Interview de M. Bernard Laporte, secrétaire d'Etat aux sports, à la jeunesse et à la vie associative, à RTL le 4 août 2008, sur l'organisation des jeux olympiques 2008 en Chine et les droits de l'homme.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral


 
 
 
S. Carpentier.- Nous sommes donc à quatre jours désormais du rendez-vous planétaire en ce qui concerne le sport, ce sont les Jeux Olympiques. Et cette année, en 2008, ça se déroule à Pékin, en Chine, vous le savez, on vous en parle depuis des mois maintenant. Nous sommes en direct avec B. Laporte ; bonjour.
 
Bonjour.
 
Secrétaire d'Etat aux Sports ; vous vous envolez aujourd'hui pour Pékin...
 
Oui, ce soir, à 19 heures, effectivement.
 
Pourquoi y aller plus tôt que les autres politiques français ? Pour donner un signe, un encouragement aux athlètes qui ont fait le déplacement déjà ?
 
Oui, bien sûr, c'est surtout pour accompagner les sportifs français qui sont déjà sur place et préparer, anticiper, effectivement, la cérémonie, enfin le départ des Jeux qui auront lieu vendredi.
 
Pour parler sport, d'abord avant d'aborder le sujet politique, quelle ambition vous pouvez avoir, vous, en tant que secrétaire d'Etat aux Sports pour les médailles françaises ?
 
L'ambition, c'est que nous conservions notre 7ème rang mondial. Nous reculons depuis maintenant deux olympiades. Nous étions 5ème en 1996 à Atlanta, nous étions 6ème en 2000 à Sydney, 7ème à Athènes en 2004, donc nous voulons maintenir cette place de 7ème nation mondiale. Et pour cela, il faudra atteindre aux alentours des 40 médailles.
 
Oui, un peu moins de 40 médailles même, disait la ministre R. Bachelot, c'est l'ambition. Est-ce que vous sentez que les athlètes français sont prêts ?
 
Oui, bien sûr ! Moi, j'ai eu l'occasion d'aller l'INSEP voir beaucoup d'athlètes se préparer, on les sent prêts. Maintenant, vous savez, on sait ce que c'est le haut niveau, il n'y a pas que nous qui serons prêts, mais sincèrement il y a beaucoup de détermination, beaucoup de volonté, on le sent, de la part de nos athlètes.
 
Assez bizarrement, à l'approche de ces Jeux, on n'a pas trop parlé du sport, j'ai envie de dire entre guillemets "de la préparation des athlètes", mais plus de politique, évidemment, par rapport à ce rendez-vous à Pékin avec les boycotts, oui ou non, annoncés, la crise tibétaine, la violence et le non-respect des droits de l'homme sur place. Est-ce que c'est quelque chose qui vous ennuie, vous, personnellement ?
 
Ce n'est pas quelque chose qui m'ennuie. Je crois qu'effectivement ça existe tout cela, mais nous allons, nous, là-bas faire une compétition, faire du sport. Et encore une fois, je le dis depuis le début, c'est que les Jeux Olympiques c'est le seul évènement sportif mondial qui rassemble 205 pays, qui fait en sorte justement qu'à un certain moment, pendant dix-huit jours, les gens se consacrent au sport et dans le respect et les vertus de l'olympisme. Donc je crois qu'il faut protéger cet évènement. Si on le met en otage, cet évènement, ce sera grave pour le sport et à terme il disparaîtra. Donc, encore une fois, préservons-le, on est là pour faire du sport. On n'est pas, je dirais innocents, on sait ce qui se passe en Chine, et encore une fois je suis convaincu que le fait d'y aller les obligera à s'ouvrir et fera en sorte que ce pays évoluera.
 
La France a décidé de faire le déplacement à votre image, à l'image de plusieurs ministres, et surtout du président de la République qui sera là vendredi, alors que d'autres grands de ce monde comme G. Brown, comme S. Berlusconi ou A. Merkel n'iront pas. Comment justifier le déplacement français ?
 
Je ne sais pas. Est-ce qu'ils n'y vont pas parce qu'ils boycottent ou est-ce qu'ils n'y vont pas parce qu'ils n'aiment pas les Jeux Olympiques ? Vous savez, il y a rarement eu des présidents de la République qui assistent aux Jeux Olympiques aussi. Je crois que N. Sarkozy y va parce qu'il est un passionné de sport avant tout.
 
Voilà. Et le message aussi de faire le voyage et peut-être d'évoquer les droits de l'homme sur place, ne pas laisser ça de côté ?
 
Ah ça, ça ne me regarde pas, ça le regarde lui. Ce qui est sûr, c'est que j'ai rarement vu des présidents de la République française assister à des Jeux Olympiques. Lui, je vous le répète, il y va parce qu'il est passionné de sport et il a envie de donner un message d'encouragement aux athlètes qu'il verra d'ailleurs le vendredi.
 
Les athlètes français que vous avez côtoyez avant ce grand rendez-vous, le fait qu'on parle beaucoup de tous ces aspects politiques en marge de la compétition, est-ce que ça les agace, est-ce qu'ils comprennent, est-ce qu'ils seront impliqués. Est-ce que vous allez leur laisser la possibilité de faire des messages ?
 
Non, ça ne les agace pas. Vous savez, on sait ce que c'est, encore une fois, une préparation. Il y a le stress, il y a beaucoup de choses qui font qu'on est dans une bulle, et l'athlète aujourd'hui ne se consacre plus, enfin n'écoute plus ce qui se dit en dehors de son sport. Il est focalisé, il est concentré, il est comme je vous le disais, dans une bulle, et il lui tarde maintenant l'évènement sportif. Le reste, "il n'en a rien à faire", entre guillemets, il y va pour faire du sport. Après, un sportif a le droit de s'exprimer - c'est ce que J. Rogge disait juste avant que je prenne la parole -, c'est que un sportif a le droit de dire, il a le droit de critiquer la Chine, mais encore une fois quand il est dans l'enceinte sportive, il est là pour faire du sport.
 
Vous ne leur avez pas fait passer un message en disant, "restez sages" ?
 
Moi, je ne leur ai rien dit du tout. Vous savez, chaque athlète a son coach, a son président de fédération, ils sont assez grands pour parler de tout ça.  
 
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 4 août 2008