Texte intégral
Monsieur le Président,
Le Conseil tient à remercier le Parlement européen et en particulier M. Brok pour son rapport sur le document de stratégie de 2007 de la Commission relatif à l'élargissement et profiter de cette occasion pour saluer le rôle actif et la contribution précieuse du Parlement européen dans le processus d'élargissement.
Le rapport qu'a élaboré Elmar Brok indique que le dernier élargissement a été un succès tant pour l'Union européenne que pour les Etats membres qui l'ont rejointe.
Nous estimons que l'élargissement a été une réussite pour l'Union et qu'il a permis de surmonter la division de l'Europe et contribué à la paix et à la stabilité sur tout le continent. Il a inspiré des réformes et consolidé les principes communs concernant la liberté, la démocratie, le respect des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, l'Etat de droit ainsi que l'économie de marché.
L'élargissement du marché intérieur et de la coopération économique a renforcé la prospérité et la compétitivité, ce qui a permis à l'Union européenne de mieux répondre au défi de la mondialisation et aussi de faciliter les échanges avec nos partenaires. Incontestablement, l'élargissement a ainsi accru le poids de l'Union européenne dans le monde et en fait un acteur international plus fort.
Notre politique d'élargissement est bien établie et a intégré les leçons tirées des élargissements précédents. En décembre 2007, l'Union est convenue que la future stratégie d'élargissement reposerait sur la consolidation des engagements, sur une conditionnalité équitable et rigoureuse et sur une meilleure communication. Cela reste le fondement de notre approche en matière d'élargissement.
L'Union a conclu que, pour lui permettre de maintenir sa capacité d'intégration, les pays en voie d'adhésion devaient être disposés à assumer pleinement leurs obligations qui découlent de l'adhésion et que l'Union devait pouvoir fonctionner efficacement et aller de l'avant comme l'a souligné dans son intervention M. Elmar Brok.
Ces deux aspects sont essentiels, en effet, si l'on veut gagner le soutien large et durable de l'opinion publique. Ils devraient être mobilisés par une plus grande transparence et une meilleure communication sur ces enjeux et je compte effectivement sur le Parlement européen pour nous y aider.
En ce qui concerne les négociations en cours, l'Union tiendra ses engagements.
- En ce qui concerne la Turquie, l'examen analytique, c'est-à-dire la première étape formelle pour chaque chapitre, a été conclu sur 23 chapitres, dont 8 ont été ouverts.
- En ce qui concerne la Croatie, 20 chapitres ont été ouverts et 2 d'entre eux ont été provisoirement clôturés.
Des conférences intergouvernementales se sont tenues au niveau ministériel le 17 juin avec la Turquie et la Croatie pour ouvrir le chapitre 6 "Droits des sociétés", le chapitre 7 "Droits à la propriété intellectuelle en ce qui concerne la Turquie", le chapitre 2 "Libre circulation des travailleurs" et le chapitre 19 "Politique sociale et emploi en ce qui concerne la Croatie".
Notre ambition est de faire avancer ces négociations et je rappelle qu'en ce qui concerne nos relations avec la Turquie, nous souhaitons que le processus de réformes se poursuive et s'intensifie. C'est ainsi que seront garanties l'irréversibilité et la pérennité du processus et nous continuerons à veiller à un suivi étroit des progrès accomplis dans tous les domaines, en particulier pour ce qui est du respect des critères de Copenhague.
Bien évidemment, il faut aussi que des progrès soient accomplis sur la voie de la normalisation des relations bilatérales avec la République de Chypre. En ce qui concerne la Croatie, les négociations progressent bien, elles sont entrées cette année dans une phase décisive et l'objectif principal est désormais de continuer à tirer parti des progrès accomplis et d'accélérer le rythme des réformes.
L'Union européenne encourage donc la Croatie à poursuivre ses efforts visant à instaurer des relations de bon voisinage, y compris les travaux destinés à trouver des solutions définitives, acceptables pour les deux parties, ainsi, bien évidemment, qu'à résoudre les questions bilatérales en suspens avec ses voisins.
Mais je souhaitais également profiter de cette intervention, si vous me le permettez, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, Monsieur le Commissaire Olli Rehn, pour condamner, au nom de la Présidence, avec la plus grande gravité, l'action violente qui s'est produite ce matin, à Istanbul, et qui a provoqué des victimes parmi les forces de l'ordre en faction devant le consulat des Etats-Unis à Istanbul. Sachez, qu'au nom de la Présidence, nous dénonçons cet attentat tout à fait odieux et que nous sommes proches, bien évidemment, des autorités turques à cet instant.
Réponse aux orateurs :
Jean-Pierre Jouyet, président en exercice du Conseil
Monsieur le Président, trois observations avant d'en venir à ce débat qui a été extrêmement riche et passionnant.
D'abord je voulais, au nom du Conseil également, saluer la délégation sud-africaine, qui est devant votre Parlement, et lui indiquer que nous reverrons prochainement les dirigeants de la République sud-africaine, à l'occasion du Sommet UE/Afrique du Sud qui sera le premier sommet organisé durant la Présidence française de l'Union européenne à la fin de ce mois.
Deuxièmement, je me joindrai à Olli Rehn en exprimant toute ma compassion à l'égard des touristes allemands qui ont été enlevés par des rebelles kurdes en Turquie. Au sein du Conseil, nous espérons vraiment que ces personnes seront retrouvées le plus rapidement possible, véritablement saines et sauves, et nous tenons à exprimer notre solidarité à leur égard.
Troisièmement, je souhaite dire à M. Duff que je le remercie de sa bonne connaissance de la politique française et des positions que je peux avoir à titre personnel. Je tiens à lui dire que je suis bien évidemment à sa disposition pour en parler de manière plus profonde avec lui autour d'un café, mais que je ne suis malheureusement pas là aujourd'hui pour les commenter dans le cadre de ces fonctions.
Alors, s'agissant de notre débat, tout d'abord l'élargissement fait pleinement partie de l'histoire de la construction européenne et, jusqu'à présent, nous avons toujours fait en sorte qu'élargissement et renforcement de l'Union aillent de pair, et il est important que cela continue, comme l'a souligné M. Brok. Tous les débats sont utiles pour sensibiliser nos citoyens aux enjeux de l'élargissement, et donc nous accordons une attention tout à fait particulière aux débats et aux positions du Parlement européen sur ce sujet.
A la suite de ce qu'ont fait de nombreux parlementaires, je voudrais souligner le rôle stabilisateur de l'élargissement. Cela est évident dans le cas des Balkans. Les progrès rapides de la Croatie, que la Présidence française souhaitera accélérer si tous les Etats membres sont d'accord, montrent que des pays qui ont connu les conflits des années 90 ont une vraie perspective d'adhésion. C'est un message important à l'adresse, notamment, de la Serbie, alors que ce pays vient de se doter d'un gouvernement qui, également, aspire à renforcer ses liens avec l'Union européenne.
Cela est vrai également s'agissant de la Turquie et, à cet égard, je souhaiterais rappeler que l'état actuel des négociations n'est pas lié à la position de tel ou tel Etat membre de l'Union européenne, mais qu'il est lié à la Turquie elle-même, au rythme des réformes de ces pays, et surtout au respect, par la Turquie, de ses obligations envers tous les Etats membres de l'Union européenne et, notamment, au respect du Protocole d'Ankara.
La politique d'élargissement ne signifie pas que nous négligeons les autres voisins de l'Union européenne. Le Conseil discute en ce moment de la manière de permettre à l'Ukraine de franchir une étape nouvelle dans sa relation avec l'Union européenne, lors du prochain sommet Union européenne-Ukraine, qui aura lieu à Evian le 9 septembre prochain, et nous souhaitons également faire progresser la relation de l'Union avec la Moldavie, pays dans lequel le Conseil a déjà beaucoup investi.
Et nous soutenons également, en tant que Présidence du Conseil, les processus régionaux qui ont été décrits. J'ai moi-même assisté à la conférence de lancement de la synergie sur la mer Noire, à Kiev, en février, et au sommet des pays riverains de la Baltique. Et, bien évidemment, je n'omets pas de mentionner le prochain sommet sur le Processus de Barcelone et l'Union pour la Méditerranée, qui aura lieu à Paris le 13 juillet.
Pour conclure, comme vous le voyez, le processus d'élargissement n'est pas en panne. Il se poursuit de manière exigeante envers les pays candidats, mais également pour les Etats membres auxquels il appartient d'expliquer ce processus à leurs citoyens. Et M. Roucek et Mme De Keyser ont parfaitement raison, il y a un véritable effort de pédagogie à faire, avec ou sans Magritte, chère Madame De Keyser. Mais c'est vrai que, comme vous l'avez souligné, il y a un effort à faire pour les rassurer également.
C'est justement pour permettre la poursuite de ce processus, dont certains d'entre vous, et notamment M. Brok, ont rappelé l'intérêt stratégique, que le traité de Lisbonne prévoit de réformer nos institutions de manière à ce que les nouveaux Etats membres - il faut être clair - soient accueillis dans les meilleures conditions, qui ne remettent pas en cause la capacité d'action de l'Union européenne.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 juillet 2008