Texte intégral
Q - Il y a un contexte français, il semble que le président de la République, ce matin, ait un petit peu tapé du poing sur la table en demandant plus de coordination, plus de loyauté gouvernementale. C'était vraiment nécessaire ?
R - Dans un fonctionnement gouvernemental, il faut mêler la clarté de l'expression, le débat que souhaite le président de la République et la loyauté.
Q - Là, on avait été trop loin ?
R - On avait été trop loin. Je crois qu'il faut éviter une course à l'expression individuelle, à la surenchère dans l'expression qui est nocive à la solidarité et à la loyauté qui doit exister dans le gouvernement, comme dans toutes équipes.
Q - Mais c'est un problème de politique, avec un gouvernement qui connaît des sensibilités fondamentalement différentes ou c'est un problème de communication, d'où l'arrivée de Thierry Saussez ?
R - C'est à la fois un problème de sensibilité politique, vous avez des membres du gouvernement issus de l'ouverture, vous avez également des personnalités fortes. Le président de la République a souhaité qu'il y ait un certain pluralisme. Il est donc normal qu'il y ait des sensibilités différentes qui s'expriment. C'est aussi un problème de communication : dans certains cas, la communication l'a emporté sur la légitime expression de sensibilités différentes.
Q - Mais dans la perspective de cette Présidence européenne, est-ce que vous avez le sentiment qu'il fallait que cela change ?
R - Il faut que tout le monde soit sur la même ligne. Quand vous conduisez des actions de réformes importantes, ce qui est le cas actuellement, vous avez intérêt à être unis. Parce que c'est comme cela que vous avez le plus de chance d'achever l'oeuvre de réforme, pour laquelle le président de la République a été élu et que l'on doit mener à bien pour que la France soit aux standards européens. C'est encore plus nécessaire dans le cadre de la Présidence française de l'Union européenne. Il est évident que lorsque vous traitez de dossiers aussi importants, il est nécessaire d'avoir une bonne cohésion gouvernementale. Ce sera indispensable pour faire une bonne Présidence européenne.
Q - Mais dans le domaine que vous connaissez bien, justement, est-ce qu'il y a cohésion ? Parce qu'il y a peu de temps nous recevions Bernard Kouchner qui disait "non, je ne mangerai pas mon chapeau". Il y a eu des déclarations divergentes, des actions divergentes. Claude Guéant et le voyage en Syrie, la position de Jean-David Levitte, les déclarations de Rama Yade, est-ce que dans ce domaine qui est celui de la politique étrangère il y a une vraie cohérence ? Et qui dirige ?
R - La politique étrangère fait l'objet d'une action cohérente. Elle est impulsée par le président de la République, comme cela a toujours été le cas sous la Vème République. La cellule diplomatique a toujours eu à l'Elysée un rôle important. C'est le cas dans les affaires internationales, c'est le cas également dans les affaires européennes. Le ministre des Affaires étrangères dirige la diplomatie française. Il n'y a pas d'autres voix. Il peut y avoir des sensibilités différentes mais, sur les questions diplomatiques, ce sont ces voix qui comptent. Ce que je remarque, c'est que dans le domaine des Affaires étrangères, nous sommes les seuls à avoir signé une tribune en commun, Bernard Kouchner, Rama Yade, Alain Joyandet et moi-même sur les émeutes de la faim, sur la crise alimentaire. Cela montre l'unité du "pôle" Quai d'Orsay.
Q - Les grands dossiers dans la perspective de la Présidence française de l'Union européenne. Premier dossier, la Chine. Il semble que l'on soit un peu boycotté. Est-ce qu'il va y avoir une position européenne commune quant à la cérémonie d'ouverture, quant à un éventuel boycott ?
R - Je crois qu'il y a un constat commun. Premièrement, nous sommes tous extrêmement préoccupés par la situation au Tibet. Deuxièmement, nous souhaitons tous que les autorités chinoises aient un dialogue sincère avec le Dalaï-Lama qui, je le répète, a indiqué qu'il n'était ni pour l'indépendance du Tibet ni pour le boycott des Jeux Olympiques.
Q - Mais Gordon Brown a dit moi je n'irai pas...
R - Il ira à la cérémonie de clôture.
Q - Le président de la République ne sait pas... Est-ce qu'il va y avoir une position européenne ?
R - Il devra y avoir une position européenne en ce qui concerne la cérémonie d'ouverture. Il appartiendra au président de la République, qui sera le président en charge de l'Union européenne à ce moment-là, de faire en sorte qu'il y ait une position européenne. On prend la Présidence de l'Union européenne le 1er juillet, mais vous avez un Conseil européen sous Présidence slovène fin juin. Vous pouvez très bien avoir une position commune qui soit prise dès la fin juin par les Européens.
Q - Donc il y aura une position commune ?
R - C'est plus que souhaitable, c'est même nécessaire. Le président de la République aura besoin de cette position commune pour pouvoir déterminer sa propre position. On dit qu'il laisse les voies ouvertes, il y est obligé car il sera, le jour de la cérémonie d'ouverture, le président en charge du Conseil de l'Union européenne. C'est sur la base de cette position qu'il se déterminera.
Q - C'est vous qui préparez cette Présidence, avec de multiples voyages, et beaucoup de travail. Il y a beaucoup de mystères, on se demande qu'est ce que va porter la France ? On a bien compris, pendant la campagne, c'était l'idée du Traité simplifié. C'est fait. Qu'est-ce qui va être porté par la Présidence française ? Qu'est-ce que l'on veut ?
R - Ce que l'on veut c'est que l'Europe puisse être organisée pour faire entendre davantage sa voie. L'Europe doit être un acteur global qui parle d'égal à égal avec les Etats-Unis ou avec la Chine. On a, avec le Traité de Lisbonne, s'il est ratifié, ce que j'espère, d'ici la fin de l'année, les moyens institutionnels de décider et d'être organisés. On doit conduire les politiques extérieures qui seront nécessaires à cette fin et se doter d'une politique de défense au niveau européen qui nous permette d'être influent sur la scène internationale.
Q - Vos anciens amis socialistes disent que c'est de la dérive atlantiste. Sarkozy, finalement, est plus proche des Anglais et des Américains, il n'aime pas trop Merkel...
R - Non, il ne faut pas tomber dans les caricatures.
Q - Vous l'avez lu, vous le savez ?
R - Oui, mais ce n'est parce que je l'ai lu que c'est vrai ! Je vous donne mon sentiment. J'ai mes convictions, elles sont européennes et non atlantistes. Ce qui est important, c'est que nous privilégions la construction d'une défense européenne. C'est clair. C'est une position de l'Europe unie qui, au Sommet de l'OTAN à Bucarest, a permis de faire reculer les Etats-Unis.
Q - Il n'y a pas de dérive atlantiste de la part du président de la République ?
R - Je ne pense pas qu'il y ait de dérive atlantiste et, en tout cas, je ne participe pas de ce point de vue. Il y a une construction de l'Europe dans un monde nouveau qui suppose d'avoir de nouveaux rapports avec les Etats-Unis. Ce n'est pas parce que vous avez une alliance franco-allemande, qui est un instrument essentiel, une relation particulière au sein de l'Union européenne, et vous ne pouvez pas avoir d'avancée, dans le cadre de la construction européenne, sans une alliance franco-allemande forte, que vous ne pouvez pas discuter et dissiper les malentendus avec les Britanniques. Il n'y a aucune dérive atlantiste. C'est de la politique européenne qui est parfaitement normale et que nos partenaires, notamment allemands, comprennent bien.
Q - Est-ce que Angela Merkel a compris le sens du discours de Nicolas Sarkozy devant le Parlement britannique où il disait qu'au fond la Grande-Bretagne était une sorte de modèle pour nous ? C'est quand même le premier président de la République française qui le dit. On a même dit qu'il en faisait trop...
R - Il prend en compte le fait, que cela plaise ou non, que la Grande-Bretagne a enregistré sur le plan économique, un certain nombre de succès ces vingt dernières années et que la Grande-Bretagne a rattrapé, voire dépassé, un certain nombre de ses partenaires européens. Je ne vois pas en quoi prendre ce qu'il y a de bien chez les Anglais, dirigé par un parti social-démocrate, le Labour, serait une mauvaise chose ou une preuve d'atlantisme. Je vous signale également que, sur le plan économique, les Allemands et les Britanniques sont beaucoup moins éloignés qu'on le croit. Il y a un modèle qui est anglo-saxon, si l'on en parle, c'est qu'il y a une raison. C'est qu'il est saxon d'un côté et anglo de l'autre.
Q - Il n'y aura pas de référendum, comme certains à l'UMP le réclamaient, sur l'accession de la Turquie à l'Europe. C'est une idée bannie ?
R - Non. Ce que j'ai indiqué, ce que le président de la République a proposé et ce qui a été repris par le Premier ministre, François Fillon, dans le cadre de la réforme des institutions, c'est qu'on laisse le choix au chef de l'Etat de conduire les négociations avec les pays qui souhaitent intégrer l'Union européenne et de décider, in fine, si cela doit être soumis à référendum ou au Parlement. Ce qui était exactement la situation antérieure. Il y a eu une modification, que j'estime circonstancielle, qui n'a pas empêché de perdre un référendum sur l'Europe et qui n'a pas apporté de solution quant à la Turquie. Nous disons simplement, c'est ce qui est proposé dans le cadre de la réforme des institutions, que le président de la République, qui est élu pour cela, prenne ses responsabilités et voit, en fonction de la conduite des négociations, dans quels cas cela doit être soumis à ratification ou à référendum.
Q - Est-ce que vous considérez que l'arrivée de Berlusconi au pouvoir en Italie est une bonne chose pour l'Europe ? Au fond, quel est le rêve européen pour le président de la République ? Mitterrand a apporté un rêve, d'une certaine manière, après l'échec du socialisme en France, il a pensé porter la France vers l'Europe. Quel est le rêve de Nicolas Sarkozy dans ce domaine ?
R - En ce qui concerne l'Italie, c'est un pays ami qui fait partie des pays fondateurs de la construction européenne. Ce que je remarque, c'est que Silvio Berlusconi a été élu pour la troisième fois, assez largement, avec 80 % de votants et que l'Italie est désormais dans un système bi-partisan.
Q - Donc il ne sera pas un obstacle, d'après vous, à l'Europe ?
R - J'espère que nous aurons le meilleur Berlusconi, celui qui souhaite faire les réformes, qui souhaite avancer sur le plan européen et qui souhaite une Europe politique. Sur tous ces plans, nous coopèrerons bien évidemment avec l'Italie.
Q - Le rêve du président français ?
R - Le rêve du président français est justement de faire en sorte que l'Europe devienne une réalité politique, que cela soit moins un objet non identifié mais une Europe concrète, politique, et surtout qui prenne son destin en main.
Q - C'est facile d'être un homme de gauche dans un gouvernement de droite ?
R - Comme le dit Martin Hirsch, tout le monde a ses états d'âmes. On en a depuis que l'on est petit. Il faut garder les pieds sur terre, il faut garder ses valeurs et savoir jusqu'où on peut aller et ne pas aller trop loin. Mais du moment que la France est en accord avec l'Europe, c'est pour moi le plus important dans le cadre de ma mission.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 avril 2008
R - Dans un fonctionnement gouvernemental, il faut mêler la clarté de l'expression, le débat que souhaite le président de la République et la loyauté.
Q - Là, on avait été trop loin ?
R - On avait été trop loin. Je crois qu'il faut éviter une course à l'expression individuelle, à la surenchère dans l'expression qui est nocive à la solidarité et à la loyauté qui doit exister dans le gouvernement, comme dans toutes équipes.
Q - Mais c'est un problème de politique, avec un gouvernement qui connaît des sensibilités fondamentalement différentes ou c'est un problème de communication, d'où l'arrivée de Thierry Saussez ?
R - C'est à la fois un problème de sensibilité politique, vous avez des membres du gouvernement issus de l'ouverture, vous avez également des personnalités fortes. Le président de la République a souhaité qu'il y ait un certain pluralisme. Il est donc normal qu'il y ait des sensibilités différentes qui s'expriment. C'est aussi un problème de communication : dans certains cas, la communication l'a emporté sur la légitime expression de sensibilités différentes.
Q - Mais dans la perspective de cette Présidence européenne, est-ce que vous avez le sentiment qu'il fallait que cela change ?
R - Il faut que tout le monde soit sur la même ligne. Quand vous conduisez des actions de réformes importantes, ce qui est le cas actuellement, vous avez intérêt à être unis. Parce que c'est comme cela que vous avez le plus de chance d'achever l'oeuvre de réforme, pour laquelle le président de la République a été élu et que l'on doit mener à bien pour que la France soit aux standards européens. C'est encore plus nécessaire dans le cadre de la Présidence française de l'Union européenne. Il est évident que lorsque vous traitez de dossiers aussi importants, il est nécessaire d'avoir une bonne cohésion gouvernementale. Ce sera indispensable pour faire une bonne Présidence européenne.
Q - Mais dans le domaine que vous connaissez bien, justement, est-ce qu'il y a cohésion ? Parce qu'il y a peu de temps nous recevions Bernard Kouchner qui disait "non, je ne mangerai pas mon chapeau". Il y a eu des déclarations divergentes, des actions divergentes. Claude Guéant et le voyage en Syrie, la position de Jean-David Levitte, les déclarations de Rama Yade, est-ce que dans ce domaine qui est celui de la politique étrangère il y a une vraie cohérence ? Et qui dirige ?
R - La politique étrangère fait l'objet d'une action cohérente. Elle est impulsée par le président de la République, comme cela a toujours été le cas sous la Vème République. La cellule diplomatique a toujours eu à l'Elysée un rôle important. C'est le cas dans les affaires internationales, c'est le cas également dans les affaires européennes. Le ministre des Affaires étrangères dirige la diplomatie française. Il n'y a pas d'autres voix. Il peut y avoir des sensibilités différentes mais, sur les questions diplomatiques, ce sont ces voix qui comptent. Ce que je remarque, c'est que dans le domaine des Affaires étrangères, nous sommes les seuls à avoir signé une tribune en commun, Bernard Kouchner, Rama Yade, Alain Joyandet et moi-même sur les émeutes de la faim, sur la crise alimentaire. Cela montre l'unité du "pôle" Quai d'Orsay.
Q - Les grands dossiers dans la perspective de la Présidence française de l'Union européenne. Premier dossier, la Chine. Il semble que l'on soit un peu boycotté. Est-ce qu'il va y avoir une position européenne commune quant à la cérémonie d'ouverture, quant à un éventuel boycott ?
R - Je crois qu'il y a un constat commun. Premièrement, nous sommes tous extrêmement préoccupés par la situation au Tibet. Deuxièmement, nous souhaitons tous que les autorités chinoises aient un dialogue sincère avec le Dalaï-Lama qui, je le répète, a indiqué qu'il n'était ni pour l'indépendance du Tibet ni pour le boycott des Jeux Olympiques.
Q - Mais Gordon Brown a dit moi je n'irai pas...
R - Il ira à la cérémonie de clôture.
Q - Le président de la République ne sait pas... Est-ce qu'il va y avoir une position européenne ?
R - Il devra y avoir une position européenne en ce qui concerne la cérémonie d'ouverture. Il appartiendra au président de la République, qui sera le président en charge de l'Union européenne à ce moment-là, de faire en sorte qu'il y ait une position européenne. On prend la Présidence de l'Union européenne le 1er juillet, mais vous avez un Conseil européen sous Présidence slovène fin juin. Vous pouvez très bien avoir une position commune qui soit prise dès la fin juin par les Européens.
Q - Donc il y aura une position commune ?
R - C'est plus que souhaitable, c'est même nécessaire. Le président de la République aura besoin de cette position commune pour pouvoir déterminer sa propre position. On dit qu'il laisse les voies ouvertes, il y est obligé car il sera, le jour de la cérémonie d'ouverture, le président en charge du Conseil de l'Union européenne. C'est sur la base de cette position qu'il se déterminera.
Q - C'est vous qui préparez cette Présidence, avec de multiples voyages, et beaucoup de travail. Il y a beaucoup de mystères, on se demande qu'est ce que va porter la France ? On a bien compris, pendant la campagne, c'était l'idée du Traité simplifié. C'est fait. Qu'est-ce qui va être porté par la Présidence française ? Qu'est-ce que l'on veut ?
R - Ce que l'on veut c'est que l'Europe puisse être organisée pour faire entendre davantage sa voie. L'Europe doit être un acteur global qui parle d'égal à égal avec les Etats-Unis ou avec la Chine. On a, avec le Traité de Lisbonne, s'il est ratifié, ce que j'espère, d'ici la fin de l'année, les moyens institutionnels de décider et d'être organisés. On doit conduire les politiques extérieures qui seront nécessaires à cette fin et se doter d'une politique de défense au niveau européen qui nous permette d'être influent sur la scène internationale.
Q - Vos anciens amis socialistes disent que c'est de la dérive atlantiste. Sarkozy, finalement, est plus proche des Anglais et des Américains, il n'aime pas trop Merkel...
R - Non, il ne faut pas tomber dans les caricatures.
Q - Vous l'avez lu, vous le savez ?
R - Oui, mais ce n'est parce que je l'ai lu que c'est vrai ! Je vous donne mon sentiment. J'ai mes convictions, elles sont européennes et non atlantistes. Ce qui est important, c'est que nous privilégions la construction d'une défense européenne. C'est clair. C'est une position de l'Europe unie qui, au Sommet de l'OTAN à Bucarest, a permis de faire reculer les Etats-Unis.
Q - Il n'y a pas de dérive atlantiste de la part du président de la République ?
R - Je ne pense pas qu'il y ait de dérive atlantiste et, en tout cas, je ne participe pas de ce point de vue. Il y a une construction de l'Europe dans un monde nouveau qui suppose d'avoir de nouveaux rapports avec les Etats-Unis. Ce n'est pas parce que vous avez une alliance franco-allemande, qui est un instrument essentiel, une relation particulière au sein de l'Union européenne, et vous ne pouvez pas avoir d'avancée, dans le cadre de la construction européenne, sans une alliance franco-allemande forte, que vous ne pouvez pas discuter et dissiper les malentendus avec les Britanniques. Il n'y a aucune dérive atlantiste. C'est de la politique européenne qui est parfaitement normale et que nos partenaires, notamment allemands, comprennent bien.
Q - Est-ce que Angela Merkel a compris le sens du discours de Nicolas Sarkozy devant le Parlement britannique où il disait qu'au fond la Grande-Bretagne était une sorte de modèle pour nous ? C'est quand même le premier président de la République française qui le dit. On a même dit qu'il en faisait trop...
R - Il prend en compte le fait, que cela plaise ou non, que la Grande-Bretagne a enregistré sur le plan économique, un certain nombre de succès ces vingt dernières années et que la Grande-Bretagne a rattrapé, voire dépassé, un certain nombre de ses partenaires européens. Je ne vois pas en quoi prendre ce qu'il y a de bien chez les Anglais, dirigé par un parti social-démocrate, le Labour, serait une mauvaise chose ou une preuve d'atlantisme. Je vous signale également que, sur le plan économique, les Allemands et les Britanniques sont beaucoup moins éloignés qu'on le croit. Il y a un modèle qui est anglo-saxon, si l'on en parle, c'est qu'il y a une raison. C'est qu'il est saxon d'un côté et anglo de l'autre.
Q - Il n'y aura pas de référendum, comme certains à l'UMP le réclamaient, sur l'accession de la Turquie à l'Europe. C'est une idée bannie ?
R - Non. Ce que j'ai indiqué, ce que le président de la République a proposé et ce qui a été repris par le Premier ministre, François Fillon, dans le cadre de la réforme des institutions, c'est qu'on laisse le choix au chef de l'Etat de conduire les négociations avec les pays qui souhaitent intégrer l'Union européenne et de décider, in fine, si cela doit être soumis à référendum ou au Parlement. Ce qui était exactement la situation antérieure. Il y a eu une modification, que j'estime circonstancielle, qui n'a pas empêché de perdre un référendum sur l'Europe et qui n'a pas apporté de solution quant à la Turquie. Nous disons simplement, c'est ce qui est proposé dans le cadre de la réforme des institutions, que le président de la République, qui est élu pour cela, prenne ses responsabilités et voit, en fonction de la conduite des négociations, dans quels cas cela doit être soumis à ratification ou à référendum.
Q - Est-ce que vous considérez que l'arrivée de Berlusconi au pouvoir en Italie est une bonne chose pour l'Europe ? Au fond, quel est le rêve européen pour le président de la République ? Mitterrand a apporté un rêve, d'une certaine manière, après l'échec du socialisme en France, il a pensé porter la France vers l'Europe. Quel est le rêve de Nicolas Sarkozy dans ce domaine ?
R - En ce qui concerne l'Italie, c'est un pays ami qui fait partie des pays fondateurs de la construction européenne. Ce que je remarque, c'est que Silvio Berlusconi a été élu pour la troisième fois, assez largement, avec 80 % de votants et que l'Italie est désormais dans un système bi-partisan.
Q - Donc il ne sera pas un obstacle, d'après vous, à l'Europe ?
R - J'espère que nous aurons le meilleur Berlusconi, celui qui souhaite faire les réformes, qui souhaite avancer sur le plan européen et qui souhaite une Europe politique. Sur tous ces plans, nous coopèrerons bien évidemment avec l'Italie.
Q - Le rêve du président français ?
R - Le rêve du président français est justement de faire en sorte que l'Europe devienne une réalité politique, que cela soit moins un objet non identifié mais une Europe concrète, politique, et surtout qui prenne son destin en main.
Q - C'est facile d'être un homme de gauche dans un gouvernement de droite ?
R - Comme le dit Martin Hirsch, tout le monde a ses états d'âmes. On en a depuis que l'on est petit. Il faut garder les pieds sur terre, il faut garder ses valeurs et savoir jusqu'où on peut aller et ne pas aller trop loin. Mais du moment que la France est en accord avec l'Europe, c'est pour moi le plus important dans le cadre de ma mission.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 avril 2008