Déclaration de M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, lors du point de presse conjoint avec M. Maxime Verhagende, ministre néerlandais des affaires étrangères, sur les relations franco-néerlandaises, les priorités de la présidence française de l'UE, notamment en matière d'immigration, et les dossiers internationaux, en particulier les Balkans, le Moyen-Orient et le Tchad, Paris le 2 juin 2008.

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Circonstance : Conseil de coopération franco-néerlandais le 2 juin 2008 à Paris

Texte intégral

Avec mon collègue Maxime Verhagende, nous avons présidé la cinquième réunion plénière du Conseil de Coopération franco-néerlandais, qui a été créée en 2003. Nous avons décidé que nous allions revitaliser ce Conseil de Coopération. Nous pensons, d'ailleurs, que les mandats de ce Conseil doivent être d'une durée de cinq années et la réunion d'aujourd'hui est une bonne occasion pour faire un bilan du travail effectué depuis 2003.
Nous avons abordé également un certain nombre de problèmes internationaux. Nous venons d'apprendre qu'une explosion a fait un certain nombre de morts à Islamabad, au Pakistan, devant l'ambassade du Danemark. Nous dénonçons, évidemment, très fermement cet attentat.
Nous avons parlé des Balkans. Nous avons évoqué la situation en Serbie et au Kosovo. Nous avons, là-dessus, une vision commune et un désir que les choses s'arrangent au mieux et s'apaisent dans la région. Nous avons également discuté de la situation en Macédoine, avec ces graves incidents électoraux hier.
Nous avons aussi échangé nos idées concernant notre démarche commune au Tchad et nous avons décidé de nous y rendre tous les deux, le ministre néerlandais des Affaires étrangères et moi-même. Nous n'avons pas arrêté de date mais nous le ferons prochainement.
Nous avons évidemment évoqué le Darfour, Maxime vous en dira un mot à propos du rôle, maintenant essentiel, du Conseil de sécurité des Nations unies.
J'oublie quelques points importants tels que la Chine mais surtout et aussi les avancées du Processus de paix entre Israël et les Palestiniens. En effet, Maxime revient d'Israël et de Palestine et moi-même, je m'y trouvais récemment. Nous avons aussi salué l'élection du président Michel Sleimane au Liban.
Nous avons donc parcouru l'ensemble des problèmes du Moyen-Orient et nous allons continuer lors du déjeuner qui nous attend et où nous retrouverons l'ensemble des deux délégations. Je rappelle aussi que Mme Rama Yade se rendra au Pays Bas le 3 juillet prochain.
Q - Concernant le Kosovo, avez-vous évoqué ensemble les perspectives et les possibilités d'une division du territoire par exemple et qu'en pensez-vous ?
R - Nous ne l'avons pas évoquée, sauf pour la condamner. Nous ne voulons pas de division et, dans ce que Maxime vient de dire, si la Force EULEX peut se déployer sous le parapluie de la MINUK, nous souhaitons que cette force EULEX et la MINUK, ensemble, garantissent les frontières telles qu'elles ont été tracées.
Nous le souhaitons infiniment car c'est une complication qui serait inacceptable de part et d'autre et qui entraînerait de graves incidents.
Je crois que nous sommes complètement d'accord à ce sujet, mais nous l'avons évoqué comme quelque chose qui ne doit pas arriver.
Q - Que souhaitez-vous faire pour renouveler les relations entre les Pays-bas et la France ? Pourquoi y a-t-il besoin de cela ?
R - Parce que cela installe une dynamique, les ministres se renouvellent. Mais nous n'avons rien décidé.
Q - Est-ce pour cela que vous allez au Tchad ensemble ?
R - Nous allons au Tchad ensemble car nous avons là-bas des soldats, néerlandais et français. Par ailleurs, nous souhaitons vivement que, de l'autre côté de la frontière - et ce sera une occasion de le dire - les troupes de l'Union africaine et celles des Nations-unies se déploient. Vous savez dans quelle lenteur nous sommes pris ! Vous avez vu les attaques, il y a seulement quelques jours. La situation n'est pas stabilisée.
De notre côté, du côté du Tchad, pour le moment, la liste a été publiée pour les six villages qui seront reconstruits par les organisations non-gouvernementales, par les Tchadiens eux-mêmes, par les personnes déplacées que nous protégeons et dont nous sécurisons la zone.
Les choses commencent à évoluer de notre côté, avec notamment la reconstruction des villages. Il nous faut penser aussi à un dispositif nouveau pour la reconstruction de villages dans des régions où il y a davantage d'eau.
Tout cela est en train de se faire mais de l'autre côté, du côté du Darfour, nous sommes désolés que cela ne se fasse pas.
Q - J'aimerais savoir si vous avez discuté du pacte pour l'immigration que la France compte proposer durant sa Présidence de l'Union européenne et si oui, qu'en pensent les Pays-bas ?
R - Je suis certain que ceci sera accepté par l'ensemble des pays européens, mais bien sûr, rien n'est fixé. Il y a des discussions avec nos amis Espagnols, Hollandais. Je parle des Espagnols car cette discussion a eu lieu il y a quelques jours. Il y a déjà un texte que nous allons améliorer mais il faut que nous soyons d'accord.
Je crois que c'est une nécessité. Lorsqu'il y aura un pacte européen, je l'accepte comme une protection, une garantie supplémentaire en matière des Droits de l'Homme, d'asile, d'accueil et de protection des personnes. Il y a d'ailleurs également le problème des réfugiés, mais c'est plus compliqué à travers l'Europe parce que, si les Néerlandais et nous-mêmes nous pouvons nous mettre d'accord, il y a des pays d'Europe centrale et orientale qui n'ont pas du tout cette tradition. Il y aura donc, je le crois, un débat difficile. Mais concernant le pacte sur l'immigration, je pense que la réflexion est bien avancée et qu'elle est tournée vers les Droits de l'Homme.
Q - Vous venez de rentrer d'Irak où le gouvernement irakien a émis son souhait d'acheter de l'armement français de haute technologie. La France a-t-elle l'intention de vendre des systèmes d'armement en Irak ?Si oui, y a-t-il quelque chose qui pourrait bloquer cette demande ?
R - Je n'ai pas eu le sentiment d'aller vendre des armes, j'ai eu le sentiment d'aller proposer aux industriels français de prendre leur place aux côtés des autres qui sont là depuis longtemps.
S'il y a des achats de matériels, ils seront négociés avec les personnes compétentes. Ce que j'ai constaté, c'est ce vide invraisemblable, dans un pays avec lequel nous avons des relations historiques très importantes, la nécessité, par exemple dans le domaine de l'électricité, des centrales thermiques, de l'irrigation, de l'agriculture.
J'espère donc que mon appel, très discret, aux industriels français sera entendu parce qu'il me semble que ce qui se passe en Irak, et dans la région est important, on assiste à une amélioration de la sécurité. Il faut donc que la France reprenne sa place dans ce pays, tout simplement.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 juin 2008