Déclaration de M. Jean-François Roubaud, président de la CGPME, sur le projet de "Small Business act" pour les PME dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union européenne (PFUE), Bruxelles le 23 juin 2008.

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Circonstance : Conférence CGPME à Bruxelles le 23 juin 2008

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Dans exactement 8 jours, la Slovénie confiera à la France les rênes de la présidence du Conseil des Ministres de l'Union européenne pour les 6 prochains mois.
L'influence prépondérante de l'Europe sur les politiques économique, fiscales et sociales nationales démontrent toute l'importance pour les pouvoirs publics français et les PME de ne pas rater cette échéance !
La Secrétaire Général de notre Union européenne des PME l'a bien compris, lui qui effectue depuis plusieurs semaines des allers/retours réguliers entre Bruxelles et Paris pour venir à la rencontre des plus hauts responsables politiques français !
C'est une échéance importante pour les PME françaises puisque ce passage de flambeau, dans les mains des autorités françaises, ne se reproduira pas avant les années 2020 !
C'est une échéance importante pour les PME européennes puisque les autorités françaises ont clairement affiché leur volonté de progresser sur la voie d'un Small Business Act pour l'Europe qui permette, enfin, d'accroître la compétitivité des PME dans le cadre réaffirmé et rénové de la Stratégie de Lisbonne.
Six mois pour parvenir à doter l'Union européenne d'un instrument performant pour renforcer la croissance des PME en Europe, c'est à la fois peu et beaucoup pour répondre aux attentes des petites et moyennes entreprises de l'Hexagone et du "Vieux Continent".
Mais, il y a une réelle volonté de "faire" au niveau européen. Il y a une réelle volonté d'accompagner cette évolution de la part des organisations professionnelles par des propositions constructives. Les échanges de cette journée l'ont clairement démontré.
L'enjeu est d'importance pour les PME qui fondent beaucoup d'espoirs dans la politique communautaire.
En mai 2006, dans une enquête réalisée par IPSOS à la demande de la CGPME, près de trois dirigeants sur quatre (72 %) estimaient que l'Union européenne est un atout pour la croissance des PME.
En cette année olympique, les petites et moyennes entreprises n'ont pas seulement pour objectif de participer. Elles ont avant tout la volonté de gagner pour devenir de vraies championnes !
C'est avec cet objectif que la CGPME a formulé des propositions "pour des PME championnes d'Europe" avec 4 axes majeurs :
- Créer les conditions d'une croissance soutenue au bénéfice des PME,
- Construire l'économie de la connaissance,
- Promouvoir une croissance respectueuse de l'environnement,
- Mettre la politique sociale au service de la croissance.
Je ne reviendrai pas sur les nombreux aspects qui ont été évoqués et largement débattus au cours de la Table Ronde de ce matin et les deux ateliers de cet après-midi.
Je souhaiterais simplement réaffirmer nos attentes sur quelques priorités incontournables pour progresser sur la voie d'une croissance durable et atteindre, enfin, les objectifs de croissance économique, de création d'emplois tels que définis dans la stratégie de Lisbonne.
Si les PME font déjà beaucoup pour la croissance et l'emploi en Europe, elles pourraient faire bien davantage.
Leur réactivité, leur inventivité, leur souplesse qui font leur force méritent que les dirigeants politiques, nationaux et européens, tiennent compte de leurs spécificités.
Avant toute chose, les PME veulent pouvoir entreprendre librement, avec toute l'audace que cela implique. Elles sont prêtes à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour prendre le virage de l'innovation, gagner des nouvelles parts de marchés dans le monde, développer les emplois.
Mais, pour pouvoir continuer à être les moteurs de la croissance et de l'emploi, elles ont besoin d'un environnement économique et social qui corrige les déséquilibres du marché.
Aujourd'hui, la CGPME a voulu organiser cette rencontre en prélude à la Présidence française qui a affirmé, à maintes reprises, ses ambitions fortes en faveur de la croissance des PME.
Nous comptons sur toute la détermination du Gouvernement français, dont le représentant annoncé, Hervé NOVELLI, a dû renoncer à être parmi nous cet après-midi pour répondre au souhait du chef de l'Etat de l'accompagner en Israël hier soir, afin d'aboutir à des résultats probants et répondre ainsi à nos attentes.
La Commission européenne veut mettre l'accent sur le "mieux légiférer". C'est un axe de réforme essentiel, que les dirigeants d'entreprises attendent depuis des années et qui tarde à se mettre en place dans la pratique. Les PME sont dans l'attente d'une véritable simplification qui doit surtout être synonyme de "réglementation de qualité".
Je pense à des dates d'entrée uniques, par exemple 2 par an, pour l'ensemble de la législation concernant les PME, sur le modèle britannique.
Je pense aussi à l'introduction d'un dispositif d'approbation tacite qui signifierait pour les PME la fin de l'attente d'une réponse administrative qui bloque un projet ou leurs exportations.
La dématérialisation est également source de simplification, notamment pour encourager la participation des PME aux marchés publics. Mais si la dématérialisation est généralisée dans toute l'Union européenne, il est indispensable d'harmoniser et de sécuriser le processus de signature électronique qui deviendrait, dès lors, une véritable carte d'identité électronique infalsifiable, bénéficiant de la confiance de ses utilisateurs.
Le paysage fiscal européen est par ailleurs fort disparate et conduit à une situation de dumping fiscal néfaste pour les PME.
A nos yeux, un levier de compétitivité important serait constitué par l'harmonisation des systèmes nationaux de fiscalité conduisant à la suppression des disparités pénalisant les entreprises. Celle-ci passe notamment par une "assiette commune consolidée de l'impôt sur les sociétés", la fameuse ACCIS dont la présentation vient d'être confirmée avant la fin de cette année, sous présidence française.
Dans le cadre de cette présidence, la CGPME souhaite que le Gouvernement français, qui n'a jamais affirmé son hostilité au principe de soutenir une coopération renforcée en cas d'absence d'accord au Conseil des Ministres de l'Union européenne, prenne l'initiative de lancer une coopération renforcée pour faire aboutir ce projet "ACCIS".
Pour les PME, ce mécanisme présenterait des avantages directement opérationnels avec une réduction certaine des coûts de conformité inhérents à l'imposition des sociétés, des activités transfrontalières facilitées, une neutralité fiscale entre les investissements nationaux et ceux réalisés dans l'Union européenne.
Stimuler l'innovation et la recherche dans les PME impose de réviser et d'aménager tout l'environnement européen lié à l'innovation dans les entreprises.
Il faut pour cela que les PME puissent s'appuyer sur une politique audacieuse de financement de l'innovation et elles attendent beaucoup de l'impulsion que pourra apporter le groupe de la Banque Européenne d'Investissement, sous réserve que l'innovation soit appréhendée de manière extensive et ne se limite pas à la haute technologie.
Une autre priorité est celle de l'aboutissement des travaux en cours sur le brevet communautaire. La CGPME attend un soutien fort de la présidence française afin que des avancées significatives puissent être obtenues dès 2008, avec la mise en place d'un système juridictionnel spécialisé.
Une réflexion plus globale pourrait aussi être menée par la présidence française sur le régime européen des aides fiscales destinées à soutenir l'innovation dans les PME.
La lutte anti-contrefaçon a certes été renforcée mais aucune mesure n'est destinée à protéger de manière ciblée les PME. Un système de prévention, via des cellules d'alerte implantées notamment dans les zones transfrontalières, pourrait être institué.
La présidence française entend également vouloir faire de l'ensemble énergie-climat-environnement, une de ses priorités.
Le développement d'une Europe du développement durable a été clairement affirmé par les autorités françaises, avec un accent particulier sur la fiscalité écologique et le développement de produits propres.
C'est un axe clairement soutenu par la CGPME sous réserve que les spécificités des PME soient effectivement prises en considération y compris sous l'angle de leur capacités contributives, déjà fortement sollicitées.
Le réexamen de la législation existante sur les taux réduits de TVA est une opportunité à saisir pour inclure la protection de l'environnement dans la liste des critères permettant l'application de taux réduits.
Il est tout aussi important d'aboutir à une décision définitive sur le système des taux réduits applicable actuellement aux secteurs à forte intensité de main d'oeuvre.
Un abaissement des taux de TVA ou le recours à des incitations fiscales pourraient également constituer des solutions européennes possibles pour pallier la flambée des prix du pétrole et encourager les économies d'énergie.
Les PME sont les principaux employeurs en Europe. Il n'est jamais inutile de le rappeler.
La sécurité ne s'oppose pas à la flexibilité. Dans les PME, les intérêts des salariés rejoignent ceux de l'employeur sans que l'un puisse être sécurisé au détriment des autres.
Nous sommes en faveur d'une législation du travail souple et protectrice. Des contrats de travail fiables et flexibles sont essentiels pour les PME comme pour leurs salariés.
Une PME ne dispose que rarement d'un plan de développement sur le long terme. Elle est plutôt réactive aux fluctuations du marché dans le court terme. Pour pouvoir s'adapter rapidement aux variations de la demande, elle doit disposer de souplesse dans les contrats de travail.
Une législation du travail moderne devrait fournir aux employeurs et à leurs salariés une législation protectrice de l'emploi, qui ne gênerait pas la création de contrats à durée indéterminée, et qui offrirait en même temps un réel choix entre différents types de contrats de travail flexibles.
Les PME sont de plus en plus actives dans la lutte contre les discriminations à l'embauche notamment. Leur rôle doit être mieux reconnu et encouragé.
Nombre d'entre elles souffrent déjà de pénuries de main-d'oeuvre et de compétences dans certains secteurs de l'économie ou certaines régions, pénuries que les marchés du travail nationaux ne peuvent combler.
L'immigration professionnelle peut constituer un palliatif sous réserve qu'elle ne soit pas limitée aux travailleurs hautement qualifiés.
L'Europe a besoin de réformes et les PME sont prêtes à accompagner ce mouvement.
Nous voulons une Europe qui réussit, des PME dynamiques qui gagnent le défi de la mondialisation.
Nous, PME, défendons des valeurs qui sont portées par l'esprit d'entreprendre. Elles sont partagées par l'ensemble des PME européennes qui ont la volonté de parfaire ce marché unique européen qu'elles ont souhaitées.
Cet esprit d'entreprendre est le ferment sur lequel nous pouvons, ensemble, bâtir un avenir européen pour nos entreprises !
Source http://www.cgpme.fr, le 25 juin 2008 1