Texte intégral
Mesdames et messieurs,
Je voudrais tout d'abord remercier Nicolas About d'accueillir aujourd'hui, en cette haute assemblée, où j'ai toujours plaisir à me rendre, des professionnels de santé soucieux de leur avenir, désireux de favoriser l'amélioration qualitative de notre système de soins.
La réflexion que vous menez sur la coopération interprofessionnelle se situe au coeur de mon projet de modernisation. L'évolution de vos métiers détermine, en effet, bien des progrès.
La qualité de notre système de soins dépend pour beaucoup du travail de celles et de ceux qui ont choisi de placer leurs compétences et leur énergie au service des malades. Comment mieux travailler pour mieux soigner, telle est, concrètement, la question qui se pose à nous, en cette période de large concertation.
Les réponses qui peuvent être ici apportées ne se déduisent d'aucun a priori. Elles dérivent de l'expérience, de votre expérience dont les E.G.O.S. ont pour moi vocation à restituer clairement le contenu.
La réforme que notre pays attend ne saurait être, en effet, imposée d'en haut, préfabriquée, technocratique. Elle ne doit pas, pour réussir, susciter une adhésion simplement formelle. Il est indispensable qu'elle puisse incarner une volonté commune. La méthode que j'ai choisie et à laquelle je me tiendrai, implique une conviction partagée, un engagement solidaire.
Si j'ai souhaité vous écouter, après avoir recueilli les fruits d'une expertise de grande qualité, c'est pour mieux répondre aux attentes de nos concitoyens. Cette réponse, en effet, vous-seuls, par votre travail, par vos pratiques au quotidien, en démultiplierez l'écho, en traduirez les bénéfices.
Je connais les vertus du droit. J'en connais aussi les limites. Je sais que l'esprit des lois, pour modifier le réel, doit irriguer la pratique. Aussi, ne craignez pas d'avoir à supporter les conséquences d'une réforme abstraite, une de plus, une de trop !
C'est d'abord, en effet, à l'effectivité, à l'opérationnalité des mesures que nous prendrons, que je veux aujourd'hui penser. Ainsi, je partage avec vous la conviction que seule une évolution des pratiques favorable aux professionnels de santé peut favoriser, au bénéfice des patients, l'amélioration au long cours de notre système de soins.
La qualité du service rendu dépend d'abord, très concrètement, de l'organisation globale des ressources assurant sa production. Les patients seraient, à l'inverse, les premiers à pâtir de la dégradation de vos conditions de travail.
Il est donc indispensable, à mes yeux, de desserrer les contraintes auxquelles médecins et soignants sont trop souvent assujettis pour permettre à chacun de mieux satisfaire les exigences spécifiques à ses fonctions. Vos activités, comme chacun sait, sont, par construction, dévoreuses de temps. Votre travail est d'autant plus menacé par l'émiettement que votre isolement vous interdit de consacrer votre énergie à exercer au mieux vos fonctions propres.
Chacun souhaiterait pouvoir se concentrer davantage sur son coeur de métier. Chacun voudrait être en mesure d'exploiter au mieux ses compétences. Dans cette optique, le projet de loi de modernisation de l'organisation de la santé que je porterai, dès l'automne, devant le parlement, accordera la place qu'elle mérite à la question du partage des tâches.
Comment faire pour disposer des meilleures ressources, au meilleur endroit, au meilleur moment ?
Comment faire pour tirer vers le haut l'exercice de vos métiers respectifs ?
Ces deux questions se rejoignent. Sachons saisir l'occasion qui nous est offerte pour y répondre ensemble !
Il paraît utile, en ce sens, de réfléchir sans tabou aux modalités qui permettront d'assurer la formation initiale et la formation continue les mieux adaptées à cette exigence.
Pour garantir à chacun de meilleures conditions d'exercice, le partage du travail, valorisant au mieux les compétences de chacun, semble ouvrir une perspective intéressante. L'installation de maisons de santé pluridisciplinaires pourrait ainsi permettre l'émergence de formes inédites d'exercices regroupés.
Cette solution innovante a été amplement discutée lors des E.G.O.S. La réflexion mûrit. Je suis heureuse de constater le vif intérêt qu'elle suscite. Je serai, sur ce point, particulièrement attentive à vos conclusions et à vos propositions.
Dans une même perspective, il nous revient d'apprécier l'opportunité d'un transfert actif et contrôlé de l'activité du médecin vers ses partenaires. Notre seul objectif est, ici, d'améliorer la qualité de la prise en charge globale des patients sur l'ensemble du territoire.
Médecins, infirmiers, sages-femmes, ne sont pas interchangeables, bien sûr. Il convient, cependant, de mieux tirer parti de leur complémentarité, d'ouvrir des ponts, quand c'est nécessaire. La revalorisation de la médecine de premier recours suppose, de toute évidence, d'inventer de nouvelles formes de coopération.
S'agissant des spécialités, il convient d'envisager, pour certains actes techniques, et dans des cas très spécifiques, une évolution des modes de collaborations des médecins et des chirurgiens avec d'autres professionnels de santé. Je pense naturellement à la gynécologie-obstétrique, l'ophtalmologie, à l'anesthésie, la chirurgie ou encore l'odontologie. Concernant ces professions, je souhaite que vous me fassiez part, rapidement, de vos pistes de réflexion.
N'oublions pas, enfin, d'accorder aux pharmaciens toute l'attention qu'ils méritent, compte tenu de leurs compétences propres et de leurs fonctions spécifiques, de manière à repenser leur rôle dans l'accès aux soins de premier recours.
Sur ce sujet, comme sur d'autres, il nous revient aujourd'hui de faire preuve à la fois d'audace et de pragmatisme.
Je suis particulièrement heureuse que les états généraux aient donné aux professionnels de santé l'occasion de penser par eux-mêmes l'avenir de leur métier et le devenir d'un système de soins dont ils sont les véritables maîtres d'oeuvre.
Je voudrais ainsi, pour terminer, m'adresser plus particulièrement aux jeunes mais aussi à tous ceux qui assument la responsabilité cruciale de leur formation. Les réponses que nous saurons apporter aux questions que je viens d'esquisser engagent votre avenir.
Je compte sur vous, sur votre acuité particulière, sur votre sens des responsabilités aussi, pour nourrir sans complaisance la réflexion ouverte aujourd'hui, quitte à bousculer parfois quelques idées reçues, à contrarier quelques tropismes.
Nous devons nous tourner sans préjugé vers l'avenir et saisir l'occasion qui nous est offerte de consolider, de fortifier notre édifice de santé. Il s'agit de notre patrimoine commun, d'un patrimoine dont nos concitoyens sont fiers, à juste titre.
C'est ensemble qu'il nous revient aujourd'hui de travailler, comme si nous étions placés sous le regard des générations futures, à la réforme de notre système de soins.
C'est avec vous, c'est à votre écoute, que je veux établir, dans un esprit de concorde et de concertation, les conditions favorables à l'évolution de vos pratiques.
Voilà ce que je tenais à vous dire.
Je vous remercie. Source http://www.mgfrance.org, le 28 avril 2008