Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur les relations franco-israéliennes et l'anniversaire de la création de l'Etat d'Israël, Paris le 11 mars 2008.

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Circonstance : Dîner offert en l'honneur de M. Shimon Peres, président de l'Etat d'Israël, au Sénat le 11 mars 2008

Texte intégral

Monsieur le Président de l'État d'Israël,
Messieurs les Ambassadeurs, Excellences,
Mes chers collègues,
Mesdames et Messieurs, chers amis,
C'est un grand honneur et -je ne vous le cacherai pas- un grand bonheur de vous accueillir, ce soir, à la Présidence du Sénat, dans ces salons où j'avais déjà eu le très grand plaisir de vous recevoir en novembre 2001 et où l'amitié franco-israélienne a si souvent été célébrée.
Le Sénat et son Président conçoivent -vous le savez-une sympathie particulière pour Israël, toujours remarquablement illustrée par le dynamisme de nos échanges interparlementaires et le rôle actif du groupe d'amitié que préside mon collègue et ami, Philippe RICHERT, Vice-Président du Sénat.
Il y a un mois, c'est ici même que j'ai eu le privilège et la joie de remettre les insignes de la Légion d'honneur à mon ami Yona YAHAV, le Maire d'Haïfa, ville dont je suis fier d'être citoyen d'honneur.
Je suis aujourd'hui tout particulièrement heureux, Monsieur le Président, de vous souhaiter, ainsi qu'à toute votre délégation, la plus cordiale et la plus chaleureuse bienvenue dans ces salons où sont passés quelques-uns des plus grands noms de l'histoire de France, comme Richelieu ou Bonaparte.
Monsieur le Président et, si vous le permettez, cher ami,
Comment ne pas souligner, pour commencer, combien votre vie est liée à l'action politique et combien votre destin personnel s'identifie de manière exceptionnelle, depuis des décennies, à celui de votre pays ?
Comment ne pas relever, ici, au Sénat, que plus de la moitié de votre vie est liée au Parlement israélien, la Knesset, où -je le rappelle- vous avez siégé durant des lustres, jusqu'à votre élection, l'année passée, à la Présidence de l'État d'Israël ?
Comment ne pas saluer, à cet instant, votre irréductible volonté d'établir une paix permettant le développement de la région et la prospérité des peuples, dans le respect de leurs différences ?
Comment, enfin, ne pas rappeler ce très remarquable prix Nobel de la Paix décerné en 1994 à l'optimiste, au visionnaire, au pragmatique que vous êtes et que vous êtes resté inlassablement, contre vents et marées ?
Monsieur le Président, cher ami,
Il y a bientôt 60 ans, naissait l'État Israël par la voix d'un homme, David BEN GOURION, que vous admirez -je le sais- et que vous avez eu la formidable chance de bien connaître. L'orchestre philarmonique entonnait la « HATIKVA » -« l'espoir »- mais BEN GOURION notait dans son journal, avec la lucidité qui caractérise les véritables hommes d'Etat : « tout le monde est profondément heureux et moi je suis plein d'appréhensions ». L'exultation des coeurs et l'indicible émotion allaient en effet affronter sans tarder le fracas des armes et des haines.
Mais, dès cet instant, vous avez su -Monsieur le Président- que le jour où la paix serait possible, il ne faudrait à aucun prix en laisser passer la chance.
Tout a été dit ou presque sur ce conflit.
Année après année, se sont succédés attentes déçues, rancunes tenaces, violences aveugles et discours volontairement haineux que d'insuffisantes amorces de dialogue n'ont pas réussi à masquer.
De nouveaux signes d'espoir ont semblé, une fois encore, réapparaître : à Annapolis d'abord, où, sous l'impulsion des Etats-Unis, Israéliens et Palestiniens ont, en novembre dernier, relancé leur dialogue ; et à Paris, ensuite, le 17 décembre, quand la communauté internationale a marqué sa volonté d'accompagner ce mouvement vers la paix et d'aider à la création d'un État palestinien souverain, démocratique, viable et respectueux de la sécurité d'Israël.
Mais l'espoir, une fois encore, est fragile : l'actualité se charge de nous le rappeler avec, hélas, son habituel cortège de victimes.
Toutes les années passées n'ont cependant, pas été vaines. Certes la paix n'est pas survenue. Mais les paramètres d'un règlement durable sont - je le crois - aujourd'hui connus.
Monsieur le Président, cher ami,
J'appartiens à une génération qui a réalisé -et ce n'était pas vraiment évident- la réconciliation franco-allemande, après des générations de conflits, et je suis convaincu que la paix viendra après les guerres.
Il importe aujourd'hui que les populations, lassées par plus d'un demi-siècle de souffrances, soient persuadées que leur vie quotidienne va changer avec la paix, en matière de sécurité, de fin de la colonisation, de liberté de circulation, d'accès à une bonne éducation pour leurs enfants ou -et c'est essentiel- de développement économique et social.
Monsieur le Président,
Comme dans toute amitié forte, les liens entre nos deux pays n'ont pas -comme vous le savez- toujours été sans vagues. Mais ils n'ont jamais connu l'indifférence. Ce qui nous rapproche est en effet -et de loin- plus fort que ce qui nous sépare et vous en savez quelque chose, vous qui avez rencontré la plupart des responsables politiques français de ces 50 dernières années.
Il suffit de penser, pour souligner le caractère exceptionnel des liens qui nous unissent et la manière avec laquelle nos cultures sont mêlées, à l'importance de la communauté francophone d'Israël et de la communauté des Juifs de France.
Monsieur le Président,
J'aurais encore bien des choses à vous dire. Mais le temps passe et je dois maintenant laisser la place à un art français important, l'art de la table !
Sachez simplement, pour terminer, que l'accueil que le Sénat de la République française vous réserve aujourd'hui n'est pas inspiré par les obligations de notre charge, mais par le mouvement naturel de l'amitié et du coeur.
Permettez-moi de lever mon verre et de proclamer haut et fort :
Vive Israël !
Vive la France !
Vive l'amitié franco-israélienne !Source http://www.senat.fr, le 21 mars 2008