Texte intégral
DISCOURS LORS DE LA RECEPTION OFFERTE PAR LE MINISTRE BURKINABE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, M. TATIUS ZONGO, LE 4 MARS :
Monsieur le Ministre de lEconomie et des Finances,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Mesdames, Messieurs très chers invités,
Ouagadougou est de nouveau en fête. Le FESPACO est lun des moments forts de votre vie nationale. Cest aussi lun des emblèmes de la vie culturelle du continent africain. En venant massocier à ce moment prestigieux, jai le sentiment mêlé de vous apporter le message damitié et destime dune France qui salue une belle réussite, et de donner à la fête un tour plus studieux puisque nos administrations travaillent pendant ce temps à notre 6ème Commission mixte.
Je suis dautant plus reconnaissant au gouvernement burkinabé du soin quil a apporté à la préparation de cette réunion, et de son attention particulière à mon propre agenda, quune vie internationale extrêmement chargée complique à loisir. Mais pour rien au monde je naurais voulu davantage retarder ce moment de dialogue : vous le souhaitiez, nous le souhaitions aussi pour faire le point. Et lamoureux de cinéma que je suis espère secrètement trouver le temps de se mêler à un moment ou à un autre aux milliers dautres que vous accueillez cette semaine.
Je le disais à linstant : venu parler de coopération avec le Burkina Faso, je souhaite dabord renouveler à son gouvernement, à lensemble des forces politiques et sociales qui constituent votre pays, et à travers elles au peuple burkinabé, un message de fidélité, de solidarité et despoir.
Mais parler de coopération cest aussi réévaluer dans un monde qui change la façon de travailler de deux partenaires qui sestiment et se respectent. Chacun à une image de lautre et chacun a ses attentes. Aucun des actes que nous posons ensemble, aucun projet conduit pour lavenir du Burkina néchappe à cette exigence mutuelle dun échange responsable et fructueux pour nos deux communautés nationales. Cest sous leur regard que nous nous réunissons car cest pour elles que nous travaillons.
Fière dêtre le premier partenaire du Burkina Faso, la France est dautant plus attentive aux efforts de notre coopération quelle a le souci, sur ce continent quelle aime, dy être une force utile pour le progrès, respectueuse des peuples qui le recherchent en pleine responsabilité deux-mêmes, et soucieuse dy apporter sa voix et son expertise, en étroite coordination avec lensemble de ses partenaires extérieurs.
Oserais-je dire, sans forcer le paradoxe, que cest tout à la fois cette ambition et cette modestie qui ont tout ces derniers mois, dans la profonde réforme de lEtat entreprise par Lionel Jospin, éclairé dun sens particulier celle de notre coopération internationale et au développement ?
Votre connaissance très familière de nos institutions minterdit de vous imposer ce soir lexposé fastidieux de dispositions que beaucoup ont analysé dans le détail. Je me permettrai devant vous, et parce que le Burkina Faso nous offre lexemple dun pays qui en quelque sorte avait fait la moitié de la route, den souligner certains traits qui lui donnent son vrai sens, politique, au plein sens du terme.
Je mattarderai essentiellement sur le souci douverture qui nous a guidés : certains ont pensé que cette réforme visait simplement à tourner la page du passé, et à solder un pan dhistoire (post-coloniale). Je ne puis nier que la France ait voulu résolument se tourner vers lavenir et considérer que lavenir de nos pays, cest celui des jeunes générations, de plus en plus ouvertes à toutes sortes dinfluences et exigeantes sur les perspectives quon leur offre. Oui, de ce point de vue, louverture correspond au souhait dune offre française moderne, attractive, vivante et nul ne peut sen plaindre.
Mais louverture, pour nous comme pour nos amis relève surtout dune compréhension très contemporaine du monde. Celui-ci sorganise en espaces économiques et politiques régionaux, plus aptes que les seuls Etats à organiser leurs règles institutionnelles, les principes de leurs échanges commerciaux, leurs communications, leurs ressources énergétiques. Cest un fait historique majeur dont on ignore souvent ce quil coûte aux Etats et aux sociétés avant de leur procurer les avantages quils en attendent. Car des pays interdépendants ne reçoivent le fruit de leurs efforts dintégration : plus de commerce, dinvestissements, de biens sociaux, quaprès des périodes dajustement contraignantes et surtout quau bout dune forte détermination politique. Le Burkina Faso, pays enclavé, avait compris cela de longue date et na pas failli dans cette constance. Nous saluons dailleurs les résultats quil commence à en retirer.
La zone de solidarité prioritaire qui concentre désormais laide publique française au développement et qui accueille votre pays ne se résume pas, de ce point de vue, au seul principe de solidarité aux pays les plus démunis. Son extension géographique, les règles du partenariat que nous y proposons pour sentendre sur des projets de qualité prennent tout leur sens en perspective dintégrations régionales réussies.
Mais louverture, dans chacun de nos pays, nous la vivons aussi à lintérieur de nos frontières car partout le libéralisme fait craquer les anciens schémas : lEtat ne règle plus la vie, il la régule ; les sociétés surgissent dans leur diversité ; il nest daugmentation de la richesse nationale que dans lencouragement de linitiative. Très tôt, vous le savez, la France a perçu ce que cette règle commune comportait davantages, mais aussi dexigence, et souvent de risque. Et dans les pays en développement, qui ne veulent pas être marginalisés dans les circuits de léchange, nous mesurons bien les effets sociaux dune marche forcée vers des standards internationaux. Un flux daide publique soutenu peut aider à y pourvoir mais il ne suffit pas. Cest dans la solidarité de nos sociétés et la mutualisation de leurs forces que je vois des chances accrues de progrès : entreprises, associations, organisations professionnelles, collectivités locales et territoriales constituent aujourdhui non pas le complément de la coopération dEtat à Etat mais la raison de la renouveler car ce sont les piliers de nos sociétés. Dans ce pays qui pour des raisons précises et notamment les grandes sécheresses des années 70-80 a très tôt appris la coopération décentralisée, on comprendra ce que je veux dire.
Or louverture aux sociétés civiles si elle est souhaitable, ne peut pas non plus être laissée à limprovisation. Riches dhumanité et de créativité, elles représentent une ressources précieuse mais rare dont chacun attend des effets concrets et durables. Je souhaite que lon se penche sur lintégration de cette coopération « hors Etat » dans leffort de développement pour en multiplier et consolider les effets partout où elle se manifeste, au village, dans les quartiers comme dans les entreprises.
Louverture enfin, cest tout ce qui peut intéresser nos pays à la coopération et au développement. Notre Premier ministre a pris quant à lui les mesures propres à associer le gouvernement, la société française à la représentation nationale à la coopération : Comité interministériel, Haut conseil de la coopération internationale, débat parlementaire en portent la preuve. Comme en témoigne dailleurs la présence à mes côtés du député Jean-Michel Marchand président du groupe damitié parlementaire France-Burkina.
Naturellement tout cela a un corollaire : la mobilisation veut des preuves tangibles de progrès sur le terrain, lopinion ne boude pas sa générosité mais elle souhaite quon lui explique ce que lon fait, elle est exigeante.
Car on ne peut vouloir des citoyens acteurs si cest pour quils tiennent des rôles muets.
A nous donc doeuvrer pour une coopération toujours plus transparente, mieux évaluée dans ses effets, plus proche de la vie des gens pour quelle les mobilise et senrichisse de leurs apports.
A ce besoin douverture que nous partageons, jassocierai volontiers pour conclure cet appétit de responsabilité qui, dans le monde actuel, est latout de sociétés libres et entreprenantes. Jai vivement souhaité quau Burkina nous signions un document de partenariat, pour que notre amitié ancienne soit accueillante à un débat aussi large que possible sur les objectifs, la méthode et les acteurs de nos échanges. Dans un monde souvent incertain où lurgence lemporte trop souvent, où la paix est pour beaucoup un idéal, la sécurité un bien rare, le développement dun pays comme le vôtre est pour tous un signe précieux, gage de stabilité, pour le Burkina Faso comme pour sa région. Oeuvrer pour le développement, cest du même coup ne rien laisser au hasard pour que ces équilibres, toujours fragiles soient chaque jour plus fermes, et quils construisent la confiance et lespoir. Voilà pour moi le sens du partenariat.
Monsieur le Ministre de lEconomie et des Finances, je voulais par ce message vous remercier de votre accueil si amical et vous dire combien japprécie la mobilisation du gouvernement, de vos services et derrière eux dun pays auquel nous sommes heureux de réitérer notre profond attachement.
DISCOURS LORS DE LA RECEPTION DE RETOUR DE LA COMMISSION MIXTE, LE 5 MARS :
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Monsieur lAmbassadeur de France,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et Représentants des institutions multilatérales,
Mesdames, Messieurs les élus
Mesdames, Messieurs les représentants de la communauté française,
Je suis venu au Burkina Faso, vous le savez, pour clore demain, les travaux de la Commission mixte, la 6ème, qui remet à plat en quelque sorte, la coopération entre la France et le Burkina Faso.
Je bénis le ciel de lheureuse coïncidence qui ma fait venir - mais ce nest pas exactement une coïncidence - au moment où Ouagadougou affiche des couleurs de fête puisque le FESPACO, cet événement important de la vie culturelle africaine, est en train dy triompher une fois de plus.
Je voudrais dabord souligner la qualité du travail réalisé par ceux qui ont préparé cette Commission mixte, dont jai pu prendre la mesure ce matin, en participant aux côtés du ministre de lEconomie et des Finances à la présentation quen ont faite les rapporteurs. Cétait pour moi dautant plus important que cette Commission mixte prend place au moment où la France a entrepris de réformer son dispositif de coopération. Elle le fait à usage interne pour donner plus defficacité à sa coopération internationale, pour donner plus de lisibilité à sa politique extérieure, plus de transparence aussi afin que notre population sache mieux ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons, afin quelle adhère davantage à notre politique extérieure et que celle-ci lui devienne en quelque sorte moins étrange et moins étrangère.
Mais nous le faisons aussi parce que nous sommes convaincus que dans un monde qui change nous devons renouveler notre dialogue en particulier avec lAfrique. Nous devons désormais nous ouvrir à toute lAfrique car dautres pays africains veulent davantage de France, en quelque sorte. Et nous, nous devons le faire, en préservant le lien privilégié que nous entretenons depuis si longtemps avec certains pays dAfrique qui dans le même temps revendiquent, eux aussi, davoir dautres relations. Bref, il nest plus question de relations dexclusivité des uns vis-à-vis des autres. Cest sur la base dun partenariat librement accepté, voulu de part et dautre, quil sagit désormais dorganiser notre coopération pour faire place davantage à la responsabilité des uns et des autres, et aussi à une plus grande exigence de la part des uns vis-à-vis des autres.
Quant à la qualité du travail accompli, quant à la capacité dévaluer ses résultats, et nous le disions cet après-midi, je me réfère aux conversations que javais aussi bien avec M. le ministre des Finances quavec M. le Ministre des Affaires étrangères. Il est vrai quil faut, dans le cadre dun dialogue continu, que nous puissions en quelque sorte nous faire davantage confiance. Ce qui ma intéressé aujourdhui, cest aussi de voir quau-delà de la coopération dEtat à Etat, nous avons su mobiliser pour préparer cette Commission mixte, non seulement les organisations non gouvernementales que je remercie pour leur participation, non seulement les collectivités locales françaises qui pratiquent la coopération décentralisée en partenariat avec ces communes burkinabé que le gouvernement a fait le choix dinstaller ou de faire vivre, mais aussi le secteur privé, des représentants des entreprises françaises et burkinabé qui ce matin nous ont dit comment elles imaginaient améliorer encore leur partenariat. Bref, cest bien lensemble des acteurs de la coopération entre la France et le Burkina Faso qui était mobilisé aujourdhui. Jy ai pour ma part trouvé matière à réflexion, mais aussi des raisons despérer davantage encore dans lavenir de ce pays.
Dans quelques semaines, en présence du président Compaore, les collectivités françaises qui coopèrent avec ce pays, et elles sont nombreuses au Burkina Faso - cest probablement le pays qui a le réseau le plus dense de relations avec les collectivités locales françaises - se retrouveront à Epernay. Ce sera pour nous loccasion de donner un coup de projecteur supplémentaire à cette coopération tout a fait exemplaire.
Je voudrais, après avoir une fois encore remercié celles et ceux qui auront permis le succès de cette Commission mixte, dire à la communauté française, que je sais évidemment très attachée à ce pays - certains ont même fait le choix dy vivre définitivement - que la France entend aussi répondre aux inquiétudes que cette réforme avait pu faire naître. Jespère que la communauté française y verra la preuve que, non seulement nous nentendons pas renoncer à lamitié, à la coopération, mais que nous entendons aussi revivifier lune et lautre au travers de cette réforme. Je voudrais dire à cette communauté, à cette partie du continent à laquelle nos compatriotes réservent une affection particulière du fait de lHistoire, parce quun nombre important dentre eux y vivent, que nous avons dans une perception plus ouverte de nos échanges internationaux, fait le choix de montrer mieux ce que nous faisons, je le disais à linstant, démontrer que chacun de nos actes est utile dans un pays comme celui-ci, un pays qui avance et nous ly encourageons, sur la voie de lintégration sous-régionale et du progrès économique et social. Et je sais aussi combien chacune et chacun des représentants de la communauté française est impliqué dans ce progrès que poursuit le Burkina Faso.
Ce pays, représenté ce soir par mes collègues ministres, élus, représentants des institutions, occupe une place singulière pour nous. Jai dit tout au long des contacts que jai eus cet après-midi, lopinion positive que la communauté internationale exprime à légard de ce pays, une opinion positive aussi, chez les Français. Je voudrais dire à ce pays, dont nous savons les contraintes, dont nous savons quil na pas été forcément le mieux servi par la géographie sur le plan de ses ressources, que nous apprécions comment il compense ses handicaps par ses ressources humaines.
Monsieur lAmbassadeur, je voudrais en concluant ce propos vous remercier davoir bien voulu organiser cette rencontre, vous dire aussi combien japprécie, et je la salue à travers vous, laction déterminée, discrète parfois parce quil faut souvent, mais je la sais appréciée, de diplomatie daccueil qui par son efficacité, par ses disponibilités aussi je crois vivifie cette relation entre le Burkina Faso et la France. Et je voudrais, à travers vous, dire ma reconnaissance à toute léquipe que vous animez ici.
Mesdames et Messieurs, javais dit que je nimproviserais pas. Je nai probablement pas totalement évité de le faire. Jespère que vous me le pardonnerez, mais je voudrais sans aucune réserve, dire en concluant mon propos, vive lamitié, vive lamitié entre la France et le Burkina Faso.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 mars 1999)
Monsieur le Ministre de lEconomie et des Finances,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Mesdames, Messieurs très chers invités,
Ouagadougou est de nouveau en fête. Le FESPACO est lun des moments forts de votre vie nationale. Cest aussi lun des emblèmes de la vie culturelle du continent africain. En venant massocier à ce moment prestigieux, jai le sentiment mêlé de vous apporter le message damitié et destime dune France qui salue une belle réussite, et de donner à la fête un tour plus studieux puisque nos administrations travaillent pendant ce temps à notre 6ème Commission mixte.
Je suis dautant plus reconnaissant au gouvernement burkinabé du soin quil a apporté à la préparation de cette réunion, et de son attention particulière à mon propre agenda, quune vie internationale extrêmement chargée complique à loisir. Mais pour rien au monde je naurais voulu davantage retarder ce moment de dialogue : vous le souhaitiez, nous le souhaitions aussi pour faire le point. Et lamoureux de cinéma que je suis espère secrètement trouver le temps de se mêler à un moment ou à un autre aux milliers dautres que vous accueillez cette semaine.
Je le disais à linstant : venu parler de coopération avec le Burkina Faso, je souhaite dabord renouveler à son gouvernement, à lensemble des forces politiques et sociales qui constituent votre pays, et à travers elles au peuple burkinabé, un message de fidélité, de solidarité et despoir.
Mais parler de coopération cest aussi réévaluer dans un monde qui change la façon de travailler de deux partenaires qui sestiment et se respectent. Chacun à une image de lautre et chacun a ses attentes. Aucun des actes que nous posons ensemble, aucun projet conduit pour lavenir du Burkina néchappe à cette exigence mutuelle dun échange responsable et fructueux pour nos deux communautés nationales. Cest sous leur regard que nous nous réunissons car cest pour elles que nous travaillons.
Fière dêtre le premier partenaire du Burkina Faso, la France est dautant plus attentive aux efforts de notre coopération quelle a le souci, sur ce continent quelle aime, dy être une force utile pour le progrès, respectueuse des peuples qui le recherchent en pleine responsabilité deux-mêmes, et soucieuse dy apporter sa voix et son expertise, en étroite coordination avec lensemble de ses partenaires extérieurs.
Oserais-je dire, sans forcer le paradoxe, que cest tout à la fois cette ambition et cette modestie qui ont tout ces derniers mois, dans la profonde réforme de lEtat entreprise par Lionel Jospin, éclairé dun sens particulier celle de notre coopération internationale et au développement ?
Votre connaissance très familière de nos institutions minterdit de vous imposer ce soir lexposé fastidieux de dispositions que beaucoup ont analysé dans le détail. Je me permettrai devant vous, et parce que le Burkina Faso nous offre lexemple dun pays qui en quelque sorte avait fait la moitié de la route, den souligner certains traits qui lui donnent son vrai sens, politique, au plein sens du terme.
Je mattarderai essentiellement sur le souci douverture qui nous a guidés : certains ont pensé que cette réforme visait simplement à tourner la page du passé, et à solder un pan dhistoire (post-coloniale). Je ne puis nier que la France ait voulu résolument se tourner vers lavenir et considérer que lavenir de nos pays, cest celui des jeunes générations, de plus en plus ouvertes à toutes sortes dinfluences et exigeantes sur les perspectives quon leur offre. Oui, de ce point de vue, louverture correspond au souhait dune offre française moderne, attractive, vivante et nul ne peut sen plaindre.
Mais louverture, pour nous comme pour nos amis relève surtout dune compréhension très contemporaine du monde. Celui-ci sorganise en espaces économiques et politiques régionaux, plus aptes que les seuls Etats à organiser leurs règles institutionnelles, les principes de leurs échanges commerciaux, leurs communications, leurs ressources énergétiques. Cest un fait historique majeur dont on ignore souvent ce quil coûte aux Etats et aux sociétés avant de leur procurer les avantages quils en attendent. Car des pays interdépendants ne reçoivent le fruit de leurs efforts dintégration : plus de commerce, dinvestissements, de biens sociaux, quaprès des périodes dajustement contraignantes et surtout quau bout dune forte détermination politique. Le Burkina Faso, pays enclavé, avait compris cela de longue date et na pas failli dans cette constance. Nous saluons dailleurs les résultats quil commence à en retirer.
La zone de solidarité prioritaire qui concentre désormais laide publique française au développement et qui accueille votre pays ne se résume pas, de ce point de vue, au seul principe de solidarité aux pays les plus démunis. Son extension géographique, les règles du partenariat que nous y proposons pour sentendre sur des projets de qualité prennent tout leur sens en perspective dintégrations régionales réussies.
Mais louverture, dans chacun de nos pays, nous la vivons aussi à lintérieur de nos frontières car partout le libéralisme fait craquer les anciens schémas : lEtat ne règle plus la vie, il la régule ; les sociétés surgissent dans leur diversité ; il nest daugmentation de la richesse nationale que dans lencouragement de linitiative. Très tôt, vous le savez, la France a perçu ce que cette règle commune comportait davantages, mais aussi dexigence, et souvent de risque. Et dans les pays en développement, qui ne veulent pas être marginalisés dans les circuits de léchange, nous mesurons bien les effets sociaux dune marche forcée vers des standards internationaux. Un flux daide publique soutenu peut aider à y pourvoir mais il ne suffit pas. Cest dans la solidarité de nos sociétés et la mutualisation de leurs forces que je vois des chances accrues de progrès : entreprises, associations, organisations professionnelles, collectivités locales et territoriales constituent aujourdhui non pas le complément de la coopération dEtat à Etat mais la raison de la renouveler car ce sont les piliers de nos sociétés. Dans ce pays qui pour des raisons précises et notamment les grandes sécheresses des années 70-80 a très tôt appris la coopération décentralisée, on comprendra ce que je veux dire.
Or louverture aux sociétés civiles si elle est souhaitable, ne peut pas non plus être laissée à limprovisation. Riches dhumanité et de créativité, elles représentent une ressources précieuse mais rare dont chacun attend des effets concrets et durables. Je souhaite que lon se penche sur lintégration de cette coopération « hors Etat » dans leffort de développement pour en multiplier et consolider les effets partout où elle se manifeste, au village, dans les quartiers comme dans les entreprises.
Louverture enfin, cest tout ce qui peut intéresser nos pays à la coopération et au développement. Notre Premier ministre a pris quant à lui les mesures propres à associer le gouvernement, la société française à la représentation nationale à la coopération : Comité interministériel, Haut conseil de la coopération internationale, débat parlementaire en portent la preuve. Comme en témoigne dailleurs la présence à mes côtés du député Jean-Michel Marchand président du groupe damitié parlementaire France-Burkina.
Naturellement tout cela a un corollaire : la mobilisation veut des preuves tangibles de progrès sur le terrain, lopinion ne boude pas sa générosité mais elle souhaite quon lui explique ce que lon fait, elle est exigeante.
Car on ne peut vouloir des citoyens acteurs si cest pour quils tiennent des rôles muets.
A nous donc doeuvrer pour une coopération toujours plus transparente, mieux évaluée dans ses effets, plus proche de la vie des gens pour quelle les mobilise et senrichisse de leurs apports.
A ce besoin douverture que nous partageons, jassocierai volontiers pour conclure cet appétit de responsabilité qui, dans le monde actuel, est latout de sociétés libres et entreprenantes. Jai vivement souhaité quau Burkina nous signions un document de partenariat, pour que notre amitié ancienne soit accueillante à un débat aussi large que possible sur les objectifs, la méthode et les acteurs de nos échanges. Dans un monde souvent incertain où lurgence lemporte trop souvent, où la paix est pour beaucoup un idéal, la sécurité un bien rare, le développement dun pays comme le vôtre est pour tous un signe précieux, gage de stabilité, pour le Burkina Faso comme pour sa région. Oeuvrer pour le développement, cest du même coup ne rien laisser au hasard pour que ces équilibres, toujours fragiles soient chaque jour plus fermes, et quils construisent la confiance et lespoir. Voilà pour moi le sens du partenariat.
Monsieur le Ministre de lEconomie et des Finances, je voulais par ce message vous remercier de votre accueil si amical et vous dire combien japprécie la mobilisation du gouvernement, de vos services et derrière eux dun pays auquel nous sommes heureux de réitérer notre profond attachement.
DISCOURS LORS DE LA RECEPTION DE RETOUR DE LA COMMISSION MIXTE, LE 5 MARS :
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Monsieur lAmbassadeur de France,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et Représentants des institutions multilatérales,
Mesdames, Messieurs les élus
Mesdames, Messieurs les représentants de la communauté française,
Je suis venu au Burkina Faso, vous le savez, pour clore demain, les travaux de la Commission mixte, la 6ème, qui remet à plat en quelque sorte, la coopération entre la France et le Burkina Faso.
Je bénis le ciel de lheureuse coïncidence qui ma fait venir - mais ce nest pas exactement une coïncidence - au moment où Ouagadougou affiche des couleurs de fête puisque le FESPACO, cet événement important de la vie culturelle africaine, est en train dy triompher une fois de plus.
Je voudrais dabord souligner la qualité du travail réalisé par ceux qui ont préparé cette Commission mixte, dont jai pu prendre la mesure ce matin, en participant aux côtés du ministre de lEconomie et des Finances à la présentation quen ont faite les rapporteurs. Cétait pour moi dautant plus important que cette Commission mixte prend place au moment où la France a entrepris de réformer son dispositif de coopération. Elle le fait à usage interne pour donner plus defficacité à sa coopération internationale, pour donner plus de lisibilité à sa politique extérieure, plus de transparence aussi afin que notre population sache mieux ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons, afin quelle adhère davantage à notre politique extérieure et que celle-ci lui devienne en quelque sorte moins étrange et moins étrangère.
Mais nous le faisons aussi parce que nous sommes convaincus que dans un monde qui change nous devons renouveler notre dialogue en particulier avec lAfrique. Nous devons désormais nous ouvrir à toute lAfrique car dautres pays africains veulent davantage de France, en quelque sorte. Et nous, nous devons le faire, en préservant le lien privilégié que nous entretenons depuis si longtemps avec certains pays dAfrique qui dans le même temps revendiquent, eux aussi, davoir dautres relations. Bref, il nest plus question de relations dexclusivité des uns vis-à-vis des autres. Cest sur la base dun partenariat librement accepté, voulu de part et dautre, quil sagit désormais dorganiser notre coopération pour faire place davantage à la responsabilité des uns et des autres, et aussi à une plus grande exigence de la part des uns vis-à-vis des autres.
Quant à la qualité du travail accompli, quant à la capacité dévaluer ses résultats, et nous le disions cet après-midi, je me réfère aux conversations que javais aussi bien avec M. le ministre des Finances quavec M. le Ministre des Affaires étrangères. Il est vrai quil faut, dans le cadre dun dialogue continu, que nous puissions en quelque sorte nous faire davantage confiance. Ce qui ma intéressé aujourdhui, cest aussi de voir quau-delà de la coopération dEtat à Etat, nous avons su mobiliser pour préparer cette Commission mixte, non seulement les organisations non gouvernementales que je remercie pour leur participation, non seulement les collectivités locales françaises qui pratiquent la coopération décentralisée en partenariat avec ces communes burkinabé que le gouvernement a fait le choix dinstaller ou de faire vivre, mais aussi le secteur privé, des représentants des entreprises françaises et burkinabé qui ce matin nous ont dit comment elles imaginaient améliorer encore leur partenariat. Bref, cest bien lensemble des acteurs de la coopération entre la France et le Burkina Faso qui était mobilisé aujourdhui. Jy ai pour ma part trouvé matière à réflexion, mais aussi des raisons despérer davantage encore dans lavenir de ce pays.
Dans quelques semaines, en présence du président Compaore, les collectivités françaises qui coopèrent avec ce pays, et elles sont nombreuses au Burkina Faso - cest probablement le pays qui a le réseau le plus dense de relations avec les collectivités locales françaises - se retrouveront à Epernay. Ce sera pour nous loccasion de donner un coup de projecteur supplémentaire à cette coopération tout a fait exemplaire.
Je voudrais, après avoir une fois encore remercié celles et ceux qui auront permis le succès de cette Commission mixte, dire à la communauté française, que je sais évidemment très attachée à ce pays - certains ont même fait le choix dy vivre définitivement - que la France entend aussi répondre aux inquiétudes que cette réforme avait pu faire naître. Jespère que la communauté française y verra la preuve que, non seulement nous nentendons pas renoncer à lamitié, à la coopération, mais que nous entendons aussi revivifier lune et lautre au travers de cette réforme. Je voudrais dire à cette communauté, à cette partie du continent à laquelle nos compatriotes réservent une affection particulière du fait de lHistoire, parce quun nombre important dentre eux y vivent, que nous avons dans une perception plus ouverte de nos échanges internationaux, fait le choix de montrer mieux ce que nous faisons, je le disais à linstant, démontrer que chacun de nos actes est utile dans un pays comme celui-ci, un pays qui avance et nous ly encourageons, sur la voie de lintégration sous-régionale et du progrès économique et social. Et je sais aussi combien chacune et chacun des représentants de la communauté française est impliqué dans ce progrès que poursuit le Burkina Faso.
Ce pays, représenté ce soir par mes collègues ministres, élus, représentants des institutions, occupe une place singulière pour nous. Jai dit tout au long des contacts que jai eus cet après-midi, lopinion positive que la communauté internationale exprime à légard de ce pays, une opinion positive aussi, chez les Français. Je voudrais dire à ce pays, dont nous savons les contraintes, dont nous savons quil na pas été forcément le mieux servi par la géographie sur le plan de ses ressources, que nous apprécions comment il compense ses handicaps par ses ressources humaines.
Monsieur lAmbassadeur, je voudrais en concluant ce propos vous remercier davoir bien voulu organiser cette rencontre, vous dire aussi combien japprécie, et je la salue à travers vous, laction déterminée, discrète parfois parce quil faut souvent, mais je la sais appréciée, de diplomatie daccueil qui par son efficacité, par ses disponibilités aussi je crois vivifie cette relation entre le Burkina Faso et la France. Et je voudrais, à travers vous, dire ma reconnaissance à toute léquipe que vous animez ici.
Mesdames et Messieurs, javais dit que je nimproviserais pas. Je nai probablement pas totalement évité de le faire. Jespère que vous me le pardonnerez, mais je voudrais sans aucune réserve, dire en concluant mon propos, vive lamitié, vive lamitié entre la France et le Burkina Faso.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 mars 1999)