Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, sur quatre cents ans de relations entre la France et la ville de Québec, Québec le 3 juillet 2008.

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Circonstance : Voyage officiel au Canada du 2 au 4 juillet 2008-cérémonie de "Salut à Champlain" pour l'ouverture du 400ème anniversaire de la fondation de la ville de Québec le 3

Texte intégral

Mesdames et Messieurs, Mes chers amis,
La "Bonne Renommée", le "Don de Dieu", "La Française" : les bateaux sur lesquels Champlain franchit l'Atlantique n'ont pas fini de traverser nos mémoires. Comme la Ni?a, la Pinta et la Santa Maria de C. Colomb, ils nous ont ouvert le monde. D'une poignée de Saintongeais, de Poitevins, de Normands, de Bretons, ces bateaux ont fait des Québécois.
Avec vous, je me souviens. L'estuaire passé, le fleuve est là bordé d'un quai de fortune. Devant les voyageurs qui débarquent, à peine un avant-poste, un fossé, une palissade de pieux, trois bâtiments de rondins. Au-delà, l'image même de l'inconnu, une contrée immense, des bois épais, privés de loi, peuplés d'Indiens, hommes et femmes font pourtant un pas. Missionnaires, coureurs des bois, agriculteurs, ils empoignent leur espoir. Ils marchent et d'une carte vierge, bravant le froid, traçant les routes, bornant les champs, ils font un grand pays et lui donnent Québec pour cité.
Devient-on moins français en devenant acadien, québécois, canadien ? Samuel de Champlain dont la statut se dresse derrière moi m'aurait répondu non. Pour les hommes et les femmes qui l'ont accompagné au premier temps de Québec, la France s'est agrandie sans se diviser. Elle s'est étendue sans se rompre. Mesdames et Messieurs il n'y a qu'une France et c'est elle qui depuis quatre siècles est présente en Amérique. Sa langue est sa patrie vivante. Dans votre Québec, chaque Français reconnaît ses mots et ses serments. A travers les cérémonies du 400ème anniversaire de la ville, je salue donc au nom de la France l'extraordinaire aventure politique qu'une farouche volonté a conduite ici. Je salue l'essor prodigieux de votre prospérité. Je salue la ferveur culturelle et spirituelle que la présence française a fait éclore ici et que votre propre histoire agrandit
Oui, c'est bien une civilisation française qu'ont édifiée ici officiers parisiens, marchands rouennais, jésuites et ursulines. Mais une civilisation singulière, enrichie par le contact des premières nations indiennes, encouragée par la distance à plus d'audace, poussée par la conquête britannique à se faire plus frondeuse et plus tenace. Mesdames et Messieurs le fait français ne s'est jamais éteint en Amérique.
Voilà 40 ans qu'une grande voix, une voix historique, l'a tirée pour reprendre un mot qui vous appartient, de son hivernement dans l'esprit de mes compatriotes. Un effort persévérant de rapprochement a porté ses fruits. Les Français, les jeunes, surtout, ont compris que les grands espaces canadiens restaient des espaces d'avenir, d'investissement et de formation.
De nouveaux quais ont accueilli de nouveaux voyageurs, renouant entre nous la fraternité charnelle que nos aïeux avaient établie. En dix ans, 30.000 Français ont émigré vers le Québec, autant qu'en 150 ans autrefois vers la Nouvelle France. La France, mesdames et messieurs, se devait de célébrer le 4ème centenaire de la vieille capitale avec éclat. A La Rochelle et à Bordeaux en mai, les fêtes ont été exceptionnelles. Elles le seront en juillet à Paris. Ici même, venant de toute la France, des artistes, des spectacles offerts par les villes et par les régions françaises vont se succéder. Hier, le Belem, ce grand voilier, magnifiquement restauré est entré dans les eaux du Saint-Laurent, sur les traces de la Bonne Renommée.
Mesdames et messieurs, tout Français qui débarque à Québec porte dans ses bagages avec son ambition et sa confiance, ce contrat vierge que signent par avance les grands pays d'avenir. Nos entreprises, nos universités, nos grandes agences scientifiques et technologiques, nos élus travaillent à en réaliser les promesses. Demain, c'est un large accord économique entre l'Europe et le Canada que la France défendra.
Il y a 400 ans, Champlain a créé entre nos deux rives la continuité d'un même sentiment. Il existe en chaque Québécois une émotion française et il y a en chaque Français un rêve québécois. Parmi vous, dans Québec, je veux tourner ce rêve vers l'avenir.
Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 7 juillet 2008