Conférence de presse de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur la question de la révision des sanctions contre l'Irak, Paris le 23 février 2001.

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Circonstance : Entretien entre MM. Hubert Védrine et Brian Cowen, ministre irlandais des affaires étrangères, Paris le 23 février 2001

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Brian et moi nous nous sommes rencontrés bien souvent lors de nombreuses rencontres européennes, mais nous voulions consacrer un temps plus long à passer en revue tous les deux toutes les questions qui se traitent notamment au sein du Conseil de sécurité.
A ce titre, nous avons parlé des questions africaines, de la nouvelle situation prometteuse qui est créée par l'adoption de la résolution sur la question des Grands Lacs. Il y a une conjonction qu'il faut mettre à profit pour obtenir la mise en oeuvre de tous les engagements qui avaient été pris par tous les protagonistes, notamment dans les Accords de Lusaka, mais qui n'avaient jamais été tenus jusqu'ici. L'ensemble des membres du Conseil de sécurité, unanimes, vont rassembler toutes leurs forces pour que l'on avance.
Nous avons parlé d'autres questions africaines traitées au Conseil de sécurité. Nous avons fait le point sur la situation au Proche-Orient. Nous avons parlé de la question iraquienne, des Balkans, de différents sujets qui vont être traités au Conseil Affaires générales de lundi.
Nous avons parlé, évidemment, des questions touchant à l'Union européenne, de la Russie, des Etats-Unis, bref nous avons fait un tour d'horizon très complet de toutes les questions qui intéressent la France et l'Irlande dans leur dialogue politique, soit parce qu'elles sont ensemble au Conseil de sécurité, soit parce que cela relève de l'Union européenne.
Tout cela, inutile de vous le dire, c'est passé dans un climat très chaleureux, très amical et très confiant et je crois très utile pour harmoniser nos approches et uvrer ensemble sur tous ces grands dossiers, et naturellement nous poursuivrons cet échange.
Q - Vous avez parlé de l'Iraq au cours de votre entretien. Les aviations américaine et britannique viennent de mener une nouvelle frappe. Je voudrais savoir si ces frappes contre l'Iraq étaient de nature à inciter le régime de Bagdad à coopérer avec les Nations unies ? Les arguments qui sont développés par les Américains et les Britanniques pour justifier ces frappes, vous semblent-ils recevables et enfin pensez-vous que ces frappes sont cohérentes avec la révision des sanctions sur lesquelles vous avez eu un consensus et avec le concept de vigilance internationale que vous avez développé ? Je voudrais en savoir un peu plus sur ce concept ?
R - D'abord en ce qui concerne les frappes, je n'ai à ajouter à ce que j'ai déjà dit et on connaît l'analyse de la France sur cette question.
En ce qui concerne la révision des sanctions, je voudrais préciser ce que j'ai dit : c'est que plus aucun membre du Conseil de sécurité n'était satisfait de la situation actuelle ; donc l'unanimité pour dire ce n'est pas une bonne situation et ce n'est pas un bon système. Mais les différents membres du Conseil de sécurité n'en tirent pas encore les mêmes conséquences. Cela ne les conduit pas forcément aux mêmes propositions, ni aux mêmes propositions de révision. A cet égard, je serai très intéressé par les échanges que je pourrais avoir dans les jours prochains avec Colin Powell, Robin Cook et d'autres responsables, comme avec tous les membres du Conseil de sécurité, comme nous l'avons fait aujourd'hui, comme je l'ai fait hier avec le ministre norvégien qui préside le Comité des sanctions. Cette réflexion sur la révision est en cours.
C'est dans ce cadre que j'ai incité à ce que l'on s'interroge sur les termes et que j'ai voulu indiquer que, par rapport à l'Iraq, ce dont nous avons besoin, ce n'est pas tellement de sanctions, parce que ce mot apparaît disons tourné vers le passé, nous avons besoin d'un système de vigilance et de contrôle international efficace qui nous dispense d'autres mesures qui pénalisent inutilement et injustement la population. C'est là-dessus que je souhaite que la réflexion s'approfondisse puisque tout le monde déclare être en train de réfléchir avec une éventuelle révision du système.
Q - M. Nizar Hamdoun vice-ministre iraquien des Affaires étrangères a dit, ce matin, d'une part qu'il attendait une nouvelle escalade des attaques contre l'Iraq et il a suggéré d'autre part que les inspecteurs chargés du contrôle des armements puissent retourner en Iraq en échange de la levée immédiate des sanctions. Selon vous, y aura-t-il escalade ? Et la France et l'Irlande pourraient-elles accepter cet échange ?
R - Sur l'escalade, je n'en sais rien. Comment le savoir ? Cela ne dépend pas de nous.
Deuxièmement, pour le reste, il n'y a pas à négocier. Il y a une résolution qui est la résolution 1284 et la résolution est la force de loi internationale. C'est la caractéristique des résolutions du Conseil de sécurité. Donc, il n'y a pas à négocier sur les résolutions.
Ce qui est possible en revanche, cela nous renvoie à la question précédente, c'est que les membres du Conseil de sécurité réfléchissent entre eux à l'adaptation des mesures qu'ils décident ensemble, cela est leur rôle même dans la communauté internationale.
Mais du point de vue de l'Iraq par rapport à la résolution 1284, l'Iraq doit coopérer avec les Nations unies pour l'application de la 1284. Voilà la situation.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 février 2001)