Texte intégral
Q - Etes-vous satisfait de l'accord signé aujourd'hui par les Russes ?
R - Restons très prudents... Pourtant, si les deux parties s'en tiennent à cet accord, ce sera une des guerres les plus courtes et l'un des cessez-le-feu le plus vite obtenu. Mais nous n'en sommes, hélas, pas là. L'essentiel, c'est le retrait des forces russes et il n'est pas encore amorcé malgré la signature des deux présidents Saakachvili et Medvedev, l'appui des Etats-Unis et des vingt-sept pays européens. En tout état de cause, cet épisode souligne, après tant de déceptions, l'immense place que doit occuper l'Europe dans la diplomatie mondiale. Qui pouvait intervenir autre que l'Europe pour faire cesser la guerre ?
Q - Malgré l'accord signé par les Russes eux-mêmes, ils n'ont pas encore retiré leurs troupes. N'est-ce pas inquiétant ?
R - C'est très inquiétant. Le cessez-le-feu est fragile, bien sûr, comme tous les cessez-le-feu. Je suis, hélas, bien placé pour le savoir depuis des dizaines d'années : c'est toujours à la période d'un cessez-le-feu que les exactions les plus graves se commettent. Mais il faut absolument que les pressions diplomatiques et politiques continuent, nous nous y employons.
Q - Les Russes n'ont-ils pas la part belle dans cet accord ?
R - Au nom de l'Union européenne, nous avons eu à intervenir en urgence parce que la situation était catastrophique pour les populations civiles. La signature de l'accord ayant été obtenue, dès demain les Nations unies adopteront, je l'espère, une résolution qui permettra d'envoyer au plus vite une force internationale de maintien de la paix et d'affirmer, ce à quoi nous tenons tous, l'intégrité territoriale de la Géorgie. Nous y travaillons avec acharnement mais rien n'est encore certain.
Q - Dans quel délai cette force internationale peut-elle intervenir selon vous ?
R - Les conflits caucasiens durent depuis des siècles et vous voulez que l'on réussisse en deux jours ! Au plus vite, cela peut être quelques semaines. En attendant il faudra que des observateurs de l'OSCE et de l'Union européenne se rendent sur le terrain, seule façon d'éviter les provocations et le maintien des troupes russes.
Q - N'est-ce pas finalement le plan Medvedev qui l'a emporté ?
R - Si l'on se situe du côté de la paix indispensable et non du côté des opérations militaires ou des jugements moraux, le travail du président Sarkozy et de la diplomatie française a consisté à faire signer le même texte par les deux présidents, géorgien et russe. Il y a eu de la part des Géorgiens de grosses erreurs de jugement et de la part des Russes, une disproportion évidente à la riposte. Que les journalistes enquêtent et que les historiens se prononcent ! Mais il n'est pas encore temps d'écrire l'Histoire.
Q - Certains parlent du retour de la guerre froide, qu'en pensez-vous ?
R - La Russie est devenue une grande puissance, c'est ce qui inquiète. La Russie et la Géorgie se sont dégagées du communisme ensemble, il y a vingt ans. Une nouvelle analyse s'impose : ce n'est pas la guerre froide, c'est une opposition qu'il faut caractériser différemment malgré les résurgences du passé. Par exemple, sur l'Iran, nous avons des positions communes et c'est très important. Parler de guerre froide, c'est vraiment tomber dans la facilité. Qu'il y ait des oppositions entre les puissances, c'est juste, et qu'il y ait des rancoeurs de la part des pays qui ont eu à affronter, sans notre soutien, le communisme pendant si longtemps, cela est vrai aussi.
Q - Néanmoins, que pensez-vous de la menace des Russes à l'égard de la Pologne, si celle-ci installe sur son sol le bouclier antimissile américain ?
R - La Pologne est un pays souverain. Mais il faut comprendre que cela suscite la réprobation et des craintes de la part de la Russie. Les Américains nous disent que ce ne sont pas les Russes qui sont visés. Dont acte. Nous avons à inventer un langage nouveau vis-à-vis de la Russie. C'est ce que s'efforce de faire l'Union européenne.
Q - Allez-vous retourner en Russie et en Géorgie ?
R - Probablement.
Q - Allez-vous finalement rencontrer le Dalaï-lama le 20 août ?
R - Non, le 20 je ne peux pas. Je rappelle qu'il s'agissait d'une visite privée. Sans flonflons ni trompettes. Je vois mon ami le Dalaï-Lama à chaque fois qu'il vient en France. Je l'ai appelé cette semaine au téléphone. J'espère pouvoir le rencontrer, mais mon calendrier a été bouleversé par la crise géorgienne - nous avons une réunion extraordinaire de l'OTAN sur la Géorgie - et, si je ne retourne pas à Tbilissi, je dois me rendre au Proche-Orient.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 août 2008
R - Restons très prudents... Pourtant, si les deux parties s'en tiennent à cet accord, ce sera une des guerres les plus courtes et l'un des cessez-le-feu le plus vite obtenu. Mais nous n'en sommes, hélas, pas là. L'essentiel, c'est le retrait des forces russes et il n'est pas encore amorcé malgré la signature des deux présidents Saakachvili et Medvedev, l'appui des Etats-Unis et des vingt-sept pays européens. En tout état de cause, cet épisode souligne, après tant de déceptions, l'immense place que doit occuper l'Europe dans la diplomatie mondiale. Qui pouvait intervenir autre que l'Europe pour faire cesser la guerre ?
Q - Malgré l'accord signé par les Russes eux-mêmes, ils n'ont pas encore retiré leurs troupes. N'est-ce pas inquiétant ?
R - C'est très inquiétant. Le cessez-le-feu est fragile, bien sûr, comme tous les cessez-le-feu. Je suis, hélas, bien placé pour le savoir depuis des dizaines d'années : c'est toujours à la période d'un cessez-le-feu que les exactions les plus graves se commettent. Mais il faut absolument que les pressions diplomatiques et politiques continuent, nous nous y employons.
Q - Les Russes n'ont-ils pas la part belle dans cet accord ?
R - Au nom de l'Union européenne, nous avons eu à intervenir en urgence parce que la situation était catastrophique pour les populations civiles. La signature de l'accord ayant été obtenue, dès demain les Nations unies adopteront, je l'espère, une résolution qui permettra d'envoyer au plus vite une force internationale de maintien de la paix et d'affirmer, ce à quoi nous tenons tous, l'intégrité territoriale de la Géorgie. Nous y travaillons avec acharnement mais rien n'est encore certain.
Q - Dans quel délai cette force internationale peut-elle intervenir selon vous ?
R - Les conflits caucasiens durent depuis des siècles et vous voulez que l'on réussisse en deux jours ! Au plus vite, cela peut être quelques semaines. En attendant il faudra que des observateurs de l'OSCE et de l'Union européenne se rendent sur le terrain, seule façon d'éviter les provocations et le maintien des troupes russes.
Q - N'est-ce pas finalement le plan Medvedev qui l'a emporté ?
R - Si l'on se situe du côté de la paix indispensable et non du côté des opérations militaires ou des jugements moraux, le travail du président Sarkozy et de la diplomatie française a consisté à faire signer le même texte par les deux présidents, géorgien et russe. Il y a eu de la part des Géorgiens de grosses erreurs de jugement et de la part des Russes, une disproportion évidente à la riposte. Que les journalistes enquêtent et que les historiens se prononcent ! Mais il n'est pas encore temps d'écrire l'Histoire.
Q - Certains parlent du retour de la guerre froide, qu'en pensez-vous ?
R - La Russie est devenue une grande puissance, c'est ce qui inquiète. La Russie et la Géorgie se sont dégagées du communisme ensemble, il y a vingt ans. Une nouvelle analyse s'impose : ce n'est pas la guerre froide, c'est une opposition qu'il faut caractériser différemment malgré les résurgences du passé. Par exemple, sur l'Iran, nous avons des positions communes et c'est très important. Parler de guerre froide, c'est vraiment tomber dans la facilité. Qu'il y ait des oppositions entre les puissances, c'est juste, et qu'il y ait des rancoeurs de la part des pays qui ont eu à affronter, sans notre soutien, le communisme pendant si longtemps, cela est vrai aussi.
Q - Néanmoins, que pensez-vous de la menace des Russes à l'égard de la Pologne, si celle-ci installe sur son sol le bouclier antimissile américain ?
R - La Pologne est un pays souverain. Mais il faut comprendre que cela suscite la réprobation et des craintes de la part de la Russie. Les Américains nous disent que ce ne sont pas les Russes qui sont visés. Dont acte. Nous avons à inventer un langage nouveau vis-à-vis de la Russie. C'est ce que s'efforce de faire l'Union européenne.
Q - Allez-vous retourner en Russie et en Géorgie ?
R - Probablement.
Q - Allez-vous finalement rencontrer le Dalaï-lama le 20 août ?
R - Non, le 20 je ne peux pas. Je rappelle qu'il s'agissait d'une visite privée. Sans flonflons ni trompettes. Je vois mon ami le Dalaï-Lama à chaque fois qu'il vient en France. Je l'ai appelé cette semaine au téléphone. J'espère pouvoir le rencontrer, mais mon calendrier a été bouleversé par la crise géorgienne - nous avons une réunion extraordinaire de l'OTAN sur la Géorgie - et, si je ne retourne pas à Tbilissi, je dois me rendre au Proche-Orient.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 août 2008