Interview de M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, à RTL le 10 avril 2008, sur le débat sur les OGM à l'Assemblée nationale, la polémique sur une déclaration de N. Kosciusko-Morizet et sur la prise en charge de la carte famille nombreuse par la SNCF.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

J.-M. Aphatie.- Bonjour, J.-L. Borloo.
 
R.- Bonjour... Ouf !
 
Q.- Ouf, comme vous dites ! Avant de parler des OGM, cet auditeur... les cartes de famille nombreuse supprimées, ça suscite beaucoup d'appels, ce matin, sur RTL, que pouvez-vous leur dire ?
 
R.- Non, mais ce que j'ai compris, en lisant d'ailleurs les dépêches, c'est qu'il y avait un débat pour savoir si elles devaient être prises en charge par la SNCF ou par le contribuable. En aucun cas, les avantages des familles nombreuses ne seront réduits.
 
Q.- Alors, le problème n'est pas tout à fait celui-là : l'Etat donnait 70 millions d'euros à la SNCF, il ne va plus les donner. Donc, c'était ce qui finançait la carte famille nombreuse. Donc, il faut trouver un autre financement.
 
R.- Non, non, les positions de l'Etat sont parfaitement claires, de celles du Premier ministre aussi : il n'y aura pas de modification du statut des familles nombreuses.
 
Q.- Non. Mais les 70 millions d'euros versés par l'Etat à la SNCF sont supprimés ?
 
R.- Non. Attendez, l'Etat donne plus que ça à la SNCF...
 
Q.-... pour aider la politique familiale.
 
R.- Les comptes sont, comme vous le savez, compliqués. Je vous affirme qu'il n'y aura pas de modification pour les familles nombreuses. C'est clair.
 
Q.- Et la carte Famille Nombreuse sera maintenue, c'est la SNCF qui va la financer ?
 
R.- Mais peu importe !
 
Q.- Ah non, pas peu importe !
 
R.- Il ne vous a pas échappé que la SNCF était possédée par l'Etat. Ca ne vous a pas tout à fait échappé. Donc, voilà, il y a un problème de réorganisation de clarté des budgets. Rien n'est tranché de surcroît. Absolument rien n'est tranché. Pour l'instant, c'est un débat. Mais je vous affirme qu'il n'y aura pas de modification pour les familles nombreuses.
 
Q.- Voilà. C'est une information sur RTL. J.-L. Borloo assure que la carte Famille Nombreuse sera maintenue.
 
R.- D'une manière ou d'une autre.
 
Q.- L'Assemblée Nationale a adopté, hier, un projet de loi qui a pour vocation d'organiser la coexistence entre les cultures OGM et celles qui ne le seront pas. Donc, le Grenelle de l'Environnement aboutit à ça : désormais, les OGM seront cultivés en France. C'est étonnant, J.-L. Borloo ?
 
R.- Le Grenelle de l'Environnement avait voulu qu'il y ait une loi, que cette loi sorte la situation actuelle qui était invraisemblable. Il y a six mois, quelle était la situation ? 1) on produisait du maïs Monsanto en France, 22.000 hectares. On en produisait de plus en plus ; 2) de manière pas claire, on ne savait pas à quel endroit ; 3) il n'y avait pas de responsabilités de celui qui les utilisait ; 4) si jamais un tiers, un autre agriculteur était touché, avait son champ contaminé, il n'y avait aucun dédommagement ; 5) il n'y avait absolument pas de Haute autorité des bio-technologies pour donner au cas par cas, la position croisée de l'ensemble des scientifiques et de la société civile. Le Grenelle de l'Environnement avait demandé six choses. 1) un moratoire sur le 810. La France est un des seuls quatre pays au monde à avoir un moratoire sur le 810. Un des quatre.
 
Q.- D'accord. Si on doit passer les six choses, là, on y passe la matinée !
 
R.- Mais oui, mais oui ... parce que, excusez-moi de vous dire que c'est un peu...
 
Q.- Le 810, d'accord ?
 
R.- Mais oui, enfin je rappelle qu'on est que quatre pays au monde sur 180 pays à l'ONU à le faire, par mesure de précaution. 2) qu'il y ait enfin pour l'ensemble des OGM, un soutien à la recherche. C'est fait et il y a l'unanimité. Deuxièmement (sic), une Haute autorité des biotechnologies, un principe de responsabilité et un principe de traçabilité.
 
Q.- Donc, la culture des OGM est organisée ?
 
R.- Mais pas du tout.
 
Q.- Elle est organisée, mais oui, c'est ce que vous dites.
 
R.- La directive 2010-18 faite par Monsieur Jospin et Mme Voynet, en 2001, doit être transcrite dans le droit Français. Cela fait 7 ans qu'elle devait être transcrite. On était dans le non droit absolu. Personne ne peut demander l'intégralité ad vitam aeternam de toutes les OGM. La directive nous demande simplement d'organiser dans chaque pays, les conditions éventuelles - éventuelles - dans lesquelles il pourrait y avoir des autorisations. Il y a aujourd'hui des recherches en plein champ pour les peupliers, par exemple. Cela ne suscite pas de polémique particulière. Il y en a sur les raisins, ça ne suscite pas de polémique particulière.
 
Q.- Ca, c'est fait.
 
R.- En réalité, il y a qu'un point, un seul point : c'est les OGM pesticides, ceux qui produisent leurs propres pesticides. Il n'y en avait qu'un. Celui-là, il est interdit.
 
Q.- Donc, ça c'est fait. De votre point de vue, c'est bien fait. Pourtant, le débat s'est mal passé. A l'issue de ce débat, la Secrétaire d'Etat à l'Environnement, N. Kosciusko-Morizet a dit : "J'en ai marre d'être confrontée à une armée de lâches" ... et elle vous a mis dans cette armée de lâches.
 
R.- Non, écoutez, elle a dit elle-même que les propos avaient été très déformés ...
 
Q.- Oui, c'est toujours la faute des journalistes !
 
R.- Non, non, je reprends ses déclarations.
 
Q.- Bien sûr ! C'est ce que je dis : Toujours la faute des journalistes !
 
R.- Vous prenez les siennes, je vous prends les siennes également. Je n'ai pas dit ça. Voilà, elle s'est excusée. Ce sont des moments à l'Assemblée qui sont extrêmement lourds, qui sont extrêmement difficiles. On y passe des heures...
 
Q.- Mais si elle a dit ça, c'est que quand même ...
 
R.- Non, il y a un moment où c'est difficile quand on est membre du Gouvernement, il y a des moments qui ne sont pas amusants. Il y a des moments où on assume des choses, il y a une solidarité gouvernementale, c'est lourd, voilà. Il y a un moment où on craque. Il n'y a pas de coin...
 
Q.- Beaucoup de députés lui ont reproché d'être trop proche des Ecologistes, trop proche de J. Bové.
 
R.- Ouais, vous savez, chacun sa sensibilité. Ce qui est terrible dans ce genre de choses, c'est l'absolue caricature que l'on fait des débats. Vraiment, moi je suis fascinée ...
 
Q.- Qui caricature ?
 
R.- Tout le monde. Tout le monde. Tout le monde.
 
Q.- Mais là, c'est elle qui s'exprime. C'est elle qui a exprimé un mécontentement quand même.
 
R.- Non, non, mais je parle du fond du dossier là, si vous voulez bien. Si vous voulez, on est - je reviens là-dessus - le pays qui met en place le dispositif législatif le plus précautionneux pour protéger les AOC, pour protéger les cultures traditionnelles ; une Haute autorité des biotechnologies qui va être très pluraliste avec toutes les sciences, qui va rendre publiques ses décisions, au cas par cas devoir justifier les positions qu'elle va prendre et proposer au Gouvernement et aux pouvoirs publics. Le texte le plus précautionneux du monde dans un pays qui a interdit le 810 et on a le sentiment qu'on a une forme de laxisme à l'égard des OGM, tout ça en application d'une directive sous la gauche - Mme Voynet au Gouvernement - je dois dire que je suis absolument stupéfait.
 
Q.- Vous en voulez à votre secrétaire d'Etat ?
 
R.- Ah pas à elle ! Mais attendez, on a bâti ce texte ensemble.
 
Q.- Mais c'est quand même elle qui a créé la polémique hier !
 
R.- Il n'y a pas une feuille de papier à cigarettes...
 
Q.- Entre elle et vous ? Eh bien, dis donc !
 
R.- Je reprends la dépêche de mardi, à la reprise des débats, mardi ...
 
Q.- Il n'y a pas une feuille de papier ? Il y a une grosse feuille de tabac.
 
R.-...J.-L. Borloo s'était déclaré intégralement solidaire de la position de sa secrétaire d'Etat. Voyez. C'était de mardi 9/04 à 13h26.
 
Q.- Vous pouvez continuer à travailler avec elle, J.-L. Borloo ?
 
R.- Bien sûr. On a bâti ce texte ensemble.
 
Q.- C'est comme si rien ne s'était passé ?
 
R.- Mais attendez ! Evidemment. Evidemment.
 
Q.- Qui est-ce qui a inventé toute cette mousse, alors ?
 
R.- Mais c'est des moments de tension. Vous savez...
 
Q.- Ça ne se produit pas tous les jours, quand même, J.-L. Borloo ? Vous ne pouvez pas faire comme si rien ne s'était passé, rien ne s'était dit ?
 
R.- Ecoutez, rien ne s'est passé. Rien ne s'est dit. L'incident est clos.
 
Q.- Formidable !
 
R.- Nathalie a craqué à un moment donné ... voilà.
 
Q.- Elle a craqué ! Voilà.
 
R.- Bon, c'est tout, il n'y a pas de quoi ...
 
Q.- Elle va mieux, là ?
 
R.- Je crois qu'elle va beaucoup mieux, très franchement.
 
Q.- Elle n'est pas trop frustrée de ne pas aller au Japon ?
 
R.- Ah écoutez, je n'en sais rien. Je crois que le Japon, elle aurait été heureuse d'y aller. Mais enfin ça, ça appartient au Premier ministre.
 
Q.- Le parcours grotesque de la flamme olympique vous suscite un commentaire chez vous, J.-L. Borloo ?
 
R.- Non, je suis comme tout le monde : mal à l'aise parce que l'Olympisme ce n'est pas ça. Cela dit, il y a une sensibilité dans le monde concernant le Tibet, concernant les Droits de l'Homme en général, et on peut le comprendre.
 
Q.- La Chine, c'est une dictature ?
 
R.- Ecoutez, moi il ne m'appartient pas de commenter ce genre de qualificatif.
 
Q.- J.-L. Borloo qui ne commente pas tout, mais qui parle beaucoup des OGM, était l'invité d'RTL ce matin. Bonne journée.   
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 10 avril 2008