Entretien de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, dans "Le Journal du Dimanche" du 15 juin 2008, sur l'avenir de la construction européenne après le vote négatif des Irlandais concernant le Traité de Lisbonne.

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Média : Le Journal du Dimanche

Texte intégral

Q - Que comptez-vous faire après le "non" irlandais au Traité de Lisbonne ?
R - Dès le prochain Conseil européen, les 19 et 20 juin, nous allons faire de la politique et de la diplomatie pour voir l'analyse que font les Irlandais et nos différents partenaires européens. Ce n'est pas la peine de se cacher derrière son petit doigt, il y a des enseignements politiques à tirer de ce résultat. Il faut notamment comprendre pourquoi demeure ce fossé entre les attentes à court terme des citoyens et le projet d'Union européenne. Il faut donc faire en sorte qu'il y ait une meilleure lisibilité des actions européennes et que les valeurs de l'Union soient mieux portées au niveau national.

Q - Faut-il continuer à ratifier ce traité ?
R - Nous espérons que le processus de ratification va continuer et nous nous félicitons déjà de la prise de position courageuse du Premier ministre britannique, Gordon Brown. Il est tout à fait normal que les autres peuples se prononcent également. Surtout, cela permet aux Irlandais de se laisser le temps de la réflexion, de voir de quelles propositions ils ont besoin pour traiter le problème.

Q - Ce "non" remet-il en cause l'agenda de la présidence française de l'Union ?
R - Non seulement il n'est pas remis en cause, mais il est d'autant plus pertinent qu'il répond à des préoccupations qui sont celles des citoyens : assurer une meilleure sécurité énergétique, mettre en place un mode de développement durable, faire face aux différents problèmes migratoires, dresser le bilan de santé de la PAC sur la politique de défense commune... Ce qu'il nous faut, c'est un accord politique au Conseil. La Présidence française aura tous les moyens de mettre en oeuvre des politiques indispensables à l'Europe. Ce qui est touché, c'est tout ce qui était relatif à la mise en oeuvre du nouveau traité, les nominations comme celle du futur président de l'Europe, par exemple; elles vont vraisemblablement connaître un certain retard.

Q - Mais les débats sur l'Irlande vont forcément plomber la Présidence française...
R - La manière de les conduire sera fixée dès jeudi au Conseil européen, donc, sous présidence slovène. Nous établirons ensemble un agenda, et la présidence française ne sera pas plombée. Nous écouterons ensuite nos amis irlandais et nous verrons leurs propositions pour dégager ensemble une solution politique intelligente. Pour l'heure, cette solution, je ne l'ai pas sous la main et personne ne l'a. Il est donc impératif que l'Europe soit en ordre de marche et que les politiques de l'agenda français progressent, car la meilleure réponse, c'est de montrer que l'Europe répond aux attentes du citoyen. Nous allons perdre quelques mois sur le plan institutionnel, mais nous ne perdrons pas de temps en ce qui concerne les projets attendus. Vous pouvez compter sur le président de la République pour ne pas laisser l'Europe en panne.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juin 2008