Déclaration de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat chargé des transports, sur le projet de création du canal "Seine Nord Europe" et sur son financement, Paris le 17 avril 2008.

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Circonstance : Rencontre organisée par Voies Navigables de France « Canal Seine-Nord Europe : un partenariat industriel européen », à Paris le 17 avril 2008

Texte intégral

Monsieur le président, (François BORDRY)
Messieurs les ministres, (Michel DELEBARRE et Jacques GODFRAIN)
Messieurs les présidents, vice-présidents et directeurs,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de me trouver parmi vous cet après-midi et je remercie François BORDRY pour l'organisation de cette rencontre, grâce à laquelle le projet du canal Seine Nord Europe, qui nous tient tant à coeur, continue à aller de l'avant.
Le canal Seine-Nord Europe, ce canal à grand gabarit de 106 km de long, constitue à mes yeux la plus grande réalisation de notre époque, en matière d'infrastructures fluviales. Ce projet est au centre de la politique des transports que j'entends mener, ce pour au moins trois raisons.
1. C'est l'illustration avant la lettre de la logique développée lors du Grenelle de l'environnement. Vous le savez, l'objectif du canal Seine-Nord Europe est de tripler le trafic fluvial sur le corridor Nord-Sud dès 2020. Au-delà de l'axe Nord-Sud, le canal Seine-Nord Europe va également renforcer la compétitivité du transport fluvial sur la Seine. La possibilité de faire venir plus facilement de nouveaux bateaux rendra l'offre fluviale plus souple, plus apte à répondre aux besoins des industriels et logisticiens.
En outre, l'originalité de ce projet est de ne pas se limiter à la réalisation d'une nouvelle infrastructure linéaire : au contraire, il prend en compte dès sa conception quatre plates-formes d'échanges multimodales, trois en Picardie, une dans le Nord-Pas de Calais. A ce titre, il s'inscrit pleinement dans le développement de l'intermodalité voulue par notre politique de développement durable.
2. Deuxième raison : Le projet du canal Seine-Nord Europe participe à la politique de relance des ports que le gouvernement met actuellement en oeuvre. En effet, il constitue une opportunité de développement pour les ports de Rouen, du Havre et de Dunkerque, qui voient leur hinterland considérablement agrandi avec des opérateurs de grande qualité.
Seine-Nord Europe ouvre pour les ports normands des possibilités de relations fluviales massifiées vers le nord du Bassin parisien, vers le Nord-Pas de Calais et, au-delà, vers la Belgique et le bassin rhénan, qui représentent un pôle de production et de consommation de 45 millions d'habitants. Cette connexion avec le nord et l'est ne peut que mettre en valeur la position de l'ensemble Le Havre - Rouen, première place portuaire rencontrée sur la rangée nord. Enfin, l'amélioration de la desserte fluviale de l'avant-port à conteneurs de Port 2000 sera de nature à dynamiser les échanges au port du Havre.
3. J'en viens à la troisième raison. Le canal Seine-Nord Europe, reliant Compiègne et Aubencheul-au-Bac, est le maillon central d'un projet de dimension européenne. La future liaison fluviale entre la Seine et l'Escaut figure parmi les 30 projets prioritaires des réseaux de transport transeuropéens (RTE-T) : de fait, elle contribuera de manière décisive à l'intégration du réseau fluvial européen, intégration que nous voulons encore améliorer lors de la présidence française de l'Union européenne, au semestre prochain.
Le canal Seine-Nord Europe désenclavera le bassin de la Seine, principal bassin fluvial français, et le reliera au réseau à grand gabarit de l'Europe du Nord et de l'Est. De plus, en complément de la réalisation du canal Seine-Nord Europe, la Belgique et la France s'emploieront à accroître les gabarits de leurs réseaux, afin de constituer un itinéraire Seine Escaut, entre Paris et Gand, accessible à la très grande majorité des unités fluviales européennes. Car, au-delà, c'est l'ensemble des bassins du Rhin et du Danube qui seront directement connectés au bassin de la Seine.
Le 20 juillet 2007, les partenaires français, flamand, wallon et néerlandais ont signé une déclaration commune qui prévoit la création d'une Commission intergouvernementale (CIG) et d'un Groupement Européen d'Intérêt Economique (GEIE), chargé de la gestion et la redistribution des péages appliqués à la future liaison.
L'installation de cette Commission intergouvernementale est envisagée pour le mois de mai 2008. Il est possible qu'elle soit élargie à l'Allemagne.
La constitution rapide de cette Commission intergouvernementale est l'une des conditions exigées par la Commission européenne pour subventionner le projet. Je m'arrêterai d'ailleurs quelques instants sur les questions ayant trait à son mode de financement.
La Commission européenne a accordé au projet Seine-Escaut la totalité de la demande déposée par la France et la Belgique : elle versera une subvention de 420,19 millions d'euros sur la période 2008-2013, dont 350 millions consacrés à la partie française - et, plus spécifiquement, 333 millions d'euros pour le canal Seine-Nord Europe.
Le coût global de ce canal est évalué, je le rappelle, à 4 milliards d'euros pour une réalisation en contrat de partenariat. 2,33 milliards seront couverts par les subventions publiques versées par l'Europe (333 millions), par l'Etat français (1 milliard) et par les collectivités (1 milliard). Enfin, les 1,66 milliard d'euros complémentaires seront financés par le secteur privé.
Les travaux de la mission de financement, menée par Messieurs COUSQUER et SCEMAMA, se poursuivent actuellement ; leurs conclusions feront l'objet d'un rapport qui devrait être finalisé au courant du mois de mai 2008.
Sur les modalités de financement, nous sommes totalement favorables - et la Commission européenne également - aux contrats de partenariat public-privé.
Nous y sommes favorables, dans la mesure où les contrats de partenariat public-privé créent une dynamique et une véritable synergie. Cette synergie permet de réaliser, à un coût optimal, des projets de grande envergure dans un délai record. Que l'on songe seulement au viaduc de Millau, dont Jacques GODFRAIN nous parlera tout à l'heure : la concession du viaduc a rendu possible la conclusion, en l'espace de seulement trois ans, d'un projet commencé dix-sept ans plus tôt.
En ce qui concerne le canal Seine-Nord Europe, la Mission d'appui à la réalisation de contrats de partenariat (MAPPP) a donné en octobre 2006 son accord au dossier d'évaluation préalable présenté par Voies Navigables de France (VNF). VNF lancera, avant la fin de cette année, je l'espère, un appel à candidature, ouvert aux entreprises françaises, européennes, internationales. Un projet de cette envergure requiert en effet de faire jouer la concurrence d'une manière saine et de jeter son dévolu sur les entreprises les plus compétentes ainsi que les financements les plus innovants. Je ne doute pas de la qualité des réponses qui pourront être faites.
Cet appel à candidature est encore suspendu aux conclusions du rapport de financement, aux arbitrages législatifs qui font suite au Grenelle et à la prise du décret de déclaration d'utilité publique du projet (DUP). Pour rappeler les grandes étapes de cette procédure, l'enquête publique, effectuée de janvier à mars 2007, a reçu un avis favorable de la commission d'enquête en juillet 2007. Et le Conseil d'Etat a été saisi sur le projet de décret le 23 janvier 2008.
Le décret d'utilité publique devrait être pris dans le courant du premier semestre 2008, une fois le Conseil d'Etat entendu (la date limite est le 15 septembre 2008, le décret devant être pris au plus tard 18 mois après la clôture de l'enquête publique).
L'objectif d'un lancement des travaux de réalisation à la fin de l'année 2010 pour une mise en service en 2014/2015 apparaît donc comme réaliste, dans le cadre d'un contrat de partenariat.
Avant de terminer, je souhaite remercier tout particulièrement l'ensemble des collectivités territoriales qui financent le projet aux côtés de l'Europe et de l'Etat, et s'associent à notre politique de développement durable.
A mes yeux, le canal Seine-Nord Europe est plus qu'une infrastructure de transport : il participera à l'aménagement et au développement des territoires traversés, d'un point de vue économique, touristique, industriel et agricole. Il permettra aussi d'assurer l'approvisionnement d'eau des agglomérations du Nord, en particulier de Lille, dont les besoins sont croissants et ne peuvent être satisfaits sans apport extérieur. En outre, le projet devrait limiter le niveau des crues, en particulier dans la vallée de l'Oise, en amont de Compiègne, durement touchée par les inondations de 1993 et 1995.
Je suis donc convaincu que les collectivités territoriales tireront de multiples profits de ce projet et je m'en réjouis, car leur participation à sa réalisation est décisive.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.vnf.fr, le 15 mai 2008