P. Raffarin, en ce moment, il a beaucoup parlé...
R.- Décidément, il vous a tapé dans l'oeil.
C. Roux : A propos du Centre, il dit : "après les municipales, il faudra, un jour...
R.- Ah ça y est, elle s'en prend aussi au Centre.
C. Roux : Ah non, non, non... Après les municipales, il faudra, un jour, un Epinay du Centre". Est-ce que vous êtes d'accord avec ça, ou...
R.- Moi j'avais dit un "Grenelle du Centre".
C. Roux : Est-ce que vous êtes plutôt d'accord avec P. Devedjian qui dit : non, non il faut plutôt faire une confédération de l'UMP ?
R.- J'ai vu que mon ami Sauvadet, président à l'Assemblée du Nouveau Centre, était plutôt hostile à une confédération. Moi j'avais lancé l'idée d'un "Grenelle du Centre".
C. Roux : Cela veut dire quoi pour les centristes qui nous regardent ?
R.- Cela veut dire qu'il fallait qu'on se rassemble. Alors il fallait d'abord dialoguer avec J.-M. Bockel, avec E. Besson.
B. Toussaint : Avec F. Bayrou ?
R.- Avec F. Bayrou, je crois que non, c'est mal parti. Je l'avais dit, mais vous ne m'écoutez pas, souvent je le dis ici, cela sera Guyana sans le jus d'orange.
B. Toussaint : Les scénaristes ne sont pas en grève à Issy-les- Moulineaux ?
R.- Je n'ai pas besoin de scénaristes, je me fournis moi-même, je me contente du meilleur.
C. Roux : Juste très court. Il y a besoin de mettre de l'ordre dans la majorité, ces initiatives là sont faites pour mettre de l'ordre, pour organiser la majorité, est-ce que c'est nécessaire ?
R.- Après chaque élection, on repositionne les choses et les gens, c'est normal. C'est à cela que servent les élections.
B. Toussaint : Allez, la question de Léon. L. Mercadet : A. Santini, vous êtes secrétaire d'Etat à la Fonction publique, vous avez les fonctionnaires en charge. Alors justement, en début de semaine, la Cour des Comptes de P. Seguin a rendu un rapport qui pointe des dysfonctionnements, des absurdités. A quel dossier allez-vous vous attaquer, pour assurer un suivi de ce rapport de la Cour des Comptes. C'est les handicapés, c'est le conservateur des hypothèques, c'est la station thermale d'Aix-les- Bains ?
R.- Non, non, quelques dossiers relèvent de la Fonction publique. Vous avez eu effectivement le fonds pour les handicapés. Quand je suis arrivé au ministère, il y avait un problème, c'est une des rares institutions qui avait beaucoup d'argent et qui ne le dépensait pas... Alors c'est fini, 150 millions d'euros stockés, on en avait dépensé 15.000, enfin c'est lamentable. Donc nous avons opéré les changements de gouvernance, comme on dit, pudiquement et c'est reparti. C'est un peu l'équivalent du privé pour les handicapés, on paie une taxe quand on n'atteint pas les 6 % et c'est malheureusement le cas, donc ça on s'en occupe. Il y a un autre secteur qui a été évoqué : c'est celui des pensions. Là aussi, nous sommes en train de concentrer les moyens, c'est une affaire qui dure depuis trente ans. Alors la Fonction publique n'est pas en première ligne dans ce genre de dossier. Nous avons la Cour des Comptes qui a déjà remis un rapport à la Commission des Finances du Sénat, donc je suis allé devant elle, et j'ai promis qu'il fallait faire quelque chose, parce que c'était l'évidence. Nous actuellement, on se concentre sur la mobilité. J'ai été donc en Allemagne, à Berlin hier, pour voir comment ils faisaient, ce n'est pas terrible non plus. Parce que chez eux, il y a les fonctionnaires d'Etat et des fonctionnaires contractuels et la mobilité chez nous c'est 5 % seulement. Donc nous voulons que les fonctionnaires puissent bouger dans leur fonction publique et avec les autres fonctions, Etat, Territoriales et Hospitalières et même avec le privé.
B. Toussaint : D'accord, le "J'aime, j'aime pas", un tout petit, parce qu'on n'a plus beaucoup de temps. C. Roux : Bon le mini "j'aime, j'aime pas". J'aime pas le plan de la ville ? B. Toussaint : De F. Amara !
R.- Ecoutez, moi j'aime beaucoup Fadela, je suis souvent à côté d'elle à l'Assemblée, c'est une fille courageuse, authentique et elle souffre beaucoup des critiques des autres, oui.
C. Roux : Elle n'a pas été assez soutenue par la majorité ou par ses petites camarades du Gouvernement ?
R.- Elle a été soutenue globalement, mais il y en quelques uns qui la chatouillent toujours et ça c'est difficile pour elle.
L. Mercadet : Dont C. Boutin, son ministre de tutelle.
R.- Ça c'est autre chose, on connaît bien. Moi, il se trouve que je suis avec E. Woerth, qui est un garçon loyal, très professionnel. Avant j'étais ministre délégué avec Léotard, cela marchait aussi très bien, parce qu'on était corses tous les deux. Là, c'est un petit peu plus difficile, mais bon. On ne va pas faire de machisme élémentaire.
B. Toussaint : J'aime, j'aime pas John McCain.
R.- Ah très bien.
B. Toussaint : C'est votre favori ?
R.- Ah oui, moi je trouve que c'est un type très courageux : cinq ans, pilote de chasse. Enfin, d'abord lui, il a fait la guerre, alors que les autres se sont arrangés pour ne pas la faire.
B. Toussaint : Il est un peu jeune, Barack Obama, pour...
R.- Oui, bien sûr. Cela me rappelle, en Corse... Il y avait un candidat à Corte, il était corse et il arrive à une partie de cartes, les vieux étaient en train de taper et puis d'un seul coup, il y en a un qui se tourne vers lui et qui lui dit « La guerre de 14, vous l'avez faite ? », il dit « non ». Eh bien il faudrait la faire ! Il a repris la partie et il a compris qu'il valait mieux se retirer de la compétition. Alors non, on ne va pas demander à Obama de faire la guerre, mais il est incontestable que McCain correspond- nous, on n'est pas très branché là-dessus - à une image. J'entendais dans une interview un type qui disait : moi je ne demande pas au Président d'orienter l'économie, je lui demande de défendre notre pays et McCain, il est fait pour ce job. C'est bizarre. N'oubliez pas, il a été cinq ans prisonnier, torturé, c'est un type très courageux, avec des idées qui lui sont propres d'ailleurs. Il est par exemple pour la guerre en Irak, mais il est violemment contre la torture. Donc il peut, il peut se permettre d'assumer ses idées. Ce qui explique d'ailleurs cette résurgence dans les sondages.
B. Toussaint : Bien on s'arrête là. Certains de nos invités politiques arrivent ici en grognant, en disant que c'est trop tôt, on ne donne pas de nom d'ailleurs. En revanche, vous, ce matin, vous étiez très en forme.
R.- Je suis toujours en forme. D'abord je n'habite pas loin. Malgré mes problèmes de balcon... cela s'est bien passé. Et puis j'aime bien votre émission, j'aime bien les matinales en général, parce que les gens sont chez eux et si on parle un petit peu fort et un petit peu drôle, ils nous entendent bien.
B. Toussaint : Le message est passé, merci, A. Santini, à très bientôt dans la Matinale.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 8 février 2008
R.- J'étais très content de retrouver Nicolas, parce que je commençais à être fatigué d'entendre des gens qui lui doivent leur élection se permettre de critiquer. C'est vraiment misérable, c'est bien sûr le jeu politique, mais quand même, Nicolas a été un grand candidat à la présidentielle. Il a été élu avec un taux de participation de 85 % et une majorité extraordinaire. Il a gagné les législatives, on lui a même reproché de ne pas être intervenu entre les deux tours pour ne pas gagner encore plus de députés. On ne saura jamais s'il l'a fait express ou si c'était un hasard. Et aujourd'hui bien sûr, ah ! Comment ? Il a perdu la main etc.
C. Roux : Parce que les sondages sont en baisse c'est ça ?
R.- Parce que les sondages sont en baisse et puis cela grogne, c'est toujours pareil. Certains sont impliqués dans les municipales et leur génie ne suffit pas à les faire gagner, alors ils disent : c'est évidemment, ah, si le roi savait ça !
C. Roux : Alors vous lui devez tout, fermez là !
R.- Je leur dis : occupez-vous des affaires qui sont à votre portée, c'est-à-dire des affaires municipales. Battez-vous sur place, soyez autre chose que des gens qui dépendent du Président. Et puis je leur dis aussi : méfiez-vous, Nicolas n'est jamais aussi bon que quand il est menacé. On le voit actuellement, il est reparti...
C. Roux : Mais vous dites, il est reparti, on l'a retrouvé, il était où A. Santini ?
R.- Il n'oubliera pas ceux qui l'ont trahi, voilà.
C. Roux : Il était où, parce que vous dites : "il est reparti, on l'a retrouvé". Il était où ?
R.- Oui, il a eu à un moment une pause personnelle, parce que lui, il assume, il le dit, régulièrement, il a le droit, il a le droit au bonheur aussi. L'autre jour, il nous a fait un très joli discours au Conseil des ministres, il n'y avait pas que des problèmes politiques, n'est-ce pas.
B. Toussaint : Il vous a parlé de son mariage ?
R.- Il nous a parlé de son bonheur et il nous a souhaité, à nous, le bonheur, en disant qu'en politique - je suis en train de trahir des secrets, là - mais qu'en politique il y a peu de moments heureux et qu'il fallait, de temps en temps savoir les prendre et j'ai trouvé ça émouvant.
C. Roux : C'est la priorité en ce moment à votre avis ?
R.- Non, mais la priorité pour lui c'est de travailler. J'ai été très content, vous ne m'en avez pas parlé, qu'il ait reçu les buralistes...
C. Roux : On va en parler, vous pensez bien. Mais d'abord, on va parler des conseillers du Président qui ont été la cible de nombreuses attaques. Vous êtes de quel côté vous : vous êtes du côté des parlementaires ou des conseillers ? De quel côté vous vous situez, vous, en tant que ministre, c'est compliqué ?
R.- Je suis du côté du Président, c'est tout, voilà c'est clair, et du Premier ministre que je respecte beaucoup.
C. Roux : Mais vous trouvez que ce n'est pas un problème que les conseillers s'expriment sans rendre de comptes, les conseillers du Président ?
R.- Mais c'est le Président qui décide. Ils ont déjà reçu un rappel à l'ordre d' E. Mignon, la directrice de cabinet, qui est une femme remarquable. Et donc, ils n'agissent plus maintenant que sur autorisation c'es très bien.
C. Roux : Donc vous êtes devenu légitimiste ... C'est le rappel à l'ordre qui vous a fait rentrer dans le rang, A. Santini ?
B. Toussaint : C'est le bonheur, j'ai l'impression. Le discours sur le bonheur cela vous a... L. Mercadet : Mais, oui, il a le coeur tendre.
R.- Vous êtes vraiment des hyènes !
C. Roux : Pas du tout. Vous dites à propos de N. Sarkozy : les sondages au fond, cela va, cela vient. J.-P. Raffarin a dit, enfin laisse comprendre qu'il y avait un problème de gouvernance. Il dit : "il faut revenir à la nécessaire protection du président de la République par le Premier ministre", c'est ce matin dans Libération. Est-ce que c'est aussi un conseil que vous adressez à N. Sarkozy ? Est-ce qu'il faut qu'il se protége derrière F. Fillon ?
R.- Oui, ça Nicolas, il n'aime pas beaucoup qu'on lui dise, voilà. Il dit toujours : j'ai été élu pour travailler, je n'ai pas été élu pour faire la sieste. Le Premier ministre, bon, il fait ce qui lui est dévolu, mais lui, il ne se cache pas. Il est comme ça, il assume, c'est bien pour ça qu'on l'a élu. Alors on est en train de lui dire maintenant : "Ah ! Tu ferais mieux de rester chez toi ; les buralistes, il ne faut pas s'en occuper. Les taxis, c'est le bordel, mais laisse faire à d'autres". Enfin, ce n'est pas du tout son tempérament et ce n'est pas pour ça que le contrat a été signé avec l'opinion.
C. Roux : Je vois bien que vous avez envie de parler des buralistes, on va en parler. Le Gouvernement donne le sentiment... d'ailleurs a fait machine arrière sur les taxis, une prime pour les petites retraites de 200euros, fait un geste aux buralistes. On a l'impression, pardon, mais que N. Sarkozy c'est du Raffarin. Où est passée la rupture ? C'est-à-dire qu'on fait des cadeaux avant les élections et on ne va pas au bout d'une logique, qui était par exemple de déréglementer des professions, comme celle des taxis.
R.- Vous croyez que s'en prendre aux buralistes - enfin je sais bien que tous mes amis ayatollah sont en train de s'agiter derrière leur écran, mais moi je l'avais dit dès le mois de janvier, c'était peut-être sur cet écran, sur ce plateau...
C. Roux : C'était chez nous A. Santini.
R.- Voilà et j'ai obligé ma copine Roselyne et mon copain Xavier à sortir ensemble.
B. Toussaint : Bachelot et Bertrand.
R.- « Bonjour ma copine, bonjour mon copain », voilà, enfin ils avaient relancé l'opération. Et j'avais dit : on est en train de piétiner une spécificité française, car c'est vrai qu'il n'y a qu'en France qu'on a des buralistes qui vendent du tabac et qui à côté permettent de consommer. Et puis surtout, en milieu rural, je l'avais aussi dit ça. Alors je l'avais dit, respectueusement, puisque je suis évidemment solidaire et que c'est un décret seulement, ce n'est pas une loi qui a été votée. Alors maintenant...
C. Roux : Sur le reste, cela donne le sentiment que le Gouvernement fait machine arrière et en perd la rupture.
R.- Mais non, le Gouvernement... mais la rupture sur les buralistes, vous vous rendez compte, enfin, oh, Caroline, arrêtez...
C. Roux : Je vous en prie André !
R.- La rupture sur les buralistes.
B. Toussaint : On va vous laisser. C. Roux : Les buralistes, les taxis...
R.- Mais les taxis, il y a aussi un problème à régler.
C. Roux : Eh bien justement, il avait dit : on va bien réglementer, je ferai tout du rapport Attali.
R.- Leur retraite c'est leur plaque. Il faut trouver un système. Moi j'ai vu les taxis de chez moi qui m'ont dit : voilà, on a vendu de justesse, on attend 20.000 euros, c'était leur retraite. Il faut trouver des solutions humaines, des solutions qui soient économiques, bien sûr. C'est vrai qu'on manque de taxis...
C. Roux : Il ne faut pas réformer, il faut céder au lobbying, c'est ça qui est en train de se passer ?
R.- Non, il faut trouver des formules. Qu'est-ce que je suis en train de faire moi avec des fonctionnaires et avec E. Woerth ? Eh bien nous sommes en train d'écouter des gens, de dialoguer, de "perdre du temps", entre guillemets. Ce n'est pas vrai, on ne perd pas de temps. Hier, j'étais à Berlin pour rencontrer mes homologues, ils nous regardent avec intérêt, parce que, eux, ils commencent à avoir des grèves dures. Alors ils nous demandent un peu : et vous, comment vous faites ? Eh bien on leur apprend, nous on est gentil et là c'est très dur actuellement chez eux, ils demandent 8 %, vous vous rendez compte.
C. Roux : Vous vous rendez compte de ce que vous êtes en train de dire ? Cela veut dire qu'il faut faire des grèves dures et que le Gouvernement va céder !
R.- Alors, les Allemands sont en train de me dire, finalement... parce que j'ai également rencontré les syndicats, c'est très intéressant. Et d'ailleurs je vous donne un scoop : je vais proposer à E. Woerth et au Premier ministre que, pendant que la France présidera l'Union européenne, on échange les secrétaires d'Etat aux fonctions publiques et qu'on échange aussi les syndicats.
B. Toussaint : C'est-à-dire ?
R.- Eh bien que nos huit organisations syndicales iraient à Berlin, pendant un ou deux jours, et les deux VerDi et DGB allemands iraient en France.
C. Roux : Cela sert à quoi ?
R.- Eh bien c'est pour que l'on sente que le même problème n'est pas traité de la même façon.
B. Toussaint : Alors au-delà de toute cette agitation, l'impression qu'on a aussi c'est qu'effectivement avec les buralistes, avec les petites retraites, les chauffeurs de taxi, le Président sort l'extincteur à quelques jours des municipales, c'est une évidence. Est-ce que vous pensez que c'est une bonne stratégie ?
R.- Cela se fait tout le temps, je ne vois pas pourquoi avant les élections, on va se flageller...
C. Roux : La rupture A. Santini, voilà on y est.
R.- Mais la rupture sur les municipales, allons.
C. Roux : Cela se fait tout le temps, mais justement ! B. Toussaint : Vous ne craignez pas la déculottée aux municipales ?
R.- On verra selon les candidats. J'ai vu déjà un sondage ce matin où cela remontait, alors vous voyez.
B. Toussaint : Un point, oui.
R.- Plus un c'est beaucoup vous savez, un point. La première fois que j'ai été élu, c'était avec 44 voix d'avance.
L. Mercadet : Mais inversement, cela veut dire qu'après les municipales, il y a de la rupture dans l'air, de la déréglementation, voire de resserrement de vis, de la rigueur, c'est ça que cela veut dire ?
R.- Oui, mais c'est ce que racontent les socialistes. Vous n'êtes pas devenu socialiste ? Ils passent leur temps à l'Assemblée à dire : après, il y aura un plan de rigueur, il y aura...
L. Mercadet : Vous, vous dites que non !
R.- Non, mais non.
C. Roux : Remaniement non plus ?
R.- Remaniement, sans doute et alors ?
C. Roux : Cela vous effraye ?
R.- Non, mais je ne sais pas, vous savez, ministre c'est bien, ancien ministre cela dure plus longtemps.
B. Toussaint : Quelle lucidité !
R.- Ah ! Moi je l'ai été, j'ai été longtemps ancien ministre.
C. Roux : Encore J.-P. Raffarin, en ce moment, il a beaucoup parlé...
R.- Décidément, il vous a tapé dans l'oeil.
C. Roux : A propos du Centre, il dit : "après les municipales, il faudra, un jour...
R.- Ah ça y est, elle s'en prend aussi au Centre.
C. Roux : Ah non, non, non... Après les municipales, il faudra, un jour, un Epinay du Centre". Est-ce que vous êtes d'accord avec ça, ou...
R.- Moi j'avais dit un "Grenelle du Centre".
C. Roux : Est-ce que vous êtes plutôt d'accord avec P. Devedjian qui dit : non, non il faut plutôt faire une confédération de l'UMP ?
R.- J'ai vu que mon ami Sauvadet, président à l'Assemblée du Nouveau Centre, était plutôt hostile à une confédération. Moi j'avais lancé l'idée d'un "Grenelle du Centre".
C. Roux : Cela veut dire quoi pour les centristes qui nous regardent ?
R.- Cela veut dire qu'il fallait qu'on se rassemble. Alors il fallait d'abord dialoguer avec J.-M. Bockel, avec E. Besson.
B. Toussaint : Avec F. Bayrou ?
R.- Avec F. Bayrou, je crois que non, c'est mal parti. Je l'avais dit, mais vous ne m'écoutez pas, souvent je le dis ici, cela sera Guyana sans le jus d'orange.
B. Toussaint : Les scénaristes ne sont pas en grève à Issy-les- Moulineaux ?
R.- Je n'ai pas besoin de scénaristes, je me fournis moi-même, je me contente du meilleur.
C. Roux : Juste très court. Il y a besoin de mettre de l'ordre dans la majorité, ces initiatives là sont faites pour mettre de l'ordre, pour organiser la majorité, est-ce que c'est nécessaire ?
R.- Après chaque élection, on repositionne les choses et les gens, c'est normal. C'est à cela que servent les élections.
B. Toussaint : Allez, la question de Léon. L. Mercadet : A. Santini, vous êtes secrétaire d'Etat à la Fonction publique, vous avez les fonctionnaires en charge. Alors justement, en début de semaine, la Cour des Comptes de P. Seguin a rendu un rapport qui pointe des dysfonctionnements, des absurdités. A quel dossier allez-vous vous attaquer, pour assurer un suivi de ce rapport de la Cour des Comptes. C'est les handicapés, c'est le conservateur des hypothèques, c'est la station thermale d'Aix-les- Bains ?
R.- Non, non, quelques dossiers relèvent de la Fonction publique. Vous avez eu effectivement le fonds pour les handicapés. Quand je suis arrivé au ministère, il y avait un problème, c'est une des rares institutions qui avait beaucoup d'argent et qui ne le dépensait pas... Alors c'est fini, 150 millions d'euros stockés, on en avait dépensé 15.000, enfin c'est lamentable. Donc nous avons opéré les changements de gouvernance, comme on dit, pudiquement et c'est reparti. C'est un peu l'équivalent du privé pour les handicapés, on paie une taxe quand on n'atteint pas les 6 % et c'est malheureusement le cas, donc ça on s'en occupe. Il y a un autre secteur qui a été évoqué : c'est celui des pensions. Là aussi, nous sommes en train de concentrer les moyens, c'est une affaire qui dure depuis trente ans. Alors la Fonction publique n'est pas en première ligne dans ce genre de dossier. Nous avons la Cour des Comptes qui a déjà remis un rapport à la Commission des Finances du Sénat, donc je suis allé devant elle, et j'ai promis qu'il fallait faire quelque chose, parce que c'était l'évidence. Nous actuellement, on se concentre sur la mobilité. J'ai été donc en Allemagne, à Berlin hier, pour voir comment ils faisaient, ce n'est pas terrible non plus. Parce que chez eux, il y a les fonctionnaires d'Etat et des fonctionnaires contractuels et la mobilité chez nous c'est 5 % seulement. Donc nous voulons que les fonctionnaires puissent bouger dans leur fonction publique et avec les autres fonctions, Etat, Territoriales et Hospitalières et même avec le privé.
B. Toussaint : D'accord, le "J'aime, j'aime pas", un tout petit, parce qu'on n'a plus beaucoup de temps. C. Roux : Bon le mini "j'aime, j'aime pas". J'aime pas le plan de la ville ? B. Toussaint : De F. Amara !
R.- Ecoutez, moi j'aime beaucoup Fadela, je suis souvent à côté d'elle à l'Assemblée, c'est une fille courageuse, authentique et elle souffre beaucoup des critiques des autres, oui.
C. Roux : Elle n'a pas été assez soutenue par la majorité ou par ses petites camarades du Gouvernement ?
R.- Elle a été soutenue globalement, mais il y en quelques uns qui la chatouillent toujours et ça c'est difficile pour elle.
L. Mercadet : Dont C. Boutin, son ministre de tutelle.
R.- Ça c'est autre chose, on connaît bien. Moi, il se trouve que je suis avec E. Woerth, qui est un garçon loyal, très professionnel. Avant j'étais ministre délégué avec Léotard, cela marchait aussi très bien, parce qu'on était corses tous les deux. Là, c'est un petit peu plus difficile, mais bon. On ne va pas faire de machisme élémentaire.
B. Toussaint : J'aime, j'aime pas John McCain.
R.- Ah très bien.
B. Toussaint : C'est votre favori ?
R.- Ah oui, moi je trouve que c'est un type très courageux : cinq ans, pilote de chasse. Enfin, d'abord lui, il a fait la guerre, alors que les autres se sont arrangés pour ne pas la faire.
B. Toussaint : Il est un peu jeune, Barack Obama, pour...
R.- Oui, bien sûr. Cela me rappelle, en Corse... Il y avait un candidat à Corte, il était corse et il arrive à une partie de cartes, les vieux étaient en train de taper et puis d'un seul coup, il y en a un qui se tourne vers lui et qui lui dit « La guerre de 14, vous l'avez faite ? », il dit « non ». Eh bien il faudrait la faire ! Il a repris la partie et il a compris qu'il valait mieux se retirer de la compétition. Alors non, on ne va pas demander à Obama de faire la guerre, mais il est incontestable que McCain correspond- nous, on n'est pas très branché là-dessus - à une image. J'entendais dans une interview un type qui disait : moi je ne demande pas au Président d'orienter l'économie, je lui demande de défendre notre pays et McCain, il est fait pour ce job. C'est bizarre. N'oubliez pas, il a été cinq ans prisonnier, torturé, c'est un type très courageux, avec des idées qui lui sont propres d'ailleurs. Il est par exemple pour la guerre en Irak, mais il est violemment contre la torture. Donc il peut, il peut se permettre d'assumer ses idées. Ce qui explique d'ailleurs cette résurgence dans les sondages.
B. Toussaint : Bien on s'arrête là. Certains de nos invités politiques arrivent ici en grognant, en disant que c'est trop tôt, on ne donne pas de nom d'ailleurs. En revanche, vous, ce matin, vous étiez très en forme.
R.- Je suis toujours en forme. D'abord je n'habite pas loin. Malgré mes problèmes de balcon... cela s'est bien passé. Et puis j'aime bien votre émission, j'aime bien les matinales en général, parce que les gens sont chez eux et si on parle un petit peu fort et un petit peu drôle, ils nous entendent bien.
B. Toussaint : Le message est passé, merci, A. Santini, à très bientôt dans la Matinale.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 8 février 2008