Texte intégral
Je suis heureuse de vous présenter aujourd'hui mes priorités et mes objectifs pour l'élaboration d'un plan des métiers au service des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes. J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer ce sujet très important pour le Gouvernement de manière générale et pour moi au titre de la mission qui m'a été confiée, car il correspond à un enjeu essentiel de solidarité tant au plan national et qu'au niveau régional. C'est en effet un enjeu d'avenir et de société pour toutes les personnes handicapées, les personnes âgées dépendantes mais aussi leurs familles et les professionnels qui les accompagnent.
La nécessité de réaliser un plan des métiers au service des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes résulte de plusieurs facteurs. Premier de ces facteurs, l'obligation faite par la loi du 11 février 2005 relative à la politique du handicap de réaliser un plan des métiers du handicap.
En effet, cette loi que chacun considère à juste titre comme fondatrice, a identifié de nouveaux droits pour les 5 millions de personnes handicapées qui vivent en France [1], le droit à l'accessibilité généralisé : école, emploi, cadre bâti, établissements recevant du public et le droit à la compensation qui se traduit par des aides humaines et des aides techniques.
Deuxième facteur, je pense qu'il y a, un intérêt majeur à coordonner les actions des différents acteurs publics au sein desquels les régions ont un rôle pilote et tiennent une place essentielle puisque la loi du 13 août 2004 leur a confié toutes compétences en matière de formation professionnelle.
Le troisième facteur est d'ordre démographique, puisque la France comptait 1 million de personnes âgées de plus de 85 ans en 2005. Ce nombre aura doublé d'ici 2015. De plus, les attentes des personnes qu'elles soient handicapés ou âgées, de leur famille sont de plus en plus fortes en termes d'exigence et de proximité.
Or, aujourd'hui, les personnels qui les accompagnent ont de plus en plus de difficultés à répondre à ces besoins. En effet, les tâches se sont extrêmement diversifiées. Une adaptation des compétences des personnels aux besoins des personnes dépendantes s'avère nécessaire pour le bien être des personnes les plus vulnérables et pour soulager leurs accompagnants.
Le renforcement de leurs compétences leur permettra également d'être mieux valorisés en leur proposant des évolutions de carrière et des perspectives.
Pour concilier ces différentes attentes et y répondre, les besoins de recrutement au niveau national sont estimés à 400 000 emplois à l'horizon 2015, dont 200 000 liés aux départs en retraite dans les 10 ans à venir et 200 000 liés à des créations nettes d'emplois dues aux mesures nouvelles en faveur des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes, dont notamment de nombreuses créations de places en établissements et services médico-sociaux. De plus, l'amélioration de la vie quotidienne des personnes âgées et handicapées et le développement de services aux familles ainsi qu'une répartition territoriale inégale contribuent dès aujourd'hui à des besoins d'emploi accrus dans ce secteur.
Il s'agit par conséquent aussi d'un gisement considérable d'emplois non délocalisables.
Et c'est pourquoi, l'objet de mon intervention aujourd'hui et du document qui vous a été remis est :
- de proposer des orientations générales,
- de fixer une méthode et un calendrier,
- d'organiser la concertation.
C'est en effet sur la base de ces orientations que le document va être soumis à concertation auprès des partenaires sociaux, auprès du monde associatif. Il convient à ce titre de souligner que j'avais saisi le CNCPH au mois de juin dernier et que les premiers travaux du groupe de travail spécifique mis en place par le CNCPH me seront remis officiellement demain pendant la Commission plénière. Ces orientations seront concertées auprès des associations d'élus locaux et principalement l'Association des Régions de France et l'Assemblée des Départements de France, auprès de structures publiques comme l'ANPE, le CNFPT, et enfin auprès des organismes collecteurs et des employeurs concernés.
La méthode
La méthode proposée repose sur les compétences des régions. En effet, depuis le 1er janvier 2005, c'est aux régions que revient la responsabilité de la définition et de la mise en oeuvre de la politique de formation des travailleurs sociaux, dans le cadre du schéma des formations sociales.
Elles sont également compétentes pour répartir les étudiants dans les formations sanitaires et paramédicales sur la base du schéma régional des formations sanitaires. C'est aux régions également d'assurer le financement de la formation initiale et des aides aux étudiants. Ces schémas, qui s'inscrivent dans le plan régional de développement des formations professionnelles (PRDFP) sont élaborés avec l'ensemble des acteurs concernés au niveau local. Dans ce contexte l'Etat souhaite contractualiser avec les régions et leurs partenaires.
Dans cette perspective je signerai cet après midi un protocole d'accord avec la Région Nord-Pas de Calais. Une convention d'objectif et de moyens sera élaborée et signée au mois de juin prochain.
Les deux autres régions pressenties étant l'Alsace et le Centre.
Ces conventions permettront de fixer le cadre méthodologique de l'action engagée par la Région en lien avec les priorités et les objectifs définis dans le plan national des métiers de la dépendance : repérage des besoins, expérimentations de formations nouvelles, financement et conditions de contractualisations avec les partenaires financiers. La CNSA qui est représentée par son directeur Denis Piveteau, va appuyer ces 3 expérimentations en y consacrant un budget spécifique de 8 millions d'euros la première année.
Pour accompagner ces expérimentations, un comité de pilotage sera créé au niveau national. L'une des fonctions de ce comité sera de mutualiser les financements existants autour d'objectifs communs définis dans le cadre de conventions nationales avec les partenaires concernés.
A titre d'exemple, nous signerons dans une quinzaine de jours une convention cadre et des conventions financières entre l'Etat, la CNSA et l'UNA dont je salue le président Flageul présent parmi nous. Nous poursuivrons ensuite la signature de telles conventions avec d'autres structures comme l'ADMR et la FEPEM si elles souhaitent s'engager dans cette direction. Le but de ces conventions est de moderniser les réseaux d'aide à domicile et ainsi de faciliter leur organisation territoriale.
Au-delà de la méthode, rentrons maintenant dans le vif du sujet !
Les priorités et les objectifs.
D'ores et déjà je souhaite en effet vous annoncer les 4 priorités qui devront être prises en compte dans ces plans régionaux des métiers et les 10 objectifs concrets qui permettront de les construire.
La priorité 1 est de faciliter l'identification des besoins. Il s'agit en effet de connaître le nombre de personnes diplômées par an et par filières, les candidats et/ou diplômés à la VAE, celles exerçant dans le secteur de l'aide à domicile et celles ayant une première qualification et en recherche d'emploi. Cela permettra d'identifier les besoins à court et moyen terme, le nombre de recrutements nouveau nécessaire et ceux liés au remplacement des personnes partant à la retraite dans les 5 prochaines années.
La priorité 2 est de recruter pour répondre aux besoins actuels et futurs.
Ainsi le recrutement pourra se faire auprès de 4 publics cibles : le grand public, les jeunes qui seront sensibilisés dès le collège et le lycée, les publics en situation difficile pourront accéder aux métiers de la dépendance en s'appuyant sur un nouvel outil : le PARMED (parcours d'accès aux métiers de la dépendance). Celui-ci sera le fruit d'une collaboration entre les conseils généraux et le service public de l'emploi. Par cet accompagnement individualisé renforcé par une offre de formation spécifique, le PARMED permettra aux demandeurs d'emploi intéressés par ces métiers d'acquérir les compétences nécessaires et enfin, les cadres intermédiaires pourront bénéficier de formations adaptées en termes de management et de gestion. La priorité 3 sera de former pour mieux accompagner les personnes et pour mieux reconnaître les compétences des professionnels. La formation des personnels doit en effet bénéficier d'une ingénierie rénovée. Pour cela, nous proposons de développer des passerelles et des troncs communs de formation entre les différents secteurs (petite enfance, personnes âgées, personnes handicapées). Par ailleurs, des objectifs ambitieux doivent être affichés en terme de VAE (validation des acquis de l'expérience). Il s'agit pour cela de mettre en place des actions de formation continue. Cela permettra aussi aux aidants familiaux d'accéder à des formations et reconnaître leur expérience en termes d'accompagnement. Enfin il est nécessaire d'imaginer les formations permettant de créer de nouveaux métiers, les métiers d'avenir, ceux liés au handicap ou aux maladies dégénératives (maladie d'Alzheimer).
La priorité 4 portera sur la valorisation des métiers au service des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes. Cette valorisation passe par leur reconnaissance et par la garantie d'un cadre éthique d'exercice professionnel. Cette reconnaissance sera facilitée par la création d'un répertoire national des métiers de la dépendance expliquant la nature de chaque métier, les possibilités d'évolutions de formations et de perspectives professionnelles. Enfin la généralisation des passeports de formation par l'employeur permettra de contribuer concrètement à la lisibilité du parcours choisi. Enfin, un cadre déontologique et éthique sera élaboré pour l'intervention des professionnels en établissements ou à domicile. Ce cadre déontologique fera l'objet d'une recommandation de l'Agence Nationale d'Evaluation sociale et médico-sociale appuyée par des modules de formation initiale et continue sur la base de propositions du Conseil Supérieur du Travail Social.
Vous le voyez, c'est une démarche ambitieuse et c'est pourquoi nous aurons besoin de la contribution et de l'engagement de chacun afin d'atteindre ces objectifs et surtout de répondre aux attentes personnes handicapées et aux personnes âgées dépendantes tout en permettant aux professionnels qui les accompagnent au quotidien de se sentir reconnus, valorisés et soutenus.
Je remercie par avance les différents partenaires qui acceptent dès aujourd'hui de s'engager dans ce processus et de répondre à cet enjeu d'avenir et de solidarité pour notre pays. Je vous remercie. Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 18 février 2008